Partie 9 - Par Mastroyal

Partie 9

Par Mastroyal

Les Aventuriers, encore ignorants de qui était le grand méchant dans cette affaire, choisirent finalement de porter leur attention sur Sir Delenor. Après tout, personne n'avait jamais parlé de lui comme étant quelqu'un de noble et de respectable, quelqu'un qui sauve des vies et protège le peuple.

Alors, nos quatre compères, même s'il était possible que le chef des forces armées de Lyzandr était un homme juste et bon, décidèrent de lui faire sa fête... Restant ainsi fidèles à leur réputation de « On tape d'abord et on discute après ». Théo, monté sur Lumière, son cheval de guerre, décida de charger Sire Délénore, en criant :

— Si ça avait été moi qui avais fait ton plan, il aurait marché.

Le guerrier de Lyzandr leva alors les yeux au ciel et répondit au paladin :

— Mais... On aurait pu s'entendre.

Théo, après avoir fantasmé sur une possible relation homo-érotique avec ce triste sire, préféra finalement ne pas répondre et continua sa charge. À ce moment-là, les mains de Sir Delenor se mirent à lire d'une lueur rougeâtre et à vibrer d'une énergie malsaine, d'une énergie démoniaque que BOB, le fils d'un démon, reconnut aisément et qui se mit à investir et à faire vibrer le sol, pendant que Grunlek et Shin se penchaient sur le corps du mage pour vérifier son état global et voir s'il pouvait éventuellement sortir du coma.

Shin se releva avec une aura bleutée autour de lui, banda son arc et concentra sa nature de demi-élémentaire pour cristalliser une flèche de glace qui vint s'encocher dans l'espace entre le bois et la corde et visa soigneusement le demi-diable qui lui faisait face (Sire Délénore, pas BOB, évidemment)... Et lâcha quelques mots :

— Tu m'as forcé à tuer deux congénères... Tu vas le payer ! Au nom de tous les innocents qui sont tombés, au nom du tsunami... Au nom du petit chat qui a failli se noyer... Fais un miracle, flèche de glace !

À ce moment-là, pendant que Théo chargeait leur ennemi en beuglant : « Tu aurais dû rester dans ton lit, j'aurais fait du meilleur travail que toi ! », que BOB concentrait sa volonté pour faire appel à ses flammes tout en faisant un bref signe de tête à Shin pour lui dire d'y aller... Sir Delenor se retourna vers le demi-élémentaire, tandis que la terre à ses pieds et tout autour de lui se recouvrait de pentacles sataniques d'invocation, et se mit à parler :

— Que l'Enfer se déferle ! Mes rejetons, venez ! Arrachez-leur leurs chairs putrides !

Puis, il remarqua que Shin le visait avec soin et fronça les sourcils. "Attendez..." pensa-t-il, "Ça n'était pas censé se passer comme ça". Et Shin tira ! La flèche, vibrant d'une énergie bleutée et de puissance, ne vint pas se loger dans le cœur de leur ennemi, mais le traversa littéralement au niveau de la carotide en lui coupant net la colonne vertébrale au passage ! La flèche poursuivit sa course vers Théo et lui passa à côté en lui laissant une fine cicatrice sur la joue tandis que les mains de Sir Delenor perdirent leur énergie démoniaque et que leur propriétaire s'écroula lourdement au sol... Abattu par une seule et unique flèche de glace.

Tandis que BOB se tournait vers Shin en hurlant « WITNESS ! WITNESS ! », Théo, dans son insatiable soif de sang, demanda à la cantonade s'ils pouvaient enfin attaquer le village, s'attirant une nouvelle fois l'ire de Grunlek par la même occasion.

C'est alors que les Aventuriers remarquèrent que la terre, au niveau des pentacles générés par désormais feu Sir Delenor, était en train de se craqueler, voire de se fissurer. Des créatures démoniaques sortirent du sol alors que leur maître était étalé face contre terre. D'un même mouvement, elles se tournèrent vers son corps sans vie et affichèrent la même expression de stupeur.

Théo, toujours dans sa charge, hésita à attaquer les créatures, probablement parce qu'elles n'étaient pas innocentes et que cela allait contre son potentiel principe de tuer uniquement les innocents comme le faisait jadis le Roi Hérode... À moins que ce n'était que la confusion de son esprit, dûe à la complexité de toute cette affaire, qui le faisait douter. Il chargea malgré tout les démons qui continuaient de regarder le cadavre de ce qui aurait dû être leur maître et sortit sa lance pour en embrocher un par derrière, puis en piétiner un deuxième avec son cheval.

— Allez... fit Théo d'une voix lasse et plate. Tuez les démons... L'Inquisition, tout ça... Allez...

— Retournez d'où vous venez, maudits chiens ! s'exclama BOB en lâchant un Enfer sur Terre sur un autre démon

Mais lorsque les flammes disparurent, le démon, loin de se sentir en danger, lâcha un "Oui... Oh oui..." et se mit à grossir sous l'effet des flammes du pyromage. Un de ses confrères se retourna ensuite vers lui et se jeta sur lui, lui infligeant une attaque qui le fit tomber dans le coma, à l'article de la mort. Une autre créature décida quant à elle de partir vivre sa vie, libre de toute obligation après la mort de son invocateur et fût bientôt suivie par une de ses sœurs.

Grunlek, quant à lui, décida enfin de se désintéresser du mage tombé dans l'inconscience et se prépara à attaquer le démon qui avait doublé de volume en utilisant son poing-grappin pour le frapper... Malheureusement, celui-ci refusa catégoriquement de lui obéir. Le gros démon, qui devait maintenant faire la taille de Théo sur son cheval, se tourna alors vers le nain, lui sourit, puis tourna la tête vers le cadavre de son invocateur... Avant de finalement hausser les épaules et de partir vivre sa vie.

Enfin, le dernier démon, celui qui avait attaqué BOB en le mettant dans l'inconscience, se releva, pris le corps flasque du pyromage et s'apprêta à partir avec lui, mais Théo, traînant toujours le corps d'un démon au bout de sa lance (pas de la façon dont vous l'imaginez, bande de gros dégueulasses !) chargea derrière lui en hurlant comme un diable (tiens, tiens ?) pour l'effrayer. Le démon, hésitant, lui tendit alors le corps du pyromage, avant de le lâcher et de s'enfuir.

Théo ramassa le corps de BOB et commença à lui fouiller les poches... Avant finalement de se raviser et de tenter de le soigner grâce à la magie de fin de scénario. Puis, les Aventuriers se concertèrent sur la conduite à adopter. Maintenant que la guerre entre Lyzandr et les demi-élémentaires d'eau était sur le point d'éclater, que fallait-il faire ? Quitter la région et ne plus y revenir en laissant les deux parties vivre leur vie ? Aller voir Neptune, chef des demi-élémentaires d'eau pour essayer de désamorcer la situation ? Retourner à Lyzandr pour accompagner les armées dans leur guerre ? Ou leur présenter le cadavre de Sir Delenor en prenant le risque de ne pas être cru et dénoncer Shin (demi-élémentaire d'eau, faut-il le rappeler) le cas échéant selon l'idée de Théo, alias Judas ?

Finalement, les quatres compères décidèrent de se rendre aux Dents du Ciel afin de calmer les choses tandis que BOB, arraché des griffes de la Faucheuse in extremis par Théo, décida de dormir du sommeil du juste sur son cheval invoqué, après avoir lancé quelques dernières piques à Shin :

— Je t'en foutrais, des vacances, moi... La prochaine fois, on les passera dans un bordel, putain... Je te l'avais dit...

— C'était le bordel, pour le coup ! essaya de se justifier Shin.

— Ouais... approuva BOB. Au milieu des écureuils, tu nous as bien pris pour des glands...

Pendant que BOB retombait endormi sur son cheval, Théo, Shin et Grunlek arrivèrent devant Neptune, le chef des demi-élémentaires d'eau. Shin s'avança alors de quelques pas, visiblement prêt à prendre la parole, tandis que le chef des demi-élémentaires, qui devait facilement faire deux mètres et des poussières, le toisait de toute sa hauteur sans prononcer le moindre mot, les bras croisés, le visage complètement impassible.

Tandis que Grunlek s'affairait à descendre de Brasier le corps toujours inconscient du mage de l'eau et que Théo s'occupait de jeter à bas de sa monture le cadavre de Sir Delenor, Shin décida de parler :

— Seigneur Neptune... Je suis un demi-élémentaire d'eau mais je ne suis pas un de vos congénères. Je suis plus un humain qu'un élémentaire d'eau donc je ne poursuis pas votre combat. Mais je suis pour la justice et pour la paix et en ça, nous avons trouvé un moyen de résoudre ce conflit qui vous oppose à ce village et à Delenor. Et nous avons trouvé la solution à ce problème. Elle venait de lui, ajouta-t-il en pointant le cadavre qu'avait transporté Théo. Sir Delenor, qui était la source du mal. C'était un demi-diable ou un demi-démon... Je ne sais pas... Comme mon collègue inconscient sur son cheval... C'était lui qui voulait voir le monde brûler, il voulait voir la destruction... Il voulait voir les peuples s'entre-déchirer... Et nous étions là, nous avons pu l'intercepter et empêcher tout ce flot, tout ce torrent de sang se déverser malgré la volonté de notre paladin... Qui était plus pour la guerre, pour le coup... Donc, c'est pour ça. Et je viens devant vous, me mettre à genoux et vous implorer de retirer vos troupes.

Le Seigneur Neptune regarda Shin encore quelques instants, puis prit à son tour la parole :

— Nous allons ouvrir les Dents du Ciel et noyer cette vallée. L'armée approche.

— Mais dans quel but ? s'insurgea Shin. Pour qu'il y ait plus de souffrances ? C'est votre peuple qui va en souffrir bientôt.

— C'est de la souffrance humaine, trancha Neptune sans état d'âme.

— Mais je serais là ! affirma Shin. Je protégerais les populations. Vous serez prêts à tuer un congénère ?

— Tu t'opposerais à nous ?

— S'il le faut, au nom de la paix. Vous serez capables de tuer l'un des vôtres pour justifier plus de morts ?

— Tu as été capable de tuer l'un des tiens, reprit le Seigneur Neptune.

— J'ai répondu à un acte d'agression, c'était de la pure défense. Il allait s'en prendre à des amis. À mes amis Aventuriers qui sont avec moi ici. Nous traversons ces terres pour justement résoudre les conflits et apporter un peu de paix dans le cœur des gens. C'est notre raison première de notre mission d'Aventuriers.

— Si vous voulez la paix... Je veux le corps de Sir Delenor.

— Nous l'avons apporté avec nous, répondit Shinddha. Il est là. Vous pouvez vérifier par vous-même.

Grunlek et Shin posèrent le corps sans vie de l'ex-commandant des armées de Lyzandr devant Neptune. Celui-ci se pencha alors dessus, l'examina pendant de longues minutes, puis reprit la parole :

— Que l'armée des mortels se retire de cette vallée. Qu'ils signent un traité ou que vous vous arrangiez pour que jamais - et je dis bien "jamais" - ils ne mettent les pieds ici. Que tous les mortels sachent que s'ils s'approchent des Dents du Ciel, leur vie est condamnée. S'ils s'approchent, ils sont morts.

— Très bien, répondit Shin. Qu'il en soit ainsi. Nous allons retourner...

— Je veux que ça se sache, l'interrompit Neptune, et je veux que vous vous portiez garants de ce message à travers toute la région.

— J'aimerais savoir quelque chose avant si vous le permettez, intervint Grunlek. Auparavant, vous arriviez à vivre dans une certaine harmonie avec les humains. Certains des apothicaires faisaient des échanges avec les membres de votre peuple. Qu'est-ce qui a changé cet état d'esprit ? Est-ce que vous comprenez que beaucoup de ces civils sont loin de toutes ces guerres ou de tous ces actes militaires et ne recherchent qu'une seule chose : vivre en paix. Et vivre en paix avec eux-mêmes, mais aussi avec vous.

Neptune se tourna vers Grunlek, visiblement impressionné par son audace. Il poussa un petit soupir et gronda :

— La paix est éphémère. Ce qui régit la loi et l'ordre, c'est la guerre. Et les humains l'ont bien compris, c'est pour cela qu'ils viennent à notre rencontre. La paix... des alliances... Ceci n'est fait que pour repousser la guerre. La guerre entre éléments... entre mortels... est inévitable. Quand il arrivera ce jour, vous vous poserez la question : dans quel camp vous serez ? Et j'apprécierai probablement des Aventuriers dans mes rangs.

Pendant que Grunlek et les autres aventuriers prenaient le temps de méditer les paroles du chef des demi-élémentaires, Théo, qui devait prendre rendez-vous avec le capitaine des armées de Lyzandr (le subordonnée de Delenor) réfléchissait à ce qu'il allait lui dire. Il laissa son esprit aller un instant au fantasme en imaginant les archers jouer du violon et faire un discours complètement mièvre et écœurant au capitaine du style :

— Alors... Les fleurs et les p'tits oiseaux vous demandent de ne plus vous approcher du lac, parce que c'est mal. Et que si vous voulez qu'il y ait la paix et l'amour... Eh bien, il faut pas vous approcher. Rentrez chez vous, restez dans votre village... Et puis, soyez heureux. Et faites des bébés.

Puis, il secoua la tête et reprit ses esprits, laissant le VÉRITABLE Théo reprendre sa place et imaginant une potentielle fin alternative à la guerre qu'ils venaient d'éviter. Dans son imagination malsaine et sanglante, il se vit face à Neptune en train de boire un grand verre d'eau et de se gargariser avant de lui tenir ces propos :

— Est-ce que vous tenez vraiment à votre famille ? Combien vous êtes ? Vous êtes nombreux ? À quelle vitesse vous vous reproduisez ? Les humains se reproduisent très vite... Et vous ? J'ai besoin de vous connaître : Quel est le cycle de vie d'un demi-élémentaire comme vous ? Combien de temps vous vivez ? Ça doit être tellement triste de mourir après une éternité. À l'heure où je vous parle, il y a des catapultes et des archers avec du feu grégeois qui se dirigent vers vos femmes et vos enfants. Ils les brûleront tous jusqu'au dernier !

— Écoute-moi, pauvre mortel, lui répondit le Neptune imaginaire, que de la gueule !

— J'attends que ça, affirma le Théo imaginaire. Croyez-moi, je serais ra-vi ! J'adore la guerre ! Je vis, je me noie dedans !

Et sur ces paroles, tandis qu'un BOB imaginaire dans l'esprit de Théo envoyait une boule de feu dans la tête de Neptune, le paladin imaginaire sortit son épée et décapita le chef des demi-élémentaires tout en faisant en même temps tomber la foudre sur lui. L'imagination de l'inquisiteur passa ensuite à la vitesse supérieure en s'imaginant, lui et ses compagnons, quittant la région de Lyzandr dans un tourbillon de flammes et dans des explosions brillantes derrière eux, avec des lunettes noires devant les yeux.

Théo, plongé dans cette vision imaginaire avec un délice proche de l'extase, garda les yeux fermés, savourant du mieux qu'il pouvait... et fût brutalement rappelé sur terre par une petite tape de Grunlek sur son épaule.

— Théo, fit le nain, est-ce que tout va bien ? Faut vraiment que t'arrête de fantasmer en public, ça devient super gênant, à force.

Le paladin, voyant que Neptune était toujours face à lui, bien vivant et les sourcils si haut sur son front qu'ils auraient pu disparaître dans ses cheveux, poussa un soupir de dépit. La réalité ne lui avait jamais parue aussi décevante.

FIN

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Merci à tous d'avoir suivi la retranscription de ce deuxième live d'Aventures ! On se retrouve très bientôt pour un nouveau ! Des bisous !

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