Partie 4.1 - Par Mastroyal
Partie 4
Par Mastroyal
On aurait pu croire que les aventuriers avaient eu leur lot de frissons dans ce début d'aventure : après avoir sauvé une jeune femme d'un dragon, ils durent affronter un immense tsunami en pleine forêt... Avant que BOB ne tente de se sacrifier pour sauver un chaton qui, depuis, était juché sur l'épaule du pyromage et se faisait appeler Wilfried. Que pouvait-il leur arriver maintenant : le meilleur ou le pire ? Qui savait...
Les aventuriers, à peine remis de leur bain de midi, arrivèrent dans un village où les attendait la famille de la jeune fille qu'ils avaient sauvé du dragon. Au sol, renversé depuis peu, était allongé le patriarche qui portait une longue robe que Théo identifia comme celle des apothicaires de l'Église de la Lumière. Ainsi, il avait donc affaire à un « collègue » soigneur... Ou plutôt, à son cadavre, puisqu'il venait, semblait-il, de donner sa vie pour sauver les siens du tsunami.
— Tiens, fit remarquer Grunlek en se moquant du paladin, quelqu'un de ton église qui se sacrifie... Ce n'est pas commun.
— Oh, tu sais... répondit Théo. C'est les apothicaires, alors que moi, je suis inquisiteur. C'est pas le même service...
— T'en parle avec un de ces déni, se moqua à son tour BOB.
— Oh, ce mépris... renchérit Shin.
— Ben, écoute... se défendit Théo. C'est grand, l'Église de la Lumière. On connaît pas tout le monde, y'a plusieurs étages...
Puis, le plus calmement du monde, comme si le mépris était une seconde nature chez lui, Théo se tourna vers la dame qui se tenait à côté du cadavre et leur demanda comment le « pauvre » apothicaire avait perdu la vie.
— Lorsqu'il y a eu la vague d'eau qui est venue des Dents du Ciel... Eh bien, les premiers à être tombés sous la vague ont à peine eu le temps de prévenir les autres et mon mari nous a poussé à l'intérieur de la maison et il a maintenu la porte fermée pendant qu'il était sous les eaux.
— D'accord... répondit simplement l'inquisiteur. Est-ce que vous permettez que je le fouille ?
— Quoi ?! réagit Shin. Mais non, pas sous les yeux de sa meuf !
— C'est juste pour voir comment il s'appelle, répliqua Théo. Peut-être qu'il a ses papiers.
— Mais... reprit BOB. Tu peux peut-être demander ça à sa famille qui est autour de lui en train de le pleurer !
— Ah merde, c'est sa famille ?! J'croyais que c'était des inconnus, moi.
BOB, visiblement épuisé par les dérives pas très orthodoxes de son "ami" paladin, décida de déléguer toute interaction avec Théo à Shin et de se tourner vers les autres villageois pour faire le point sur la situation, sachant que le demi-diable était lui-même à peine remis de la situation qu'ils avaient vécu précédemment.
Quant à Shin, après avoir frappé son front de sa main, il décida de regarder l'étendue des dégâts aux alentours afin de voir s'il pouvait se rendre utile pour dégager d'éventuels blessés des décombres ou quelque chose dans la même idée. C'est alors qu'il surprit une conversation entre deux nobles :
— Mais c'est pas possible ! Il faut que la ville et le Sieur Délénor fassent quelque chose. On peut pas rester de manière pacifique, comme ça !
Shin, mettant temporairement de côté la gravité de l'échange qu'il venait d'entendre, se tourna vers Grunlek pour lui demander son aide afin de déblayer les décombres et d'évacuer un maximum de blessés, sachant que son faciès, loin d'être disgracieux auprès des femmes, avait souvent tendance à effrayer les gens. Et justement, alors qu'il s'avançait pour donner un coup de main, les deux nobles se tournèrent subitement vers lui ainsi que quelques autres villageois et il ne lui fallut pas plus de quelques secondes pour se rendre compte que, malgré le fait qu'on ne voyait pas d'emblée qu'il s'agissait d'un demi-élémentaire d'eau, sa capuche et son air assez mystérieux et renfermé provoquaient facilement un climat de méfiance à son égard. Et même la présence généralement apaisante et pacifique du nain à ses côtés ne rassurait en rien les habitants sinistrés.
Pendant que l'archer et le golem faisaient de leur mieux pour aider tout en faisant fi de la froideur à leur encontre, Théo continuait d'investiguer auprès de la famille de l'apothicaire décédé :
— Mon mari s'appelait Baline, répondit simplement la veuve à la question du paladin.
Puis, elle fouilla autour du cou de son époux et en sortit un pendentif qui était remis par l'Église de la Lumière aux gens qui faisaient preuve d'une très grande valeur, comme ce fût le cas du père de Théo, mais pas du fils, ce qui n'était guère étonnant... Surtout quand il se demanda s'il ne pouvait pas tout simplement prendre celui qu'il avait sous les yeux, piétinant ainsi encore une fois un de ses « principes », à savoir ne jamais toucher aux morts... Même si, techniquement, lorsque tout le monde l'avait cru mort, lui, et que son ancien précepteur Viktor a récupéré légitimement son bouclier, personne ne s'était posé la moindre question. L'inquisiteur joignit toutefois ses mains au niveau de sa poitrine et dit une petite prière pour rendre hommage au défunt... Sans pour autant mettre un genou à terre (faut quand même pas exagérer).
La veuve du malheureux apothicaire se tourna ensuite vers le groupe d'Aventuriers, et plus particulièrement vers l'emblème de la lumière gravé sur l'armure de Théo, avec une légère forme de dureté dans le regard, et déclara :
— Messire... Jurez-moi que l'Église de la Lumière va venger l'un des siens !
— Ben... Il est mort noyé, répondit le paladin un peu circonspect. Je vais pas aller taper de la flotte.
— Chevalier, reprit la veuve d'un air sérieux, la rumeur prétend que ce sont des personnes mal intentionnées qui sont derrière ceci. Des personnes capables d'user de sorcellerie, qui pèsent même une lourde menace sur Lysandr. La rumeur prétend même que ces gens sont ici depuis longtemps et qu'ils veulent s'emparer de Lysandr. Promettez-moi, chevalier, de réclamer vengeance au nom de l'Église de la Lumière. Votre... ajouta-t-elle avec hésitation. C'est presque un... C'est un frère pour vous. Mon défunt mari a voué sa vie... Pour l'église... Pour votre Église... Dites-moi que... Que la Lumière va réagir en conséquence... Que la Lumière vengeresse va agir !
— Je jure de venger la mort de votre mari, répondit simplement l'inquisiteur après une longue... TROP longue hésitation sur le prénom du défunt.
À ces mots, elle enleva le médaillon du cou de Baline, le glissa dans la main de Théo et la referma dessus, avant de réciter quelques psaumes liés à la Lumière, le front sur le poing fermé du paladin.
— Je vous remercie, dit-elle enfin. J'espère que ceci lui rendra la paix... Où qu'il soit.
— Moi aussi, répondit l'inquisiteur visiblement soulagé que la veuve n'ait pas remarqué l'exaspération qu'il avait laissé transparaître un court instant.
BOB, de son côté, recherchait désespérément un moyen de se soigner quelque peu, surtout que l'apothicaire du village, qui représentait une certaine promesse de soin, était un peu trop mort pour agir. Théo proposa alors à son « ami » pyromage d'aller retrouver la sœur de Shaydan, la jeune fille qu'ils avaient sauvé du dragon.
Shin et Grunlek, de leur côté, continuaient d'aider à déblayer les décombres tout en prenant grand soin de ne pas trop se rapprocher des autres habitants qui continuaient à se méfier d'eux. Mais alors qu'ils étaient occupés à leur tâche, ils entendirent tout près d'eux des bruits de pas. Puis, une jeune paysanne s'écarta pour laisser passer un homme armé (probablement un garde) qui convergeait vers eux.
— Holà, voyageurs ! lança-t-il. Que faites-vous ici ? Qu'êtes-vous en train de faire ?
— On aide comme on peut, répondit calmement le nain.
— Ah, vous aidez ? reprit l'homme. Vous savez qu'il y a, depuis quelques heures, une rumeur qui circule selon laquelle des opportunistes profiteraient du chaos pour vider quelques chaumières ? Pour s'en mettre plein les poches. Désolé, mais je ne vous ai jamais vus par ici.
— Est-ce qu'on a l'air de vider des chaumières ? rétorqua Grunlek. On est en train de pousser des poutres, de dégager des passages pour des gens...
— Excusez-nous, intervint Shin, nous n'avons pas le temps. On est complètement éreintés, un de nos compagnons a failli succomber aussi à ce tsunami... Donc, s'il vous plaît, soit vous nous aidez... Vous nous filez un coup de main pour aider ces pauvres gens... Ou soit vous vous barrez. Mais on a pas le temps pour ça.
— Écoutez, répliqua le garde, je ne vous ai jamais vus par ici... Vous allez baisser d'un ton ! Je ne vous ai jamais vus par ici... Qu'est-ce qui me dit que je dois avoir confiance en vous ?
— Mais il n'y a pas à avoir confiance en nous, soupira Shin. On ne veut pas échanger... Parler avec vous.
— Surveillez-nous, si vous voulez, renchérit Grunlek. Donnez-nous un coup de main, faites comme vous voulez...
— C'est quoi le problème, ici ? dit une voix derrière eux.
Théo venait à son tour d'arriver sur les lieux, non loin d'un autre soldat qui, lui, avait vu et entendu le paladin discuter avec la veuve de l'apothicaire de la lumière et promettre de venger la mort de son défunt mari. Ainsi, là où il aurait du mal à accorder sa confiance à Shin et à Grunlek, occupés à soulever un buffet renversé sur le côté, il en aurait davantage pour l'inquisiteur qui a juré d'apporter vengeance et justice pour un de ses « frères »... Ce qui prouve bien, une fois de plus, que la réalité n'est pas toujours très logique, compte tenu des fréquentes dérives sanglantes de Théo, et de son insolence.
— Chevalier, lança l'autre soldat d'une voix claire. Ces deux étrangers disent que soi-disant, ils sont en train d'aider les nôtres à restaurer les lieux. Sauf que nous, on ne les a jamais vus par ici.
— Ah, mais ils sont avec moi, répondit Théo. C'est bon, il n'y a pas de problème.
— Bon... répondit le soldat après deux secondes d'hésitation. Très bien.
Visiblement à court d'arguments devant la seule présence (intimidante sans doute) du paladin, les soldats se contentèrent de garder Shin et Grunlek à l'œil pendant quelques instants, avant de finalement tourner les talons et de s'en aller. Ainsi, le demi-élémentaire et son ami nain purent en profiter pour achever leur besogne et terminer de débarrasser la cour d'une maison de tous ses débris.
Au même moment, Shaydan revint voir ses sauveurs aventuriers, la mine sombre et renfermée, sûrement pas porteuse de bonnes nouvelles :
— J'ai essayé d'obtenir des informations par rapport à ma sœur, Li. Et... Il semblerait qu'elle eût été emportée par les eaux.
À ces mots, les joues de la jeune femme se creusèrent sous l'effet de la crispation et de la frustration qu'elle ressentait en ce moment précis.
— Et où était sa maison ? interrogea Théo.
— Plus en contrebas, répondit Shaydan. À flanc de colline. On est passé à côté, la maison était à-peu-près debout. Je ne l'ai pas vue, et personne...
— On n'a pas trouvé de corps, l'interrompit Shin.
— Peut-être qu'elle n'était pas dedans, renchérit Théo.
— Je suis allée voir, justement, reprit la jeune femme. Il n'y avait personne. Il y a quelqu'un qui... Qui témoigne l'avoir vu se faire emporter par les eaux. La dernière chose qu'elle a prononcé apparemment, ajouta-t-elle d'une voix sombre et basse, c'était mon nom.
— Notre compagnon a survécu, déclara Grunlek avec une forme d'optimisme. Peut-être que votre sœur est plus bas et a besoin d'aide. Vous devriez peut-être partir à sa recherche.
— Faites un câlin à ce chaton, plaisanta l'inquisiteur en désignant Wilfried d'un geste.
— Plus sérieusement, rétorqua BOB en essayant de détourner l'attention de l'humour désastreux de son ami paladin, si le témoin peut nous dire dans quelle direction elle a été emportée, on peut essayer d'organiser des recherches afin de la retrouver... À défaut, peut-être, de la retrouver vivante, parce que je ne voudrais pas vous donner de faux espoirs, on pourrait au moins lui donner une sépulture décente.
— Peut-être qu'on va demander aux gens du village, alors ? proposa Théo en reprenant un air sérieux.
— Non ! rétorqua le pyromage. Peut-être qu'on va faire quelque chose de bien une fois dans nos vies et essayer d'aider à trouver des gens. On l'a sauvé d'un dragon, on peut bien trouver le cadavre de sa sœur. T'as bien trouvé mon cadavre !
— On ne sait même pas à quoi elle ressemble ! se défendit le paladin. Des cadavres, ils vont en retrouver plein !
— Ben, faudrait qu'elle vienne avec nous... commença Shin.
— Une gonzesse qui a à-peu-près sa tronche ! coupa BOB. Ça va, c'est pas non plus compliqué.
— Vous voulez pas plutôt aller voir ? insista Théo. Parce que... Moi, je dis ça... Il peut peut-être y en avoir d'autres, des tsunamis. Parce qu'un tsunami au milieu de la montagne, c'est quand même pas naturel.
Balthazar soupira.
— Deux choses, répondit le demi-diable. Primo, on a besoin de se reposer. Le problème, c'est qu'on peut pas vraiment se reposer tant qu'ils n'ont pas remis un peu d'ordre dans leur village. Et deuzio, on voudrait aller voir d'où viennent les tsunamis, et vu qu'il se parle que c'est d'origine magique, essayer de niquer la mère du responsable parce que là, je suis complètement d'accord avec toi, Théo. Tu veux faire ta vengeance, moi, je veux buter un mage qui fait de la merde... Moi, je suis pour. Cependant, là, mini-quête, le temps qu'ils rangent le village, le temps qu'on trouve le cadavre de la sœur, on pourra rentrer avant la nuit et peut-être passer une nuit ici à se reposer, regagner un peu de forme, et pouvoir repartir frais comme des gardons le lendemain avec des informations sur les lieux qu'on va explorer et pas au pif, en se prenant un deuxième tsunami dans la gueule.
— Dans ce cas-là, reprit Théo à l'adresse de Shaydan, est-ce qu'on peut aller se reposer dans la maison de votre sœur ?
— C'est une bonne idée, approuva BOB, parce que si elle a tenu, elle tiendra une deuxième fois.
— Est-ce qu'elle avait une forme de famille ? interrogea Shin. Est-ce qu'elle avait un compagnon ? Est-ce qu'elle avait des enfants ? Ou elle vivait seule ?
— Non, répondit la jeune femme. Non, non, elle vivait seule. Elle était là, comme la plupart des personnes, ici dévouée à la communauté.
Sur ces mots, elle lança un regard en biais à l'apothicaire étendu au sol, et murmura :
— Elle a fini comme ce pauvre malheureux.
— Mais vous n'en savez rien ! répliqua Théo.
— Peut-être... Peut-être pas... ajouta BOB, avant de se tourner vers ses compagnons. Moi, je propose, chers amis, qu'on l'aide à trouver le cadavre de sa sœur et au moins, quand on aura fait ça, on pourra peut-être demander à passer une nuit dans sa maison.
— Mais le problème, intervint Shin, c'est que Théo a raison sur un point : on ne sait pas du tout à quoi elle ressemble, sa sœur. Il faudrait l'emmener avec nous, mais ce serait un peu glauque.
— Mais après, déclara Grunlek, elle peut nous la décrire.
— Elle peut nous accompagner dans le pire des cas, approuva Théo. C'est sûr, elle reconnaîtra le cadavre boursouflé de sa sœur, mais...
— Et on va pas juste demander de passer la nuit dans la maison de sa sœur défunte dans l'après-midi, se défendit BOB, alors qu'on a même pas retrouvé son cadavre.
— Le problème, reprit Shin, c'est que voilà... Si elle est aux portes de la mort, elle va succomber dans la nuit.
— Je pense que c'est ça, la priorité, de toute façon, intervint Grunlek. De retrouver sa sœur, c'est la priorité, s'il y a une quelconque chance qu'elle soit en vie.
— Le gros problème, reprit le pyromage, c'est que si on continue à se balader dans ce village... Un mage, un demi-élémentaire, un nain... Alors certes, il y a le paladin pour fliquer, mais...
— Après, l'interrompit le nain sans demander à son ami ce qu'il entendait par « fliquer », peut-être que la ville est en train de s'organiser pour justement faire une battue pour essayer de retrouver des survivants.
— C'est ça, approuva Théo. On peut pas choper un des gardes qui vont et viennent, et leur demander s'ils sont en train d'organiser des recherches pour les survivants ?
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