Des Vacances Paranormales
Le jeune garçon observait les nuages défiler lentement à la guise du vent. Il soupira, lassé d'essayer d'y déceler de nouvelles silhouettes informes. La douceur du ciel et de ses duvets cotonneux ne suffisait plus à le distraire. L'immensité bleue ne faisait que lui rappeler la monotonie de ces vacances. Naoki était facilement captivé par de simples choses et se délectait de les changer avec fantaisie en de fascinantes merveilles.
Mais à ce moment là, même la nature mirifique qui l'entourait ne semblait plus l'atteindre. Morose, l'ennui le grignotait petit à petit.
Les céréales dans lesquelles Naoki était allongé ondulaient avec souplesse sous une délicate brise rafraîchissant l'étouffante chaleur estivale. Celle-ci entonnait quelques notes aiguës et, par la danse qu'elle incitait au sein du champs, décorait le paysage d'une envoûtante mélodie.
Il détourna son regard de la voûte et tourna la tête en direction d'un des coquelicots qui parsemaient le champs aux reflets dorés, insensible à la musique qui, à ses oreilles, était insipide. Le garçon frissonna et se recroquevilla légèrement sur lui même, faisant crisser les plantes aux allures de paille sous lui. À son tour, il entonna quelques notes qui ne le rendirent que plus nostalgique qu'il ne l'était déjà.
Une pensée releva imperceptiblement les commissure de ses lèvres pour révéler une brève ombre de sourire. Le cauchemar passé, il entrerait dans sa troisième année à Yuei, reviendrait dans sa classe hétéroclite, avec chacun de ses différents camarades.
Le garçon s'était énormément attaché à eux lors de sa deuxième année, contrairement à sa première année, où il avait été trop obsédé par ses problèmes personnels pour percevoir la bienveillance de la quasi totalité de ses camarades, Bakugou étant toujours aussi haineux, et où il n'avait affiché en permanence qu'un sourire de façade maintenu par sa person-a. Ils l'avaient supporté durant chaque phase instable et fragile de sa vie, sans jamais se montrer intrusif, même suite à ses
quelques "débordements" dont l'implication de Inferno n'était pas étrangère. Une poignée s'était particulièrement démarquée et lui avait même changé par moment les idées pendant ces sombres périodes.
Il souhaiterait passer ses vacances à leur côté. Que pouvait-il bien faire en ce moment?
Le vent, plus insistant, ne tarda pas à détruire le peu d'ordre qui régnait dans les cheveux de l'adolescent. Une mèche rousse, assortie aux tâches de rousseur qui constellaient le haut de ses pommettes et contrastaient avec sa peau de nature pâle, se hâta sournoisement d'entraver sa vue.
Trop engourdis pour remettre la rebelle en place, il lui souffla mollement dessus. En vain. La touffe retomba platement sur son œil gauche, narguant le garçon à la chaude chevelure. Il ne s'acharna pas et se contenta de fermer les yeux.
Le temps s'écoulait horriblement lentement dans cet enfer qui n'avait d'un paradis que les allures. Une voix résonna dans la tête de Naoki et rompit la tranquillité de ces lieux. Ou du moins, du point de vue de celui-ci.
- On se fait chier.
Des plis se formèrent sur le front du jeune homme, appréhendant la suite. Il ne manquait plus qu'il la ramène, celui-là.
- Je sais Inferno. Ça sert à rien de te répéter, tes remarques ne vont rien changer à ma... enfin, à notre situation. Épargne-moi tes lamentations et pleins-toi en silence, bougonna-t-il agacé, son humeur peu enjouée se dégradant à l'image de la météo.
L'innocente ouate blanche commençaient lentement à faire place à un amoncellement de nuage gris menaçants. L'atmosphère se chargeait en électricité et annonçait une tempête imminente. Le climat orageux reflétait bien la relation qu'entretenaient Naoki et Inferno ces temps-ci. Ils étaient toujours froid pour l'un, hargneux pour l'autre, envers leur "colocataire".
- Mais merde! Bouge-toi, Naoki. Sinon, laisse-moi le contrôle, que je rajoute un peu d'ambiance dans ce trou à rat ! s'énerva le démon au bord de la crise.
Les sourcils du garçon se froncèrent et ses dents mordillèrent légèrement sa lèvre inférieure, trahissant son plus haut désappointement. Il regrettait amèrement d'avoir oublié son chargeur, ce qui n'avait pas tardé d'entraîner la mort rapide de son portable et par la suite une douloureuse absence de musique.
- Oh, boucle-là à la fin! Tu sais très bien qu'il en est hors de question. T'entendre déblatérer est encore plus abominable que cet horrible silence! T'es insupportable !
Comme pour amplifier son accès de colère, un coup de tonnerre éclata, mettant fin au différend qui s'était installé une fois de plus entre les deux compères. Cette fois, c'était au ciel de cracher sa haine.
De fines gouttes d'eau se déposèrent par intermittence sur le visage tourmenté de l'adolescent. La légère pluie se transforma vite en un déluge torrentiel qui s'abattit sur lui.
Le jeune homme, toute dispute oubliée, se releva d'un bond. Il râla intérieurement en évaluant la distance à parcourir jusqu'à la petite résidence de sa grand-mère. Il ne prit même pas le temps d'épousseter ses vêtements et s'élança à travers l'immense champs dans une direction incertaine dans l'espoir de tomber sur le chemin qu'il avait emprunté plus tôt. Des céréales encore emmêlées dans sa chevelure en bataille, il trouva au bout de quelques bifurcations le sentier convoité.
Ses pas foulèrent à la hâte le sol inondé de boue, évitant difficilement les flaques qui jonchaient le sol. La course devenait de plus en plus pénible. Ses habits étaient déjà trempés et ses cheveux habituellement volatiles s'étaient affaissés et collaient désagréablement sur sa nuque. Il aperçut dans sa course le vieux moulin délaissé, signe qu'il approchait de la maison salvatrice, mais un détail attira son attention.
Les pales du bâtiment se mouvaient lentement dans une rotation paresseuse malgré l'absence de leur toile. Intrigué et friand de trouver rapidement un refuge, il dévia de sa trajectoire en direction de l'ancienne bâtisse. Arrivé devant l'encadrement qui avait dû dans une vie antérieure abriter un semblant de porte, Naoki s'engouffra dans la pénombre et le confort douteux qu'offrait le moulin, la respiration haletante et mouillé de la tête aux pieds.
Une fois le souffle retrouvé, il inspecta l'intérieur. Les deux étages qui tenaient dans l'étroit espace était constitué d'un bois humide et vermoulu. Certaines planches manquaient et la voûte, constellée d'une myriade de petites fissures, laissait entrevoir quelques minces rais de lumière grisâtre. De l'eau gouttait sporadiquement au travers des trous et formait de fines flaques par endroit. Une échelle aux allures tout aussi solide que le reste qui n'inspirait guère confiance traversait le bâtiment en hauteur.
Malgré l'apparence miteuse et peu avenante du moulin, il dégageait une aura excitante. Comme s'il recelait des mystères plus passionnants les uns que les autres et d'histoires de laborieuses vies depuis longtemps oubliées. Mais aucune trace d'une quelconque raison du mouvement des pales. Naoki s'installa à même le sol poussiéreux à côté de l'ouverture. Il observa la pluie battre son plein rageusement à l'extérieur, songeur, ces pensées à nouveau tournées vers sa classe.
- Qu'est-ce que j'aimerais être avec eux..., souffla-t-il, le regard perdu dans la vague.
Depuis leur "légère altercation", Inferno ne s'était plus manifesté et le jeune homme ne s'en plaignait pas, appréciant cette paix temporaire.
Naoki ne vit pas arriver le danger. Le bruit discret de la bulle qui le happa avait été couvert par le clapotis de la pluie. Il eut tout juste le temps de se rendre compte de la situation que l'obscurité l'entraîna dans ses profondeurs abyssales.
...
Une odeur familière parvînt aux fine narines de Naoki.
Du iode.
C'était agréable...
Du iode?!
Le garçon ouvrit les yeux et se releva brusquement, éberlué par le paysage qui s'offrait à lui. Une vaste étendue inondée de soleil de sable s'étendait dans deux directions opposées. Plus loin devant lui s'écrasaient d'épais rouleaux azurs qu'un enfant s'amusait à sauter par dessus en piaillant dès que des éclaboussures l'atteignaient. Le reflux grignotait avec gourmandise la bordure de la plage, avalant sur son passage des milliers de coquillages de petits grains de sable foncés. Des parasols accompagnés de serviettes et autres accessoires de plage éparses étaient disposés sur toute le surface dorée. L'ambiance était celle de vacances et le croassement des mouettes se mélangeait aux exclamations et cris de joie de la foule.
- Mais qu'est-ce que je fous à la mer, murmura Naoki pour lui-même, complètement dépassé.
Il se trouvait juste avant dans un moulin sans une étendue d'eau plus grande qu'un étang à des kilomètres à la ronde et maintenant...
- Inferno, t'es là? demanda-t-il à mi-voix.
- Nan! Et non, je sais pas dans quel bordel tu nous as encore entraînés, bougonna-t-il, répondant à l'avance à la question que Naoki s'apprêtait à poser.
Anxieux, le jeune homme se mit en tête de faire une reconnaissance des lieux et trouver si besoin est un moyen de téléphoner. C'était trop irréel, comme un rêve éveillé.
Il sursauta lorsque une main se posa sur son épaule.
- Tu passes aussi tes vacances à la plage, Naoki? Kero...
Il se retourna surpris en reconnaissant la voix. Il se hâta par sûreté de mettre tout de même une person-a.
Cette fois c'est sûr, je rêve, pensa Naoki.
Devant lui se tenait son amie Tsuyu, un sourire un peu tordu mais adorable aux lèvres. Il improvisa à toute vitesse une excuse.
- Euh, oui. Je fais un petit job d'été. J'ai congé aujourd'hui. C'est dingue qu'on se croise...
- Kero. Oui, c'est très chouette! Tu veux te joindre à nous?
- Nous?
Elle rigola légèrement.
- Oui, on a organisé une semaine entre filles à la plage.
Naoki n'eut même pas le temps de répondre qu'une autre voix (en crescendo) les coupa.
- Hey, Tsuyu. Tu trouves pas la balle?
Une Mina rayonnante arrivait droit sur eux puis tourna la tête pour remarquer la personne au côté de son amie grenouille.
- Naoki? Mais qu'est-ce que tu fais là?
L'intéressé se dépêcha de lui servir la même excuse qu'auparavant.
- Trop drôle! Le hasard fait bien les choses! On avait prévu de passer cette semaine entre filles, mais on va faire une exception, hein! s'exclama-t-elle enjouée en lui faisant un clin d'œil. Tu joues au volley? Il nous manques une personne.
Naoki réfléchit à la vitesse de la lumière à un paquet d'informations, digne de Izuku.
Qu'il délire ou non, il était bien mieux ici qu'au vieux moulin. Sa grand-mère ne rentrant pas avant deux jours, elle ne pourrait s'inquiéter de son absence. De même pour sa famille de toute façon sans nouvelles de lui, l'ayant confié à la vielle femme sans chargeur. Il tenterait de les joindre plus tard s'il ne trouvait pas de solution d'ici là. Et s'isoler de ses amies dans un endroit inconnu, bien qu'il avait grâce aux écriteaux pu savoir à son plus grand soulagement qu'il était au Japon, ne lui paraissait pas être une bonne idée. Réfléchir à sa délicate situation ne pouvait que lui faire du bien.
- C'est d'accord.
Ils se dépêchèrent de rejoindre le reste du groupe sur le terrain de volley impatient de reprendre la partie. L'adolescent y rencontra avec bonheur Ochaco, Toru et Kyoka. Seule Momo manquait à l'appel. Toutes l'accueillîrent la surprise passée d'un large sourire et lui expliquèrent que Momo était en voyage avec ses parents dans un hôtel de luxe.
La journée des jeunes se passa incroyablement bien. Ils la passèrent principalement dans l'eau ou à manger des glaces sur la digue qui bordait en amont la plage. La retenue de Naoki s'envola vite, chassée par la bonne humeur rayonnante du petit groupe. Naoki était même parvenu à glaner quelques informations intéressantes. L'année scolaire serait prometteuse. Il se surprit lui-même de s'amuser autant, lui qui avait tendance à apprécier la solitude.
En fin d'après-midi, ils entamèrent une partie de pétanque qui s'acheva par une cuisante défaite pour l'équipe que formait Naoki et Mina.
Le soir, les filles s'éclaboussèrent une derrière fois dans la mer, rieuses. Leur silhouette s'assombrissait plus la course du globe orangé s'approchait de la fin. Le jeune homme les regarda faire en retrait, le sourire au lèvres. Il n'était toujours pas sorti de cette mystérieuse affaire.
Une voix affolée rompit l'instant féerique.
- La revoilà !
- Quoi ? Qui ça ?
- La bu...
De nouveau, le noir complet.
...
Il retrouva ses sensations contre à un mur rugueux.
Oh non, encore !
Il se figea en entendant des voix connues et terrifiantes. Il se trouvait en réalité juste à côté de la maison de Katsuki en pleine "discussion" entre l'explosif garçon et sa mère, tout aussi, voire plus, explosive. Des hurlements volaient dans tous les sens.
- Katsuki, viens immédiatement faire la vaisselle!
- Ta gueule, la vieille. Je suis occupé ! Arrête de me déranger !!
- Comment oses-tu me parler ainsi, Katsuki. Ramène immédiatement tes fesses ici ou bien je te zigouilles les oreilles. Crois-moi, ça fait mal !
- Rien à foutre !
Le garçon crut déceler une faible voix masculine tentant de calmer les deux sauvageons, en vain.
Naoki, malgré ses sueurs froides, trouvait à la situation un côté comique. Quelqu'un qui criait autant sur Bakugou, c'était hilarant.
Il sonda le reste des environs, essayant malgré le boucan de se concentrer à la recherche de la louche bulle qui l'avait amené ici pour le sortir de cette situation précaire. Comme si celle-ci se pliait à sa volonté, elle réapparut tandis que le vacarme à l'intérieur allait de bon train.
- Je te préviens, fils indigne, si tu ne te ramènes maintenant, je révèle à Inko tes sentiments pou...
Naoki n'entendit jamais la fin de sa phrase, emporté par la pénombre de la bulle.
Et c'est ainsi qu'il vit Izuku et sa mère dîner gaiement ensemble dans leur modeste appartement, le garçon aux cheveux verts racontant à sa mère avec passion les anecdotes de Yuei.
Il rencontra également avec amusement Aoyama en France, à son grand dépit Mineta dans un sauna, Momo au bord d'une piscine d'un hôtel de luxe, Kaminari, Sero et Eijiro dans un parc, Ida dans un musée avec son frère et Tokoyami dans une forêt à camper, seul. Étrange contexte pour passer des vacances, s'était fait Naoki comme réflexion. Il avait même croisé Todoroki en montagne.
Il ne s'était jamais autant amusé.
Au bout d'un énième voyage, la drôle de bulle le ramena au moulin. Épuisé, mais heureux.
Il entrouvrit les yeux à moitié, ébloui par la soudaine luminosité que laissait entrevoir le moulin. La pluie avait cessé et le soleil resplendissait à nouveau.
Ai-je bel et bien rêvé ?
Une silhouette entra comme une ombre dans son champs de vision.
Elle se révèla être une petite fille aux alentours de huit ans aux traits fin et aux cheveux blond tellement clairs qu'ils en étaient presque blanc.
- Tu as apprécié ton voyage ? demanda-t-elle dans un sourire.
- C'... C'était réel ? balbutia Naoki, surpris par la présence de l'enfant.
- Absolument. Elle lui tendit la main. Soyons amis, veux-tu ? Je m'appelle Nitch.
Une belle amitié était sur le point de naître...
Fin.
Merci d'avoir lu ma nouvelle😊.
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