•7•
Ce ne fut qu'une fois sorti de l'hôpital - c'est-à-dire trois jours après son incartade avec Alice - qu'il se dit qu'il devait absolument revoir cette fille - il ne connaissait même pas son nom, il devait le lui demander...
Ce n'était qu'un prétexte. Il avait envie de la revoir. Il le savait au fond de lui. Mais, hélas. Comment pouvait-il seulement espérer l'approcher? Elle lui avait dit qu'elle l'aimait, peut-être que c'était le cas aussi pour lui? Seulement, si c'était réellement ça, les frissons et les papillons dans le ventre, c'était carrément de l'arnaque. Et puis, il ne pouvait pas être sûr si elle bluffait ou si elle était sincère. Ah, encore une excuse. Il se sentit lâche : ces larmes étaient vraies.
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Il était sûr de la retrouver là. À cet endroit. Mais à une heure différente.
- T'es vieux vont pas te punir de sortir tard?
- Ma chambre donne sur le rez-de-chaussée et celle de mes parents est au premier étage. Avec les somnifères qu'ils prennent, ils entendraient pas un avion s'écraser sur l'hôtel.
- Pratique, fit-il.
Un silence lourd de malaise s'installa entre eux. Il faisait noir, et les étoiles, perchées dans le ciel, semblaient les observer. Ironiquement.
- Alors comme ça tu m'aimes.
- C'est euh ça m'a échappé et...
- T'es vraiment une idiote.
Il s'avança vers elle et lui posa une main sur la tête. Il eut le temps de remarquer à quel point ses cheveux étaient doux au toucher. Un
- Je connais même pas ton nom, tu sais, enchaîna le garçon.
Elle éclata de rire, soudain détendue.
- Alice, dit-elle. Alice.
- Pas mal.
Pas mal. Elle faillit s'étrangler de rage. Il trouvait son merveilleux prénom “pas mal”?!
- Oui ben Conrad c'est presque un homonyme de connard en français, grommela-t-elle pour se venger.
- Mouais.
Il ne dit plus rien et retira ses vêtements peu à peu pour se retrouver en maillot de bain. Elle le regardait faire, ébahie.
- Tu comptes aller nager maintenant ? s'étonna-t-elle.
- Tu verras bien.
À sa grande surprise, elle sentit la poigne ferme de Conrad se refermer sur sa main et la tirer, la tirer, pour l'emporter avec lui dans les vagues...
La chute engendra de grandes éclaboussures d'eau se perdre dans le vide et leurs respirations étouffées.
Lorsqu'elle put respirer, elle constata avec effroi le triste état de son pyjama et de ses cheveux. Dans la pénombre, elle lui lança un regard furibond. Elle remarqua également l'étreinte qui l'enserrait et remercia le ciel que cela se passe en pleine nuit pour que Conrad ne voie pas ses joues se transformer en tomates.
- Conrad tu vas me le pay-
Sa phrase s'acheva sur un petit hoquet de surprise quand elle sentit des lèvres se coller aux siennes.
Bien que stupéfaite, elle n'essaya pas de le repousser. Ce baiser inattendu lui faisait du bien. Il était doux, enveloppé de tendresse.
Elle oublia la sensation plus ou moins désagréable de ses vêtements humides qui lui collait à la peau, sa frustration, ses problèmes, cette vie qui n'avait pas souvent été clémente avec elle, la sévérité de ses parents contre laquelle son entêtement ne pouvait pas toujours résister. Tout cela lui semblait bien loin, à présent, avec la distance flous d'un rêve brouillé dans mémoire.
En cet instant, elle se sentait pour la première fois de sa vie en sécurité dans les bras de ce garçon rejeté par tout le monde.
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