Chapitre 12.


(Fabien)

Le prof de Français me retient cinq minutes et quand je sors enfin, j'ai juste le temps d'apercevoir Violette entrer dans la voiture de son frère qui klaxonne et me fait un signe amical. Mon oncle arrive juste à ce moment et doit supporter ma mauvaise humeur.

- Ta journée s'est bien passée ? me demande-t-il enjoué.

- Nan, réponds-je et pour clore en lui toute envie de poser des questions, je me tourne vers la vitre.

Je ne comprends pas ce qui s'est passé. Pourquoi un tel changement de comportement ? Si elle ne veut pas que j'en parle à son frère, je peux difficilement en discuter avec Ludovic. Et dire quoi d'ailleurs ? Que la petite Violette fait les devoirs de tous les camarades nuls de sa classe. Sûrement contre sa volonté. Quand la voiture s'arrête, mon oncle m'empêche d'attraper mon fauteuil et prend la parole.

- Explique-moi ce qui te met de mauvais poil !

- Je ne peux rien te dire. Et puis au niveau des cachotteries ...

Du coup, il se tait et libère l'accès à mon fauteuil. Le repas de ce midi est mal passé, je déteste manger contrarié, aussi je goûte avec appétit.

- C'était pas bon ce que je t'avais préparé, s'inquiète-t-il en me regardant dévorer.

- Si mais j'étais contrarié, et non je ne peux toujours pas en parler, complété-je suite à son regard interrogatif.

Dans la chambre, afin de contrôler mon énervement, je me lance dans une série de tractions, puis je prends le téléphone.

Fabien : Tu es dispo ?

Violette : Oui. Par texto, je ne veux pas que mon frère entende.

F: Pourquoi tu leur fais les devoirs ?

V : Ils sont nuls et ils me filent du fric.

Elle me prend pour un con ou quoi ? Elle n'a pas du tout ce profil.

F : Menteuse. De quoi as-tu peur ?

V : Ça ne te regarde pas. A demain.

Pas la peine d'insister, elle ne dira rien. Si je reste dans la chambre, je vais tourner fou, aussi je décide d'aller dehors. Mon oncle, assis dans le canapé, bouquin à la main me regarde passer. Je reste devant, tire sur ma cigarette. Il ne dit rien tout en s'installant sur le banc à mes côtés.

- Je dois t'expliquer deux trois petites choses concernant Martin, commence-t-il. C'est en effet le grand frère de Violette. Pourtant ils n'ont quasiment pas vécu ensemble.

- Je sais que c'est son frère. Demi-soeur ?

- Non, mais Martin est parti très jeune de chez lui. Violette était une petite fille.

- Les parents sont morts ?

- La mère, oui. Sous les coups de son mari. Violette a été placé en famille d'accueil. Son père est en prison.

Je reste silencieux. La voilà, la réelle raison, j'en suis presque certain. Un de ces fumiers a dû le découvrir et la menace de tout dire.

- Martin était à l'étranger, continue-t-il. Les démarches ont été longues....

- Et l'homosexualité aurait pu être un obstacle, c'est cela ?

- C'est ce que pense Martin, oui. Il vient aussi de comprendre que vivre ainsi n'est pas possible. Ni pour nous, ni pour vous. Je n'ai jamais eu à dissimuler qui j'étais.

- Jamais ? Tes parents ne t'ont rien dit ?

- Mon père s'en moquait royalement, quant à ma mère sans être folle de joie, elle me laissait gérer cela tout seul. Je ne sais même pas si ta mère le sait, rajoute-t-il, les parents ne parlaient guère de ces trucs-là.

Ah je peux t'assurer qu'elle ne le sait pas ou alors c'est une sacrée hypocrite, ce qui est aussi très possible. Pour l'instant je n'ai pas très envie d'en parler plus que cela.

- Et il pense que Violette s'y opposerait ?

Et donc pourrait ne plus m'adresser la parole en découvrant que je suis attiré par les mecs plus que par les nanas.

- Non, je ne crois pas. Il s'en veut surtout de ne pas lui avoir dit. Un peu comme moi avec toi d'avoir joué ce rôle.

- Si tu n'avais pas rougi et baffouillé comme un idiot, je n'aurais sûrement pas tilté de suite, ironisé-je.

- Un peu de respect, gamin. Martin va lui en parler ce soir. J'espère qu'elle était de meilleure humeur que toi.

- Pas sûr de cela. Je vais faire un peu de sport. On mange vers quelle heure ?

- Rien eu le temps de préparer, j'avais pensé commander une pizza, ça te va ?

- Toi, tu manges des pizzas ? m'exclamé-je.

- Et des hamburgers aussi parfois. Cela peut être compatible avec les légumes, tu vas découvrir cela, jeune homme. A propos de sport, il serait peut être souhaitable de prendre contact avec le kiné. Sans aller chez lui, il peut te donner des exercices à faire, non ?

- Si tu veux, mais je fais ainsi depuis un moment. J'y vais, tu m'appelles quand la pizza arrive ? dis-je en m'esquivant le plus vite possible.

Je dois me débrouiller pour ne pas voir de kiné. Au premier massage, il découvrira très vite que le fauteuil roulant n'est pas utile. Ma jambe droite est certes encore un peu fragile mais une canne suffirait à me tenir debout sans problème. C'est un arrangement entre ma mère , mon médecin et moi. Pour partir loin de mon père. Je cache tellement de trucs à mon oncle que j'en ai honte. Je sors mon portable, je dois discuter avec Violette.

Fabien : Tu es dispo ?

Violette : Non. Demain, promis.

Je me dis que si son frère lui a parlé, elle a sûrement des choses à discuter avec lui.

(Ludovic )

Le comportement de Fabien est étonnant. Dès que je lui parle de son handicap, il se ferme. Je suis persuadé qu'il me cache une information et comme sa mère, ma soeur, est aussi fermée que lui sur le sujet, je n'avance pas à grand chose. Je lui laisse encore quelques jours pour me parler et je mets les pieds dans le plat. J'ai laissé un message à Martin, il m'a répondu très vite qu'il discutait avec Violette. J'espère que cela se passera bien. Si sa soeur ne supporte pas l'idée que son frère soit gay, Martin ira dans son sens...

Nous mangeons la pizza devant un film merdique, et chacun retourne dans sa chambre. Il était aussi pensif que moi et pas plus bavard.

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