III. La Princesse du lac
La Princesse était la créature la plus belle, la plus délicate et la plus fascinante de tout le royaume. Mais son cœur était de pierre et sa beauté n'avait d'égal que sa cruauté.
Son père le roi était fier de sa fille, au point même qu'il organisa un tournoi en son honneur. Le roi invita tous les jeunes hommes de bonne famille à participer, tout en promettant une récompense exceptionnelle au vainqueur : la main de sa fille.
Le tournoi fut cependant un désastre. Assise dans la tribune royale, au bras de son père, la charmante Princesse raillait tous les participants, les humiliant et les mortifiant. Elle chassa ensuite le vainqueur, un vigoureux jeune prince, clamant qu'aucun homme ne méritait une femme comme elle, et retourna dans son palais, riant aux éclats avec son père.
Les années passèrent et la beauté de la Princesse ne s'amoindrit pas ; en revanche, sa cruauté s'accrut, et elle prenait un intense plaisir à maltraiter ses servantes et à rejeter les prétendants. Du moins, jusqu'à ce que le destin intervienne.
Par une belle journée d'automne, la Princesse jubilait : un nouveau prétendant venait de s'enfuir après s'être fait humilié devant toute la cour, alors rassemblée pour une audience. Cependant, la Princesse ignorait que ce jeune homme avait la rancune facile, et que jamais il ne se le pardonnerait si cette gamine ignare et puériles'en sortait avec rien d'autre qu'un regard désapprobateur de son père, qui se désespérait de voir sa fille toujours célibataire.
La colère le rongeait, et il finit par y succomber. Il rassembla une troupe d'hommes, tous victimes des humeurs de la Princesse, et tendit une embuscade à la jeune fille alors qu'elle quittait son précieux palais. Son hurlement transperça la nuit lorsque les hommes s'emparèrent d'elle et la traînèrent jusqu'au lac que le palais surplombait.
Il fallait admettre qu'elle se débattit comme un beau diable, avec toute la force qu'elle possédait mais elle ne pouvait faire face à une dizaine d'hommes adultes et animés par la haine et la honte. Elle s'enfonça rapidement sous l'eau.
La Princesse paniquait. Sa lourde robe était complètement imbibée et l'alourdissait, l'emportant vers le fond du lac. Des dizaines de mains la poussaient dans la vase et elle ouvrit la bouche ; l'eau s'y infiltra et l'étouffa. Un voile sombre l'aveuglait peu à peu.
La dernière chose qu'elle vit fut l'expression jubilatoire de l'homme qu'elle avait bafoué, une expression si semblable à celle qui peignait d'ordinaire les délicats traits de la Princesse...
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