Déclin au destin




J'ai suivi la course du soleil, m'éveillant aux premières lueurs du jour, et vivant tant que la lumière perdurait dans le ciel, sans vraiment comprendre que le soir montant marquait ma fin. J'ai tremblé des battements hésitants de mon cœur, des battements irréguliers de mes ailes.

J'ai vécu ivre de liberté et du vent sur ma peau. J'ai vécu en zigzag entre les rayons du soleil, le cœur explosant de joie, débordant d'un amour dont je ne saisissais même pas l'ampleur.


« J'adore cette sensation d'avoir des ailes dans le dos et un papillon dans le cœur »


J'étais une part infime du monde, coincée dans un présent lumineux. Les jugements, les préoccupations matérielles et les pensées complexes tombaient par milliers à mes pieds. On me les jetait en masse, sans jamais parvenir à m'atteindre. Je voguais sur les eaux-vives de la vie comme une feuille verte, tournoyante d'innocence au milieu des épaves morcelées et des voiliers brisés.


Je n'étais pas puissant, imposant ou fort. Mais j'étais invincible. Je ne savais pas pleurer ce que je perdais. Je ne savais que me réjouir de ce que j'avais eu. La vie n'était pas à réfléchir. Je me laissais porter par le bonheur, sans considérations pour ce qui tombait autour de moi. J'éclairais les ténèbres sans y penser, sans même réaliser que d'autres souffraient. Que d'autres n'avaient jamais appris à se servir de leurs ailes. Que certains même ignoraient qu'ils en avaient.

Oui, je le reconnais aujourd'hui. Je savais éclairer, mais je ne savais pas recevoir la lumière des autres. C'est sans doute mon seul regret, un infime pincement dans le battement serein de mon cœur.





Cette journée aux couleurs vives a été la plus longue de ma vie. Et je suis reconnaissante au monde de m'avoir permis de vivre à nouveau un instant de printemps.


Un dernier instant.





Finalement, les dernières secondes d'une vie sont comme les premières. Elles sont empreintes d'une angoisse profonde et d'une excitation incroyable. Que va-t-il se passer ensuite ? Mon esprit papillonne de pensées en émotions.

Ais-je peur ? Oui, sans l'ombre d'un doute. Mais cela ne m'empêche pas d'être heureux. Car ce que je vivrais sera peut-être encore plus merveilleux que ce que j'ai vécu.


Mes ailes se replient sur mon corps las, comme un cocon de chaleur. Autour de moi, l'air se refroidit et le silence se fait. Le chant des grillons entame sa lente symphonie aux airs de sommeil. Le soleil fait disparaître ses derniers rayons éclatants à l'horizon. Les champs de blés sont or, le ciel est aussi rose que les fleurs qui ont rythmé ma vie.


« Le coucher de soleil est la preuve que les fins peuvent être belles. »


Encore une fois, je sais bien que je ne disparais pas.


Il y a, dans mon sillage, les pulsations effrénées de cœurs qui battent.


Il y a, dans la trace indistincte de mes pas, des esprits qui se construisent, pas à pas, et qui s'amènent peu à peu au printemps chenille.


Il y a, au-delà de ma mort, au-delà même de ma vie, des êtres qui vivront de sourires et d'amour.





Il y a, bien au-delà de tout cela, des ailes sur ces cœurs battants.





Le dernier battement de cœur s'envole au vent,

Un souffle qui s'éteint, dans un instant d'amour,

Un esprit papillon qui s'éloigne à son tour

Des tourments de la vie et des saveurs du vent.





Je ne crois pas que le temps ait une importance dans le bonheur de vivre. Cette journée, un fragment d'éternité gravé au creux de mes ailes, a été la plus belle qu'un être puisse vivre. Mon corps se pose à présent, oui. Il vieillit, c'est vrai.

Mais si je meurs, c'est pour mieux me préparer à renaître.





Et mon cœur, lui, ne cessera jamais de voler.


« Si le papillon s'est brûlé les ailes à la lumière, la lumière a connu les ailes du papillon et les a aimées. »

Evangile de la Colombe








Chaque fois que votre cœur se met à battre, vos ailes se déploient.

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