Rayon de soleil
Je sens avec exactitude la roche qui mord ma peau. Je suis assise sur un quelconque caillou et si la position est inconfortable, je ne songe même pas à m'en plaindre.
Je ne vois pas le soleil. J'aimerais le voir, distinguer rien qu'un instant son éblouissante clarté. Rien de cela ne m'est accordé. On m'en a privé il y a quelques mois seulement, lorsqu'Anathos s'est réincarné sur Alysia. Outre les dommages physiques le traumatisme reste entier. Une période sombre dont je ne parviens pas à me détacher.
Aujourd'hui pourtant, je me sens coupée du monde. Je ne vois pas la luminosité de l'astre du jour. Non, je ne le peux pas le voir, les ténèbres ont dévoré mon univers. Je suis pourtant capable de sentir la chaleur de ses rayons. Cette tiédeur agréable qui suit le levant et qui me bouleverse. Inopinément, j'imagine les couleurs pâles de l'aube, celles que je ne verrai jamais plus.
Je souris bêtement. Je suis seulement heureuse d'être en vie et si cela ne semble pas suffisant à certains, c'est qu'ils n'ont jamais connu l'enfer. J'en reviens et je me rends compte à quel point la vie vaut la peine d'être vécue.
Une légère brise s'emmêle dans mes cheveux et je profite silencieusement de sa caresse. C'est agréable, un de ces petits bonheurs que bon nombre de gens ne comprennent pas. J'ai appris à l'aimer, à aimer tout ce que je ne suis plus en mesure de voir. Aimer ce qui m'entoure autrement, pleinement et de toute la force de mes autres sens.
-Shimy.
Mon nom n'a jamais semblé aussi beau qu'entre ses lèvres. Je n'ai pas besoin de mes yeux pour le reconnaître, je n'ai besoin de rien. Il s'assied à côté de moi et je souris encore une fois. Je sens sa main sur la mienne et il la serre doucement, comme pour signaler sa présence et son soutien.
Gryf se tient face à moi et, de cela aussi, je suis heureuse. Notre relation se porte mieux, elle est un peu moins explosive que part le passé. En réalité, nous passons encore des heures à nous chamailler pour un oui ou pour un non. Oui, mais il y a aussi ces moments là. Ces moments de calme que j'aimerais reconnaître plus souvent.
Le soleil brille plus fort, je sens ses rayons contre mon épiderme. Le vent s'est calmé et le silence règne en maître. Je n'utilise pas mes broches, en cet instant, je n'en ai aucune envie. Parfois, il m'arrive de les actionner en secret, rien que pour revoir le visage du Jaguarian. De revoir son visage fort que les rondeurs de l'enfance ont atténué, ses yeux félins et ses dents aiguisées. De le revoir lui, tout simplement.
Je sens ses doigts qui redessinent le contour de mes joues et je lève prudemment les miennes. Je reproduis le même schéma et redécouvre ce que j'ai perdu. Mes mains explorent ce que mes yeux aveugles ne me permettent plus d'admirer. La beauté de l'homme que j'aime.
-Gryf...
Son nom dans ma bouche sonne presque comme une requête, une supplique. Je l'imagine sourire comme moi je souris. Je l'imagine poser sur mon un regard saturé d'amour et je me surprends à l'espérer. Mon esprit fantasque s'y risque et mon imagination sans limite se débride.
Il répète mon nom et je me perds dans ces quelques syllabes. Mon prénom couplé au sien sonne comme la plus délicieuse des symphonies. Il le souffle une dernière fois alors que mes lèvres couvrent les siennes d'un éclat de passion.
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