Prisonnier [2]
La suite de Prisonnier, demandée par une fan sur le site des Légendaires. Danaël est fait prisonnier par le Sorcier Noir, Darkhell. Bonne lecture :)
Il existait en ce monde bien des tortures et bien des manières de faire souffrir un être. De le pousser à bout, de l'amener à sa perte. Avant et malgré ce que j'avais déjà enduré, je n'avais aucune idée de tout cela. Maintenant, je le savais !
J'étais resté longtemps dans les cachots de Casthell. Si longtemps que j'avais perdu le compte. Des semaines, des mois, peut-être même des années de captivité. Le temps s'était étiré, creusant les dégâts sur mon corps et sur mon esprit, y imprégnant une lente agonie.
Mes muscles étaient endoloris constamment et le moindre mouvement en devenait un supplice. Les bracelets de fer passés autour de mes poignets avaient entamé ma peau, laissant la chair à vif. Les plaies n'avaient pas eu l'occasion de cicatriser et le moindre contact occasionnait de nouveaux saignements. Le sol rugueux frottait ma peau nue aux pieds et aux genoux, la griffait aussi.
Je peinais à trouver le sommeil malgré l'état d'épuisement constant dans lequel je me trouvais. Mes yeux fatigués me brûlaient et me refusaient le moindre répit, la plus minuscule trêve. Mon esprit se trouvait dans une sorte de brouillard épais et seule la douleur pouvait y retrouver son chemin.
La faim et la soif me tenaillaient sans que je ne puisse en faire abstraction un seul instant. Ma bouche était sèche au-delà du possible et mon estomac hurlait son mécontentement. L'être qui venait me nourrir avait tout d'humain, une expression de terreur peinte à même le visage. C'était un prisonnier, tout comme moi sauf qu'il restait libre de ses mouvements. Si j'avais espéré que l'on me libère de mes chaines au moins le temps d'un repas, j'avais vite désenchanté. A aucun moment on ne m'avait détaché et j'étais même contraint d'y faire mes besoins. L'odeur en était devenue abjecte !
La puanteur, la solitude, la faim et la soif avaient de quoi me faire perdre la tête. Les points serrés, je résistai aux chimères de mon imagination. Je m'efforçai de ne pas trop penser, puisque laisser mon esprit libre c'était prendre le risque de le perdre à jamais. J'y faisais le vide, me refusant le moindre sentiment, la moindre faille. Les premiers jours, je m'étais accroché à mon passé, à tout ce qui faisait de moi ce que j'étais. Et puis j'avais senti que même mes propres émotions se retournaient contre moi. Lorsque la douleur devenait trop forte, on est seul, rien ne peut nous aider vraiment !
Je songeais malgré moi à la Mort, alors qu'il semblait l'apercevoir, pas si loin de moi. Allais-je réellement mourir ainsi ? Dépassé par la nature, coincé dans ce cachot ? C'en était presque risible !
Moi qui me croyais invincible, totalement invulnérable ... Le leader des Légendaires, fier de la cause qu'il défendait et tous pleins d'ambition et de bonnes intentions. Je me croyais alors un modèle de vertu, rien ni personne ne pouvait m'atteindre à cette époque. Je pensais avoir goûté à la douleur après le mort de mon père et de Saryn, j'étais si naïf !
Et, alors que mes défenses tombaient peu à peu et que ma faiblesse n'était même pas descriptible, la véritable torture commença. Ténébris est venue ! D'elle, je connaissais surtout sa cruauté, née d'un sadisme réel que son paternel lui avait transmis. Mais ce jour-là, elle ne m'était jamais parue si dangereuse. Peut-être était-ce à cause de ma vulnérabilité, mais malgré tout ce que je pouvais prétendre, j'avais peur d'elle.
J'avais le sentiment d'avoir perdu toutes les valeurs qui faisaient de moi un Légendaire au moment où son regard rencontra le mien. Je lisais dans ces prunelles vermeilles une soif de pouvoir et de douleur. Elle a détaché mes liens et je m'écroulais sur le sol humide et irrégulier. J'essayais en vain de me relever, d'user du peu de dignité et de force qui me restaient.
Je connus alors une souffrance indescriptible. Un feu sans nom qui lécherait ma chair jusqu'à ce qu'elle disparaisse entièrement. Un poison qui coulerait dans mes veines, jouissant de ma longue agonie. La voix de Ténébris s'élevait parfois, au terme de longues minutes de douleur :
-Tu n'as rien à me dire, Danaël ?
Ma bouche restait hermétiquement close et je me refusais le moindre son. J'avais trouvé à quoi me raccrocher, comment y résister. Je voyais Jadina et tous les Légendaires. Alysia et toutes ses vies que je voulais sauver.
-Danaël, dis-moi où sont les Légendaires !
Non. Non, je ne parlerai pas. Pas devant elle, ces informations futiles devaient des secrets et je les enfermai où personne ne les trouverait jamais. Silencieusement, j'en faisais le serment sur ma vie. Même si je devais en mourir, crever ici et sans attendre de ce mal qui me rongeait. La douleur cesserait alors et j'aurais le sentiment d'être à la hauteur de mon nom.
Et contre cette volonté, même la grande Ténébris n'y pouvait rien. Je pouvais bien succomber à la folie, quitter ce monde s'il le fallait, rien ne me ferait changer d'avis.
-Danaël. Danaël. Danaël.
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Je ne sais où je suis. Mes yeux voient sans vraiment distinguer quoi que ce soit. Rien ne semblait réel et la vérité s'en voit déformée. Tout est immonde et j'ai peur. Le froid est partout, sur ma peau comme dans mon cœur.
Le vide ne laisse la place à rien d'autre et je suis ce néant, comme tant d'autres. Je n'ai souvenir de rien. Mes pensées s'évanouissent comme un goutte d'encre dans un peu d'eau, jusqu'à disparaître entièrement. Au milieu de tout cela, une impression me colle au corps. Un sentiment que je crois connaître mieux que tout, mieux que ce rien qui m'engloutit. La douleur qui éveille quelque chose en moi, juste au niveau de mon cœur. C'est tout ce que je sais de ce monde froid et nu. Une petite voix en moi murmure alors, comme seule réalité : La souffrance d'un prisonnier !
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