La déception dans leurs yeux

Tu y étais enfin arrivée. Tu faisais maintenant partie des Légendaires. Bien-sûr, tu savais que tout n'était pas gagné, comme toujours. Tu sentais le doute dans certains regards, tu n'avais pas encore toute leur confiance. Mais ça ne saurait tarder.

Tu étais toujours sur tes gardes, jamais tranquille. Le sens aux aguets, prête à défendre ta vie si c'était nécessaire. Tu jouais sans cesse un jeu, tu faisais ton possible pour paraître naturelle. Sourire, être agréable, plaisanter de temps à autre, aider si tu le pouvais. Tout cela résonnait comme une chanson dans ton esprit, c'était devenu obligatoire. Chaque regard était comme une menace, une menace qui pesait sur tes épaules, comme une bombe à retardement. C'était difficile, surtout les premiers jours, tu ne savais pas vraiment comment réagir. Et puis, tu avais peur. Peur que dans tes prunelles claires comme le clair de lune, ils voient la personne que tu étais réellement. Celle qui allait les trahir pour son géniteur. Tu t'efforçais de te rappeler ces paroles, chacune d'elles, pour te donner la force de leur mentir. Les laisser sourires alors qu'ils allaient mourir, les laisser espérer alors que tu savais parfaitement que c'était inutile. Il n'y avait plus d'espoir pour eux.

Mais rien ne s'est passé comme prévu, comme tu l'aurais espéré. Alors que la peur t'oppressait chaque jour davantage, un autre sentiment être apparu. De l'affection. J'ai commencé à ressentir de l'affection pour ces personnes, pour ces héros qui n'avaient qu'une idée en tête, sauver le monde. Les Alysiens avec leur haine tenace et leur rancune. Penser à ta mission te donnait mal au ventre, te donnait envie de pleurer. Tu ne pouvais qu'imaginer leur déception, la surprise sur leurs visages quand ils comprendront. Tu pouvais déjà sentir leurs regards sur toi et tu avais honte, honte à en mourir.

Pourtant, malgré ta peur et ce malaise qui ne cessait de croître, tu ne faiblissais pas et les Légendaires ne se doutaient toujours de rien. Ils n'étaient pas témoins du trouble que tu vivais et du mal que tu avais à sourire. A masquer la Galina que tu étais.

Malgré toi, tu les appréciais, jusqu'à te demander où tu trouverais la force de tout briser. La force de Danaël qui savait toujours prendre les bonnes décisions. La jovialité de Jadina faisait que tu ne pouvais que t'entendre avec elle. La gentillesse de Razzia qui était sans aucune limite. Shimy était surement la plus difficile à supporter, très froide, et n'était pas tendre avec toi. Quant à Gryf, il souffrait beaucoup, tout le monde en était témoin, bien qu'il fasse son maximum pour le masquer. Tu éprouvais l'irrésistible envie de le consoler, de lui parler, de le rassurer. Mais chaque fois, tu te retenais, tu ne devais pas t'attacher encore plus à ce Jaguarian.

Plus vous vous rapprochiez de la cité secrète, plus il semblait mal. Il s'en était même pris à Jadina, lors de votre arrivée dans un village. Il souffrait alors de violentes migraines et tu aurais tellement voulu l'aider, soulager sa douleur. Et puis vint l'attaque des trafiquants de Monslaves, alors que Gryf allait au plus mal. Tu avais failli être démasqué, une pierre s'était détachée et tu t'étais jetée sur elle pour protéger le Jaguarian. Ton bras Galina était blessé et Shimy à voulu le voir. Ton instinct de survie et tu avais oublié toutes retenues. Tu l'avais regretté immédiatement et t'étais excusée.

Alors que vous vous étiez réfugiés dans une grotte, Gryf a perdu tout contrôle. Toi, comme les Légendaires, ne comprenaient pas ce qu'il se passait. Tu appris plus tard qu'il venait de faire une crise de Chakounia. Tu sentais les choses t'échapper, tu ne contrôlais plus rien et tu t'imaginais déjà le pire. Après vous êtres battus contre des Milksharks, tu étais heureux de revoir Gryf. Mais quelque chose n'allait pas, tu l'avais tout de suite compris, son attitude, peut-être, ou juste ton instinct. D'un coup de griffe, Shimy fut à terre et ton cerveau cherchait déjà une solution. Chose que tu n'eus pas le temps de trouver, puisque Gryf te tenait déjà par la gorge. Tu ne l'avais même pas vu bouger, il était tellement rapide que tes yeux n'arrivaient même pas à capter ses mouvements :

-Aaah ... Gryf !! Mais ... Qu'est-ce que tu as ?!

Il ne te répondit pas, son visage était très proche du tiens et ce que tu vis te fit frémir d'horreur. Le jaune de ses yeux avait fait place à du rouge vif, comme le sang, bordé de veine, un ton moins foncé. Il grognait, ne semblait pas te reconnaître ni pouvoir comprendre tes paroles. Ses crocs étaient bien visibles et de sa bouche s'écoulait plusieurs filaient de bave. Partout, sur son corps et sur son visage, des veines saillaient. Tu avais peur, vraiment peur. L'être en face de toi n'avait plus rien du Jaguarian que tu connaissais et appréciais. C'était un animal !

Il s'apprêtait à t'attaquer, les griffes pointées vers ta gorge, afin de donner le coup mortel. Mais, tout à coup, une flèche atteint Gryf au bras et il s'écroula lourdement sur le sol. A quelques mètres à peine de toi, des êtres, dont l'un ressemblait étrangement à ton ami, se tenaient là. L'un d'eux lança à ton égard :

-Je t'ai sauvé la vie, humaine ! Mais touche à un seul poil de mon frère et ton geste sera le dernier !

Tu hésitais entre être soulagée s'avoir été sauvée et être effrayée par ses individué un peu étrange. Ne sachant pas très bien t'il allait t'être utile ou, au contraire te mettre des bâtons dans les roues. Tu gardais toujours en tête ton objectif. Une petite voix dans ta tête te dis, comme une évidence : «Ce sont des Jaguarian, Shun-Day, tu as réussi ! ». Tu t'en voulus de ne pas y avoir pensé avant. Tu te laissas donc endormir sans même penser à te défendre.

Tu te réveillais plus tard, au côté des Légendaires. Tous formulant des hypothèses plus improbables les unes que les autres, mais tu te mêlais quant même à ses débats. Tu sentais que ton heure approchait, tu l'attendais et en avais peur à la fois. Tu voulais que ça se termine et que ta vie reprenne son cours. Mais tu ne voulais pas arriver à ce moment, tu ne voulais pas lire de déception dans leurs yeux. Tu ne saurais comment le supporter.

Quant Gryf fut de retour, tu ne pus t'empêcher de te jeter dans ses bras, prise d'une impulsion irrésistible. Tu appris que le Jaguarian qui lui ressemblait tellement était en faite son frère et le nom qu'ils donnaient à la crise dont avait été victime ton ami. La Chakounia.

Kel-Cha décida alors de vous montrer la cité. Toi, tu les suivais, docile. Ton visage était neutre, tu jouais bien ton rôle. Mais la corne de Sygma t'hantait toujours, tu l'avais en tête, jour et nuit. Tu lançais de temps à autre, de petites remarques. Les choses devinrent intéressantes, une fois dehors. Le roi parlait de la corne en expliquait les pouvoirs, des informations que tu connaissais déjà. Cette fois, tu ne te gênais pas, lançant à voix haute :

-Ah, ben, nous y voilààà ! Donnez-nous la corne !!

Tu sentais les regards de tes amis sur toi, étonnés. Tu ne t'en formalisais pas. Une dispute éclata, Danaël était de ton avis et tu étais soulagée de l'avoir de ton côté. Kel-Cha ne comprenait pas, il n'avait aucune idée de la menace qui pesait sur les Alysiens. L'un de ses gardes du corps, Ko-Chonu, s'élança vers son monarque :

-Halte ! Là, vous allez trop loin !

L'autre, le plus enveloppé, ajouta quelque chose avant de suivre son ami dans l'idée de protéger son souverain. Tu ne captas même pas ses paroles, d'un coup de pied dans la mâchoire, tu envoyas valser le premier. Tandis que Razzia neutralisait le deuxième avec facilité. Au coin de l'œil, tu pus voir que Danaël appelait son épée d'or. Les choses n'allaient pas s'arrêter là, tu en étais certaine. Tu t'apprêtais à te battre contre Ko-Chonu qui s'était déjà relevé et qui était prêt à prendre sa revanche, quand la voix du leader t'arrêta :

-Jaguarians !! Remettez-nous la corne de Sygma si vous tenez à votre souverain !

Son intervention stoppe nette toutes les autres. Il tenait son épée sous la gorge du roi. Sa menace te choqua, ce n'ait pas dans ses habitudes de faire une telle chose. L'urgence de la situation, certainement. Tu souris intérieurement, espérant que son idée est du succès. Gryf fut le premier à réagir, défendant son frère, son frère dont il ne se souvenait même pas. Kel-Cha grogna entre ses dents :

-Jamais vous ne l'aurez !!! Ma vie n'a aucune importance face au destin des miens !!!

Tu admirais son courage, un roi prêt à se sacrifier pour son peuple, prêt à donner sa vie. Le débat ne s'arrêtait pas là, mais tu trouvas plus juste de ne pas t'en mêler, plus sage, aussi. Celui-ci aurait surement duré longtemps si une explosion n'avait pas retentit. Tu sursautas à peine et tu eus un sourire, minuscule, mais tu ne parviens pas à le masquer. C'était ton père, tu n'en avais pas le moindre doute. Et, sans le savoir, les Légendaires et les Jaguarians signaient leur arrêt de mort en quelques paroles :

-Prends bien garde à toi, ennemi inconnu !! Car tu vas devoir affronter les Légendaires et les Jaguarians.

Le leader ne semblait avoir aucune idée de la portée de ses paroles, de la souffrance qui allait être la leur. Et ton ventre se tordit quand tu te rappelas que tu en étais la principale responsable.

Tes compagnons se demandaient comment l'ennemi avait-il pu entrer dans la cité. Tu gardais le silence, les points serrés. Une voix couvrit complètement les autres :

-Il est ici !!!

Un Jaguarian blessé apparu de derrière les décombre, son œil gauche était fermé et bleui et il semblait épuisé. Il était mal en point. Il reprit, la respiration difficile :

-Il ... Il est ici ! Ne l'approchez pas, roi Kel-Cha ! Le monstre qui nous a attaquées est ...

Mais il n'eut pas l'occasion de finir sa phrase, un cri horrible le remplaça. Un trou béant et fumant en milieu de sa poitrine, tu vis ses yeux s'immobiliser pour toujours. Une ombre apparut derrière lui :

-Merci, petit Jaguarian ! Je crois que le message est passé !

Même avant que l'on puisse apercevoir ses traits, tu l'avais déjà reconnu. Ton père, Skroa. Il parlait, mais tu ne l'écoutais pas vraiment, prête à agir à la moindre occasion. Les deux gardes du corps du roi s'élançaient vers ton géniteur qui balança le corps du défunt comme une vulgaire poupée. Le corps sans vie tomba lourdement sur le sol, à quelques mètres de là. Le sorcier dit, tu pouvais presque l'imaginer sourire :

-Venez, mes petits chatons !

Jadina et Danaël l'avait reconnu. Tu te rassuras aussitôt, il ne pouvait pas remonter à toi, de toutes manières. Peu importait qu'il connaisse maintenant son identité. La magie de ton père mit à terre les deux Jaguarians qui gémissaient maintenant sur le sol. Alors que Jadina annonçait aux autres et à Skroa qu'elle le connaissait et l'avait reconnu, tu décidas de leur fausser compagnie. Mais Danaël te vit et demandit :

-Shun-Day ?! Où vas-tu ?

Tu t'arrêtais, et, ayant déjà réfléchit à une réponse, à une excuse plausible, tu répondis, presque sans hésitation :

-Je ... Je pensais aller protéger la corne de Sygma de plus près, à l'intérieur de la tour. Allez savoir de quoi ce type est capable ! Peut-être a-t-il fait tout sauter ici pour nous attirer à cet endroit pendant qu'un complice va essayer de voler l'artefact ?!

Le léger trémolo dans ta voix était à peine audible et tu étais presque certaine d'être crédible. Il eut un sourire et dit, avec un mouvement de son bras valide pour le colosse :

-Bien raisonné, Shun-Day ! Razzia, accompagne-là !

Le compliment ne été toucha même pas. Ton plan risquait de tomber à l'eau avec Razzia à côté. Tu lanças :

-Je peux y aller toute seule, Danaël !

Son sourire disparu et son regard se fit plus dur, comme s'il allait gronder une enfant qui venait de dire une bêtise. Il te sermonna, d'une voix grave :

-Shun-Day, même temporairement, tu es une Légendaire ! En tant que telle, tu es priée d'accepter mes décisions !!!

Tu juras intérieurement, maudissant ta malchance. Raté ! Tu lâchas, du bout des lèvres, le regard noir :

-Bien ... Chef !

Et tu t'élançais en avant, Razzia sur tes talons. Il n'était pas question pour toi d'échouer et tu comptais bien se débarrasser de se gêneur le plus vite possible. Vous courriez rapidement en direction de la tour, l'autre te suivait, tant bien que mal. Vous arriviez finalement devant le haut bâtiment, tu ne ralentissais pas l'allure et Razzia semblait étonné de te voir si pressée, tu ne t'en formalisais pas. Vous commenciez à gravir les marches alors que des bruits sourds se faisaient entendre régulièrement. Ton cœur battait à tout rompe et pas seulement à cause de l'effort. La tour trembla et de la poussière tomba tout proche. Razzia t'arrêta :

-Za à l'air de chauffer, dehors ! Faudrait p'têt' allé aider nos amis ?

-Rebrousse chemin si tu veux, moi, je continue vers la corne de Sygma !

Tu repris ta route, espérant de tout cœur qu'il rejoigne les autres, mais il dit :

-D'accord, d'accord ! Ze te zuis !

Vous gravîtes encore quelques marches, avant de finalement apercevoir la fin de l'escalier :

-Ca y est ! On est arrivé au sommet de la tour !

-Pouf ! Pouf ! Vivement qu'on invente les aszenzeurs ! Lâchait Razzia qui peinait à suivre le rythme

Tu en pus t'empêcher de sourire lorsque tu vis la corne de Sygma, tu dis :

-Regarde, Razzia !

-Mazette !

-Nous l'avons enfin trouvé ! La corne ... de Sygma !!

Tu réfléchissais à toute allure, pendant que l'autre observait, des étoiles dans les yeux, l'artefact. Le moment était venu, tu le savais et l'angoisse était maintenant bien présente, bien que tu t'efforces de la contenir. Tu devais être prête à faire face au moindre désagrément et depuis des semaines déjà tu avais imaginé toutes sortes d'imprévus. Lentement, tu sortais ton arme de son fourreau, ta main moite serrée sur le manche. Razzia était approché de la corne, mais toi, tu étais restée en retrait, il dit :

-Minze ! On fait quoi maintenant ? On n'a pas eu d'instructions zupplémentaires !

-T'occupe ! J'ai eu les miennes !

N'ayant pas l'intention de lui laisser le temps de réagir, tu t'apprêtais à passer à l'attaque, la lame pointée devant toi. Mais le mur de votre gauche explosa et les Légendaires apparurent, portés par une fusion de Shimy, qui semblait aller mieux. Tu te mordis la lèvre jusqu'au sang, maudissant les dieux et jurant contre ta poisse. La main de Razzia rencontra ton épaule, il demandit, incertain :

-Shun-Day ! Z'est quoi, zette hiztoire ?

-J'y étais ... Presque !!!

En un mouvement tu envoyas valser le colosse à l'autre bout de la pièce, bien avant qu'il se rende compte de quoi que ce soit. Ton plan avait échoué, mais tu n'avais pas l'intention de te laisser faire, la voix de Razzia et de Jadina s'élevait, des paroles en l'air, d'aucune importance pour toi. Tu souris, rangeant ton arme et lançais, presque taquine :

-Alors là ... Chapeau ! Et vous pouvez me dire comment vous l'avez découvert ?

Encore des paroles, les Légendaires se succédaient pour te donner leur explication. Cette fois, tu les écoutais. Tu étais impressionnée, toi qui pensais que personne ne pourrait remonter jusqu'à toi. Tu t'étais trompée. Tu soupirais, sans te dépourvoir du sourire, plaqué sur ton visage :

-Puisque les masques sont tombés, je ne vois plus de raisons de cacher mon bras ...

D'un mouvement brusque, tu remontais la manche du vêtement et laissant les héros voir la chose que tu cachais depuis votre rencontre. Tu poursuivais :

-... Ni ma véritable ... Apparence !!

Sous les regards mi-étonnés mi-effrayés de ceux que tu avais trahis, tu retrouvais ta véritable apparence. Celle de la Galina que tu étais. Et tu vis la déception dans leurs yeux, ça te fit mal, autant que ce que tu avais imaginé. Pourtant, tu ne laissais rien paraître et lançais à leurs égards :

-Et là ? Je suppose que le lien de parenté avec mon père devient plus évident, non ?

Pris soudain d'un élan de patriotisme pour un peuple dont il ne savait rien, Gryf s'élança vers toi, hurlant ces mots :

-Pourriture ! Tu vas payer pour le mal que tu as fait à mon peuple !

Tu ne voulais pas te battre contre lui, mais tu n'avais pas le choix, tu le savais aussi. Tu pris une grande inspiration et dis d'une voix calme, beaucoup trop calme :

-Tu oublies la règle d'or des Légendaires, Gryf ! Toujours ... Agir ... En équipe !!

Un coup de genou, de point dans le ventre, puis dans le visage, le Jaguarian fut à terre. Les Légendaires s'élançait vers toi, te répondant à l'unisson :

-Et c'est ce que nous allons faire !!

Tu t'apprêtais à te défendre, mais tes assaillants furent mis à terre par ton père. Skroa surgit de nulle part, un peu amoché, mais vivant. Tu étais tellement heureuse de le revoir, tu t'élançais dans sa direction, oubliant toute retenue :

-Papa !

-Shun, je t'ai déjà dit que ...

D'un revers de main, il t'envoya au sol et tu le rencontrais durement. Il poursuivit :

-... Je ne suis pas ton père ! Je t'ai donné une partie de corps et de mon âme pour que tu puisses passer pour une humaine ! Pas pour éprouver de l'amour !!Est-ce bien clair ou dois-je reprendre ce que je t'ai offert ... La vie ?

La douleur que tu ressentais était encore plus forte, bien pire que celle que tu devrais ressentir. Tu répondis, tremblante :

-Oui, p ... Maître !

La voix de Gryf te parvint, alors que tu avais presque oublié la présence des plus grands héros d'Alysia :

-Et c'est ... Pour un type comme ça ... Que tu nous ... as trahis ?! Niaf ! Niaf ! Quelle ... Blague !

Tu le fusillas du regard, tandis que ton géniteur, la main posé négligemment dans tes cheveux bleus, se lançait dans une longue explication, dont tu n'entendais que des bribes. Tu connaissais déjà tout ça, tu savais déjà tout. Les points serrés, tu t'efforçais d'encaisser les évènements. La voix de Skroa te parvint, alors qu'il s'adressait à toi :

-Ces babillages m'agacent ! Shun-Day, je veux que tu règles leur compte à ces héros en commençant par ... Gryf !

-Quoi ? Mais ... Ce n'est pas nécessaire ! Vous avez la corne, le reste n'a pas d'importance ! Vous ... tentais-tu de protester

-Shun-Day ! te coupa Skroa, d'une voix qui n'offrait aucune place à la négociation, tu n'avais aucune chance.

Tu avais la bouche sèche et tu te sentais mal. Tu ne le souhaitais pas, tu ne voulais pas les tuer, pas après ce qu'ils avaient fait pour toi, c'était impensable. Pourtant, tu allais obéir, comme la marionnette que tu étais. La sale besogne allait commencer, et peut importait ce que tu en pensais.

-A vos ordres ... Maîtres !! Tu dis, comme un soldat fatigué, retissant à obéir, mais qui finissait toujours par faire son travail. Un automate bien huilé.

Gryf se relevait avec difficulté, mais tu le plaquais déjà sur le sol dur et froid. Son visage était dans un sale état et tu ne pus t'empêcher de t'excuser :

-Je suis ... Désolée, Gryf ! J'aurais préféré que ça se finisse autrement !

Et tu ne mentais pas, pas cette fois. Jamais tu n'aurais imaginé devoir le tuer. Tu croisais son regard et ton cœur se serra douloureusement. Tu le suppliais, désespéré, sachant que s'il continuait, tu allais échouer :

-Arrête, tu vas me faire pleurer ! Gryf ...

Ta main serrée sur sa gorge et tes serres prêtes à donner le coup de grâce, tu avais le mauvais rôle et tu avais juste envie de fuir. Fuir loin d'ici, loin des yeux de ton ami, qui te juge, te supplie de ne rien faire. Tu es prise entre deux feux, tu ne sais plus rien. Ce qui est bien et ce qui est mal. Tout ce bouscule dans ton esprit. Et les voix des Légendaires qui te parviennent, comme une tentation, ne sont pas là pour t'aider :

-Shun-Day ... Ne fais pas ça ! Tu n'es pas une ... meurtrière !

-Je ne t'ai jamais vraiment aimée ... Mais on a ... traversé des épreuves ensemble ! Tu vaux mieux que ça !

-Shimy a raison ! Skroa t'a peut-être créée et tu n'es pas ... Humaine, soit ! Mais tu es plus que ça ! Tu es une Légendaire !

Ils étaient là, paralysés, inoffensifs, à première vue. Mais ils ne l'étaient pas. Ils arrivaient encore à te toucher, avec leurs paroles, ils en savaient la portée, ils savaient qu'elles ne te laissaient pas indifférentes. Tu avais envie de les croire, c'était si plaisant. Ca faisait du bien, c'était agréable.

-On te faisait confiance ... Tu étais des nôtres ! Pour nous, tu étais ...

Tu allais craquer, tu le savais, Gryf également. Tu le stoppais, avant qu'il ne commette l'irréparable :

-La ... Ferme !

-... De la famille !

Dans ses yeux de félins, tu voyais ton reflet, le reflet du monstre. De celle qui avait trahi ceux qui avait eu confiance en elle. Elle te dégoutait. Mais c'était celle que tu étais. Mais, peut-être que cette fille pouvait encore changer, peut-être que tu pouvais être celle que les Légendaires appréciaient. Tu avais une chance, aussi petite soit-elle. Des larmes coulaient le long de tes joues, épousant le contour :

-La ... Ferme !!!

Tu arrachais le Katseye de Gryf, tremblante. Tu avais pris ta décision et tu étais prête à en payer les conséquences, aussi lourdes qu'elle pouvait être.

-Voilà ! Je suis ... Désolée ...

-Shun-Day ! Que tiens-tu dans ta main ?

Tu serrais le Katseye du Jaguarian entre tes doigts, tu entendais vaguement les mots du roi, mettant des mots sur ton acte. Tu te retournais, répondant à ton géniteur, le visage inondé de larmes :

-J'ai protégé ... Ma famille !

Gryf, l'animal, bondit au dessus de toi, toutes griffes dehors. Et tu le vis asséner un violent coup de point dans le ventre de Skroa, qui régurgita la pierre de Crescia. Dans une explosion, le démon perdit sa forme adulte et redevint l'oisillon inoffensif. Toujours en train de commenter leurs faites et gestes, Jadina et Kel-Cha perdait leur temps avec des explications inutiles. Tu lançais :

-Au lieu de parler, remettez le Katseye au cou de Gryf avant qu'il ne se réveille !!

Shimy passa le collier autour du cou du Jaguarian. Les avis des héros divergeaient, mais ils étaient d'accord pour faire de toi de la chair à pâté. Pourtant, tu dis quand même, sans vraiment savoir à quoi tu t'attendais :

-Je ne me demande qu'une chose ... Laissez-moi partir avec mon père !!

Jadina eut un petit rire, elle leva les yeux au ciel pour finalement lancer à ton encontre :

-Non mais tu plaisantes ?! Après tout ce que tu nous as fait ? Tu rêves ! Tu t'es fait passé pour une humaine pour nous infiltrer, tu nous as ...

-C'est d'accord !

Les Légendaires furent étonnés, ce n'est rien de le dire, mais sous ton masque d'impassibilité, tu l'étais tout autant. Le leader ne cessait de te surprendre, tu ne savais jamais à quoi t'attendre. Il jugea utile de se justifia :

-Nous avons obtenu la pierre de Crescia, plus besoin de la corne ! On a gagné et ils ont perdu ! Alors je crois que nous pouvons être bon joueur !

Son esprit de meneur t'impressionnait, ses décisions étaient d'une justesse remarquable et, rien que pour ça, tu le respectais. Malgré ta trahison, il avait accepté une demande que tous auraient rejetée. Tu t'élançais dans les airs, tenant dans tes bras, ton père :

-Merci, Danaël ! Alors, je suppose que c'est un au revoir !

-Disons plutôt un adieu ! Car si nous devons nous revoir ... Ce sera en ennemis mortels !

Tu hochais la tête tu aurais voulu t'attarder davantage en remerciement, ils le méritaient tous. Mais tu ne le fis pas. Tu leur fis, simplement :

-Message reçu !

Et tu t'éloignais d'eux, de la cité des Jaguarians, de ce trouble qu'elle avait suscité. Tu avais à la fois trahi ton père et les Légendaires. Tu n'avais pas su faire un choix. Pourtant, tu ne parvenais pas à t'en vouloir, tu étais heureuse que ça se finisse de la sorte. Tu voulais juste oublier maintenant, partir loin. Vivre à l'écart pour ne plus causer de tord à personne. Ne plus avoir à lire cette déception dans les yeux des êtres qui te sont chers. C'était trop pour toi.  

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