┆𝘽𝙀𝘼𝙎𝙏 & 𝙧𝙚𝙫𝙚𝙧𝙞𝙚
BEAST & REVERIE
CE TEXTE CONTIENT DES SPOILERS IMPORTANTS SUR LA FIN DE BEAST.
nda - j'adore beaucoup trop écrire sur BEAST. je trouve l'univers et le concept absolument génial et j'aimerais tellement qu'il soit encore plus développé (surtout au niveau des personnages) parce que wow, ce LN est angst af mais si bien-
pour rappel pour ceux qui ne connaîtraient / ne se souviendraient pas : BEAST est un des light novels de BSD, sur le concept d'un Atsushi à la mafia et d'un Akutagawa à l'Agence. Aucune traduction en français n'est disponible à ce que je sache, mais une traduction anglaise est publiée sur wattpad actuellement, et, pour ceux qui veulent aller à l'essentiel, looking-for-stray-dogs a publié sur son tumblr un long résumé détaillé de ce qui s'y passe.
attention de nouveau : c'est angsty à plusieurs moments et on aborde des thèmes pas joyeux-joyeux comme le suicide et la maltraitance.
je précise aussi que je l'ai écrit sans me baser sur les scènes exactes du LN donc si des experts passent par là, ne soyez pas surpris que ce ne soit pas tout à fait exact :')
bonne lecture !
✾
Ryunosuke observa le ciel sombre au-dessus d'eux, qui laissait tomber une fine pluie sur la ville portuaire de Yokohama. Le soleil perçait à peine à travers tous ces nuages sombres, un soleil qui n'avait rien de réconfortant de toute manière. Le rouge-orange dont il teintait habituellement le ciel à cette heure de la journée était beau pour certain, laid pour d'autres ; et pour lui, il était juste dénué d'intérêt.
Il s'arracha à sa contemplation du ciel pour tourner son regard métallique sur les grandes tours qu'il apercevait sans difficulté malgré l'obscurité environnante. La lumière rouge qui les surplombait était visible sans problème, peu importe d'où on se tenait dans la ville. Il était difficile de croire qu'il s'y tenait quelques heures à peine plus tôt, combattant pour retrouver la sœur qu'on lui avait arrachée.
Désormais, il contemplait le paysage dénué d'humanité devant lui, en se demandant ce qu'ils allaient faire maintenant qu'ils s'étaient retrouvés.
Il s'adossa à un mur orné d'un balcon pour s'abriter de la pluie quelques instants. Il n'était pas à côté de l'Agence, aussi il préférait attendre de voir si le temps allait s'apaiser avant de prendre le risque d'arriver trempé sur son lieu de travail. Il était supposé rentrer chez lui pour se reposer, mais il savait que ce serait impossible présentement. Son cerveau bouillait d'un trop plein de pensées.
Alors qu'il observait la promenade vide de présence humaine qui s'étendait devant lui, une silhouette se détacha de l'obscurité et s'approcha à pas lents de lui. Il se mit en position défensive mais se détendit imperceptiblement en découvrant l'identité de celui qui venait vers lui ; il s'agissait du mafieux qu'il avait affronté précédemment, un jeune homme aux cheveux clairs et au long manteau noir, répondant au nom d'Atsushi Nakajima s'il se souvenait bien.
Lors de leur affrontement, il était un jeune homme redoutable et déterminé qui avait poussé Ryunosuke à puiser dans toutes ses ressources pour le battre. Mais il ressemblait désormais à un enfant perdu qui ignorait où aller et quoi faire maintenant que sa vie n'avait plus vraiment de sens.
Le jeune homme atteignit son niveau, et le dévisagea quelques instants. Chacun soutint le regard de l'autre sans ciller pendant plusieurs secondes, avant que le mafieux ne murmure :
« Je peux m'abriter ici ? » Ryunosuke laissa le silence s'étirer quelques secondes avant de répondre un assentiment silencieux d'un hochement de tête. « Vous avez tout vu. » ajouta ensuite le jeune homme au bout de quelques instants. Ce n'était évidemment pas une question, bien sûr qu'il savait, il avait même vu de ses propres yeux ce qui s'était produit - et d'ailleurs, il était aux côtés de ce Nakajima lorsque l'événement avait eu lieu.
« Désolé, marmonna le détective en plongeant son regard sur le paysage.
- Vous n'êtes pas responsable, répondit Nakajima avec un éclat de rire qui se brisa. Personne ne l'est. Sauf monsieur Dazai... »
Ryunosuke repensa à cet homme redoutable qu'il avait à peine entraperçu, cet homme qui avait brisé sa famille en enlevant sa sœur, cet homme qui avait fait du jeune homme à côté de lui un tueur, cet homme qui avait pris sa propre vie sans raison, en se jetant du haut du bâtiment qu'il avait toujours occupé.
Le parrain de la mafia, Osamu Dazai, le prodige, l'homme craint par tous, s'était suicidé, et le détective avait encore du mal à croire que ce n'était pas un mensonge. Vu le portrait de l'homme qu'il s'était dessiné en se confrontant à lui, il aurait eu plutôt tendance à croire à une plaisanterie de sa part s'il ne l'avait pas vu de ses propres yeux. Mais l'image du corps élancé du parrain chutant dans les ténèbres restait ancrée dans son cerveau.
Ses mots aussi ne quittaient pas l'esprit du détective. Tout ce qu'il avait dit, ses explications sur le Livre (avec une majuscule), cet objet si important qu'il avait protégé toutes ces années. Protégé contre qui, protégé de quoi, ça, ils n'avaient pas eu le temps de le lui demander. Le parrain le savait-il seulement ? Si ce qu'il avait dit était vrai, alors le jeune homme aux cheveux bruns avait eu une connaissance du monde, non, de l'univers, qui dépassait grandement sa compréhension.
Ce n'était pas une plaisanterie, pas plus qu'un rêve. Et si lui se remettrait sans trop de mal de cet événement, il se demandait comment l'homme à ses côtés passerait au-dessus de la mort de celui à qui il semblait tant attaché. Du coin de l'œil, il observa ce redoutable assassin qui n'était plus que l'ombre de lui-même. Et, comme s'il sentait qu'une attention était portée sur lui, Nakajima se mit à parler, à raconter des souvenirs qu'il revoyait se dérouler devant ses yeux, une rêverie d'un passé révolu destiné à survivre uniquement dans sa mémoire.
« Il m'a sauvé la vie quand j'étais jeune. Les enfants et les adultes de l'orphelinat dans lequel je me trouvais... me maltraitaient, par crainte de mon pouvoir. Monsieur Dazai m'a sauvé la vie et m'a offert un endroit où rester, où je serais utile. Où mon pouvoir ne serait pas rejeté mais respecté par tous. Où on ne me considèrerait pas comme un danger, un enfant qui n'aurait jamais dû voir le jour. » Sa voix se renforçait à chaque nouvelle phrase. « Pourquoi s'est-il tué ? acheva-t-il. Je ne comprends pas.
- Je ne crois pas que quelqu'un puisse comprendre ce qui se passait dans son esprit. » L'assassin tourna un regard flamboyant de colère vers lui, mais celle-ci fondit comme neige au soleil au bout de quelques instants.
« Oui. Sans doute. Monsieur Nakahara y parvenait peut-être. Mais je crois que même cet acte l'a dépassé. »
Ryunosuke ignorait qui était l'homme en question, même si ce nom ne lui était pas totalement inconnu - il s'agissait sans doute d'un haut gradé de la mafia dont Kunikida ou Fukuzawa avaient déjà mentionné l'existence. Il pouvait cependant parfaitement comprendre que tous les hommes qu'Osamu Dazai dirigeait d'une poigne de fer se retrouvent perdus devant son suicide soudain. Sans doute n'avaient-ils jamais envisagé une seule seconde que le dernier acte de cette affaire se clôturerait ainsi.
« Qui va prendre la tête de la mafia ? demanda le détective par curiosité, pour essayer de soutirer des informations.
- Son bras droit en théorie. » répondit sèchement Nakajima, visiblement peu désireux de dévoiler les secrets de son organisation malgré les questions qui planaient au dessus de son avenir.
Ryunosuke prit note mentalement de cette information malgré tout utile. Il ne savait pas qui était le bras droit de Dazai, mais il espérait que c'était quelqu'un de différent. S'ils se trouvaient à nouveau nez à nez avec un homme aussi perspicace et malintentionné que l'ancien parrain, l'Agence avait encore des jours compliqués devant elle.
L'autre s'était de nouveau muré dans un silence rempli de souvenirs. Ryunosuke ignorait pourquoi il était venu s'abriter à ses côtés alors qu'il y avait d'autres endroits où se protéger de la pluie - et qu'il avait en plus une capuche pour se protéger - mais l'autre ne semblait même pas vouloir l'attaquer. Il était juste... là, perdu dans son esprit, sa douleur et ses rêveries.
Le détective resta également silencieux, observant les nuages gris qui s'éclaircissaient peu à peu dans le ciel chargé. Il se demanda ce que ressentait l'homme à ses côtés après la perte de cet homme si important pour lui. Si jamais Oda venait à mourir, sans doute serait-il tout aussi perdu. Même s'il n'était pas du genre à manifester son affection, le détective auburn l'avait sauvé en le recueillant sans rien obtenir en échange et en lui offrant un toit où s'installer. C'était la même chose pour Fukuzawa, Kunikida, Kenji et ses collègues. Ils lui avaient offert un endroit où rester, un rôle à jouer et un but dans la vie. Que ressentait-on quand on perdait de telles personnes ?
« Eh. » l'interpella finalement Nakajima au bout de longues minutes de silence. Son ton agressif ne plut pas au détective qui le toisa quelques instants avant de répondre sur la même intonation :
« Quoi ?
- Pourquoi être devenu détective ?
- ... » Ryunosuke mûrit quelques instants sa réponse dans son esprit puis lâcha :
« Parce que je voulais aider les gens. »
C'était la réponse la plus honnête qui lui était venue. Il cherchait aussi un moyen de devenir plus fort pour retrouver sa sœur, et de s'approcher de celui qui la lui avait enlevée.
« Je voulais retrouver ma sœur aussi, ajouta-t-il sans trop savoir pourquoi il se confiait sur ce genre de choses à cet inconnu.
- Gin ? observa le jeune homme après un petit silence. Elle ne pensait pas que vous la cherchiez. » Oui, ça il le savait. Il l'avait remarqué, puisqu'elle l'avait affronté presque sans ciller.
« Je ne suis pas du genre à abandonner ma famille, souffla-t-il finalement.
- Je n'ai pas de véritable famille, répondit le mafieux après d'être absorbé dans ses pensées. Alors c'est quelque chose que je ne comprends pas bien mais... Je crois qu'au fond elle est contente. Et je suis contente qu'elle n'ait pas été exécutée finalement. » Ryunosuke n'en était pas persuadé mais ne protesta pas. Il laissa l'autre poursuivre sur sa lancée. « Je l'ai à peine aperçue depuis que monsieur Dazai... » Sa voix se brisa sur les mots qu'il ne pouvait prononcer.
« ... s'est suicidé. » acheva le jeune homme aux cheveux bicolores pour lui.
L'autre lui jeta un nouveau regard furibond mais ne répliqua rien. Il ne servait à rien de nier l'évidence. Était-ce le fait de ne pas avoir vu le corps de son modèle qui empêchait le jeune homme d'accepter le fait et de prononcer les seuls mots existants pour qualifier cela ? La vue d'un corps disloqué sur le béton n'était pourtant pas une vue spécialement agréable.
« Vous allez rester dans la mafia ? » interrogea finalement Ryunosuke en jugeant que la question était de mise. Il ne comptait pas vraiment créer des liens entre ce jeune homme et lui-même, mais une part de lui était curieuse de savoir. Osamu Dazai n'était plus, et il ne restait de lui que ses derniers mots et son ultime volonté. À eux de déterminer quoi faire désormais de la tâche que l'homme leur avait laissée.
« Je vous rappelle que monsieur Dazai m'a renvoyé, répliqua Nakajima d'un ton ironique. Il ne voulait plus de moi dans son organisation. Ni de Kyôka.
- Pour votre bien, lui rappela le détective, mais l'autre balaya ce rappel d'un signe de la main.
- Cela ne change rien au fait qu'il m'a viré. Et monsieur Chuuya ne me reprendra pas de bon cœur. Il ne m'apprécie pas. » Il marqua une nouvelle longue pause et finit par déclarer : « Je vais faire ce que monsieur Dazai attendait de moi. Que je protège ce Livre. » Il tourna son étrange regard vers le détective à ses côtés. « Et vous ? Vous comptez respecter sa dernière volonté ? »
Ryunosuke resta silencieux. Le parrain de la mafia était un homme qu'il avait haï de tout son cœur. Un homme qui lui avait arraché sa sœur quatre ans plus tôt, qui avait brisé leurs liens comme si de rien n'était, qui avait compliqué leur vie jusqu'à son dernier souffle. Désirait-il réellement obéir à cet homme qu'il méprisait ?
Puis, il se souvint de son air mélancolique et de leur dernier échange - l'un des seuls qu'ils aient réellement eu de toute manière.
« Pourquoi tenez-vous tant à préserver ce monde ? » avait-il demandé au mafieux alors qu'il se tenait au bord du vide. L'autre l'avait fixé de son œil visible, avant de répondre une phrase que le détective ne parvenait pas encore à comprendre.
« C'est le seul monde où il vit et écrit un livre. Je ne peux pas laisser un tel monde disparaître. »
Ryunosuke ne comprenait pas le sens de ces mots. De qui parlait le mafieux ? Il avait l'impression qu'il y avait tellement de sous-entendus qu'il ne parvenait pas à saisir, tellement de choses que le parrain savait et qu'il ignorait. Mais une chose l'avait touché : la sincérité qui transparaissait dans la voix de l'homme. Son ton était doux, nostalgique et affectueux. Jamais il n'avait parlé ainsi devant lui. Sans doute n'avait-il jamais parlé sur ce ton à qui que ce soit d'ailleurs.
« Je vais le faire, déclara-t-il finalement. Protéger son fichu Livre et ce fichu monde. » Nakajima le dévisagea quelques secondes avant de déclarer, en lui tendant le poing :
« Alors, nous le ferons ensemble. »
Et Ryunosuke scella cette promesse en apposant son poing contre le sien.
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