Chapitre 7
Avec tout ça je n'ai même pas pensé à lui demander son prénom. Est-ce qu'il a un prénom d'ailleurs ? Ça me parait improbable qu'il n'en ait pas, mais en même temps rien n'est logique dans tout ça, alors pourquoi pas ? Il faudra que je lui pose la question tout à l'heure. Du moins s'il daigne revenir. Je l'ai visiblement irrité avec ma question. Même si son bracelet ne parait pas vraiment spécial, mis à part la lumière et le son qu'il a émis, je crois qu'il doit être plus important pour lui que je ne le pense.
Je retrouve Luke dans la cuisine et me dépêche de préparer à manger. J'ai la tête ailleurs tout le long du repas et ne parle pas énormément à mon frère, ce qui n'est pas dans mes habitudes. Il le remarque d'ailleurs rapidement.
— Tu vas bien ? demande-t-il finalement quand je commence à débarrasser.
— Oui ça va, je réponds en souriant pour le rassurer.
Je ne peux pas lui parler de ce qu'il se passe. Il ne comprendrait pas et me prendrait pour une folle. Je ne sais même pas s'il pourrait le voir dans le miroir si je lui en parle. Peut être que je suis la seule à pouvoir l'apercevoir, et je dois avouer que cette possibilité ne m'enchante pas. Si un jour mon frère me surprenait à parler à mon miroir, alors que lui ne peut pas voir qu'il y a quelqu'un de l'autre côté, il me ferait interner sans même me poser une seule question.
— Tu me le dirais s'il y avait quelque chose qui n'allait pas ? insiste-t-il l'air inquiet.
Je me sens soudainement mal de lui cacher ça. Il va vraiment falloir que je fasse un effort pour ne pas penser à ce miroir quand je suis en compagnie de mon frère.
— Tout va bien Luke, dis-je finalement.
J'entoure ensuite sa taille pour un câlin qu'il me rend aussitôt. Il me serre fortement avant de m'embrasser le sommet du crâne et de me relâcher.
— On se regarde un film ce soir ? demande-t-il ensuite.
J'hésite un moment, je pensais aller rapidement dans ma chambre et lui parler. Mais je ne vais pas laisser mon frère pour ça, Luke passe avant tout. Et vu la façon dont l'homme du miroir est parti tout à l'heure, je ne devrais pas être pressée de le revoir.
Je m'installe donc sur le canapé près de mon frère et attends qu'il lance le film de son choix.
Luke s'endort contre moi avant même la fin du film. Il a encore dû avoir une dure journée. Le mois de février dans une bijouterie est l'un des plus fréquentés. Les deux premières semaines par des clients voulant trouver le bijou parfait, et les deux dernières semaines par les destinataires de ces cadeaux qui n'ont pas aimé et veulent changer, ou bien dont la taille est mauvaise. J'essaie donc de le réveiller en douceur et l'envoie au lit quand il émerge enfin. Je n'ai pas envie de continuer à regarder la télévision seule, alors je pars dans ma chambre aussi après un rapide tour dans la salle de bain.
J'ai un moment de doute quand j'entre dans ma chambre. Est-ce que je devrais tenter de lui parler, ou directement aller me coucher ? J'ai peur que si on se met à parler je ne vais pas dormir de si tôt. Or je n'ai pas envie de renouveler l'expérience de ma fatigue extrême le lendemain matin.
Je décide donc d'aller me coucher, et pars en direction de mon lit puisque j'étais plantée au milieu de ma chambre. Mais au moment où je vais m'asseoir sur mon matelas, je jette un coup d'œil au miroir. Et ce n'est pas mon reflet que je vois, ce n'est pas lui non plus d'ailleurs. Je pense que c'est sa chambre. Je peux apercevoir un bout de son lit, et quand je m'approche de ma coiffeuse et que je m'assois sur le tabouret, je vois une forme sous la couverture. Il fait plutôt sombre de son côté du miroir, mais je devine facilement que c'est lui et qu'il dort. Il m'a expliqué que ma chambre lui était apparu comme ça la première fois, et celle d'après aussi. Mais quand que je prends mon téléphone pour vérifier l'heure, je me rends compte qu'il est bien plus tôt que les fois où il frappait. Je me demande vraiment comment ça fonctionne. J'ai une soudaine envie de frapper contre le miroir et le réveiller comme il l'a fait avant ça. Je suis plutôt du genre rancunière. Mais pourtant je ne le fais pas, au contraire, je reste la plus silencieuse possible et continue à observer le peu que je peux voir de son endroit. Il n'y a pas l'air d'avoir d'énorme différence visible avec notre monde, si ce n'est son énorme lit à baldaquin, mais ça c'est simplement différent de mon univers simpliste à moi, je sais bien qu'il existe beaucoup de personnes de ce côté du miroir avec des lits dans ce genre.
— Tu vas continuer à m'observer longtemps comme ça ? sa voix rauque me surprend finalement.
Je me sens rougir à nouveau, prise sur le fait. Je le vois se redresser lentement et s'asseoir sur son lit en se frottant le visage. Il est torse nu à nouveau. Mais je suis malheureusement trop loin pour pouvoir apprécier la vue... Bon sang mais qu'est-ce que je raconte ? J'ai un petit ami, et lui n'est peut être qu'une pure imagination de mon cerveau qui dérive.
— Je pensais que tu dormais, je réponds en évitant de penser à son torse.
— J'étais sur le point de m'endormir mais le miroir c'est mis à éclairer ma chambre. J'ai compris que cela venait de ton côté. Tu allais finir par toquer ? demande-t-il ensuite.
Je vais lui répondre quand je le vois finalement se lever. Il ne porte qu'un boxer et se dirige vers moi sans même prendre la peine d'enfiler quelque chose. Je détourne alors automatiquement le regard jusqu'à ce qu'il s'assoit.
— Alors ? insiste-t-il.
C'est vrai, je n'ai toujours pas répondu à sa question. Je n'ai pas vraiment la réponse. Je n'ai pas la moindre idée de ce que j'aurais fais.
— Je t'aurais surement laisser dormir, je réponds enfin.
— Après m'avoir espionné cinq minutes de plus? dit il en souriant.
Je me pince les lèvres pour éviter de sourire. Je devrais peut-être me défendre et dire que je ne l'espionnais pas, mais je ne trouve pas mes mots.
— Est-ce que tu as un prénom ? je demande finalement pour changer de sujet.
Il sourit, il a très bien compris mon stratagème.
— Comme tout le monde je pense, réplique-t-il simplement.
D'accord j'ai compris, ma question n'était pas superbe mais j'avais le droit de douter. Je ne connais rien de son monde.
— Alors quel est-il ? je l'interroge.
— Shaan, m'annonce-t-il. Et toi ?
Bon, ils ont peut-être des prénoms, mais tout comme la couleur de leur yeux, ils sont vraiment étrange. Shaan, je n'avais jamais entendu ça avant, mais pourtant je me mets à sourire, j'aime vraiment bien.
— Violette, je me présente finalement.
Je pense que son visage reflète exactement le mien quelques secondes avant. Il a l'air d'abord confus puis il se met à sourire. Je pense que mon prénom est tout aussi inconnu pour lui, que le sien l'est pour moi.
— Enchanté Violette.
Mon prénom dans sa bouche sonne comme un vrai délice, et encore une fois, sans raison apparente, je me mets à rougir.
— De même Shaan, je réponds intimidée. Je ne vais pas pouvoir rester très longtemps pour parler, je me lève tôt demain pour travailler, je lui explique ensuite.
Je me demande s'ils ont les mêmes métiers que nous, ou s'ils en ont tout court. C'est peut être une question aussi bête que celle des prénoms, mais je ne peux pas m'empêcher de me demander. Cependant je ne la poserai pas, me rendre ridicule une fois m'a suffit.
— Quel métier tu exerces ? demande-t-il.
S'il me pose cette question c'est qu'ils ont aussi du travail là bas, je n'ai heureusement pas eu besoin de poser la question pour connaître la réponse.
— Je travaille dans un institut de beauté, je suis maquilleuse professionnelle, je réponds donc.
— Tu es vraiment très douée, affirme-t-il.
— Comment peux-tu le savoir ?
— Il n'y a qu'à te regarder. Les traits de ton visage sont tellement bien dessinés. Tes atouts, comme tes pommettes saillantes et tes yeux sont merveilleusement bien mis en valeur, tu es magnifique, conclut-il, ce qui me fait rougir.
— Mer...merci, je bégaye, mais je ne porte pas de maquillage là.
— Oh ! répond-t-il simplement.
Son visage devient rapidement rouge et il se le frotte en regardant ailleurs. Le plus embarrassé de nous deux, c'est visiblement lui. Moi je souris timidement mais à l'intérieur je fonds. Je crois qu'il vient de m'offrir le plus beau des compliments que j'ai reçu jusqu'à présent .
— Je vais te laisser aller dormir, finit-il par dire en brisant le silence gênant qui s'installe.
— Attends, je l'arrête avant qu'il ne se lève.
Il me regarde et attend patiemment.
— Et toi tu fais quoi comme boulot ? je l'interroge à mon tour.
— Je... je suis..., il hésite en regardant partout autour de lui, je te le dirai demain, finit-il sans me répondre.
— Pourquoi demain ? je demande curieuse.
— Comme ça je suis sûr de te revoir, sourit-il.
Je rougis encore une fois et baisse la tête en souriant. Je finis par accepter et lui souhaite rapidement une bonne nuit avant de me lever. Mon reflet dans le miroir revient aussitôt que je me retrouve debout. Il va vraiment falloir que je comprenne comment cela fonctionne. Mais pas maintenant. Je pars donc me coucher, repensant à ce qu'on s'est dit aujourd'hui, et je m'endors un sourire aux lèvres en me rappelant qu'il m'a appelée magnifique, alors que je n'avais pas une seule trace de maquillage sur moi.
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