Chapitre 8

L'alarme, agaçante. Le réveil arrache Yibo à sa courte nuit. Il se dirige à pas silencieux vers la porte de sa chambre, mais se stoppe. Zhan aurait-il pu lui faire suffisamment confiance pour ne pas avoir verrouillé ?

Plein d'espoir, Yibo s'empare de la poignée  et la porte s'ouvre sans résistance. Son visage s'éclaire. La confiance se mérite. Et vraisemblablement, son invité l'a jugé digne de recevoir la sienne.

L'esprit cotonneux, Zhan se manifeste par un gémissement fatigué. Ses paupières lourdes s'ouvrent sur la fine lueur du jour, immiscée dans l'entrebâillement de la porte. Le même doux sourire que celui de Yibo étire ses lèvres.

Il n'est pas venu. Peut-être va-t-il pouvoir commencer à lui faire réellement confiance...

—  Pars dix minutes après moi, recommande Yibo en enfilant son blouson de motard.

—  Dis, Yibo, comment est mon odeur ce matin ?

Prudent, le concerné jauge ses phéromones depuis son emplacement, mais Zhan réduit la distance entre eux et lui offre son cou.

—  Que... qu'est-ce que tu fais ?

—  J'ai besoin de savoir. Je suis avec Zhuocheng toute la journée, je dois m'assurer que mon procédé fonctionne bien.

—  Tu... tu n'as plus peur ?

—  De toi, non.

Ces paroles confortent Yibo dans sa fierté. Grâce à son self-control et à sa bienveillance, ses efforts ont porté leurs fruits et son partenaire est à présent soulagé de ce poids. Il parcourt son cou du bout du nez pour capter l'infime odeur imprégnée.

—  Hm, c'est bon. Il faudrait vraiment, mais alors vraiment, qu'il vienne jusque-là pour tenter de discerner quoique ce soit. Et même moi, ça ne m'interpelle pas.

—  O.K. je suis tranquille jusqu'à ce soir. J'aurai besoin que tu viennes contrôler dans l'après-midi, si tu veux bien. Je dois savoir à quel moment les effets s'estompent.

—  Très bien. Et Zhan ?

Depuis la porte, Yibo scrute son aîné.

—  Ne vas plus dans ce quartier. Trouve un autre endroit moins... sale.

Ces mots sortent de sa bouche comme s'ils dégageaient eux-mêmes une odeur nauséabonde. Zhan acquiesce. C'est vrai, il doit trouver un autre endroit. Mais où trouver un lieu plus propre ? Là se trouve la problématique. Pour une fois, ses collègues vont pouvoir se rendre utiles.

  

Lorsqu'il arrive dix minutes après Yibo, Zhan ne peut s'empêcher de sourire. Pas de ce sourire quotidien, celui qui voile son malaise habituel, non. Un sourire authentique. La réponse à cette nouvelle complicité qu'ils échangent de manière implicite, dans un œillade discrète. Si on lui avait dit hier encore qu'il se serait retrouvé à dormir chez Wang Yibo, il aurait certainement hurlé de rire.

En pleine séance d'entraînement au combat dans une grande salle, Zhan attrape son ami par le bras et s'écarte dans un coin avec lui.

—  Zhuocheng, j'aurais quelque chose à te demander.

—  Je t'écoute ?

—  Est-ce que tu connais un endroit où... où les gens comme nous peuvent aller se distraire sans avoir d'ennuis ?

—  De quel genre de distraction est-ce que tu parles ?

—  Eh bien... tu sais, là où on peut trouver des personnes avec qui... enfin...

—  Oh, du sexe !

Zhan lui jette un regard exorbité. Rieur, Zhuocheng se pince les lèvres et reprend le combat feinté pour ne pas finir par se faire remarquer.

—  Je sais que le Dôme Rouge est un endroit réputé dans le milieu. J'ai déjà entendu ce nom plusieurs fois même si je ne saurais pas te dire exactement ce qu'il s'y passe. Ce qui est sûr, c'est qu'il est exclusivement réservé aux personnalités, tant qu'elles peuvent payer le prix de leur anonymat.

—  Oh, vraiment ?

—  Demande à Haikuan. Il me semble que je l'avais entendu prononcer ce nom.

—  Je... je ne suis pas à l'aise pour...

—  J'ai entendu mon nom ? s'écrie le concerné en pointant son arme factice vers eux.

Le jeune homme attrape sa bouteille d'eau pour s'hydrater un moment et, par la même occasion, participer à la conversation de ses deux camarades.

—  Pourquoi mes oreilles ont-elles sifflé ? sourit-il, taquin.

L'embarras de son coéquipier pousse Zhuocheng à prendre les devants.

—  Eh bien, on se demandait ce que c'était que le Dôme Rouge. Et je me demandais si un séducteur comme toi saurait nous renseigner.

—  Moi, un séducteur ? Ha Ha ! Pour ma part, je n'y suis jamais allé mais j'ai des amis qui y ont déjà été. Apparemment, ils choisissent leur clientèle avec grand soin.

Cette nouvelle information ravit l'acteur oméga ; son regard se met soudain à briller.

—  Donc, de nombreuses célébrités y vont ? continue Zhuocheng.

—  Mes amis ont croisé de nombreuses têtes très connues, en effet. Mais une clause de confidentialité est soumise à l'entrée alors ils n'ont pas pu me dire qui étaient ces personnes.

Zhan dissimule sa mine ravie.

—  Mais pourquoi toutes ces questions ? Vous cherchez vraiment à aller dans un endroit si coquin ? pouffe-t-il sur un ton salace en les attrapant tous les deux par les épaules.

—  Pourquoi, tu voudrais te joindre à nous ? rétorque Zhuocheng.

—  Oh, non. Ces endroits ne m'intéressent plus.

—  Ah oui, pourquoi ? s'étonne Zhan.

Haikuan lance un regard tendre en direction de son jeune duelliste du moment puis part le retrouver.

— Je ne vous dirai rien puisque vous ne me dites rien non plus.

Les deux garçons échangent un clin d'œil complice, satisfaits de leur enquête.

—  Eh, Zhan... n'oublie pas de me raconter comme c'était... !

Gêné, Zhan envoie son coude taper dans l'épaule de son ami, à nouveau hilare.

Ses rires ne passent pas inaperçu aux oreilles de Yibo. Il tourne la tête vers le duo, toujours en train se taquiner. Bien trop à son goût. Ses yeux se plissent.

Cette soi-disant amitié, il la voit d'un mauvais œil. En réalité, depuis que son propre comportement a changé envers Zhan, il ne peut s'empêcher d'être irritable sans aucune raison. Plus rien ne lui paraît rationnel dans sa manière de penser. Tout ce qu'il sait, c'est qu'il ressent une étrange méfiance envers tous les hommes qui approchent Xiao Zhan. Une méfiance sortie de nulle part. Incontrôlable. A moins que ce ne soit pas de la suspicion... Mais quoi d'autre alors ? Peu importe. En y réfléchissant, ces dites raisons n'ont aucune sorte d'importance. Sa carrière est la seule chose qui en a. Et, certes, tant qu'il ne lui cause pas de gêne, veiller sur son partenaire est plutôt une chose normale. Rien de bien inquiétant, finalement.

En proie à un grand stress, Zhan franchit la porte du bâtiment en se triturant les doigts, l'esprit absent. Ses plans de soirée l'obnubilent. Ce Dôme Rouge est sécurisé pourtant, il n'a aucune raison d'angoisser. Il soupire. Ce genre de lieux n'est définitivement pas sa tasse de thé – depuis qu'il a plongé de force dans ce milieu, il en est certain. Et le fait de devoir se cacher en permanence est une source de tension non négligeable. Se détendre dans une telle atmosphère est une tâche ardue.

—  Xiao Zhan !

L'appelé se retourne.

—  Oui, Yibo ?

—  Hm. Je voulais savoir si tu avais trouvé... un autre endroit ? Ou si...

—  Oh, oui ! J'ai fini par trouver.

— ... Vraiment ?

—  Oui, un endroit réputé pour être discret et où les gens comme nous se rendent pour faire leurs affaires sans rencontrer de problèmes.

Plus surpris qu'il ne s'y attendait lui-même, Yibo reste interdit quelques instants face à sa mine soulagée. Il s'éclaircit la voix puis étrangle une étrange amertume.

— O.K. Bonne nouvelle.

—  Je te remercie pour tout, sourit Zhan, une main sur son bras.

Subjugué comme à son habitude par son adorable sourire, le cœur de Yibo bondit au premier contact.

—  Oh, je suis désolé, s'excuse Zhan en retirant sa main comme s'il l'avait brûlé.

—  Hm. C'est bon... File. Tu commences à sentir à nouveau.

—  D'accord, merci.

La déception nouée dans la gorge, Yibo le suit du regard. Une nouvelle fois, son partenaire s'apprête à passer sa soirée dans les bras d'un autre homme. Il est plus que temps de se faire à l'idée qu'il ne sera pas cet autre homme. De plus, entretenir des rapports charnels ne ferait que compliquer leur relation au travail. Et en ce qui concerne le professionnel, son objectif est clair. Se laisser attendrir n'est pas une option possible.

Englué dans son canapé, son esprit surchauffe. Il est incapable de se détendre. Ses doigts restent figés sur la télécommande de sa T.V., zappant sans cesse le moindre programme.

Et s'il lui demandait le nom de l'endroit où il doit se rendre ?

D'un bond, Yibo se jette sur son téléphone mais se freine avant d'envoyer le message.

Une telle question ne paraitrait-elle pas trop intrusive ? Son collègue lui a été clair sur le fait qu'il ne souhaitait pas partager avec lui sa vie privée. La curiosité finit finalement par l'emporter sur la prudence et le SMS décolle plus vite que sa raison.

—  Tant pis. Au pire, il ne me répondra pas.

L'écran se rallume presque aussitôt.

XZ : Dôme Rouge. Tu connais ?

Comment pourrait-il connaître ce genre d'endroit ?

WY : Non.

Dôme Rouge. Yibo porte sa main à son menton, perplexe. Bien qu'il ne connaisse pas le lieu, ce nom ne lui est pas pour autant entièrement étranger. Il jurerait même l'avoir déjà vu quelque part. Peut-être est-il déjà passé devant en voiture ? Non. Un tel repère se doit de rester secret, pas de nom en devanture. Peut-être alors l'a-t-il entendu de la part d'un ami ? d'un membre de l'équipe ? Peu probable.

Il se laisse retomber sur son canapé, troublé. Toutefois, éreinté par leur emploi du temps épuisant, la somnolence finit par l'emporter.

Le Dôme Rouge. Pourquoi a-t-il l'impression que quelque chose ne va pas...

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top