Chapitre 43
Dans sa chambre d'hôtel, Zhan subit les assauts de Fong Jie ; l'agente compte bien lui reprocher son absence du jour un certain temps. Il enfouit sa dignité et ses émotions derrière une série d'approbations bien sages tout en laissant traîner un regard las sur les lumières de la ville, à travers la baie vitrée. Toute résistance est vaine. Lorsqu'il raccroche, il s'assoit au bord du lit, le visage dans les paumes et soupire. L'amour n'est pas que doux sentiments.
Dire qu'en ce moment, il devrait passer la soirée avec Yibo, au cours d'un dîner en tête à tête. Quels qu'ils soient, omégas, alphas ou bêtas, les jolis minois attirent bien des ennuis, semble-t-il. Seungyoun n'est qu'un rappel à l'ordre.
Il se laisse tomber dos sur le matelas et se palpe les joues, songeur. Lui, est loin d'être une beauté, pourtant – c'est tout juste s'il se donne un six sur dix –, il n'est qu'un homme normal. Comment les autres peuvent-ils le considérer comme si séduisant ?
La minute d'après, son iPhone sonne à nouveau. Yibo. Ses yeux roulent déjà. Il se résout néanmoins à décrocher sans dire un mot.
— Zhan Ge ?
— Qu'est-ce qu'il y a, Wang Yibo ?
— Ge... ça va ?
Zhan se redresse sur un coude.
— Pourquoi ça n'irait pas ? Il n'y a rien de grave. Je me suis juste fait engueuler pour ne pas avoir obéi, soupire-t-il en accusant son propre manque de sérieux. Bref, j'ai connu pire.
— ... Écoute, je serai là dans une heure.
— Quoi ? Non, Yibo, je prends le vol de quatre heures, cette nuit. On se verra un autre jour.
— Impossible. Je dois venir. Je dois te parler.
Cette fois, Zhan s'assoit sur le lit, les sourcils froncés.
— Wang Yibo, qu'est-ce qu'il y a ?
— Dans une heure, Xiao Zhan. Attends-moi.
Avant qu'il ne puisse prononcer un mot de plus, la tonalité retentit. Zhan reste ahuri en regardant son smartphone.
— Putain, il se passe quoi... ?
Quelques heures avant
Dans les grandes douches des vestiaires du complexe, les hanches drapées dans une serviette blanche, Yibo se sèche les cheveux devant la glace. Bientôt, il devra aller retrouver ses nouveaux collègues de travail pour son drama actuel. Avec le bruit du séchoir, et perdu dans ses pensées, il met un moment avant de réaliser qu'un inconnu vient de pénétrer dans la salle d'eau. En l'apercevant derrière lui au milieu de la brume du miroir, il pose aussitôt l'appareil et fait volte-face.
— Qu'est-ce que tu fais encore ici ?
— Bo Di, je devais te parler, sourit Seungyoun.
— Et moi, j'ai rien à te dire, grommèle Yibo en se retournant pour coiffer d'un geste grossier sa chevelure humide.
Les yeux de Seungyoun glissent sur son dos dénudé, perlant de quelques gouttes. Son rictus s'affine.
— Bo Di, avant tout, sache que tout ce que je veux c'est passer du temps avec toi. Et je ne compte pas interférer dans ton couple avec Xiao Zhan.
— Hm. Bien.
Désintéressé, Yibo se dirige vers son casier pour en sortir ses affaires. De ce fait, il retire son drap de bain et le balance sur le banc. Seungyoun se mord la lèvre. Son regard s'affute, gourmand, à la recherche des monts tentateurs de son corps, dévore les courbes de son fessier aiguisé. Les angles doux de ses hanches et les fins vallons de sa musculature réveillent tant ses souvenirs que ses ardeurs. Puis, son attention se porte sur la chose, celle qu'il n'avait pas vue depuis bien trop de temps. Longueur alléchante. Le goût de sa chair la plus intime lui revient en bouche.
Conscient de ce qui se cache derrière le silence de son ancien camarade, Yibo se retourne et lui jette un regard ennuyé.
— Ça va ? Tu t'fais plaisir ?
— Aish, tu te mets nu devant moi, où veux-tu que mes yeux aillent ?
— Mec...
Plus blasé qu'autre chose, Yibo secoue la tête et s'habille sans perdre un instant. Sa veste de survêtement enfilée, il se dirige vers la porte.
— Bo Bo...
— Pas le temps.
— Eh bien, prends ce temps pour moi.
La main sur la poignée, Yibo s'arrête et se tourne lentement vers lui. Ses nerfs arrivent à bout. Quand le moment vient de s'emporter, Seungyoun brandit son téléphone sous son nez. Son visage se décompose.
— Que... qu'est-ce que c'est que cette photo ?! s'écrie-il en s'emparant du smartphone pour l'examiner de plus près.
Sa mâchoire se décroche.
— C'est moi et Zhan Ge tout à l'heure sur le parking ! Qu'est-ce que ça veut dire ? Pourquoi on dirait qu'on se... Putain, c'est quoi cet angle de vue ?! C'est quoi ce bordel ?!
Il lève un regard noir sur son ami.
— Me dis pas que c'est toi qui...
— Non. Mais je connais le type qui l'a prise. Je lui ai demandé de me l'envoyer et de ne pas la diffuser sur les réseaux.
Yibo reste abasourdi.
— Toi ? Toi, t'as fait ça ? Toi, tu m'as couvert alors que... O.K. Elle est où la douille ?
— Ha Ha ! Pourquoi tu vois toujours le malheur partout, Wang Yibo ?
— Hyung, j'ai pas de temps à perdre et je te connais. Parle.
Percé à jour - comme prévu -, Seungyoun fait quelques pas circulaires sur le carrelage, mettant la patience de son camarade à rude épreuve.
— Je t'ai dit que tout ce que je voulais était de passer du temps avec toi.
— Ha ! Tu veux un dîner romantique peut-être ? pouffe Yibo, sarcastique.
— Et pourquoi pas ? J'ai changé, tu sais. Moi aussi, je peux être délicat.
Yibo s'esclaffe. « Moi aussi » ... Ainsi, il tente de correspondre à celui qui a déjà capturé son cœur.
— Si tu crois que tu peux lui ressembler, tu te fourre le doigt dans l'œil.
— Ah oui ? Parce que tu penses qu'il n'y a que Xiao Zhan comme gentil petit garçon tout mignon ?
— Si tu étais quelqu'un d'aussi bienveillant que lui, jamais tu n'aurais été là, en train de magouiller comme tu le fais. Maintenant, crache ton venin.
Le malin siffle entre ses dents, les yeux au plafond.
— Tss... Il n'a absolument rien d'exceptionnel, et en plus il est loin d'être le plus beau...
— Cho Seungyoun !
— D'accord, d'accord... souffle l'aîné en levant les mains. Un dîner. Chez moi.
Halluciné par ses deux derniers mots, Yibo lâche un rire bref.
— Putain, tu te fous de moi ? Ton dîner, ça va se finir en fraise chantilly dans les draps.
— Eh bien, libre à toi de nous trouver un restaurant romantique où il n'y aura pas de risque de se faire prendre. Je te rappelle que je suis tout aussi concerné que toi et je n'ai pas envie de me retrouver sur les réseaux, fiché comme étant en couple gay avec mon vieux pote des UNIQ. Je tiens à ma peau.
Yibo froisse une grimace contrariée. Cet enfoiré a raison. Et bien entendu, son argumentaire était déjà préparé. Il relève le menton et le toise.
— Sois franc au moins une fois dans ta vie. C'est juste un prétexte pour me sauter dessus une fois que je serai chez toi.
— Aish ! Bo Di... soupire Seungyoun avec un charme doucereux. Je ne te force à rien, et je ne te forcerai à rien non plus.
— Tu le ferais à tes risques et périls. Et si je t'accorde ça, j'ai quelle garantie que ce type ne balancera pas la photo ?
— Je lui ai promis de l'argent, je lui en ai déjà offert la moitié.
— Tu... tu quoi ?!
— Tu voulais que je le laisse la publier direct ? Si on se met d'accord toi et moi, il ne la publiera pas, sois en sûr.
— Ouais, en gros, si je fais pas ce que tu veux, la photo sera mise en ligne. Encore un coup tordu.
— Ce que je veux, c'est juste passer un moment avec toi, Di Di, sourit Seungyoun, tout miel.
D'un geste brusque, Yibo balaye la main tendre que son ami s'apprêtait à appliquer sur son visage.
— Bordel, écarte-toi ou je vais vraiment finir par t'en coller une.
Il porte son poing à sa bouche entrouverte pour se mordre une phalange, puis recule. La situation est inquiétante. Il doit en parler à Zhan. Les décisions doivent se prendre à deux, il est toujours le premier à le rappeler.
Soucieux, il détaille à nouveau la photo avec une moue contrariée. Sa main sur le trapèze de Zhan, trop proche de son cou ; leurs regards plongés l'un dans l'autre, sans équivoque ; leur proximité physique, très suggestive sous cet angle. Même dans leur position, rien ne penche du côté de l'amitié. Il comprend mieux avec quelle facilité les fans parviennent à capturer des moments clefs pour les tourner en faveur de leur couple préféré.
Plus dérangeant encore que ce manque impardonnable de vigilance de sa part, pour quelle raison ce mécanicien, habitué aux célébrités, serait allé prendre ce genre de photos à ragot ? au risque de perdre son emploi ?
Un rictus mauvais pique ses lèvres. Pure manipulation de Seungyoun, tout comme il le craignait. S'il voulait garder le secret, ce n'était pas par plaisir. Derrière les visages angéliques, de vrais démons se cachent.
— Je vais réfléchir, crache Yibo en tournant les talons.
— Ouais. Dis plutôt que tu vas aller lui en parler pour avoir son accord ?
— Ne me pousse pas à bout, Cho Seungyoun.
— D'accord, mais décide-toi vite. Tu as jusqu'à minuit.
— Y'a pas à dire...
— Quoi ?
— T'as changé.
— C'est vrai ? s'étonne Seungyoun, tout sourire.
— Ouais.
Dans l'encadrement de la porte, Yibo se retourne légèrement.
— T'as plus une once de bienveillance.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top