6

Je m'assois sur l'herbe derrière le lodge, où personne ne peut me déranger. Je plonge mon regard dans la lune attrayante qui me réchauffe instantanément.

Elle a toujours été ma protection et mon guide dans cette vie affreuse.

Chaleureuse, la lune m'a accueilli depuis petite me protégeant des démons terrifiants de ma mère.

Je soupire et m'allonge complètement, regardant le ciel magnifique du Kenya. Je me perds dans la beauté céleste en contemplant l'infini, lorsque je sens sur ma droite qu'il s'installe près de moi.

– Qu'est-ce que tu veux ? lui craché-je.

Ethan étire son dos et s'allonge aussi, j'installe alors une distance raisonnable entre nous. 

– Je n'ai pas le droit d'être ici ? répond-il, d'un air innocent.

Je roule des yeux.

– Quel hasard, tiens !

Du coin de l'œil, je vois ses lèvres s'étirer en un sourire au coin, et je replace ma tête correctement pour me perdre à nouveau dans la voie lactée.

– Tu aimes bien les étoiles ?

Je fronce les sourcils, je rêve où Ethan essaye de faire la conversation ?

– Sérieusement, qu'est-ce que ça peut te foutre ?
– Qu'est-ce que t'es rabat joie !

Je laisse le silence planer, et une pensée me traverse l'esprit, Ethan a tout entendu.

Il va me prendre pour une faible.
Il va utiliser mes confessions contre moi.

C'est donc pour ça qu'il me parle ?

– Tu n'as même pas intérêt à me prendre par pitié Ethan.

Il racle sa gorge et je le sens se mettre de profil pour me regarder attentivement. Il me trouble mais je tente de faire abstraction à cela.

– Pourquoi aurais-je de la pitié pour toi ?

Son ton ne transmet aucune émotion, ce qui m'énerve.

– Rien, laisse tomber, ordonné-je, sèchement.
Pour ce que tu as dit ?
– Laisse tomber, répété-je.

Malgré tout, il continue de parler, et je me retiens de ne pas lui sauter dessus pour l'étrangler à mains nues.

– Je suis loin d'avoir de la pitié, si tu veux savoir.
– Je t'ai dis que je ne veux pas.

Ma voix tremble de colère, et je tente de me contrôler.

– En fait, c'est plutôt l'inverse. Je n'aurais jamais pensé que tu as vécu une enfance difficile. C'est plutôt admiratif, je comprends maintenant pourquoi tu es à fond dans ce concours, c'est plus qu'un projet pour toi.

Je me tourne de profil et le regarde, écoeurée.

– Je n'ai pas besoin de ta compréhension, Ethan. Je suis la femme que je suis maintenant, le passé ne m'appartient pas.
– Au contraire, il fait de toi, la personne que tu es à présent.

Il se racle la gorge et lève les yeux vers le ciel comme pour se donner du courage, puis me dit d'une voix rapide :

– C'est dur à dire, mais tu es une battante.

Je ne sais pas si je dois prendre ces paroles comme un compliment mais je reste sur mes gardes, et me retourne sur le dos.

– Comme je te l'ai dit, je ne veux rien savoir.
– Laisse-moi finir.

Il se remet droit aussi, tandis que je cueille une brindille d'herbe et joue avec, en faisant semblant de l'écouter.

– Tu es certes forte, mais sache que je gagnerai, je n'ai rien fait cette semaine, parce que j'ai tâté le terrain. Donc, soit prête.

Un petit sourire se forme sur mes lèvres, je reconnais le Ethan compétiteur.

– Je commençais à m'ennuyer, lui dis-je en fixant ses pupilles.
– Quand je veux quelque chose, Elena...

Je relève le menton, attentive.

– Je l'ai.

Intimidée, je tente de ne pas rompre le contact avec ses yeux qui s'attardent sur mon visage tout entier, ses iris noisettes sont devenues plus foncées.

Je reconnais sa détermination dans son regard, et j'accepte le défi qu'il me lance.

Je ne le laisserai pas remporter ce prix. Pour rien au monde.

– On verra ça, dis-je en fixant ma gardienne.
– Tu es au courant que je te bats dans tous les domaines ?

L'arrogant de retour.

Ma main droite qui est tendue tout le long de mon corps joue avec la verdure fraîche.

– Tu as un égo surdimensionné.
– Non, je sais seulement de quoi je suis capable.

Son bras se tend aussi, sa main gauche se trouve à côté de la mienne.

– Tu te sur-estime, chuchoté-je.
– Et pas toi ?
– Je ne suis pas arrogante.

Mes doigts sont naturellement attirés par les siens, je bouge lentement pour résister.

– Tu en es sûre ? Tu crois tout savoir.
– Tu t'es décris là, Tarzan.

Un rire rauque sort de sa gorge et je retiens le mien.

– Que le meilleur gagne Elena.

Je retiens ma respiration lorsque ses doigts entrent en contact avec les miens.

– Ou la meilleure.

Je la relâche lorsque mon index est contre le sien, son contact est froid, il m'électrise. Le dos de sa main est posé contre le mien, il fait deux fois ma taille.

Je pince mes lèvres lorsque ses phalanges sont totalement contre les miennes. Je reviens à la réalité lorsqu'il feinte de vomir.

– Dégage ! dit-il en se relevant.

Je l'imite aussi.

– Je vais devoir me laver avec de l'eau de javel, putain !

– Mais c'est toi qui m'a touché avec tes grosses pattes d'ours là, Dieu seul sait ce que tu as touché, crasseux !
– Elena, tu as le tétanos, tu as du culot de dire ça, dit-il d'une voix calme.
– Mais non ! Putain, je te déteste, arrête de dire ça !

Je feins d'avoir des frissons désagréables partout dans mon corps en bougeant dans tous les sens.

– Non, ce n'est pas vrai.

J'écarquille les yeux lorsqu'il s'approche de moi.

– Quoi ? articulé-je, difficilement.
– Tu ne me détestes pas.
– Non, bien sûr que non ! Ethan, je te hais, complètement, plus que tout.
– Pourquoi ?

Je reste stoïque face à sa question inattendue.

– Quoi pourquoi ?
– Pourquoi tu me détestes ?
– Toi, pourquoi tu me détestes ? Moi, j'ai tellement de raisons !
– Cite-les moi donc !

Retenez-moi.

– Tout va bien ? On a entendu du bruit, demande Mary qui arrive sur le côté.
– Très bien ! cris-je, agacée.
– Tout va bien ! dit-il sur le même ton. Je retourne sous mon arbre.
– Oui, c'est ça, retourne dans ta tanière, et reste-y ! lui dis-je tandis qu'il est dos à moi. Moi je retourne dans mon lit, bien douillé.
– Je dors à la belle étoile moi, au moins ! crit-il, quelques pas plus loin.

Je compte répondre mais Mary me coupe en me demandant en ricanant, d'arrêter de jacasser comme une poule.

Je rentre dans le lodge d'un pas lourd, ferme la porte derrière moi et je me laisse glisser contre elle.

Mon cœur bat à la chamade, mes joues sont d'une chaleur fluctuante et je ne sais pas pourquoi...

***

Le projet prend enfin forme, j'ai pris beaucoup de clichés de plusieurs femmes de la tribu et j'ai même incorporé des vidéos dans mon dossier.

Ethan travaille aussi de son côté, nous sommes toujours assis tous les deux sur la table à écrire.

Même s'il profite plus que moi avec la tribu, je vois son travail avancer et à la vue de l'introduction que j'ai pu apercevoir d'un coup d'œil, il y va fort, très fort même.

Certaines femmes lui ont enfin accordé leur confiance, et il peut enfin jouer avec les petits. Mais la relation entre Faith et lui est toujours aussi électrique, même si elle ne crie plus lorsqu'elle le voit.

On a pas parlé de ce qu'il s'est passé, il y a quelques jours de cela, bien trop concentré. Mais l'ambiance est meilleure, je me suis rendue compte qu'il avait raison sur un point : si je paniquais autant, c'était parce que je n'avais pas confiance en mon travail.

J'ai fait donc la veille une prospection, j'ai mis toutes mes qualités sur mon carnet et mes défauts lorsque je travaille. Et il se trouve que je suis, depuis, plus efficace et moins stressée.

Comme maintenant, Ethan tente de m'apprendre chaque jour, qu'il faut vivre chaque moment.

Nous sommes à notre deuxième safari qui est consacré cette fois uniquement aux animaux sauvages.

Et même si je suis impressionnée par la nature grandiose de ces êtres, je reste tout de même professionnelle en écoutant attentivement notre guide.

– Tu prends des photos qu'avec ton téléphone, remarqué-je.
– Je veux pouvoir les garder.
– Tu sais qu'avec ton appareil, tu pourras te les envoyer ? me moqué-je en capturant une magnifique girafe qui prend soin de son petit. 

Il me regarde faire et sourit.

– C'est trop professionnel, j'aime bien avec mon téléphone.

Je secoue la tête et continue de prendre des photos que j'incorporerai dans mon dossier. Je veux qu'une petite page apparaisse concernant le pays du Kenya en plus de la tribu. Mais le visage de mon voisin me perturbe trop.

– Pourquoi tu souris comme ça ?

Il hausse les épaules.

– Je ne sais pas, je suis bien. J'aime bien profiter de chaque moment de la vie.
– Tu parles comme un vieux.

Il ricane.

– Non, je trouve ça dommage, que tu ne t'en rends pas compte de la beauté de la vie.

Et il se remet à regarder le paysage attentivement.

Je relève mon appareil, mais après hésitation, décide de le poser et de figer ces instants dans le cadre de mes souvenirs.

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Ig : Lynamimy

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