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"Par quoi devrais-je commencer ?

Mon âme noircie ?
Mon cœur détruit ?
Ou mon corps en miette ?

Je ressens chaque jour, l'étouffement qui m'empêche d'avancer. L'épée qui transperce mon cœur pour atteindre la source qu'est mon âme. Et la noirceur qui renferme mon esprit qui m'empêche de me sortir de là.

Comment vaincre la dépression qui, à chaque respiration, me coule vers les abysses et m'éloigne de la lumière ?

Comment vivre alors que je crie sous chaque sourire que je lance ?

Faire semblant d'aller bien me tire de plus en plus dans les ténèbres, alors devrais-je me laisser guider ?

Comment surmonter les vues atroces qui me hantent ?

L'envie de vaincre cette guerre sanglante me prend aux tripes, mais comment la gagner ?

Faut-il pardonner les coups que ma mère m'a infligés parce qu'elle était dans un état second ?
Pardonner mon père qui n'a pas su prendre ses responsabilités ?
Ou me pardonner de ne pas avoir le courage de partir de cette vie ?

Comment sortir de cette spirale interminable ?
Comment cesser de survivre pour enfin vivre.

Seigneur, transforme les cornes du diable qui m'encerclent en ailes d'anges qui m'emporteront à leur clarté.

Comment sortir de ce tunnel et desserrer ce nœud d'angoisse qui m'étrangle ?

Suis-je condamnée ou me reste-t-il un Dernier Espoir ?"

03h45, 13 novembre 2011.

Je ferme mon journal, le cœur lourd et m'allonge sur mon lit en serrant mon coussin.

J'avais douze ans, c'était il y a treize ans et pourtant, j'ai l'impression que ce nœud d'angoisse qui m'étranglait, est toujours présent. 

Je prenais des cours d'écriture, dans un atelier, et la professeur nous avait conseillé d'écrire nos peines sur le papier, j'avais pu imager parfaitement ce que je ressentais.

Pourtant en lisant cela, ce n'est pas de la fierté que je ressens pour la petite Elena, face à ses talents d'écriture, mais de la peine.

Les événements de cette nuit me reviennent en mémoire, et ils étaient loin d'être joyeux.

Je grimace et ressers plus fort mon emprise.

Je m'étais réveillée en sursaut en entendant des bruits insoutenables de la chambre d'à côté, des gémissements.

Les yeux grands ouverts, je tentais de me boucher les oreilles, mais je les entendais encore.

Je pris mon casque, et tapais "musique forte" dans la barre de recherche de Youtube, mais même en ayant du métal dans les oreilles, je pouvais imaginer ce qu'il se passait.

Je me levais en grognant, pas encore...

Je sortais de ma chambre sur la pointe des pieds et retenais un vomissement lorsque je vis la porte de la chambre de ma mère à moitié ouvert.

– Continue !

J'écarquillai les yeux et plaçai la main sur ma bouche.

Les grognements du type était insupportables, je m'approchai d'eux et vis l'horreur. Ma mère était à quatre pattes et un homme lui tirait les cheveux.

Une larme coula, puis une autre.

Je savais, en effet, ce que ma mère faisait, j'ai baigné dans cela, entendre ses cris, et ceux de ses partenaires.

Ils étaient parfois même plusieurs...

Je lui avait demandé des maintes et maintes fois pourquoi elle faisait cela et sa réponse était toujours là-même :

"Je gagne bien ma vie, ma fille, mais toi, ne t'avise jamais de prendre cette route !"

J'ouvrais la porte tandis que celle-ci grinçait. Je restais debout, stoïque, fixant ma mère et l'homme gémir, tels des animaux.

Ce dernier me remarqua et feint d'être surpris, il prit un coussin et cacha son appareil génital avec.

Je ne tentais même plus de me cacher les yeux tant j'étais traumatisée et écoeurée.

Ma mère semblait à nouveau être dans un état second car lorsqu'elle me vit, elle éclata de rire.

– Mais va dormir, bébé !
– Mais putain, Marine ! T'as un môme !

Il chercha son pantalon tandis que ma génitrice le supplia de ne pas partir.

– Ta fille nous a vu, t'as un problème ou quoi ?! s'énerva-t-il.

Elle semblait désolée, pour lui.

– Va dormir, petite conne ! me menaça-t-elle.

Elle se leva, nue, sans prendre la peine de s'habiller ; elle était bien trop défoncée pour cela.

Ma mère lui tenait le bras, mais son client se leva et la poussa. Il se dirigea vers la porte, et tremblante, je m'écartai pour le laisser passer.

Il me lança un regard désolée, et je remerciai Dieu que celui-ci n'était pas méchant comme certains.

Ma mère me poussa violemment et courut après lui, le peignoir à moitié fermé.

– Attends ! Et mon pognon ?

Je marchai dans le couloir et les regardai, le corps frêle.

Je vis l'homme lui jeter à la figure des billets d'Euro, ma mère l'embrassa mais il ne lui rendit pas son baiser, puis il claqua la porte derrière lui en la traitant de folle.

Marine resta sur la pallier, le dos tourné, elle embrassa les liasses et ricana.

Effrayée, je reculai.

– Elena, Elena...

Son ton menaçant me fit frissonner.

– Qu'est-ce que tu ne comprends pas dans tu dois rester dans ta chambre ?

Elle se retourna et l'air content qu'elle avait abordé s'était remplacé par de la colère.

– Vous m'avez réveillé, désolée, m'excusé-je en tripotant mes mains.

Je ferme les yeux, mais les images d'il y a quelques minutes apparurent, je les ouvris rapidement, mais ma mère était trop proche de moi.

Elle tenait fort mon haut de pyjama et cria :

– Imagine s'il ne m'aurait pas donné mon argent !

Puis elle me le jeta à la figure.

– Je devais gagner plus ! Il nous restait trente minutes, petite merde !

Puis sans que je ne puisse comprendre quoique ce soit, ma joue était devenue chaude, rouge. Elle venait de me claquer.

La goutte salée qui se descendait, se mélangea avec ma joue brûlante.

Elle me prit par les cheveux et m'entraina dans ma chambre.

– Tu vas voir ce que je vais te faire, sale emmerdeuse !!

Ses yeux étaient rouges, je priais le Bon Dieu de m'aider, mais ce soir-là, elle était bien trop enragée.

L'oxygène paraît inexistant, je prends une grande bouffée d'air, mais ma respiration commence à se saccader. Je tente tant bien que mal de me lever de mon lit, je dois absolument vomir.

Alors que ma vue commence à se troubler, je pose mon coussin, mes larmes ne coulent plus, l'eau salée s'est transformée en une obstruction qui bloque ma gorge.

J'accoure dans ma salle de bains, descends la clanche et je rejoins les toilettes en tenant à peine sur mes pieds.

Une brûlure acide remonte le long de mon oesophage, je ressens encore ce trou béant dans mon être qui est empli de noirceur.

Ne pense plus au passé, Elena.

Je tente, mais sans succès.

Ma mère tira mes cheveux et me traîna sur le sol froid de ma chambre.

– Calme-toi Elena, respire, me répété-je en avançant.

Elle prit le coussin à ses côtés et m'étouffa avec.

Un mauvais souvenir emmène un autre, alors comment sortir de cette boucle infernale ?

Je rentre dans les toilettes, ferme la porte à clé. Ma crise d'angoisse m'enveloppe complètement et je n'ai pas ma ventoline.

Je tombe à genoux devant la cuvette, et un liquide infect remonte ma gorge pour venir se jeter dans l'eau. Je vomis à m'en éclater les vaisseaux de mon visage.

Mes mains tiennent si fort la lunette, que pendant un seul instant, je pense que celle-ci va se briser tout comme l'état de mon intérieur.

Je continue de déverser toute ma douleur, ma peine et mes peurs en espérant me sentir mieux, vide.

Mes démons continuent de me chuchoter les choses affreuses que j'ai vécues et ils me font  revivre encore des scènes que je souhaite enfermer dans un coffre qui toucherait les profondeurs de l'océan.

Mes cauchemars doivent se trouver dans les profondeurs de l'enfer, et non en moi.

Je suis tellement emplie de noirceur et d'atrocité que je me demande si je dois prendre la couronne de la reine des enfers.

Je ressens dans mes veines, une chaleur nocive qui enflamme toute ma personnalité.

Je m'assois sur le carrelage, j'essuie mes larmes et tiens ma tête si fort que je grimace.

Je ne dois pas retomber.

Je tire la chasse d'eau, pose ma tête contre le mur et me chuchote :

– Tout va bien, c'est fini.

Je prends une grand inspiration et expire.

– Tout va bien, Elena.

La vue de ma mère, il y a quatre jours, a été insupportable pour moi, je l'ai directement emmené à nouveau, dans le centre de désintoxication même si elle me suppliait de ne pas le faire, mais elle était bien trop faible pour se débattre.

Je détache mes cheveux pour refaire ma couette, j'ai passé des années à vaincre cette dépression sévère qui était due à un stress post-traumatique.

Il en est hors de question que je replonge seulement parce que le passé souhaite me hanter.

Je suis devenue la femme que je voulais être, journaliste, forte, assoiffée de savoir et un entourage plus qu'admirable.

Je me lève, la tête étourdie et décide d'ouvrir mon journal pour écrire mes plus sombres pensées.

J'ai déposé un arrêt maladie d'une semaine, bien trop déconcentrée pour aller travailler.

J'ai besoin de repos.

Je ne peux pas retomber dans les entrailles de l'enfer, pourtant une partie de moi me crie de tout abandonner et de me laisser mourir.

Parce que la petite Elena a été sans arrêt, poignardée, par l'être aimé.

Mais je ne suis plus cette jeune fille.

J'en suis consciente que la vie n'est pas facile, que nos chemins seront toujours semés d'obstacles mais on ne peut baisser les bras.

Nous sommes des combattantes, et nous le resterons.

Alors, effectivement, il reste toujours un Dernier Espoir.

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Ig : Lynamimy

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