Les habitantes sortent du lodge et le bruit sourd qui tue mes tympans s'accentuent. Mon regard disparaît dans le vide tandis que Ethan tente à nouveau de me parler.

Je serre des dents, je fais un énorme effort pour ne pas l'égorger.

Tout est de sa faute.

– Elena...

Je secoue frénétiquement la tête en m'allongeant, épuisée.

– N'ose même pas me parler, Ethan, craché-je en posant une main sur la serviette qui est posée sur mon front.

Je fronce les sourcils en retenant mes larmes qui menacent de couler.

– Tu n'as pas le droit.

Je me maudis lorsque j'entends ma voix se briser.

– Je ne comprends pas..., je...
– Il n'y a rien à comprendre, Ethan ! C'est toi qui m'a poussé à nager dans ce maudit lac ! C'est toi qui m'a noyé ! C'était ta ruse c'est ça ?!
– Mais quoi ? Qu'est-ce que tu racontes ? Tu crois que...

Je le coupe en toussotant.

– Je ne crois rien du tout, je ne veux pas te parler, tu comprends ça ?!

Ses épaules s'affaissent et il éteint la lumière pour venir s'allonger à mes côtés. Je me crispe, en serrant fort un coussin, puis me retourne sur le côté, dos à lui tandis qu'une goutte d'eau de tristesse coule de mon œil gauche.

Il racle sa gorge et je me mords la lèvre inférieure.

Mon rêve s'arrête ici.

Une autre larme coule, et un sanglot lutte pour s'échapper.

Je devais prouver à mon entourage, à ma mère que je n'étais pas comme elle, que j'allais réussir, et ce concours était la seule façon de leur démontrer tout cela, mais tout s'est arrêté, en un claquement de doigts.

Je me retrouve alors, désemparée, et je m'endors avec la mélancolie qui a remplacé la colère.

***

Je n'ai pas dormi de la nuit, je n'ai pas arrêté de vomir dans un sceau que Faith m'a gentiment ramené.

La docteur a conseillé à Ethan de s'éloigner de moi et de dormir dans un autre endroit pour éviter d'être contaminé mais il a insisté pour rester, pour "s'occuper de moi', selon lui, mais le mal est fait.

Pendant que je vomissais, malgré moi, Ethan me tenait les cheveux.

Je me réveille avec un grand mal de tête, et découvre le lit vide, puis j'accours aux toilettes en entendant mon ventre crier.

Après m'être lavée les mains, je retourne m'allonger, en boitant.

Mes yeux sont bouffis tant j'ai pleuré, Ethan a fait semblant de ne rien entendre et c'est bien la seule chose pour laquelle je peux le remercier.

Je me recroqueville avec la couverture sur moi lorsque la porte s'ouvre sur lui avec un petit-déjeuner en mains.

– Bonjour, me salue-t-il timidement.

Je ne lui adresse même pas un regard.

– Elles t'ont préparé ça, dit-il en posant l'assiette à mes côtés. Manges, t'as besoin de prendre des forces.

Il prend ensuite la serviette pour la mouiller mais je m'écarte de lui, du mieux que je peux.

Il soupire et se dirige vers la baignoire puis revient pour la mettre sur le front mais je la lui arrache en riant ironiquement.

– Ne fais pas semblant de t'occuper de moi, Ethan. T'es bien heureux !

Debout, il croise des bras.

– Mais, tu m'as pris pour qui ?

Je souffle et mets mes deux mains sur ma tête.

– Arrête de faire semblant, je suis fatiguée. Tu m'as emmené au lac pour que je tombe malade, c'est ça ?
– T'es devenue parano !

Le ton de sa voix augmente et malgré le peu d'énergie qu'il me reste, le mien aussi.

– Non, ça ne va pas, Ethan ! Je ne participe plus au concours par ta faute, et tu gagnes par défaut ! C'était trop important pour moi !
– Mais je le sais, Elena ! Je suis désolé, mais ce n'est pas ma faute, si j'aurais voulu que tu tombes malade, tu crois que je serais resté à ton chevet, hier ?!

Je pince l'arrête de mon nez.

– Mais c'est peut-être ton vice, tu n'es qu'un vicieux, Ethan ! Tu as eu ce que tu voulais, je ne participe pas au projet, tu as gagné ! Depuis le début, tu réclames que tu vas remporter le prix, et bien, elle était là, ta ruse !

Agacé, il s'accroupit et ébouriffe ses cheveux.

– Oui, je voulais le gagner, mais pas comme ça ! Ça sert à quoi de gagner si je n'ai pas de concurrent !

Cette phrase ajoute un pincement au cœur, je dois être son adversaire.

– Ethan. Je ne participe plus parce que tu m'as demandé de me lâcher, de profiter, alors que je ne le fais jamais, parce que je sais pourquoi ! Regarde, maintenant où j'en suis, à cause de toi.

Je déglutis, et il tente de me prendre la main, mais je la lui retire en laissant échapper un énième sanglot.

– Alors, va faire la seule chose que tu sais faire de mieux, te vanter auprès de tout le monde que tu as gagné !

Face à mon attitude froide, mon collègue se relève, le visage fermé et se dirige vers la porte pour finalement la claquer juste avant de sortir.

Je jure et essaye de manger un morceau avec ma gorge en feu.

***

Il est vingt et une heure passé et Ethan n'a pas montré une seule fois sa tête, j'ai été d'une part rassurée mais de l'autre, angoissée, car je sais qu'il profite de finir son projet.

Je tripote mes doigts en me demandant quand est-ce qu'il va revenir, j'ai surement été dur dans mes propos mais je n'arrive pas à accepter le fait que tout soit terminé.

Les femmes sont venues me rendre visite pour voir comment j'allais et pour me doucher, mais, bien trop triste, je n'ai pas voulu prononcer un mot.

J'aperçois la poignée de la porte descendre et je me replace correctement, il rentre avec un bol de fruit et me le dépose près de moi. Je constate qu'il n'a ni son ordinateur, ni son appareil photo et les battements de mon cœur sont soudainement plus calmes.

Il s'allonge ensuite et s'endort sans prononcer un seul mot.

Je tente de fermer les yeux au bout de quelques heures, mais une envie de vomir me surprend. Je finis par éclater les vaisseaux de mon visage tant je régurgite.

Je grimace lorsque les douleurs de mon ventre se font plus fortes, Ethan tente de m'aider, mais je le repousse encore.

Fatih et Mary entrent dans la pièce et accourent vers moi.

– Laissez moi faire, je prends le relai.

Je secoue la tête en toussant.

– Restez avec moi, les supplié-je.

Elles n'hésitent pas et pendant que Faith arrose mon cou d'eau, Mary me prépare un médicament.

– Je vous laisse, prenez-soin d'elle, annonce Ethan, près de la sortie.

Je retrouve progressivement mon calme, une des leaders me tend à boire, pendant que je remarque du coin de l'œil que mon ancien concurrent semble impuissant.

Ethan ferme la porte du lodge et l'amertume qui habite son visage me laisse perplexe.

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