Partie 3 : tu vas faire quoi ?
Sa peau lui tirait à cause des larmes qui avaient maintenant séchées sur son visage et son cou. Il alternait ses réflexions entre des questions existentielles comme le pourquoi de la vie et le but ultime de naître pour ensuite mourir. Pour ensuite ressasser le combat avec Kakusu et Hidan, les membres de l'Akatsuki et déverser une haine sur eux que Shikamaru n'aurait jamais cru pouvoir ressentir un jour ; l'apeurant et l'obligeant à répéter à nouveau son mantra "il faut que ça cesse, il faut que ça cesse ..." jusqu'à ce que ses mains s'engourdissent à force de les serrer si fort que le sang ne passait plus dans ses veines.
Après coup, il sentait le poids d'un immense épuisement, le faisant douter de lui et recréant de nouvelles larmes qui coulaient, connaissant le chemin, pour finalement en arriver à la fameuse question : "Que suis-je censé faire ?" et se sentir à nouveau nul et impuissant, pour finir par replonger dans un engourdissement reposant où il ne pensait plus à rien et fixait un point flou devant lui pour s'échapper de la réalité. A ce moment là, les larmes séchaient à nouveau et le cercle vicieux reprenait sans cesse.
Shikamaru entendit soudain la porte coulisser en face de lui. Il ne prit même pas la peine de relever la tête se doutant qu'il s'agissait de sa mère qui lui amenait certainement son repas.
Seulement, la personne resta interdite à l'entrée alors qu'elle refermait la porte derrière elle, ne semblant pas vouloir le déranger. Shikamaru fut bien obligé de relever la tête afin de savoir qui venait déranger son affliction.
En face de lui, figée, se trouvait une amie de longue date, qu'il n'avait pas vu depuis quelques mois maintenant. C'est à peine s'il la regarda plus de deux secondes, agacé, puis replongea sa tête dans ses genoux. Comment osait-elle entrer dans son intimité de la sorte ? Il ne voulait voir personne.
Elle s'avança de deux pas, sans empressement, afin de ne pas acculer son vis à vis. Elle murmura dans un souffle, choquée, à la vision de son, habituellement agaçant, ami se trouvant dans cette position de faiblesse :
"- Shikamaru..."
Il ne releva pas la tête et demanda froidement, sa voix rauque subissant des ratés tellement cela faisait longtemps qu'il n'avait pas parlé :
"- Qu'est-ce que tu fais là, Temari ?"
Elle avança de deux pas de plus, se retrouvant presque devant lui, à un mètre, puis répondit :
" - J'ai pris la route dès que j'ai su..." Ne sachant pas quoi ajouter, elle baissa la tête, respectant la douleur et la tristesse de l'autre.
Un ange passa et après de longues secondes, Shikamaru releva finalement la tête, lui crachant avec aigreur, en entendant même un ricanement mauvais sortir de sa gorge :
"- Ce n'était vraiment pas la peine de te donner tant de mal."
Elle regarda fixement son ami et lui répondit, d'une voix sûre :
"- Shikamaru, tu ne peux pas rester seul. Maintenant que je suis arrivé, je reste, je suis là pour toi."
Il ne se calma pas, répondant d'une froide réplique :
"- Ce n'est pas de toi dont j'ai besoin."
Elle plissa les yeux et sans s'offenser de sa réponse, vint s'asseoir à ses côtés, le dos contre le mur. Son bras touchait la jambe relevée de Shikamaru et son épaule vint se positionner contre celle du brun, tel un appui discret mais solide.
Shikamaru n'apprécia pas cette proximité gênante mais ne bougea pas. Incapable de faire un mouvement tellement il était épuisé. D'ailleurs Temari avait de suite remarqué la fatigue et les cernes noires qui entouraient les yeux du jeune brun. Elle s'en inquiéta intérieurement réfléchissant ardemment à une idée qui pourrait lui permettre de dormir mais en dehors d'une tisane que sa mère s'occuperait de toute façon de lui amener, elle n'eut aucune autre idée. Elle constata donc :
"- Tu as besoin de dormir."
Il rétorqua dans un sourire mauvais, posant sa tête contre le mur :
"- Ouai et toi tu devrais être chez toi. Mais quelques fois, on a pas toujours ce que l'on veut."
Temari s'inquiétait aussi de son ton aigri. Cela ne lui ressemblait tellement pas. Il pouvait être sarcastique, oui. Moqueur, deux fois oui. Mais aigri ce n'était pas une caractéristique de la personnalité de son ami de Konoha. Elle lui demanda donc :
"- Tu crois vraiment que ton sensei apprécierait te voir comme ça ?"
Les dents de Shikamaru grincèrent et la fureur repris à nouveau le contrôle de ses pensées et de ses paroles, criant d'un ton froid et moralisateur :
"- Vous commencez sérieusement à m'énerver tous avec vos belles paroles. Vous sortez des phrases toutes faites, sans pertinence, des phrases qui ne veulent rien dire. Nous sommes des ninjas. C'est un fait, nous perdons des compagnons pour sauver d'autres vies : soit, je veux bien l'accepter. Avoir à faire le deuil de la perte d'un être cher : je m'en démerdes aussi ! Mais vos phrases ridicules là ; je m'en passerais volontier ! Alors Temari, où tu finis par me dire ce que tu fais là où tu déguerpis du plancher. Car s'il y a bien quelqu'un qui sait ce que ça fait de perdre du monde en route c'est toi et ton petit ton mielleux, je n'y crois pas une seconde." Il retrouva un voix plus calme. "De plus, je préférerais rester seul."
Shikamaru s'était levé pour dire tout ça, dépassant sa lourde fatigue, verbalisant ces paroles autant avec ses gestes qu'avec sa bouche. Et sans qu'il ne s'en rende compte, au moins il avait accepté de se lever et de discuter même si c'était pour déverser sa colère. Cela rassura la blonde du pays du vent car même s'il était en train de la fusiller du regard. Tout n'était pas perdu. Au moins, il arrêterait de se plonger dans le silence, au moins il répondait à la stimulation d'une émotion.
Par contre, et cela créa un sourire au coin des lèvres de la jeune femme, son ami ninja avait encore une fois été époustouflant de perspicacité. Elle devait le reconnaître. Il avait bien compris qu'elle avait une idée bien précise en tête en venant le déranger de la sorte dans son recueillement. Seulement, la jeune femme ne souhaitait pas lui avouer qu'elle avait peur de sa réaction et qu'il parte se venger sous le coup de la colère, en perdant son sang froid.
Dès qu'elle avait eu l'information à Suna qu'Asuma avait perdu la vie au combat et qu'elle avait découvert les détails et le contexte de la mort du sensei de Shikamaru, elle s'était mise en route. Elle avait pris néanmoins le temps de prévenir le Kazekage qu'elle devait partir en toute urgence mais elle ne mentionna la secrète raison de son départ à personne. Après tout, Temari était en charge des affaires étrangères et était le ninja dédié aux relations d'alliance avec Konoha, alors Gaara n'avait pas été trop curieux au sujet de son départ imminent.
La raison de son départ urgent résidait dans la crainte de la jeune femme d'arriver trop tard, à cause du long voyage de trois jours qui la séparait de Konoha. Ce fut donc dans un sacré soulagement qu'au bout de ces longs jours de marche, elle fut accueillie par la mère de Shikamaru et conduite dans la pièce où se trouvait son ami brun dans un état misérable.
Mais Temari restait optimiste, Shikamaru avait préféré se fondre dans un sinistre brouillard d'indétermination jusque là donc elle avait encore la chance de réussir à lui faire reprendre ses esprits. Bon, malgré le fait que la colère semblait rendre son ami instable mais bon, il fallait qu'elle tente sa chance.
Seulement, elle ne souhaitait pas lui dévoiler la raison de sa présence si facilement. Si elle annonçait clairement qu'elle craignait de le voir partir se venger seul, il pourrait très bien embrasser l'idée qu'elle lui présentait sur un plateau d'argent, si bien sûr cela ne lui avait pas déjà effleuré l'esprit, et déguerpir sous ses yeux. Ou encore, pris comme une provocation, cela pourrait le conforter dans ce projet. Surtout dans le sens où briser les règles, dans un moment de faiblesse, pour effectuer un acte désespéré semblait souvent être une bonne justification quand on souffrait. Elle ne voulait donc pas verbaliser sa venue, de peur de commettre un impair. De plus, la véracité de ses paroles ultérieures demeurait, elle souhaitait être là pour lui.
Au bout d'un long moment, elle soupira, se redressa, s'adossant au mur puis lui répondit :
"- Shikamaru, tu vas mal. Tu es malheureux. Tu as besoin d'évacuer toute cette douleur et cette colère. Je suis là pour t'offrir une épaule sur laquelle pleurer. C'est ce que font les amis habituellement."
Il s'avança doucement vers elle, les poings et la mâchoire serrés, ces yeux chocolats furieux plongés dans ceux de son amie, cherchant la moindre trace de mensonge. Il finit par se retrouver en face d'elle, son visage tout près du sien cherchant toujours les réponses à ses questions et contre toute attente, il tapa violemment du poing sur le mur, tout proche de son oreille. La jeune fille sursauta et le jeune homme ajouta à son oreille :
"- Conneries !"
Shikamaru, sans plus rien ajouter, se recula, le regard noir puis détourna les talons, prêt à quitter la pièce.
Voyant qu'il était prêt à s'enfuir, elle paniqua et sans réfléchir, fit une nouvelle tentative :
"- Et tu vas faire quoi Shikamaru ? Hein ? Avec ta pathétique technique des ombres, tu crois que tu vas pouvoir venger ton maître ? Sur deux assaillants de l'Akatsuki qui plus est ?"
Shikamaru se figea et tourna imperceptiblement la tête. "Quelle drôle d'idée que de mettre à terre un homme qui l'était déjà", pensa t-il. Temari, elle, regretta immédiatement ses paroles.
Shikamaru, ne se formalisa pas plus de l'affront qu'elle venait de lui faire et attendit quelques secondes avant de répondre d'une voix déterminée :
"- Je ne peux pas continuer à m'enfoncer. Je suis prêt à donner ma vie pour venger mon maître."
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