Chapitre 13 - Percy

3 Septembre 1993

Je ne peux m'empêcher de me repasser cette scène en boucle. Adélaïde dans les bras de mon frère. Quelque chose s'est produit en moi quand je les ai vu. J'ai beau retourner le problème dans ma tête, une seule réponse me vient toujours. Elle ne me plaît guère, mais je ne peux plus le nier. Adélaïde me plaît. Je n'aime pas ça. Cette fille va mettre ma vie sans dessus dessous. Je la connais. Déjà hier, quand on était au lac, elle m'a fait faire des choses que je n'aurai jamais imaginé avant. Ce n'est pas moi ça. Pourtant, cette petite parenthèse m'a fait un bien fou, et même si je le nie, une part de moi a envie de revivre des moments comme ça. Mais j'ai bien conscience que si je ne fais rien, si je ne l'empêche pas de les voir, ils me la prendront. Elle est comme eux. Et un proverbe moldu dit bien «qui se ressemble s'assemble», n'est-ce pas?

Suivant le fil de mes pensées, je me tourne vers la demoiselle et la scrute quelques secondes avant de l'avertir.

-Au fait, Adélaïde...Évite de traîner avec Fred et George. Ils sont...Je tique, ne sachant pas comment terminer ma phrase. Dois-je lui dire qu'ils sont néfastes? Non, ils ont beau être stupides, je n'irai pas jusque là. Non, le mieux est de ne pas entrer dans un débat. Ainsi, je rajoute, espérant employer les bons termes pour la convaincre: Enfin, pour une fois dans ta vie, fais ce que je te dis sans discuter.

Sans attendre sa réponse, je me tourne et commence à partir. Je sais qu'elle va me contredire. Elle le fait tout le temps. Et puis, à peine les mots sortis de ma bouche, qu'ils me paraissent déjà inadaptés. C'est toujours comme ça de toute manière. J'ai du mal à m'exprimer clairement. Quand je dis les choses de but en blanc, on me reproche ma froideur, et quand j'essaye d'y mettre les formes, d'arrondir les angles, ça ne passe pas mieux.

Elle ne me suit pas. Je le sens bien. Tant pis, j'ai dis ce que j'avais à dire. Et que ça lui plaise ou non, c'est comme ça. Mais alors que je m'attends à ce qu'elle me plante, me laissant finir la ronde tout seul, certainement vexée par mes propos, je la vois me rattraper telle une furie et passer devant moi. Ses cheveux ont une odeur de framboise, et je ne peux m'empêcher d'humer l'air sur son passage. Mon coeur s'affole. C'est bien le moment qu'il fasse des siennes celui-là.

La jeune femme se poste devant moi, droite comme un i, me barrant le passage. J'essaye de la contourner, mais elle suit mes mouvements. Las de son petit jeu, je soupire.

-Adélaïde, ne fais pas l'enfant! On devrait déjà être aux cachots.

Je ne supporte pas être en retard, et pour le coup, on l'est vraiment. Que direz les professeurs si ils me voyaient flâner dans des couloirs où je ne devrais pas me trouver en ce moment? Non, je n'ai pas envie de risquer de me faire expulser de Poudlard à cause d'elle. Bon, j'exagère peut-être un peu, on ne me renverrait pas de Poudlard. Je suis l'un des meilleurs élèves de l'école et l'un des rares qui ne posent pas de problèmes. Mais me dire que je risque de me faire réprimander m'angoisse plus que de raison.

-J'en ai rien à foutre. Tout le monde dort de toute façon, personne ne saura qu'on a perdu dix précieuses minutes de ton temps. Alors si tu veux faire ton tour de garde, tu vas m'écouter! Je fréquente qui je veux, tu n'as pas ton mot à dire. Que tu dénigres mes aptitudes de préfète, j'ai déjà beaucoup de mal. Que tu me prennes de haut depuis deux ans maintenant, passe encore. Mais que tu oses me dire avec qui j'ai le droit ou non de m'amuser, je ne te le permets pas. Alors rentre toi bien ça dans le crâne Percy Weasley. Tes petits airs de dictateurs impressionnent peut-être les autres élèves, mais ça ne marche pas avec moi. Alors, fais attention à ce que tu dis.

J'ouvre la bouche, surpris par le ton qu'elle emploie avec moi. Durant sa tirade, la jeune femme n'a cessé de s'avancer vers moi, m'obligeant à reculer jusqu'à être acculée contre un mur. Je ne peux m'empêcher de penser qu'elle a vraiment un caractère exécrable, et un certain talent pour me rendre fou. Je m'apprête à la couper, énervé par son air condescendant, quand j'entends sa voix chevroter, se briser. L'aurai-je encore blessé? Sa tête se trouve désormais à quelques millimètres de la mienne. Si bien que je ne peux m'empêcher de loucher sur ses lèvres roses.

Ma poitrine me brûle, rependant une forte chaleur sur chaque parcelle de ma peau. Je suis comme hypnotiser, comme aimanté vers Adélaïde. Mes sens s'engourdissent tandis que je rapproche mon visage d'elle. Ma respiration s'accélère, se coupe par moment. On est tellement proche désormais que je peux entendre son coeur tambouriner en écho du mien. Elle s'humecte les lèvres, et ce simple geste fait accélérer mon cœur plus que de raison. Je ne me sens plus la force de résister. Tout mon être semble irrémédiablement attiré par elle.

Je me sens déconnecter, et l'espace de quelques secondes, plus rien existe autour de nous. Je ne suis plus prefet, je n'ai plus aucunes responsabilités, aucune image à renvoyer, pas de pression, pas de petite voix m'empêchant de faire quoi que se soit. Rien. Rien apart Adélaïde et l'attirance que j'ai pour elle.

Je pose mes lèvres contre les siennes. Elles sont douces, humides. Je titille sa langue, l'enveloppe, tandis que je me sens basculer. Mon coeur pulse douloureusement dans ma poitrine. Instinctivement, je passe mes bras derrière le dos d'Adélaïde, la pressant contre moi. J'ai besoin de la sentir contre moi, je dois la sentir contre moi. Mes angoisses, mes peines, et tout ce qui me tiraille quotidiennement s'envolent soudainement, me laissant un sentiment de légèreté et de bonheur. Je m'abandonne. Plus rien n'a d'importance. Mes études, mes objectifs, mon image...Mon image! Non. Ça ne va pas. Qu'est-ce que je suis en train de faire? Je ne dois pas me laisser aller de la sorte. Je dois réussir mon année, c'est primordiale. Je me décolle d'Adélaïde, la repoussant de toute ma force.

Elle chancelle, manquant de tomber, mais se retient juste à temps. Soulagé de ne pas lui avoir fait mal, je la regarde. Et je sais. Ses joues rouges qui me font chavirer, son regard de biche qui m'envoûte. Je sais que je dois l'éviter à tout prix. Si je continue dans cette voie, je ne pourrai plus me passer d'elle. Je ne pourrai plus m'assurer un bon avenir. Un bon salaire. Je serai cantonner au rôle de larbin, comme mon père. Et il est hors de question que je suive ses traces. Je ne veux pas me contenter d'un simple poste au ministère et être la risée des plus haut gradé. Non. Je veux devenir ministre. Et ce n'est pas en me comportant de la sorte que je vais y arriver. J'ouvre la bouche. Je dois lui expliquer. Elle me regarde avec incompréhension. Ses yeux brillent d'espoir et moi...Je referme la bouche. Je ne veux pas lui faire de la peine. Je ne veux pas devoir me justifier. Je prend une respiration, essayant de faire taire ce traître de cœur qui la réclame.

-Percy!

M'appelle-t-elle tandis que je passe devant elle, la bousculant, profitant de cette brève accolade pour respirer une dernière fois son parfum enivrant. Je ne peux pas. J'espère qu'elle le comprendra. Qu'elle me pardonnera. Mais si ce n'est pas le cas, je ne pourrai lui en vouloir. Et puis, ce n'était qu'un baiser. Rien ne me dit qu'elle ait apprécié, qu'elle attende plus de ma part. Demain, elle aura oublié. Demain, tout redeviendra comme avant, comme si de rien n'était. Alors que je m'éloigne, j'entends l'esprit frappeur fredonner une rengaine. J'écoute attentivement les paroles et tique dessus. J'aurai préféré qu'il n'ait pas assisté à cela.

-Il s'embrassent dans le noir, continue de fredonner Peeve, hilare, apparemment ravi de sa découverte.

Encore un problème que je vais devoir régler demain. Avant qu'il n'aille raconter ce qu'il a vu à qui veut bien l'entendre. Adélaïde est vraiment un nid d'emmerdes. Je monte les escaliers quatre à quatre et arrive, essoufflé, devant la grosse dame endormie. Après l'avoir prestement réveillée, j'entre dans la salle commune, ignorant ses vociférations. La salle est vide. Je vais m'asseoir dans un des fauteuils et fixe le feu d'un air absent. Je n'arriverai pas à dormir cette nuit de toute manière. Contemplant le feu qui s'amenuise au fil des minutes qui défilent, je me repasse en boucle les événements de la nuit. Caressant mes lèvres du bout des doigts, le parfum d'Adélaïde me revient en mémoire, faisant vibrer mon cœur, le faisant battre la chamade comme jamais auparavant.

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