Chapitre 114 - Adélaïde
26 Avril 1994
Le cours de divination se termine et c'est avec soulagement que je sors de la salle de cours. Pour une fois, le professeur Trelwaney ne m'a pas prédit d'atroces souffrances ou une mort terrible. Malgré tout, je sens que quelque chose cloche. La mine sombre, j'avance dans le couloir, essayant de démeler ces étranges sentiments qui me tiraillent de l'intérieur. Alors que nous arrivons devant la grande salle, Rusard court vers nous...enfin, plutôt trotte de façon grotesque.
-Miss Bercley ! Miss Bercley attendez ! Le professeur Chourave veut vous voir dans son bureau immédiatement ! Bon sang, je ne suis pas un hibou, il va vraiment falloir qu'ils arrêtent de me donner des messages. J'ai d'autres choses à faire nom d'une gargouille !
Tout en pestant, le concierge fait demi-tour. Devant le regard interloqué de Percy, j'hausse les épaules et dépose un baiser rapide sur ses lèvres.
-Garde moi ma place, je meurs de faim ! J'espère ne pas en avoir pour très longtemps, lui demandé-je en faisant la moue.
-Tu me raconteras !
Je lui fais un clin d'oeil avant de m'éclipser rapidement vers les serres. Je me demande bien de quoi veut me parler le professeur Chourave. Je toque et entre dans le bureau, regardant autour de moi. Ce dernier est recouvert de lianes et diverses plantes plus florissantes les unes que les autres. Il y règne un parfum de terre humide qui me prend au nez à peine le pas de la porte franchie.
-Ha miss Bercley ! Asseyez-vous, j'aimerai vous parler. Voulez-vous une tasse de thé ?
-Non merci professeur. Que se passe-t-il ?
Je m'installe dans un fauteuil face à son bureau tandis que ma responsable prend place face à moi. Elle a l'air préoccupée et semble chercher ses mots. Son attitude me stresse et je me demande quelle peut-être la raison de ma convocation. Je déglutis tandis que l'évidence me frappe. Elle est au courant pour la feuille de mandragore. Elle sait que c'est moi et elle sait pourquoi je l'ai volé. Je vais être renvoyée. Mais pourquoi, dans ce cas, je ne suis pas convoquée directement par le directeur ? Le professeur Chourave est une personne compréhensive...Peut-être va-t-elle essayer de me raisonner ? De me laisser une chance de ne pas faire ma transformation jusqu'au bout ? D'ailleurs, peut-on arrêter le processus à n'importe quel moment ? Peut-on faire machine arrière quand on est allé si loin ? Et puis surtout, en ai-je envie ? Non. Évidemment que non. Je veux aller jusqu'au bout et j'irai jusqu'au bout. Je dois simplement faire en sorte d'être convaincante. C'est ça. Je dois mentir et tout faire pour que ses soupçons se dissipent.
-Miss Bercley, commence-t-elle tandis que des sueurs froides me parcourent, je vous ai fais venir car je suis assez préoccupée.
Elle marque un temps d'arrêt, comme si le sujet qu'elle compte aborder est une chose difficile. Mais je ne compte pas lui facilité la tâche, même si je devine la suite de sa tirade. Plus le moment fatidique sera reculé, plus je pourrai trouver des arguments pour ma défense. Le cerveau en ébullition, j'essaye de rester concentrée, tout en ne laissant rien paraître.
-Certaines de vos camarades s'inquiètent pour vous miss Bercley. Depuis combien de temps durent vos cauchemars ? Je suis désolée de vous le demander ainsi, je n'ai pas envie de remuer de mauvais souvenirs, mais il est nécessaire que j'en sache davantage...afin de vous aider au mieux.
J'ouvre la bouche, figée. C'est comme si je venais de recevoir un seau d'eau glacée sur la tête. Ce n'est pas possible. Pourquoi ne peut-on pas me foutre la paix avec ça ? Furieuse envers ces petites rapporteuses, je baisse la tête, essayant de me calmer. Je n'ai pas spécialement envie de déferler ma rage sur le professeur Chourave qui, en plus de n'y être pour rien, risque d'y trouver une bonne raison pour ne pas me lâcher d'une semelle.
-Nous sommes là pour vous aider. Je connais un excellent spécialiste à Saint Mangouste. Il est assez prit, mais il fait des miracles avec ses patients. Ses thérapies sont d'une rare qualité et il porte une attention toute particulière à chacun de ses patients. Se serait...
-Non ! Rétorqué-je, un peu brusquement avant de me reprendre en grimaçant, non merci. Je...Je vais très bien. Je vous assure. Les filles exagèrent toujours tout. C'est vrai que...Je fais des cauchemars, de temps en temps, mais qui n'en fait pas ? Et puis, ce n'est pas comme si j'étais seule.
-Vous êtes très bien entourée miss Bercley, je n'en doute pas une seule seconde, mais une personne qualifiée serait plus apte à vous aider. Pouvez-vous y réfléchir ?
-Oui professeur je...J'y penserai. Merci pour...votre inquiétude Se sera tout ?
Je me dirige à pas pressé jusqu'à la grande salle où je retrouve Gaelle et Percy en pleine discussion. M'installant à côté d'eux, je leur adresse un large sourire rassurant.
-Salut ! Jacob n'est pas là ?
-Non, il a un rendez-vous clandestin, m'informe Gaelle en levant les yeux au ciel.
-Va vraiment falloir qu'il se décide à nous le présenter un jour, gloussé-je en me servant.
-Que voulait le professeur Chourave ? Me demande Percy, la mine préoccupée.
-Ho rien. Elle...Elle voulait savoir si je voulais parler ou non de...ce qui s'est passé.
Je baisse les yeux. Ce n'est pas vraiment un mensonge. Malgré tout, je n'ai pas envie de rentrer dans les détails.
-Tu devrais Ad, tu sais. C'est important pour que tu le surmonte, me conseille sagement Gaelle.
-Je sais. T'inquiètes pas, j'ai la situation en main.
Je les vois échanger des regards et me sens soudainement mal à l'aise. Gaelle se lève, finissant rapidement son morceau de tarte et rassemble ses livres.
-Tu vas où ? m'enquiers-je, surprise de la voir partir avec autant de précipitation.
-A la bibliothèque. J'ai un devoir à terminer. On se retrouve tout à l'heure.
Après un signe de main, Gaelle s'éclipse hors de la grande salle. Contente de pouvoir passer du temps en tête à tête avec Percy, je me rapproche de lui et dessine des petits cercles sur sa main.
-Dis moi, tu as combien de temps devant toi avant ton prochain cours ?
-Pas assez pour satisfaire vos idées lubriques miss Bercley...mais assez pour en avoir un aperçu.
Nous quittons tranquillement la grande salle, main dans la main. Percy m'entraîne à travers les étages jusqu'à une salle de classe vide. Il s'approche de moi, m'entourant de ses bras protecteurs, puis, doucement, pose ses lèvres sur les miennes. Des frissons me parcourent tandis que nos souffles se mélangent. Nos langues se cherchent, se trouvent, se redécouvrent avec une infini tendresse, m'ébranlant jusqu'au plus profond de mon être. Je sens des larmes rouler malgré moi sur mes joues tandis qu'une douce chaleur m'enveloppe le coeur. Ce moment de tendresse pourtant si simple, si habituel, est exactement la chose dont j'avais besoin là maintenant. Je ne m'en rends toutefois compte que maintenant. Alors, je me laisse transporter par la douceur de Percy. Par ses gestes, par ses baisers, par tout cet amour qu'il est le seul à me donner, à éveiller en moi.
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