26

Audric

Ça cogne dans mon crâne, comme si un pivert y avait élu domicile et s'acharnait à creuser un trou dans un putain d'arbre. Je n'aurais pas dû boire hier soir... La lumière vive qui entre dans la pièce par la fenêtre dépourvue de rideau me fait refermer les yeux aussi vite que je les ai ouverts. Un corps chaud est blottit contre moi, ou plutôt, je serre un corps contre moi. Je le serre tellement que j'en ai mal au bras gauche. Je tourne la tête et me retrouve le nez dans une chevelure châtain, d'où s'échappe un parfum que je connais par cœur.

Je rêve ? Peyton est collée à moi, le visage enfouit dans le creux de mon épaule et son souffle me caresse le corps à chaque respiration. Mon cœur manque un battement avant de se mettre à battre de façon anarchique lorsque je comprends que non, je ne rêve pas. Tout cela est bien réel. J'ai bel et bien passé la nuit à serrer ma petite intello contre moi comme si c'était un doudou.

La réalité me frappe de plein fouet quand mon cerveau embrumé m'envoie des images flous de la veille. Je me revois dansant avec Tara, je ressens à nouveau toute la frayeur qui s'est emparé de mon esprit faisant trembler mon corps, me retranchant dans mes plus mauvais souvenirs. Et surtout, je la revois, elle. Bravant tout pour m'apaiser, même ses peurs à laisser tomber les barrières qu'elle avait érigées autour de son cœur.

Merde ! Je me suis vraiment comporté comme le dernier des crétins !

Qu'est-ce qu'il m'a prit de me tourner vers Tara ? Je sais que Peyton ne peut pas l'encadrer, à juste titre d'ailleurs. Puis, je me souviens : Tara est venue me draguer, je l'avais repoussé, personne ne m'intéressait en dehors de ma petite intello qui n'était pas présente. Par contre, quelqu'un qui l'a connaissait bien était là.

- Putain... soufflai-je, en passant ma main libre dans mes cheveux.

Je savais que Peyton avait vécue pendant ces deux ans où j'avais été enfermé à Rikers, mais jamais je n'aurais cru qu'elle serait sortie avec quelqu'un, qu'elle aurait tenté une vraie relation avec un autre que moi. Mais c'était bel et bien le cas, après tout, c'est moi qui l'avais repoussé. J'aurais dû m'en douter.

Mais ça faisait tout de même un mal de chien, ça me tordait le ventre et ça me faisait encore plus souffrir que lorsque j'avais reçu cette balle cette nuit là. L'imaginer avec ce mec de bonne famille me donnait l'impression de recevoir des uppercuts en plein visage, de me faire écraser par un tank et dévorer par un lion enragé, tout cela en même temps et bien plus encore.

Juliette avait accueilli ce mec avec un grand sourire et une accolade amicale qui m'avait fait froncer les sourcils. Qui est-il ? M'était-je demandé. Ty, qui se tenait à mes côtés avait toussoté, l'air gêné quand le type s'était approché pour le saluer. Quand son regard s'était posé sur moi, m'avait détaillé de haut en bas, j'étais redevenu ce mec qui avait débarqué chez Jenks avec sa gueule défigurée qu'il n'assumait pas. Son regard était sombre, inquiet et avec un hochement de tête dans ma direction il avait prononcé mon prénom. Puis, l'air de rien, un éclat particulier dans le regard, il avait demandé à mon meilleur pote où se trouvait Peyton. C'est là que j'avais pigé.

Avant de me bourrer la gueule a coup de shooter de Tequila et de bières dégueulasses, j'avais interrogé Ty. Je n'aurais jamais dû le faire.

J'avais appris qu'il s'appelait Alexandre De Lacour, qu'il était en fac de droit avec ma petite intello, et qu'ils étaient sortit ensemble pendant plusieurs mois. Suffisamment, pour qu'elle présente ce mec à la gueule d'Ange et au nom qui suait la richesse, à nos amis les plus proches. Le comprendre et l'entendre énoncé par Ty n'était pas la même chose. J'avais eu l'impression de tomber de haut, peut-être d'un des gratte-ciel le plus haut de Manhattan. La chute avait semblé durer un siècle pourtant, en une seconde j'avais ressentit la douleur de l'atterrissage. Violent. Qui m'avait coupé le souffle.

Pourtant, je savais bien que j'avais merdé. C'est moi qui avait repoussé Peyton à Rikers, moi qui lui avait dit des choses blessantes et encore moi qui avait refusé de la voir pendant ces deux ans.

Je grognai en me dégageant de Peyton dont les yeux fermés papillotaient, signe qu'elle s'agitait dans son sommeil. Une de ses mains chercha mon corps à tâtons, ne trouvant rien, elle ouvrit les yeux et se redressa d'un bond.

- J'voulais pas te réveiller, dis-je en enfilant mes chaussures sans un regard pour elle.

- Pas grave.

Elle s'assit en tailleurs, me regardant ranger portefeuille, téléphone et clé de voiture dans différentes poches de mon jeans sans mot dire. Alors que je me dirigeai vers la porte, elle me héla. Je stoppai net, une main sur la poignée de la porte.

- On va vraiment faire comme si rien ne s'était passé ?

- Tu veux parler d'hier soir ou d'Alexandre ?

Un long soupir me répondit. Mais putain, je ne pouvais pas simplement partir en laissant de côté ma jalousie mal placée ?! Je baissai la tête et me retournai alors qu'elle s'extirpait du lit, me fusillant du regard.

- Tu veux parler d'Alex ? Très bien. Me lança-t-elle sur la défensive, en croisant les bras sur sa poitrine. On était plus ensemble, Audric ! J'étais triste, seule et il était gentil ! Alors oui, je suis sortit avec un mec bien, qui a été aux petits soins pour moi pendant trois mois.

- Puisqu'il est si parfait, tu peux aller le retrouver et arrêter de te jeter à mon secours pour te donner bonne conscience.

- Quoi ? Mais de quoi...

Tais-toi, Audric... Ne dis rien !

- Hier soir, c'était pour quoi ton intervention à me calmer hein ? Dis-je rapidement. Pour te donner bonne conscience de m'avoir fait miroiter un truc ?

Quel con ! Pour un peu, je me serais mît K.O moi-même si je pouvais !

- Non mais tu t'entends ?! T'es grave ! J'suis venue parce que tu avais besoin de moi et que je pouvais pas te laisser comme ça ! Même si t'es qu'un crétin qui a préféré se jeter dans les bras de la plus grande pétasse de la planète !

- J'étais mal ! Ok, j'aurais pas dû, je le reconnais. Mais tu sais pertinemment qu'on aurait dû y être ensemble à cette soirée, pas en tant qu'amis, ni même en tant qu'Ex ou encore moi seul et toi dans ton appartement ! J'ai fait tout pour te prouver que je tenais encore à toi... alors pourquoi tu ne nous accorde pas une...

- Parce que je t'aime, abruti ! Hurla Peyton en me coupant la parole.

What ?! Je rembobine les cinq dernières secondes dans mon crâne et le hurlement de Peyton résonne à nouveau : elle m'aime.

La porte claqua dans mon dos mais je n'y prêtais guère attention, bien trop occupé à sourire comme un idiot, les yeux dans le vide. Elle m'aime.

Soudain, je percutai. Peyton dévalait les escaliers quand je la rattrapait par le coude, l'obligeant à se retourner. Nos visages se retrouvèrent à quelques centimètres l'un de l'autre.
Le mien était souriant alors que le sien était baigné dans les larmes. Mon sourire disparut aussitôt que je vis ses joues humides et ses yeux rouges. Je posai une main tatouée sur sa joue et lui caressa la pommette du pouce.

- Redis-le, Chuchotai-je.

Elle secoua la tête doucement, ne me quittant pas du regard.

J'appuyai mon front contre le sien et fermai les yeux. Elle ne voulait pas le redire. C'était sortit comme ça, d'un coup. Comme si elle avait arraché un pansement sur une blessure. Une blessure qui n'était pas encore tout à fait guérie.

- J'suis un con... murmuré-je.

- J'suis désolée... dit-elle à son tour dans un souffle.

J'ouvris les yeux et plongeait mon regard dans le sien, dans ses yeux aux deux couleurs, plus vives que d'habitude à cause des larmes.

- Tu avais... as le droit de vivre. Corrigeai-je en grimaçant. Ça fait un mal de chien, mais tant que tu seras heureuse...

Elle secoua à nouveau la tête, me coupant dans ma phrase.

- C'est avec toi que je veux être heureuse, espèce de crétin. Chuchota-t-elle en se détachant de moi. Mais pour cela, il faut que tu règles tes problèmes.

Je fronçais les sourcils perdu.

- Au lycée, c'est toi qui a en partie réglé les miens, tu en as payés deux ans de ta vie, Audric. Expliqua doucement Peyton en jouant avec mes doigts, Après j'ai vu tout à un tas de psy, j'ai discuté avec Juliet et Roman, j'ai tout fait pour mettre mes problèmes derrière moi et non devant moi comme une putain de barrière.

Elle s'interrompit, respirant calmement mais ne me quittant néanmoins pas du regard.

- La seule barrière que j'ai laissée, c'est celle entre toi et moi. Et elle ne tombera pas si on érige pas quelque chose qui s'est brisé entre nous ce jour là à Rikers. La confiance.

Je fermai les yeux.

Elle avait raison. Évidement. Mais ça faisait tout de même pas de l'entendre le dire.

- Pour qu'on ait à nouveau confiance l'un en l'autre, ajoute Peyton plus bas, Il faut que tu ai confiance en toi. Règles tes problèmes, Audric. Je te promets qu'au bout du chemin, je serai toujours là.

Elle se hissa sur la pointe des pieds et déposa un bisou sur ma joue avant de descendre lentement les escaliers, comme si elle se doutait que je n'allais pas la poursuivre à nouveau.

Je me passais la main sur le visage et me laissai tomber sur une marche, le dos collé au mur tout en mordant mon poing pour m'empêcher de hurler.

Je t'aime, abruti.

Bon, c'était pas tout à fait les mots que je rêvais d'entendre mais l'essentiel était quand même là : elle m'aime et c'est tout ce que j'avais besoin de savoir pour me redonner suffisamment d'énergie pour continuer le combat.

Après tout, pour un boxeur, rien de tel qu'un combat en plusieurs round pour mesurer sa force. Et là, nous n'en sommes qu'au début !

Je sautai sur mes pieds, et dévala la volée de marche jusqu'au rez-de-chaussée, je dérapais comme un personnage de dessins animés en apercevant tout mes amis qui me fixait et leurs sourit.

- Alors tu comptes faire quoi maintenant ? Demanda Juliet en croisant les bras sur sa poitrine.

- Continuer à me battre.

- Mais encore ?

- Tu fais chier Juliet ! Dis-je en levant les yeux au ciel. Même si ça te ne concerne en rien, je vais te le dire : je vais aller chez Jenks et je vais prendre rendez-vous chez un psy.

La brune décroisa aussitôt ses bras, choquée.

- Ta pote a raison, dis-je avec une ébauche de sourire, je ne peux pas avancer en occultant mes problèmes. Quand j'y réfléchis, ça m'a aidé par le passé. Et quand tout ce merdier sera dernière moi, mon histoire avec Peyton pourra reprendre sur des bases solides.

- Putain, je suis fière de toi. Souffla Juliet en se jetant sur moi.

Je me crispai à son contact, mais, après quelques secondes, je lui tapotai doucement le dos avant qu'elle ne s'écarte.

- Je n'y croyais plus... avoua-t-elle.

Moi non plus à vrai dire, mais ça, je ne le dit pas. Je saluais les autres d'un Geste du menton et passai la porte, me sentant déjà un peu plus léger, semblant déjà apercevoir un peu de soleil dans mon monde nuageux.

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