Lorsque nous arrivons à nouveau sur le parking, un sentiment nouveau m'habite. J'avance main dans la main avec Elliot, qui a bien grandi depuis la dernière fois que j'ai pu le voir.

La pluie tombe toujours. Les quelques habitants restants sont installés dans des voitures qui s'apprêtent à partir en direction de Phandrès. Non loin de là, j'aperçois Erwan assis sur le bord du coffre d'une voiture, la combinaison à moitié ouverte, les cheveux trempés. Mon cœur s'apaise automatiquement et je souffle de soulagement.

Je m'accroupis à nouveau devant Elliot en lâchant sa main.

— On va aller voir un monsieur qui va s'occuper de toi d'accord ? Si tu as besoin de quoi que ce soit, tu n'auras qu'à lui dire de m'appeler. Je serais juste à côté.

— Et papa et maman ?

— On les reverra bientôt.

Il hoche doucement la tête. Je dépose un bisous sur son front avant de reprendre sa main pour rejoindre Andrew, qui parle avec des Terilanéeins. Il m'accueille avec un sourire et son regard se pose sur Elliot.

— Andrew, voici mon petit frère, Elliot, je déclare en souriant.

Il attrape à son tour la main du petit garçon et s'exclame :

— En voilà un beau garçon ! On va bien s'occuper de toi Elliot, n'ai pas peur d'accord ?

Il hoche simplement la tête en fixant Andrew.

— Vous avez fait du beau travail. Nous avons quelques derniers détails à régler et nous pourrons nous mettre en route, continue-t-il en s'adressant à moi cette fois-ci.

J'ai une centaine de questions à lui poser, mais aucune d'elle ne franchit mes lèvres. Je me contente d'acquiescer et me retourne en lançant un dernier sourire à Elliot.

Je m'approche d'Erwan, sans parvenir à cacher mon sourire. Lorsqu'il m'aperçoit, il sourit à son tour et je m'installe à ses côtés.

— Ça va mieux ? Que s'est-il passé dans l'appartement de Geoffrey ?

— Oui, ça va. Quand nous sommes arrivés à l'appartement de Geoffrey, nous avons trouvé le mécanisme qui déclencherait la destruction du dôme. Mais celui qui s'en occuperait courrait un danger de mort. Ce mécanisme n'a pas été fait pour être enclenché, pas de cette manière. Romain s'est porté volontaire. Nous avons tenté de l'en dissuader, mais il a dit qu'il était le mieux placé pour le faire, pour comprendre. Et il avait raison. Quand il a touché l'appareil, il a commencé à hurler de douleur et à se tordre, nous avons cru qu'il allait mourir sur place. Mais il a réussi. Après la désactivation, un gaz toxique s'est diffusé dans tout l'appartement. Il nous a affaibli, j'avais la tête qui tournait et Romain était entre la vie et la mort. Puis ma blessure a recommencé à saigner. Je ne sais par quel miracle nous sommes parvenus à descendre. Si ce n'était toi, nous serions tous les trois morts à l'heure qu'il est.

Il attrape ma main pour la serrer dans la sienne. Nos regards se croisent et je peux lire dans ses yeux tout le bonheur que ma simple présence lui procure.

— Où sont Enzo et Romain ?

— Romain a été ramené d'urgence à Phandrès. Mais ne t'en fais pas, il va s'en sortir. Quant à Enzo, il...

— Salut la naine ! T'as cru que tu te débarrasserais de moi aussi facilement ?

Je me tourne vers Enzo qui avance vers nous, un grand sourire collé aux lèvres. Il a un bandage autour de la tête mais ne semble pas en mauvais état. Je lui souris en retour et me lève pour le prendre dans mes bras.

— Merci la naine, tu nous as sauvés, déclare-t-il à mon oreille.

Une larme menace à nouveau de couler lorsque je m'écarte de lui. Erwan qui le remarque directement me tire vers lui et me force à m'asseoir sur ses genoux. Il enroule ses bras forts autour de mes hanches et dépose un doux baiser sur ma tempe.

Je suis si heureuse de pouvoir le toucher, lui parler.

Andrew s'approche de nous, accompagné de Julie. Le parking s'est vidé. Il n'y a plus que nous ainsi que Laurie, Théo et Isack qui nous rejoignent. Mon sourire s'élargit. Ils sont tous en vie, même si plus ou moins blessés, ils parlent, ils sourient, ils vont bien. Nous l'avons fait. Nous avons réussi, nous avons vaincu Altalie.

Andrew sourit encore. Comme s'il ne pouvait s'en empêcher.

— Les enfants, nous avons tout donné pour ce combat. Et cela n'a pas été en vain. Nous sommes tous épuisés, mais notre mission ne s'arrête pas là. Il nous reste beaucoup de travail pour reconstruire un monde unique. Beaucoup de personnes à convaincre. Je vous demande de faire preuve de patience avec les habitants d'Altalie, je vous rappelle qu'ils ont été manipulés, qu'ils sont les victimes dans cette histoire. Rien n'est de leur faute.

— Où est Geoffrey ? demande alors Julie.

— Il a eu ce qu'il méritait. Ne t'en fais pas, il ne pourra plus jamais faire de mal à qui que ce soit.

La pluie s'est calmée depuis quelques minutes. Le ciel reste gris mais les oiseaux commencent à chanter. La nature reprend ses droits. Le dernier feu qui consumait une voiture abandonnée non loin de là, s'éteint.

— Il est grand temps qu'on rentre à la maison.

Andrew nous fixe chacun son tour en nous lançant un regard encourageant.

Comme il dit, tout est loin d'être terminé. Il nous reste de nombreuses épreuves à traverser, mais le plus important est réglé. J'ai retrouvé mon frère, mes parents sont sûrement sains et saufs eux aussi. Tant pis s'ils ne se souviennent pas de leur fille, ça leur reviendra peut-être un jour. En attendant, j'ai trouvé ma place, j'ai trouvé ma famille.

Aujourd'hui, je suis capable d'accepter tout ce que j'ai pu refouler. Je n'existe plus pour mes parents. Altalie n'était pas un endroit sain et nous avons fait ce qui était nécessaire. Et enfin, j'aime Erwan. J'aime cet homme de tout mon cœur et tout ce qui s'est passé ces derniers jours ne fait que confirmer ce fait.

Je me lève, n'y tenant plus et me jette dans les bras d'Andrew. Il paraît surpris, mais finit par poser ses bras dans mon dos en esquissant un sourire. Les autres se joignent à nous, je n'ai pas besoin de ramener Erwan cette fois.

Lorsque nous nous écartons, chacun se dirige vers une des deux voitures. Je retiens Erwan par le bras et le force à se retourner vers moi.

Je dépose mes mains sur ses joues et plonge mon regard dans le sien.

— Je t'aime.

Ses yeux sombres brillent et un sourire s'étire sur ses lèvres.

— Moi aussi. Je t'aime Victoire.

Fin