Chapitre 38

La soirée hier s'est terminé vers les trois heures du matin. Nous sommes tous partis se coucher dans nos chambres respectives.

Le discours de Julie ne m'a pas laissée indifférente. Il rôde dans ma tête, je ne cesse de me remémorer ce moment. J'ai une peur bleu qui me broie le ventre. Peur de les perdre. Car elle a raison. Nous sommes avant tout une famille. Une grande famille où chacun des membres a sa place, son importance. Si quelqu'un tombe, tous tombent avec. Si quelqu'un échoue, tous échouent avec...

Et j'ai très peur que ce quelqu'un soit moi.

Depuis le début je ne pense qu'à la guerre. Je ne me suis même pas préoccupée de mes états d'esprit. Mais à présent, ce moment se rapproche à grand pas et ce que je ressens vraiment commence à se révéler.

— Vic ?

Je détourne mon regard du plafond dans un sursaut. Laurie qui vient à peine de se réveiller, me fixe tendrement.

— Ça va aller, cesse donc de te torturer.

Je soutient vaguement son regard, perplexe. Comment a-t-elle deviné ?

— Je vais manger, je préviens en me levant. Tu veux venir ?

— Tu peux y aller, je te rejoins.

Je lui souris et enfile un pull avant de prendre la porte. Le couloir est désert. À cette heure, tous dorment sûrement encore. Je m'avance jusqu'à l'ascenseur et descend au réfectoire. Sans surprise, celui-ci n'est pas bondé comme à son habitude. Seul trois-quatre personnes déjeunent tranquillement dans le calme de cette matinée. Les rayons du soleil traversent les baies vitrées du réfectoire, réchauffant la pièce. Je me sers un chocolat chaud avant de quitter la cantine pour me réfugier dehors. Je m'installe, ma tasse en mains, sur l'herbe humide du jardin.

— Quel temps, n'est-ce pas ?

Je relève la tête, cherchant la provenance de la voix. Isack s'installe à mes côtés et je souris.

— Oui. On ne dirait même pas qu'une guerre sanglante s'apprête à éclater.

— Qu'est-ce que tu fais levée de si bon matin ? Le lendemain d'une fête en plus, interroge-t-il.

Je hausse les épaules.

— Il faut dire que mon cerveau est légèrement déréglé. Il n'a pas dû comprendre que lorsqu'on se couche à trois heures du matin on est censé se lever au moins après dix heures.

Il rit doucement en s'allongeant dans l'herbe, alors que je bois une nouvelle gorgée de mon chocolat chaud.

— T'es prête ? demande-t-il en reprenant son sérieux.

— Ai-je vraiment le choix ?

— Tous ne vont pas se battre. Il y a des enfants, des personnes qui n'ont plus les conditions physique pour ça. Tu n'es pas obligée de...

— Je ne veux même pas t'entendre finir cette phrase, je le coupe en plantant mes yeux dans les siens. C'est ma cause tout autant que la vôtre, si ce n'est plus.

— Tu as raison, pardon.

Je balaie l'air d'un geste de la main pour signifier que ce n'est pas grave et me lève, ma tasse désormais vide. Je le préviens de mon départ et rejoins à nouveau le réfectoire pour déposer mon récipient.

Je croise le regard de Laurie qui me fait un signe de la main et je lui souris avant de prendre le chemin de l'ascenseur.

Je referme la porte de ma chambre derrière moi et pioche des vêtements dans mon armoire. Une fois vêtue, de légers coups se font entendre contre la porte.

— Oui ?

La tête d'Enzo apparaît dans l'encadrement de la porte et je lève automatiquement les yeux au ciel.

— Oh non, pas de si bon matin, s'il te plaît...

— Eh, du calme la naine, je suis pas là pour te saouler, malheureusement, se défend-il en s'installant délibérément sur mon lit.

— Vire tes chaussures sales de mon lit, j'ordonne froidement.

— Pardon "princesse".

— Bon qu'est-ce qu'il y a la fin ?

— On est tous convoqués dans le hall cette après-midi. Andrew a un message à nous faire passer.

J'acquiesce en continuant de le fixer.

— C'est bon j'ai compris ! Je me casse ! Si c'était Erwan par contre hein, se plaint-il.

— Erwan n'est pas aussi désagréable que toi, Enzo.

— Mais j'ai rien dit là !

— C'est vrai, cela relève du miracle.

— Oh aller, soit pas si ignorante, dit-il en se levant.

Il s'avance vers moi, sous mon regard indifférent.

— Tu sais bien que je t'aime, c'est pour ça que je te fais autant chier la naine.

Il me prend dans ses bras alors que je lève les yeux au ciel, lâchant un petit rire d'exaspération. Je finis tout de même par refermer mes bras dans son dos. Même si ce n'est pas facile tous les jours avec lui, je le considère tout de même comme un ami, un véritable.

***

Nous sommes tous réunis dans le hall, et c'est avec difficulté que je me faufile parmi les autres pour me rapprocher du grand escalier ou Andrew s'apprête à discourir, se tenant fièrement aux côtés de Lexa qui rayonne de beauté. La pièce est bondée et les voix résonnent de partout.

Lorsque j'arrive finalement à rejoindre l'escalier, j'aperçois Laurie et Julie qui me font signe de les rejoindre.

— Ça va ? demande Laurie.

Je souris en signe de réponse alors que la voix d'Andrew s'élève enfin dans la pièce, faisant taire toutes les autres.

— Mes chères et fidèles amis, voisins, habitants de l'Immeuble. Vous êtes sans aucun doute tous au courant de ce qui se trame en ce moment. Si vous êtes ici aujourd'hui, c'est parce que vous avez tous un cœur en or et une mentalité de héros, et c'est pour cela que vous avez choisi de continuer à mes côtés quand vous auriez très bien pu vous en allez, ou rejoindre les autres. J'aimerais vous remercier, tous autant que vous êtes, d'être des personnes si bonnes. Me lever chaque matin et voir que tout ce que j'ai pu faire n'a pas servit à rien, qu'au contraire, des gens vivent, des gens rient et sont heureux grâce à l'Immeuble, grâce à tous les efforts que j'ai dû fournir pour construire cette famille qu'est la nôtre ; m'emplie d'un sentiment de joie et d'envie de continuer à faire le bien, de répandre la prospérité. Personne ici n'a eu une vie facile. Je suis bien placé pour savoir que la vie peut se montrer terrible, mais malgré ça, nous nous levons tous les jours et nous préparons mentalement pour une guerre depuis des années déjà. Malgré tous ce qu'on a déjà pu traverser, toutes les souffrances qu'on a réussi à laisser dans le passé, nous allons devoir passer par là à nouveau.

Andrew fait une pose pour sécher une larme qui menace de couler au coin de son œil.

— L'heure est grave mes amis. La guerre pour laquelle nous nous préparons depuis tout ce temps s'apprête à éclater. Et quoi qu'il arrive, quoi qu'il se passe pendant ce combat, nous n'allons pas baisser les bras ! Notre monde est bien trop précieux pour que l'on permette à qui que ce soit de vouloir le diriger ou y mettre un terme ! Peu importe le résultat, nous ne fuirons pas ! Cette guerre n'est pas une option ! C'est le sort de l'humanité qui est en jeu ! Les forces du bien et du mal s'affrontant ! Nous sommes le bien mes amis. Peu importe les morts, peu importe le sang ! Je mourrais en votre honneur s'il le faut, je donnerais ma vie dans cette guerre s'il le faut. Nous nous battrons jusqu'à notre dernier cri.

Inconsciemment, des larmes ont coulées le long de mes propres joues. Le discours d'Andrew est poignant, émotionnant, et lui même est dans tout ses états. Lexa pose sa main sur son avant bras pour lui indiquer de faire une pose et j'essuie rapidement mes larmes.

Alors que j'écoute à moitié la discussion de Julie et Laurie, une main se referme sur la mienne. Une chaleur paisible m'envahie, me détend. Je me retourne vers Erwan qui me sourie tendrement et ne peux m'empêcher de me blottir contre lui. Il caresse doucement mes cheveux alors que je respire sa douce odeur.

La voix de Lexa s'élève à son tour, et je me sépare de lui pour l'écouter.

— Habitants de Phandrès, nous, Terrilanéeins, nous joignons à vous pour combattre le mal pendant cette guerre. Vous pouvez compter sur l'aide de nos guerriers. Vous n'êtes pas seuls.

Andrew avance de nouveau vers le public silencieux.

— Les Terrilanéeins ne sont pas les seuls à nous prêter main forte. Les habitants de Galandre se joignent aussi à nous. Aujourd'hui, nous allons parler de technique. De comment tout va se passer. Et surtout, vous aurez enfin le droit à des explications. Cela fait trop longtemps que vous êtes dans le flou concernant les réels plans de Geoffrey.

— Oui ! Quels sont ses plans au final ?! S'écrie quelqu'un dans la foule.

Andrew sort une petite boîte noire de sa poche et reprend la parole.

— Il y a quelques semaines, j'ai envoyé une équipe à Altalie à la recherche d'indice concernant ses objectifs. Voici ce qu'ils ont trouvés.

La boîte s'ouvre et la puce que nous avions trouver à Altalie apparaît.

— Grâce à ça, nous avons finalement réussi à tout déchiffré. Geoffrey compte implanter cette puce à tous les habitants, prétextant un vaccin de routine. Cet objet microscopique lui permettra de localiser, surveiller, chaque habitant. Savoir où chacun se trouve, à n'importe quelle heure de la journée et de la nuit. Il pourra tous les contrôler avec ça. Une fois que toute la population d'Altalie sera complètement asservie, Geoffrey compte étendre son plan diabolique sur le reste du monde. Isolant chaque ville, une par une, comme il l'a fait avec le « premier secteur » qui n'est autre qu'une ville comme la nôtre à la base. Il n'y a pas de premier ou deuxième secteur. Il n'y en a jamais eu. Personne ne sait ce qu'il se passera quand il sera imbus de pouvoir, que le monde sera à ses pieds. Et je ne préfère ne pas l'imaginer.

— Mais nous allons l'arrêter, reprend Lexa.

Les applaudissements se font entendre, les voix s'élèvent et les deux dirigeants quittent difficilement le hall pour sûrement se réfugier dans le bureau d'Andrew.

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