Chapitre 32

— Comment vas-tu ? demande Andrew, assis en face de moi.

— Je... Ça va.

— Pardonne-moi Victoire, je n'aurais pas dû t'envoyer là-bas. J'aurais dû me douter que tu n'étais pas prête, je m'en excuse sincèrement.

— Ne t'en fais pas Andrew, tout s'est bien passé à Altalie. J'ai juste stressé plus que de raison sur le retour, mais ce n'est en aucun cas de ta faute.

Il me sourit tristement.

Ma relation avec Andrew a quelque peu évoluée. J'ai l'impression que nous sommes plus proches. J'ai l'impression qu'il tient plus à moi, comme aux autres. Ce que j'ai souhaité à de nombreuses reprises. Être importante pour autre chose que par intérêt à détruire Geoffrey.

— Je vais appeler les autres pour qu'on fasse le point.

Je hoche positivement la tête et il appelle chacun des membres qui ont fait partie de la mission dans son talkie-walkie.

— Avant que les autres arrivent, je peux te poser une question ?

— Bien sûr, vas-y.

— Comment a réagi Romain ?

— Comme toi, explique-t-il. Ce qui est tout à fait normal. Il était juste un peu moins sur la défensive, ce que je peux aisément comprendre. Je pense qu'il a été emmené jusqu'ici dans de meilleurs conditions que toi.

— Qu'allez-vous faire de lui ?

— C'est un atout en plus. Il va apprendre à se battre, exactement comme toi. Ne t'en fais pas pour lui, il sera très bien intégré, en quelques semaines, il s'y fera.

Je ne réponds pas et la porte du petit bureau s'ouvre. Enzo passe par celle-ci, suivi du reste du groupe. Autant dire que la pièce est bien vite pleine. Laurie, celle qui avait été choisie pour garder notre trouvaille, dépose la petite boîte sur le bureau d'Andrew.

— Voici ce que nous avons trouvé, il semblerait que ce soit une puce ou un truc du genre, explique-t-elle.

— Vous avez fait du bon travail. Pour l'instant, reposez-vous.

— Attendez, j'ai une question, intervient Julie. Comment se fait-il que Romain se souvienne de Victoire alors que sa mère ne s'en souvenait pas ?

— Je ne sais pas Julie. Ma seule hypothèse est que lorsqu'ils ont effacé Victoire de la mémoire de ses proches, ils ont sûrement dû oublié Romain.

Après quelques autres questions, tout le monde quitte le petit espace pour vaquer à ses occupations. Alors que je sors de la pièce, j'aperçois Erwan, prêt à monter les escaliers. J'accoure vers lui et l'interpelle.

— Erwan !

Il se retourne et son regard froid se pose sur moi. J'arrive rapidement à sa hauteur.

— Tu vas me dire ce qui se passe à la fin ? j'interroge en plantant mes yeux dans les siens.

— Rien.

— Pourquoi es-tu si distant ? Tu m'évites ? Qu'est-ce que je t'ai fais ? Je ne comprends pas, explique-moi bon sang !

Il m'ignore royalement et s'apprête à continuer son chemin mais je le retiens par le bras.

— Erwan, répond moi, je veux juste comprendre.

Un instant, je crois voir un voile de tristesse couvrir ses yeux mais disparaît rapidement. Ai-je rêvé ?

— Rien. Tu n'as rien fait.

Il se dégage de mon emprise et continue de monter les escaliers, sous mon regard attristé.

Je ne comprends pas ce que j'ai bien pu faire cette fois. Pourquoi semble-t-il m'en vouloir ? Pourquoi a-t-il changé du jour au lendemain ? Je pose un cadenas sur mes questions et continue mon chemin vers la chambre de Romain. Andrew m'a donné le numéro. Lorsque je toque à la porte, elle s'ouvre sur lui. Il m'invite à entrer dans la chambre. Je constate qu'il est seul.

— Tu ne partages pas ta chambre ?

— Si, il est juste sorti, répond-il.

— Comment tu te sens ? je demande, même si, je connais déjà la réponse.

— Dans la mesure du possible ? Terriblement mal. Je découvre du jour au lendemain que tout ce en quoi j'ai cru depuis ma plus tendre enfance n'est qu'un mensonge et que ce Geoffrey n'est en fait qu'un grand psychopathe qui veut faire je sais pas trop quoi des pauvres gens qui croient en lui. Nous sommes ses jouets, depuis le début, il attend juste le bon moment pour agir. Toute ma famille est là-bas, nos amis, tous. Tu te rends compte ?

— Je sais ce que ça fait Romain. Mais nous ne le laisserons pas faire, nous sommes là pour l'empêcher. Comment se fait-il qu'on ne t'ai pas effacé la mémoire comme aux autres ? Pourquoi toi ? Est-ce que tu as parlé de moi à nos amis ? Qu'est-ce qu'ils ont dit ?

— Je pense que c'est un pur hasard. Ils ont dû m'oublier. Bien sûr, j'ai parlé de toi à Shylay et aux autres mais c'était comme si on leur avait littéralement effacé la mémoire. Au début, je leur parlais de toi tous les jours, j'ai fini par croire à une mauvaise blague mais, non. Ils ne se souvenaient réellement plus.

— Tu as sans doute raison.

— Je suis vraiment content de te voir Victoire. Tu m'as manqué.

— Toi aussi ! je m'exclame dans un sourire.

Il m'ouvre ses bras et je m'y blottit sans hésitation. Après de longues secondes, il finit par s'écarter.

— Il faut que je te dise un truc... Ton départ m'a vraiment dévasté, tu étais ma meilleure amie depuis toujours, ce n'a pas été facile de vivre sans toi, vraiment pas. Et... je m'en suis rendu compte trop tard, enfin, c'est ce que je pensais, jusqu'à maintenant. Depuis ce soir, quand on avait à peine quatorze ans, lorsque l'on s'est embrassés par accident. Mes sentiments n'ont cessé de grandir. À l'époque je ne savais pas, le déclic s'est fait quand tu es partie... Quand je me suis rendu compte que j'allais dorénavant devoir vivre sans toi. Sans explication. Rien. J-Je crois que je t'aime Victoire.

Mon cœur se serre doucement dans ma poitrine. Pourquoi ces mots font-ils si mal ?

Parce que j'ai tellement espéré les entendre franchir ses lèvres autrefois. Pendant des années j'ai secrètement espéré qu'un jour notre amitié deviendrait plus que ça. Et aujourd'hui... Aujourd'hui, je ne sais plus.

Il pose une main sur ma joue, m'incitant à le regarder. Une mèche brune retombe devant ses yeux qui sont bien trop concentrés autre part. Sur mes lèvres.

Avant que je n'ai le temps de réagir, ses lèvres s'emparent des miennes dans une douceur infinie. Il m'embrasse comme si j'étais la plus fragile des choses, comme si à tout moment, j'allais me briser entre ses mains. Et je ne peux qu'apprécier tant de douceur.

Mais lorsqu'il s'écarte de moi, je sais. Je sais pourquoi ces mots font si mal. Car aujourd'hui, ce n'est pas de lui que j'aurais aimé les entendre.

— Romain j-je... Je suis désolée...

— Tu ne m'aimes pas.

Je le regarde tristement.

C'est comme si je sentais son cœur se briser. Je sens son cœur se briser comme si c'était le mien. Ça fait mal. Je me sens mal. Je m'en veux terriblement d'être la raison pour laquelle ce pauvre cœur se retrouve en morceaux. Je me sens si mal que les larmes m'en montent aux yeux, sans que je ne puisse les empêcher. Merde.

— Hé, c'est pas grave, je vais m'en remettre, ne t'en fais pas Vic, tente-t-il de me rassurer en me prenant à nouveau dans ses bras.

J'entoure sa taille de mes bras, lui présentant mon affection le plus sincèrement possible. Je sais qu'il n'est pas si sûr de lui qu'il en laisse paraître.

— J-Je... Je t'aimais Romain. Je n'en étais pas sûre mais je crois bien que je t'ai aimé, pendant longtemps mais...

Ma voix se brise dans un sanglot. Il va vraiment falloir que je fasse un travail sur moi-même. Il faut que je travaille ma sensibilité, ce n'est plus possible.

— Mais ce n'est plus le cas. Ce n'est pas grave Victoire, ça va aller, dit-il en me serrant un peu plus dans ses bras.

C'est pathétique. C'est moi qui devrait le consoler. C'est moi qui viens de briser son cœur et pourtant c'est l'inverse qui est en train de se produire. Je me sens tellement ridicule, je me sens comme une enfant. Je me rends compte que plus les jours passent, plus je m'affaiblis. Il va sérieusement falloir que je remédie à ça.

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