Chapitre 3

Ciel regardait les rues de Londres sans vraiment y penser. Perdu dans ses pensées. Face à lui, Sebastian ne le lâchait pas du regard, depuis le début du voyage. Et il avait beau l'ignorer rien n'y faisait. Il serra la mâchoire, refusant de lui montrer le moindre signe d'agacement. Ce n'était pas sa façon de le fixer habituelle. Ce n'était pas le regard qui lui brulait la peau, qui lui faisait tourner les yeux pour planter son regard dans celui de Sebastian et les laisser s'enflammer, ce n'était pas celui qui l'admirait, le protégeait, anticipait chacun de ses mouvements... Non. C'était un regard qui le décortiquait, essayait de deviner, supposait et s'attardait sur chacune des crispations énervées de son corps avec délectation, sentant l'arrivée au terme du mutisme du Comte. Ciel finit d'ailleurs par soupirer d'agacement et fusiller Sebastian du regard.

-Très bien, cracha-t-il presque, nous parlions de nos fiançailles.

Sebastian cacha un sourire satisfait.

-Vous ne les aviez pas annulées dans la lettre que vous lui aviez fait parvenir avant votre départ il y a six ans ?

-Si. Et puisque je suis de retour, Elizabeth considère qu'elles ne le sont plus.

Sebastian empêcha son regard de s'enflammer : cette lady voulait s'accaparer son comte ? Il eut un rictus carnassier. Qu'elle essaie un peu ! Ciel Phantomhive était à lui !

Ciel haussa un sourcil amusé.

-Ne fait pas cette tête Sebastian, on dirait que tu vas dévorer quelqu'un.

Sebastian lui jeta un regard brulant et le comte détourna la tête, se concentrant à nouveau sur les rues de Londres, sentant ses joues chauffer sous la pression du regard qu'il aimait tant, ce qu'il n'avouerait jamais bien sur.

Une main gantée se posa sur sa joue et lui fit tourner la tête. Les regards se mêlèrent, encore une fois, incandescent. Rouge sanglant. Sourires carnassiers. Le pouce de Sebastian glissa sur la pommette de son maitre avant de s'infiltrer sous son cache œil, le soulevant pour dévoiler sa marque. Ce symbole encré en Ciel pour l'éternité, montrant qu'il était sien, et que jamais personne ne pourrait poser ses mains sur lui.

Le violet se mêla au rouge, tache sensuelle et sombre au milieu de tout ce sang. Ciel posa sa main sur celle de Sebastian et lui retira son gant. Dévoilant à son tour la marque encrée dans la chair du démon qui le fixait sans cesse. Il entrouvrit les lèvres pour happer de l'air alors que la main de Sebastian recouvrait son oeil, superposant les deux symboles. La pression était si forte, si intense. Il était happée par le regard du démon face à lui comme il l'avait été la première fois qu'il l'avait vu.

Seul, dans sa cage, tremblant de froid et de peur, puis... Sebastian. Une présence impossible à rater mais pourtant délicate. Les plumes noires tombant à flot, comme un matelas moelleux, sans bruit, sans même troubler l'air. Le bruit des talons haut claquant sur le sol. Les griffes acérées se présentant à lui, main d'ébène ouverte. La sienne, si blanche et pure, qui s'y superpose, si petite. La voix profonde, moqueuse. Une aide, un mensonge. Un souhait, un maléfice. Un contrat, une marque, son œil brule, le sang l'aveugle. Le démon le libère de sa cage pour l'enchainer à des liens bien plus solides, desquels il ne pourra jamais se séparer. Le démon qui le prend dans ses bras, et son premier ordre...

Un massacre. Le sang. Partout. Sur lui. Autour. Sur le démon. Les cris. Ils résonnent encore. Dans ses oreilles. Entre les murs. La mort. Omniprésente. Fin de vie. Pas de retour possible. Tout comme son contrat.

Oh quel terrible contrat. Ce contrat si mortel...

Ciel cligna des yeux et sourit doucement à Sebastian. Qui aurait cru que ce contrat l'ayant voué à la mort se finirait ainsi ? Il avait été prêt, prêt à mourir, à se faire dévorer par son délicat et sanglant majordome. Le destin en avait décidé autrement, les liant pour l'éternité...

Sebastian redescendit lentement sa main sur la joue de son maitre. Caresse légère, subtile. Ciel ferma les yeux, il aimait ce contact si rassurant. Il aurait pu rester des heures ainsi, Sebastian penché vers lui, sa douce caresse contre sa peau, son regard brulant parcourant son corps. Une quiétude agréable le pris. Il rouvrit les yeux et sourit doucement, laissant Sebastian lui répondre d'un sourire doux. Phénomène si rare chez lui...

-Que comptez-vous faire pour Mademoiselle Elizabeth alors ? Demanda-t-il doucement en continuant à caresser la pommette du comte de son pouce.

Ciel soupira.

-Je ne sais pas. Je ne veux pas lui faire du mal. Mais je suis éternel et elle finira bien par remarquer que je ne vieillis pas... De plus ce n'a jamais été qu'une chère amie pour moi...

Sebastian sourit et descendit subtilement sa main sur la gorge de Ciel qui se serait mis à ronronner s'il était un chat. (Mais au grand désespoir de Sebastian il n'en était pas un... Après tout, un chat allergique aux chats franchement...)

-Sebastian ?

-Oui jeune maitre ?

-Tu as de la famille toi ? Demanda Ciel en plantant son regard plus profondément dans celui de son majordome, sondant son âme pour y découvrir toutes les réponses qu'il cherchait.

Enfin, son âme... C'était un bien grand mot puisque les démons n'en avaient pas. Disons qu'il cherchait au fond de son être.

-Vous êtes bien curieux, sourit Sebastian avant de retirer sa main de la gorge de son maitre et de remettre son gant. Mais ce n'est ni le lieu, ni le moment pour en parler, nous sommes arrivés.

Ciel rangea sa curiosité au fond de lui, la conservant pour plus tard, remis son cache œil et sortit de la voiture en prenant la main que Sebastian lui tendait. A peine fut-il pied à terre qu'une tornade brune se précipita sur lui, l'enserrant dans ses bras à l'étouffer en pleurant.

-Allons bon. Pourquoi tous ceux que je revois ont la même réaction ?

-Cieeel ! Tu m'as tellement manqué !

-Prince Soma, salua Sebastian.

-Mon prince, relâchez Ciel de votre étreinte, laissez le respirer, intervint Agni.

Soma s'écarta enfin de Ciel et le parcouru du regard, ébahi.

-Oh Ciel ! Tu as tellement changé !

-C'est simplement que nous ne nous sommes pas vus depuis longtemps.

Après de longues embrassades de la part du prince, Ciel réussit enfin à s'éclipser jusqu'à sa chambre, s'y reposer un peu et y déjeuner rapidement en discutant avec Sebastian puis ils s'éclipsèrent pour faire quelques achats avant leur entrevue avec la reine.

-Nous nous occuperons des achats communs un autre jour, je veux seulement fournir à ma garde robe de quoi honorer mon entrevue.

-Nous en profiterons pour acheter tous les costumes dont vous avez besoin.

Le comte opina.

-Cela va faire longtemps que nous ne sommes pas allés sur la Savile Row. Je me demande comment se porte ce vieux Norton.

-C'est vrai.

La voiture s'arrêta rapidement en face du vieux magasin connu Norton and son, sur la grande rue parallèle à la fameuse Regent Street.

Sebastian aida son maitre à descendre et lui tint la porte. Un vendeur vint immédiatement les accueillir, s'inclinant avec respect.

-Que puis-je faire pour ces messieurs ?

-J'aimerais commander plusieurs costumes sur mesure, Monsieur Norton doit avoir gardé quelques costumes en réserve pour moi.

Les relations entre ce tailleur et la famille Phantomhive avaient toujours été très amicales et M.Norton prévoyait souvent plusieurs costumes en avance en cas d'urgence.

-M.Norton n'est pas là mais son fils va vous prendre en charge immédiatement, indiqua le vendeur en les emmenant dans une large pièce d'essayage personnelle. Je vais le chercher.

Le jeune homme s'éclipsa et le Comte s'assit avec un soupir.

-J'espère que le fils est aussi doué que le père...

Sebastian eut un sourire et se retint de dire que son maitre était dans tous les cas à son mieux lorsqu'il était dévêtu. Son regard parla pour lui, déshabillant méticuleusement son maitre sur un fauteuil riche en décorations, ses jambes fines croisées élégamment et un sourire insolant au visage.

Leur échange silencieux fut interrompu par l'arrivée d'un jeune homme au cheveux bruns, le nez aquilin et des yeux camouflés derrière d'épaisses lunettes. Un sourire immense s'étalait sur son visage et il salua d'un geste pressé les deux visiteurs.

-C... Comte Phantomhive, mon père désespérait de votre venue ! Bafouilla-t-il d'un air excité. Laissez moi prendre vos mesures pendant que vous m'expliquez exactement ce dont vous avez besoin.

Ciel monta sur le petit podium au milieu de la pièce et le jeune brun s'approcha de lui pour commencer à le déshabiller. Le comte darda sur lui un regard si puissant qu'il recula d'un pas devant son air furieux.

-Seul mon majordome est autorisé à me toucher. Sebastian, s'il te plait, ordonna-t-il.

Sebastian obéit avec un sourire narquois. Il aimait les marques de possession de son maitre envers lui, comme celles-ci. Il aimait être le seul à pouvoir approcher son maitre, toucher sa peau de porcelaine et sentir les frissons provoqués par ses caresses délicates. Il le déshabilla rapidement, lui laissant sa chemise sur le dos et adressant un sourire victorieux au comte qui lui rendit un regard rusé. Qu'avait-il encore préparé ?

-Vous pouvez prendre mes mesures, autorisa enfin le jeune comte au tailleur.

Celui-ci se mit immédiatement au travail, sorti de l'admiration du corps de Ciel qui était si fin, si séduisant qu'il aurait fait se damner n'importe quel saint. Il déglutit en enroulant son mètre autour de sa taille, si fine, presque marquée comme celle d'une femme... Puis il prit la parole.

-Alors de quoi avez vous besoin ?

-Hum... Il me faut un costume en urgence pour aujourd'hui 17 heures. J'ai une entrevue avec la reine, je vous laisse imaginer l'importance de ma tenue. Il me faut ensuite plusieurs costumes pour différentes occasions, bals, jours quotidiens, etc. Vous pouvez voir ces détails avec Sebastian.

-D'accord, je suppose que vous les voudrez prêts le plus rapidement possible ?

-Oui.

-Pour celui d'aujourd'hui je n'aurai pas le temps d'en coudre un nouveau, je vous proposerai donc d'utiliser l'un de ceux en réserve pour votre défunt père une fois que je l'aurai mis à la bonne taille.

Ciel fronça les sourcils.

-Je ne veux pas d'un travail fait à moitié, débrouillez vous pour me fait un costume à la hauteur, je me fiche de la méthode utilisée tant que le résultat est là.

Le jeune homme opina précipitamment et finit de prendre les mesures du Comte. Dans un coin de la pièce, le regard de Sebastian parcourait le corps à moitié nu de son maitre, brulant la peau de Ciel de son regard rougeoyant. Celui-ci étirait un sourire satisfait, une lueur rusée dans le regard intrigant de plus en plus le majordome.

-Voilà, j'ai finit. Je pense que le costume sera finit à 16h30, cela vous ira ?

-Oui, ça ira.

Sebastian rhabilla rapidement son jeune maitre, caressant discrètement sa peau, s'en attirant des regards réprobateurs.

-Vous avez besoin d'autre chose ?

-Oui, sourit Ciel, j'aimerai que vous confectionniez un autre costume pour mon majordome.

Sebastian écarquilla les yeux avant de pencher sa tête sur le coté, interrogateur.

-Quel genre de costume ?

-Un costume de majordome, noir.

-Très bien, je vais prendre ses mesures, il se tourna vers Sebastian, si vous voulez bien venir vous placer ?

Sebastian monta sur le petit podium et retira ses vêtements, comprenant enfin la raison de tout ceci... Le comte s'était rassit sur le fauteuil et promenait sur son corps un regard satisfait, carnassier. Il sourit d'un air amusé et laissa le brun prendre ses mesures tout en indiquant les différentes sortes de costumes nécessaires pour Ciel.

-Je vous livrerai ce costumes en même temps que les autres.

-C'est parfait. Merci de votre travail, nous revenons donc à 16h30.

-A tout à l'heure, les salua le tailleur alors qu'ils sortaient de la pièce une fois Sebastian habillé.

Les deux démons sortirent dans la rue et, décidèrent d'un commun accord de se rendre chez Lao puisqu'il leur restait deux bonnes heures avant d'aller récupérer le costume.

Ils marchèrent dans les rues de Londres, les souvenirs de la ville remontant à leurs esprits. Que ce soit pour les aventures de Jack l'éventreur, le marché sur la glace ou le feu ravageant la ville... Des bons comme des mauvais.

Sebastian prit enfin la parole, voyant son maitre s'enfoncer trop hardiment dans de mauvais souvenirs.

-J'espère que vous avez bien profité de la vue, susurra-t-il, tout à l'heure.

Ciel étira un sourire carnassier.

-Tu ne t'es pas gêné non plus.

-Vous ne me l'avez jamais interdit... Désireriez-vous que j'arrête ? Demanda-t-il d'un air narquois.

Piégé, le Comte... Sebastian se demandait s'il allait mentir ou oser avouer que ses regards lui plaisaient.

-Je ne voudrais pas te priver d'un de tes hobbies favoris, susurra le Comte, faisant s'élargir le sourire de son majordome dont les yeux rougeoyèrent un instant.

-Un costume en plus à payer pour vos simples lubies, soupira-t-il. Vous auriez tout simplement pu m'avouer que vous vouliez à ce point regarder mon corps...

-Ce n'aurait pas été aussi amusant.

-C'est vrai que pour vous, tout est source d'amusement...

-Pour toi aussi, n'est-ce pas mon cher Sebastian ?

Les deux démons se sourirent d'un air à la fois taquin et vicieux. La discussion s'arrêta pourtant là puisqu'ils arrivèrent dans les quartiers sous l'influence de Lao et pénétrèrent les sous sols de son repère. La fumée envahissait l'air qui embaumait l'opium. Et au fond d'une longue salle parcourue de matelas et de coussins où des hommes déliraient plus ou moins se trouvait Lao, toujours entouré de sa soeur et d'autres jolies jeunes femmes asiatiques plus dévêtues que vêtues.

-Mais c'est ce cher Comte Phantomhive, s'étonna le chinois.

-Bonjour Lao, ton marché se porte toujours aussi bien, à ce que je vois.

L'asiatique souris.

-Le votre aussi, je savais que vous rentreriez bientôt ! Et toujours accompagné de votre ombre hein... Ne me dites pas que vous avez passé six ans ensemble ? Rit-il. Je suppose que vous êtes ici pour vérifier mes trafics hein ? Eh bien comme vous pouvez le voir, tout se porte bien.

-Je voulais simplement venir te rendre visite mon cher Lao. Je n'ai pas besoin de me rendre ici pour vérifier tes petites affaires.

-C'est vrai qu'il t'aurait suffit d'envoyer Sebastian.

-Eh bien, je voulais te parler de quelque chose.

-Oh ! Cette chose ?

Ciel haussa un sourcil.

-En effet, tu es donc au courant.

Lao opina.

-Sebastian, donnes moi le contrat.

-Euh, de quel contrat parlez vous, cher Comte ? Demanda Lao.

Ciel se figea avant de soupirer.

-Bien sur, j'aurais du savoir que tu ne faisais que semblant, comme d'habitude... Tu ne sais rien n'est-ce pas.

Ciel secoua la tête affligé.

-As-tu déjà entendu parlé du réseau de Xiao Ring ?

-Oui, je le surveille activement, c'est un nouveau concurrent qui pourrait devenir embêtant.

-Je suis heureux que nous soyons sur la même longueur d'onde. Et c'est pour cela que je voulais te proposer un petit contrat. Il t'assurera mon soutient contre cet homme et je veux en échange, ta loyauté complète.

-Vous assurez vos arrières... Très bien, j'accepte ce contrat, donnez le moi.

Sebastian tendit la feuille au maitre des lieux qui signa après avoir lu en diagonale le contrat.

-Très bien, nous pouvons partir Sebastian. Au revoir Lao.

-Au revoir très cher Comte. Même si je sens que nous allons bientôt nous revoir. N'est ce pas Ran Mao ?

-Hum.

Une fois dehors Ciel sourit en regardant le contrat, le roulant avant de le glisser dans une de ses poches internes.

-Vous saviez qu'il ne le lirait pas complètement, n'est-ce pas ?

-As-tu vraiment besoin de poser la question Sebastian ?

-Non, vous avez raison... Vous avez bien fait de limiter son champs d'action. A présent, s'il étend l'opium hors de sa zone d'influence, il perdra tout voter soutien contre ce Xiao Ring.

-En effet. Je me devais de faire cela pour sauver au moins en partie notre bonne vieille ville de cette drogue. Bien, il est l'heure. Allons récupérer mon costume. Il ne faudrait pas faire attendre la reine.

Voilà pour ce troisième chapitre ! N'hésitez pas à laisser un commentaire ça fait toujours plaisir ! A bientôt pour la suite !
Saneria17.

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