Segment 23 : Vendredi 29 juillet
9h, je sonne chez Dylan, craignant de me faire rembarrer parce qu'il a embranché sur une nouvelle grasse matinée. Pas du tout : debout dès 6h, il a déjà transféré son KAAD sur une tablette dernier cri. Il est parvenu à pénétrer dans les programmes et à modifier les paramètres. La discussion à plusieurs est devenue possible, par exemple. Présentement, il est en pleine conversation avec Francine.
Il s'interrompt, pour me présenter : "Le Loustic, un pote, écrivain à ses heures, version intellectuello-tordue, adepte littérature déjantée ; histoire de parvenir pour une fois à se faire publier, il s'est lancé dans une biographie de toi..."
– Et il y en a une qui n'a pas apprécié, ricane Francine.
– Pas vraiment, je réponds.
– En littérature, à part Abbey Clitora, Apo Kalypse ou Angel Bloody, on est sûr de ne récolter que des ennuis... allez, si vous êtes bien sages, vous allez sans doute pouvoir vous rendre utile, qu'elle ajoute.
On remet la conversation sur ses rapports avec Stacy de Valera :
– Stacy de Valera : tu la connais bien Mamie ?
– Evidemment, c'est moi qui l'ai inventée !
– Wribox aussi ?
– Bien sûr.
– T'es un génie Mamie !
– Je t'adore, mon petit.
Ce qu'elle savait de la vraie Stacy de Valera, de sa disparition, du cadavre ? Effet collatéral, aussi regrettable qu'inévitable. Pour les détails, motus. Stessie et Stacy, oui, bien sûr, c'était voulu. La disparition de l'une, un drame, dont elle rendait l'autre entièrement responsable. D'ailleurs cette indifférence à la famille, Francine ne la digérait pas du tout. Manifestement, la créature avait échappé à sa créatrice.
Il était prévu que Jean Michemain s'occuperait de près des Dupontet, petits et grands, tout comme il devait veiller, le moment venu, à sa propre succession. Surveillance rapprochée, sans excès ni débordements. Qu'il se retrouve incarcéré, Carmel Castle, pour une raison obscure, par orgueil et par égoïsme bien davantage que pour sa santé, ça n'était pas du tout au programme.
Jamais Martine n'aurait dû tomber entre les mains de ce Manitou de la fougère. Jamais Anne-Laure n'aurait dû se retrouver sur le trottoir. Jamais au grand jamais Stessie n'aurait dû en arriver là.
Et Dylan, son petit Dylan, jamais il n'aurait dû se retrouver abandonné sur le pavé parisien, même s'il s'en était sacrément bien sorti. Même qu'elle était fichtrement fière de lui !
Et puis surtout, question héritage, c'était la cata. Parole d'experte ! Il fallait absolument que Dylan devienne l'héritier de Stacy de Valera, ou son légataire universel. Il en était digne. Il l'avait prouvé. Et là, c'était coton. Maîtriser la bête, la mettre à genoux, lui faire rendre gorge, tout en s'assurant de sa collaboration : gant de velours et main de fer, le grand jeu et son contraire, oxymore et succession...
Surtout que Dylan ne coupe pas son KAAD. Il avait fait sauter tous les pare-feu. Parfait. Formidable qu'il ait ainsi appris à coder. Bien plus efficace aujourd'hui que de savoir écrire... Elle allait pouvoir utiliser tous les sous-programmes dont elle avait besoin pour faire émerger la solution, quelle qu'elle soit...
Moi, là-dedans ? Que je ne me fasse pas de bile. Elle allait me tailler un rôle à ma mesure. Je n'aurais pas à me plaindre. Promis.
KAAD ouvert, Francine en pleine réflexion, on l'a donc laissée cogiter avec ses neurones artificiels et on est allé déjeuner. Hector Vacherin nous invite. Restaurant La Méditerranée, face au théâtre de l'Odéon, au milieu des sénateurs affairés avec leurs secrétaires attitrées, même fin juillet.
Un sacré débrouillard, Hector : en deux jours, il est parvenu à obtenir un passeport pour Dylan et un visa pour tous les trois.
Une voiture de location nous attend à l'aéroport de San Francisco, motel réservé, Franck Appleton au courant.
On embarque ce soir. Rendez-vous aéroport de Roissy, 18h30, terminal B, hall 4.
Et hop, c'est parti...
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top