Un nouveau défi (partie 1)
ALESSIA
Je ne sais ce qui me fait le plus peur : travailler pour un parfait inconnu ou devoir recommencer à vivre normalement.
Ce que je n'arrive pas à saisir dans tout le marasme de mon esprit, c'est comment j'ai pu oublier toute une partie de la soirée qui a changé ma vie à jamais. La seule chose que j'ai gardée en mémoire c'est la route que nous avons faite avec Dante. Je ressens encore les vibrations de l'asphalte, le vent frais claquer sur mes chevilles nues, et la vitesse ahurissante dans laquelle Dante m'entraînait. Venise étant une ville faite de rues minuscules, la conduite n'est pas simple et parfois dangereuse.
Il me semble que mon frère nous emmenait vers notre deuxième résidence, aux portes de la ville. Notre père l'avait acheté pour que nous ayons un lieu tranquille, loin de la pègre et des problèmes mafieux. Cette maison était sûrement la plus sécurisée du pays. De nombreuses caméras de surveillances avaient été installées et un vrai poste de contrôle, avec des agents expérimentés, s'assurait de tous les allers et venues. Ma mère l'a toujours qualifié de "citadelle imprenable".
J'avais déjà fouillé dans le portable que m'avait donné Cristiano pour essayer de trouver des indices mais il n'y avait que son numéro d'enregistré. Je ne comprends pas pourquoi Dante, ou même Arturo, n'ont pas essayé de me contacter. Je suppose qu'ils savent où je suis.
Du sang. Oui ! Dante était couvert de sang quand il m'a récupéré à l'hôtel vénitien ! C'est à cet instant que mon esprit dérive vers les côtés obscurs de ma mémoire.
*********
Venise, Italie, Résidence De la Rivera, 4 juin 2019
— Oh ma chérie !
Je vois ma mère accourir vers moi les yeux remplis de larmes. Son mascara a coulé et sa bouche tremble de terreur. Quand elle me prend dans ses bras, elle me sert si fort que je ne parviens même plus à respirer. Ma panique commence à se refaire un nid douillet au creux de mon estomac.
Dante ne prend même pas le temps de ranger sa moto et nous invite à rentrer. À peine ai-je passé la porte d'entrée que j'entends mon père et Arturo hurler. Que se passe-t-il ?
— Maman ?
— Ne pose pas de question amor mio. Nous allons tout arranger.
Je vois mon père sortir en trombe de son bureau privé qu'il a fait installer au rez-de-chaussée. Son teint est rouge de colère et ses yeux lancent des éclairs. Mais quand il me voit, sa rage fait place à l'inquiétude et il se précipite pour me serrer contre lui. Soudain, il se recule en me fixant de haut en bas avec un air inquiet. Il me tient fermement les épaules et j'ai la sensation que la poigne de mon père est nécessaire pour ne pas que je m'effondre sur le sol.
— Tu n'as rien ? Est-ce qu'il t'a touché ? Est-ce qu'il ...
— Papa... Laisse-la respirer.
Dante est posté juste derrière moi et regarde notre père avec la même gravité que lorsqu'il m'a récupéré. Il a l'air épuisé et profondément affecté. Je ne l'ai jamais vu avec une telle lueur dans les yeux : la culpabilité.
Mon père ne dit rien, et sans que je m'y attende, il me lâche pour frapper mon frère en plein visage. Le son de son geste se répercute sur les murs de l'entrée et intime le silence à tout le monde.
—Tu étais chargé de prendre toutes les informations nécessaires sur la famille Julliani ! Tu m'as juré qu'ils étaient réglo ! Mais "monsieur le déconneur" a préféré aller faire la fête et se prendre des cuites au lieu de veiller à la sécurité de son unique petite sœur !
Dante repousse avec force mon père tout en se tenant le côté du visage. Je n'ai jamais observé un tel acharnement de la part de mon frère à l'égard de sa propre famille, mais je sais parfaitement de quoi il est capable avec ses poings. Je n'ai pas envie d'assister à une bagarre entre lui et mon père.
Arturo intervient pour les séparer avant que la situation ne dégénère. La tension est à son comble. J'ai l'impression que nous sommes dans une pièce remplie d'essence et qu'à la moindre étincelle, un immense incendie nous emporterait tous.
Dante se dégage et lance un regard assassin autour de lui. Je sens qu'il essaye tant bien que mal de reprendre son calme. Il a l'air d'une bête féroce prête à fondre sur sa proie :
— Ça te va bien de faire la morale ! Qui l'a obligé à épouser le fils d'un mafieux !? Au lieu de se demander qui a le plus merder, je pense qu'il serait peut-être temps de trouver une solution non ?
Dante soutient le regard de notre père et ne se démonte pas devant sa taille impressionnante et ses yeux de tueur. Ma mère prend les devants et commence à caresser timidement l'épaule de son mari pour qu'il se calme.
Soudain, alors que tout le monde semble s'apaiser un peu, une déflagration retentit à l'extérieur. Peu importe qui ils sont, nos ennemis sont rentrés dans notre forteresse et le regard de mes frères se rempli de peur. Je comprends à cet instant précis que nous sommes tous condamnés.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top