Prise au piège (partie 3)
Je suis choquée par mes propres paroles. Jamais je ne m'étais permise une telle vulgarité envers mes frères, mais mes choix d'action sont restreints à présent. La sensation que la Mer Rouge séparée par Moïse va se refermer sur moi, est très désagréable et me rend agressive.
Cristiano se lève et se dirige vers la porte. Sa démarche est lourde, et il semble anéanti sous le poids de la culpabilité que j'ai refusé de lui ôter. Malgré toutes mes attaques verbales, un tendre « bonne nuit » s'échappe de ses lèvres avant qu'il ne passe la porte de la chambre. Mon cœur se serre et, comme si ça ne suffisait pas, je me rends compte que l'un des paquets de sucre sur le chariot du room-service contient quelque chose de plus consistant. Comment les gardes ont pu passer à côté ?
Lorsque je déchire le papier, mes mains accueillent une mini-clé USB. Génial. Il n'y a aucun ordinateur sur lequel je puisse me connecter. Je vais devoir attendre le lendemain matin pour savoir quel tour Alfredo compte encore me jouer.
Par acquis de conscience, j'observe tous les paquets de sauce et de condiments qui se trouvent sur le chariot. Le dernier paquet de sel contient une oreillette minuscule avec une lumière verte qui clignote. Sérieusement, Interpol engage des bras cassés dans leur équipe de surveillance.
Sans réfléchir, je mets en place l'oreillette et attends qu'il se passe quelque chose. Comme ma patience a des limites, je décide de l'enlever au bout de quelques minutes. Au moment où mes doigts vont rencontrer le plastique de l'instrument d'espion, une voix qui me glacera toujours le sang parvient à mon oreille. Elle est aussi effrayante que dans mes souvenirs, aussi exempte d'émotions et d'empathie : Alfredo.
— Bonsoir ma belle. Je savais que tu serais assez intelligente pour suivre mes instructions. Surtout ne parle pas. J'ai tout de même réussi à brouiller les caméras de surveillance de ta chambre d'hôtel mais il y a toujours des micros qui trainent.
Je déglutis avec peine, ma gorge est sèche et mes yeux me brûlent, sans parler de ma tête qui menace d'exploser à tout moment. Mes membres me trahissent par des tremblements incontrôlés et une nouvelle envie de vomir me frappe de plein fouet. Sois forte Alessia. Je me répète cette phrase dans ma tête afin de persuader mon système nerveux sympathique de ne pas sécréter trop d'adrénaline. Il est important de garder son calme dans certaines situations, et celle que me fait vivre Alfredo est sans aucun doute l'une d'entre elles.
— Tu n'as jamais aimé la sauce samouraï. C'est l'une des choses que j'ai apprises quand je t'observais manger.
Étonnée par la direction que prend la conversation, mes sourcils se froncent automatiquement. Il est encore plus dingue que je ne le pensais il y a quelques minutes. Au même moment, mon regard se pose sur la mini-bouteille de la sauce en question sur le chariot du room-service. Le souffle serein d'Alfredo parvint à nouveau au creux de mon oreille. Si cela ne tenait qu'à moi, j'arracherais le dispositif aussi sec.
— Je suppose que comme tu n'es pas une criminelle en puissance, ni une veuve noire, les propriétés du thallium te sont inconnues. Imagine un produit transparent, sans odeur, sans goût, et dont les caractéristiques moléculaires ressemblent comme deux gouttes d'eau à celles du sodium et du potassium qui sont présents en quantité dans le corps.
Mon dieu... Alfredo allait me faire tuer quelqu'un, j'en étais persuadée...
— Tu n'es pas idiote. Je pense que tu as compris ce que je vais te demander d'accomplir. Ce sera ta première mission, une sorte de test, si tu préfères. L'homme moustachu, qui sera à ta droite lors de la réunion, aura une bouteille d'eau devant lui : ce sera ta cible. Tu dois trouver une solution pour mettre le thallium dans ta bouteille et l'intervertir avec la sienne. Si jamais les membres d'Interpol décident de changer les places des responsables autour de cette « table ronde », tu dois te souvenir de son nom : « Ricardo Valliselli ».
Mon cœur sera bientôt hors de ma poitrine, mon stress est trop intense pour que mes organes restent indemnes. Mon mari est un monstre, un tueur, un violeur, un usurpateur, un manipulateur ! La liste est longue et non-exhaustive !
— Dors bien ma belle. Je suis persuadé que tu seras à la hauteur. Oh ! J'oubliais ! Les yeux de cette petite Lily Davis sont absolument magnifiques : deux obsidiennes aux reflets dorés ! C'est si rare...
La menace d'Alfredo est plutôt claire et un sentiment d'impuissance et de tristesse me parcourt toute entière. Un froid glacial remonte le long de ma colonne vertébrale et des larmes de désespoir menacent de couler sur mon visage. Dans quoi cet enfoiré m'avait-il embarquée ?
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