Les préparatifs (partie 2)


— Dante ! Pezzo di merda ! Tu as grandi gamin !

Le rondouillard frotte les cheveux déjà décoiffés du frère d'Alessia et lui donne une tape amicale sur la joue. Son ami squelettique rit aux éclats et serre affectueusement l'épaule de Dante tout en parlant italien. À peine deux minutes après que nous nous soyons pointés avec une arme, nos deux visiteurs sont au milieu de la chambre d'hôtel en train de repenser au bon vieux temps avec Dante. Alors que je me racle la gorge, ils daignent enfin m'accorder un regard.

— Je ne voudrais pas interrompre les retrouvailles, mais Alessia est en prison pour un crime qu'elle n'a pas commis. Est-ce que l'on pourrait parler d'un éventuel plan pour la libérer ?

Un long silence suit ma tirade et je commence à me sentir mal à l'aise au milieu de ce petit groupe. Comme si ce n'était pas suffisant, les deux nouveaux se mettent à éclater de rire et, à ma grande surprise, Dante les rejoint.

— Et tu comptes aller au Pentagone ? Tu penses que l'on va s'amener avec des armes et des cagoules pour aller délivrer Alessia aux mains de la Défense Nationale Américaine ?

— Bon c'est vrai que dit comme ça...

— Il faut être plus malin et c'est pour ça que j'ai appelé Sergio et Augusto.

Les rires cessent et j'observe les amis de Dante avec méfiance. Décidant de prendre les devants, je tends la main vers le plus maigre des deux qui a encore une cigarette au coin des lèvres. Soit, ils prennent un malin plaisir à me mettre mal à l'aise, soit, ils n'ont clairement pas confiance en moi, car ma main reste sans réponse pendant plus de trente secondes. Finalement c'est celui au ventre bedonnant de bière qui me vient en aide. Son sourire est tapissé de couronnes dorées et ses yeux injectés de sang montrent qu'il ne se refuse aucun plaisir de la vie :

— Je suis Sergio, et celui qui te regarde comme si tu étais un petit chihuahua, c'est Augusto. Ils n'aiment pas trop les nouvelles têtes, mais il finira par s'habituer à ta belle gueule de Cow-Boy. Dante nous a déjà parlé de toi et nous a briefé sur la situation. Le fait que le Pentagone s'en mêle complique les choses.

— J'ai peut-être une idée.

Dante a prononcé cette phrase d'un air pensif et son regard reste rivé au sol de la chambre d'hôtel. Il se tourne vers Augusto en levant son index :

— Est-ce que tu es toujours en contact avec la mafia russe ?

Si. Mais je ne vois pas en quoi elle pourra t'aider, ragazzo. Les russes ne sont pas connus pour rendre des services sans de lourdes contreparties.

Dante ne prend pas la peine de répondre à son ami, et se tourne cette fois vers Sergio :

— Toi tu t'y connais dans le monde des cartels colombiens et mexicains ? Tu as toujours des contacts ?

— Tu es complètement fou si tu crois que les descendants de Pablo Escobar vont vouloir t'aider ! Qu'est-ce que tu mijotes ?

Le frère d'Alessia se lève et arpente la pièce pendant au moins une minute avant de nous lancer, à tous les trois, un regard combattif et déterminé.

— J'ai un contact qui sait craquer les serveurs les plus puissants qui puissent exister, aucun cryptage ne lui résiste. Elle est assez chère, mais c'est une déesse dans le milieu.

— Tu vas nous dire à quoi tu penses cretinetto !

Sergio commence à s'impatienter, et Augusto, sûrement en proie au même stress que moi, s'allume une autre cigarette. Dante réfléchit quelques secondes et finit par se mettre à table :

— À votre avis, qu'est-ce qui effraie le plus la Défense Américaine ?

— On n'a pas le temps de jouer aux devinettes !

Cette fois, c'est moi qui perds mon calme et commence à accuser le coup des nombreuses heures de sommeil perdues.

— On sait qu'ils veulent Alfredo et tous les partisans du clan Julliani. Ce que l'on sait aussi, c'est que les américains sont connus pour infiltrer les clans mafieux et les cartels pour les prendre de l'intérieur. Or, l'identité des agents infiltrés n'est connue que par les services de sécurité de nos chers amis Outre-Atlantique. Imaginez que l'on porte à la connaissance de tous les groupes criminels le nom de ces agents sous couverture.

— Tu veux faire du chantage.

— Tu as tout compris Lucky Luke ! On fait une annonce virale sur internet : soit ils nous livrent Alessia, soit on balance leurs agents chéris !

— Ils se feront descendre un par un si tu fais ça ! Wikileaks a mis en danger des centaines d'infiltrés au Moyen-Orient avec de telles actions ! Ils ne laisseront pas un autre « terroriste du net » violer leurs secrets d'État !

Je sais que je ne devrais pas m'énerver et que seul Dante est capable de m'aider à sauver Alessia des mains du Pentagone, mais son plan est de la folie pure ! 

Soudain, Sergio se lève pour faire face à un Dante qui se ronge les ongles sous le coup du stress. Il pose sa main potelée sur l'épaule du jeune homme et lui adresse un regard entendu.

Ragazzo, je te fais confiance sur ce coup. Après tout, ce n'est pas comme si on pouvait défoncer à coups de blindés les portes du Pentagone pour aller chercher notre petite Alessia.

Augusto acquiesce d'un bref signe de tête, et tous les trois se tournent vers moi, pour savoir si je suis prêt à me jeter dans ce plan démentiel avec eux. Sincèrement, si je n'avais pas rencontré cette belle italienne aux cheveux dorés, plongé mon âme et mon cœur dans ses beaux yeux noisette, ma réponse aurait été négative. Mais, rien qu'en fermant les yeux et en imaginant l'infime possibilité que ce plan marche, ma décision est sans appel.

— Allons donner un bon coup de pied dans la fourmilière des renseignements américains. Après tout, ce n'est pas comme si on pouvait jouer tous les jours à Jason Bourne.

Sergio éclate de rire et vient me donner une bonne claque dans le dos en signe d'assentiment.

— Il me plaît ce gamin de la campagne ! 

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