PARKER

Je suis en colère. Allie, enfin Alessia, me ment depuis le début. Je l'ai laissé s'immiscer dans ma vie, rencontrer ma fille, et être amie avec Nana et ma belle-sœur. Je savais que j'étais un idiot mais je ne pensais pas être un parfait abruti qui se ferait flouer par la première belle étrangère arrivée à Chugwater !

Mon sang bouillonne dans mes veines et j'ai envie de tout briser autour de moi. Je savais qu'elle me cachait des choses et que son passé la hantait, mais je ne m'attendais pas à recoudre son frère dans mon salon.

J'ai mon téléphone entre les mains et je consulte les pages Wikipédia qui parlent de la famille italienne De La Rivera. Des mafieux de premier ordre. Un article attire particulièrement mon attention. Il s'agit d'un journal italien local qui parle du massacre de la famille De la Rivera. Plusieurs corps n'ont pas été identifiés lors d'une explosion. Ils suspectent le gouvernement de cacher volontairement des informations à la population.

— Qu'est-ce que tu regardes ?

Je sursaute au son de la voix de Maddie. Elle se tient juste derrière moi et heureusement j'ai juste le temps de mettre mon portable en veille avant qu'elle puisse voir quoi que ce soit.

— Heu... Tu te mates un film porno ?

— Quoi ? Non !

Je prends mon air offusqué et elle éclate de rire.

— Tu devrais voir ta tête !

— Laisse-moi tranquille Maddie. Ce n'est pas le jour.

— Oulah ! J'en connais un qui s'est levé du pieds gauche ce matin !

Je soupire et me frotte le visage pour tenter de me réveiller. Je n'aurais pas dû être autant agressif mais la nuit n'a pas été de tout repos, sans parler de Lily qui a mis au moins deux heures avant de s'endormir. Je n'arrive pas à comptabiliser le nombre de questions qu'elle m'a posées et auxquelles je n'avais aucune réponse.

— Désolé Maddie, j'ai passé une sale nuit.

— Allie t'a jeté ?

Quoi ? Mais de quoi elle parlait ? D'ailleurs j'aurais dû la reprendre puisqu'Allie se révélait être en réalité Alessia De La Rivera, fille de Enrico De La Rivera membre de la mafia italienne.

— Laisse tomber Maddie, s'il te plaît. De toute façon j'allai partir. Je te dois combien ?

— onze cinquante.

— Ne m'en veux pas d'accord ?

Je n'attends pas sa réponse et me lève pour quitter le NEW WAY. Il faut que je retourne au ranch pour avoir le fin mot de l'histoire.

J'ai à peine passé le portail de la propriété que je vois la belle chevelure blonde d'Alessia. Ses yeux noisette me fixent d'un air inquiet alors qu'elle se tient juste devant la porte qui mène aux boxs des chevaux. Elle ne porte qu'un short en jeans et un tee-shirt noir mais je ne peux m'empêcher de la trouver sublime. Son frère n'est pas dans les parages, soit il est parti, soit il est dans la maison à faire je ne sais quoi.

Je coupe le moteur et descend du pick-up. J'avance à pas mesurés en direction de ma belle étrangère.

— Je suis désolée de t'avoir entraîné là-dedans Parker, je te promets que Dante ne fera rien qui puisse nuire à toi ou à ta fille, j'y veillerai.

— Bien.

C'est tout ce que j'arrive à dire. Je ne sais pas par où commencer mon interrogatoire. Je sais pratiquement tout ce qu'il y a savoir sur sa famille, mais elle, je ne la connais pas. Je n'ai aucune idée de ce qui se cache derrière son regard de braise et son doux visage. Ma poitrine est en feu et mon esprit est complètement chamboulé. J'aimerais la serrer dans mes bras autant que je voudrais la rejeter.

— J'ai trois frères. Dante, Cristiano et Arturo. Ma mère s'appelait Annabella et mon père Enrico. Cristiano m'a aidé à m'échapper du pays. Il me disait que j'étais en danger, qu'on en avait après moi. Maintenant, je suis complètement perdue. Je ne sais plus qui croire ni qui suivre. Ma mémoire ne revient pas et j'ai l'impression de me noyer. Je coule dans un océan d'incertitude. Tu voulais savoir qui je suis Parker ? Je ne le sais même plus moi-même.

Quand je regarde ses yeux, tout ce que j'y vois c'est de la sincérité. Sa voix tremble et je suis conscient que perdre la mémoire doit être affreux. J'ai lu plusieurs articles sur les troubles post-traumatiques et Alessia a l'air vraiment chamboulée. Quand je l'ai vu s'effondrer sur le sol, avoir peur de moi comme si elle avait vu un fantôme, je n'ai pas hésité une seconde : il fallait que je lui vienne en aide.

— Je ne sais plus où j'en suis Alessia.

Alors que je ne m'y attendais pas, elle se jette sur moi et me sers dans ses bras fins. Elle est tellement frêle par rapport à moi que j'ai peur de la casser en deux.

— Laisse-moi rester pour t'aider s'il te plaît. Tout le temps que j'ai été ici, avec toi, avec Lily, Maddie et Nana, je n'ai jamais fait semblant. La seule chose pour laquelle j'ai menti, c'est mon véritable nom.

Je ne sais pas quoi dire. Je suis raide comme un piquet mais la chaleur de son étreinte et la détresse dans sa voix me font abandonner les armes. Je l'entoure de mes bras et pose ma joue sur le haut de sa tête. C'est agréable, et pour la première fois depuis douze heures, je me sens apaisé.

— Alessia ?

Elle se dégage rapidement et se tourne vers Dante qui se met à me fixer avec un air mauvais. Ce gars a sans doute oublié que je lui ai sauvé la vie la nuit dernière. Il descend les marches du perron et se poste entre moi et sa sœur, comme si j'étais une menace qu'il fallait éliminer. Il est aussi grand que moi et aussi musclé mais je sais me battre et s'il fallait en arriver là pour la sécurité de ma famille, je n'hésiterai pas.

— Dante... Laisse tomber tes airs de grand-frère protecteur, c'est ridicule.

Alessia pose sa main sur l'épaule de son frère mais c'est comme si elle tentait de bouger un mur de brique à la force de son souffle.

— Laisse-nous deux secondes s'il te plaît. Il faut que j'aie une "conversation" avec ce Parker.

— Dante...

Je sens l'appréhension dans la voix d'Alessia et son regard est inquiet. Ses beaux yeux noisette passent de moi à son frère en essayant de mesurer le danger de la situation.

La voix d'Alessia est exténuée. Elle ne veut pas que son frère lui pose de problèmes et elle n'a pas assez de force pour supporter encore un évènement tragique.