L'amour plus fort que la haine (partie 2)
— Comment ? Pourquoi ?
Ses questions meurent sur ses lèvres à la manière de vagues s'échouant sur les rochers abruptes d'une côte.
Alfredo ne lui laisse pas le temps de se remettre du choc :
— Je veux que tous les De La Rivera s'alignent devant moi.
Personne ne bouge. C'est notre seule marque de protestation.
Soudain, sous l'ordre silencieux d'Alfredo, l'un des gardes tire dans le bras de Parker. Le bruit assourdissant, et l'odeur de poudre mélangée à celle du sang, me font pousser un cri de terreur. Je me précipite vers lui, mais Sarah est plus rapide que moi et me maintient les bras noués derrière mon dos. J'ai beau me débattre, elle est plus forte et plus entraînée que moi.
Alfredo s'approche lentement, et enferme mon menton dans sa main rugueuse et puissante, m'obligeant à le regarder :
— Est-ce que je me suis bien fait comprendre ?
— Va au diable ! Porco Dio ! Ira de Puta ! (« va te faire foutre ! Fils de pute ! »)
— Tu as fini ?
Il n'y a pas de limite à toutes les insultes que je pourrais lui balancer à la figure.
Comme si la douleur qu'il m'inflige n'était pas suffisante, il prend un katana situé sur l'un des murs de la pièce. Il observe la lame précieuse en faisant comme s'il réfléchissait à comment s'en servir.
— Toglili la maglia. (« Enlève-lui son tee-shirt »)
Sous les ordres de son patron, le garde ôte le haut de Parker qui tremble encore de douleur. Des larmes inondent mes joues, la haine me tord l'estomac, et la colère embrase mes muscles.
— Je t'en supplie ! Ne fais pas ça !
Alfredo fait comme s'il ne m'entendait pas. J'assiste impuissante à la scène qui se déroule devant mes yeux : mes frères tenus en joug, Parker se vidant de son sang. Je hurle, me débats, tente de m'échapper, mais rien à faire.
Il commence à lever sa lame en direction du cou de celui que j'ai appris à aimer. C'est un amusement pour lui ! Rien de tout ce que je pourrais dire ne pourra l'arrêter, il prend plaisir à me voir le supplier. Le katana griffe le torse de Parker. Du sang coule sur ses pectoraux et inondent son pantalon. Il serre les dents, ne voulant pas donner la satisfaction à son bourreau de le voir hurler de douleur. Son visage est blême et ses yeux se vident de leur vitalité.
— Hey Cazzino ! (« petite bite »)
Tout le monde se retourne vers Dante. Comme à son habitude lorsqu'il provoque quelqu'un, il arbore son rictus charmeur et hausse un de ses sourcils bruns.
— Tu n'as tellement pas de couilles que tu préfères nous tuer sans que l'on puisse se défendre ? Finalement, ton père avait raison, tu n'es qu'un petit con qui se croit déjà devenir roi. Quand je te regarde, je ne vois qu'une lavette qui n'est même pas capable de se battre à la loyale. Je ne sais pas comment tu vas imposer le respect, mais ce n'est sûrement pas avec ton sens de l'honneur. Tu n'es qu'une merde, un pauvre clochard, qui finira la gorge tranchée dans un caniveau.
Alfredo ne met pas longtemps à prendre la mouche et frappe Dante avec une telle violence qu'il perd l'équilibre et s'effondre sur le sol. Arturo profite de cet assaut pour défendre son frère et tente de désarmer Alfredo. Les gardes ne savent plus où se donner de la tête tant ils ont peur de blesser leur chef.
Sentent les mains de Sarah se desserrer un peu, je profite de la distraction entamée par mes frères pour enfoncer avec force mon coude dans le ventre de cette traitre. Elle titube légèrement, mais c'est suffisant pour que j'arrive à me détacher de son emprise. Au moment où elle sort son pistolet, Cristiano se poste devant moi. Il a réussi à désarmer l'un des gardes d'Alfredo, et il pointe son arme automatique sur son ancienne coéquipière.
Elle ne semble même pas s'inquiéter de ce que pourrait faire mon frère. Un sourire éclatant inonde son visage de poupée, une expression qui me glace le sang :
— Tu ne feras rien Cris.
— Tu oublies que j'ai été entraîné à tuer.
— Je suis enceinte.
La bombe explose à la figure de mon frère. Déjà que son visage était blême, cette fois, c'est comme s'il avait revêtu le masque mortuaire.
— Tu mens !
— Alors, prends le risque.
Quelle garce !
Soudain, mon attention se porte sur un cri guttural qui résonne dans la pièce. Quelqu'un a été gravement touché !
À l'instant où je me retourne, je vois le corps d'Arturo tordu de douleur, le katana fiché dans l'un de ses flancs. Mon sang ne fait qu'un tour et je me précipite vers lui. Mais, je n'ai pas le temps de l'atteindre qu'un garde d'Alfredo me saisit par derrière et place une lame tranchante sur la peau fine de mon cou. De son autre main, il tire en l'air, jetant de la poussière sur le sol.
Tout le monde se retourne, les yeux rivés sur moi et mon agresseur. Dante est sacrément amoché, mais pas autant qu'Alfredo qui peine à se relever.
Cependant, le garde a fait l'erreur de laisser Parker sans surveillance. Ce dernier, malgré les blessures qu'on lui a infligées, est encore sous l'effet des drogues, ce qui permet d'atténuer sa souffrance. Il a réussi à prendre le dernier katana qui décorait le mur, et il glisse rapidement la lame sous le menton d'Alfredo.
La scène est la véritable illustration d'un dilemme cornélien. Un des gardes est à terre, l'autre me menace d'une lame tranchante, Cristiano pointe son arme automatique sur Sarah, Arturo est au sol en train de se vider de son sang, et Alfredo est sur le point de mourir la gorge tranchée par un katana.
Il est impossible que l'on sorte tous vivants de cette situation. Autant dire qu'un sacrifice est nécessaire. Sans oublier que les coups de feu ont dû lancer l'alerte. Il nous reste que très peu de temps pour nous sortir de ce traquenard, et pour l'instant je ne vois aucune issue.
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