Arturo (partie 1)

PARKER

Décidemment, la nature a été généreuse avec la famille De La Rivera. Alessia est une beauté rare, cela ne fait aucun doute, mais ses trois frères ne sont pas en reste. Arturo est, de loin, le plus intimidant d'entre tous, alors que j'aurais plutôt misé sur Dante. Tout en lui inspire le respect et l'assujettissement, comme si le monde entier était à ses pieds. Sa démarche féline et son regard orageux font ressortir les côtés les plus sombres de sa personnalité. Son léger accent italien donne à ses ordres une certaine force, et ses yeux acérés vous observent comme une proie alléchante.

Son bureau est à son image : froid, rangé à la perfection et sobrement meublé. À l'inverse des couleurs vives de son club, le blanc et le gris anthracite sont les seules fantaisies décoratives qu'Arturo s'est autorisé. Il nous désigne un immense canapé en cuir ébène pour que nous puissions nous asseoir. Aucun d'entre nous n'ose l'interrompre. Nous attendons sagement que la porte se referme et que les yeux du chef des lieux s'intéressent de nouveau à notre personne.

Arturo s'installe à son bureau, comme un vrai maître de la mafia, et lève ses sourcils en direction de sa sœur.

— Tu es contente de ta prestation, je suppose ?

— J'ai réussi mon coup. C'est tout ce qui importe.

J'admire cette femme. Son côté revêche est électrisant et, malgré le fait qu'elle ait grandi dans une fratrie masculine, elle n'a pas perdu de son répondant. Elle sait imposer sa loi quand il le faut et ne se laisse pas facilement manipulée.

— Qu'est-ce que vous venez faire ici ? Sérieusement ? Vous croyez que c'est une bonne idée de tous nous rassembler dans un même lieu ? On ne vous a jamais appris que les cibles sont plus facilement atteignables quand il suffit de viser uniquement un gros point rouge sur une carte, plutôt qu'une myriade de petites tâches éparses ?

C'est le sermon du grand-frère, la voix de la raison. J'en rigolerais presque si nous n'étions pas dans une situation aussi délicate. Arturo, chef d'un club de strip-tease de Philadelphie, se la joue grand-frère responsable et avisé... On croirait rêver !

Soudain, Alessia se lève et rejoint le bureau du patron du club. Sa démarche est assurée, sans accroc, et ni Dante ni Cristiano n'osent faire le moindre geste pour l'arrêter.

Ma belle italienne prend un crayon de papier et attache sa belle chevelure blonde en un chignon improvisé. Tout le monde a le regard rivé sur le moindre de ses mouvements, comme si elle détenait la clé permettant de dénouer la situation critique dans laquelle nous nous trouvons.

— On a besoin de toi pour retrouver Alfredo. Julliani s'amuse avec nous comme de vulgaires pions sur un échiquier, et on n'est pas loin de se faire doubler. Il nous fait chanter, ses sbires surveillent le moindre de nos faits et gestes et...

— Et vous avez cru bon de venir ici pour vous jeter directement dans la gueule du loup ?

Je lève les yeux au ciel malgré moi, et attire immédiatement l'attention d'Arturo. Alessia, qui a suivi le regard de son frère, déglutit quand elle le voit se lever pour venir m'affronter. Sans me démonter, je campe sur mes positions et quitte le canapé confortable pour lui faire face. Refusant de baisser le regard, je croise les bras sur mon torse en signe de protection.

Arturo est, certes, grand et musclé, une carrure digne d'un champion de MMA, mais je ne suis pas ce que l'on pourrait appeler un poids plume. La seule force que j'ai par rapport à lui c'est ma taille et ma combattivité. En effet, ce n'est sûrement pas maintenant qu'un De La Riveraarrivera à m'intimider. Dante n'y est déjà pas arrivé, je ne ferais pas l'honneur au grand-frère de courber l'échine.

— Qu'est-ce que tu fous là, l'américain ?

— Je suis simplement venu aider Alessia.

— Et je peux savoir d'où tu la connais ?

— Elle s'était réfugiée à Chugwater, dans le Wyoming, pour échapper à son tordu de mari. Alessia est une femme extraordinaire qui m'a beaucoup aidé et je souhaitais lui rendre la pareille.

Arturo pose soudain un doigt menaçant sur mon torse. La pression de son index est douloureuse mais je refuse de reculer. Ses yeux clairs accueillent un puissant orage et une rage inouïe envahit le reste de son visage.

— Je déteste les petits chiens, et toi... Tu as la gueule d'un cocker qui suit son maître pour peu qu'on lui donne des croquettes et de l'eau. 

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