Chapitre 27 : Différents diplomatiques
Farca s'étira sur sa chaise en grognant. Depuis quatre heures, elle épluchait les ouvrages qu'on lui apportait, n'ayant réussi à en parcourir que la moitié pour l'instant. L'alchimiste avait d'abord regardé la bibliothèque aux étagères de pierre avec inquiétude quand elle n'avait pas aperçu de chaises ou de tables où elle pourrait s'installer, mais la bibliothécaire n'avait pas tardé à façonner toute l'ameublement sont la naine et ses compagnons avaient besoin pour prendre leurs aises.
Épaulées par quelques soldats dépêchés par Anoro, Farca et Udia menaient leurs recherches sans trouver de piste pour le moment.
– Je ne sais pas pour vous, mais moi, je commence à avoir sérieusement faim... grogna la naine. Je crois que c'est à peu près à cette heure-ci qu'on mange d'habitude...
– Oui, vous avez raison, répondit Udia en se frottant les yeux. Je pense que nous avons fait assez de recherches pour le moment, nous devrions nous arrêter là et reprendre demain.
L'équipe de recherche se levait de leurs chaises quand la porte de la bibliothèque s'ouvrit. Le nouvel arrivant attira immédiatement leur attention, tant son apparence leur semblait étrange. Il avait les mêmes écailles rouges et blanches des autres homme-dragons rouges, ainsi que des ailes et une queue, mais il ne donnait pas malgré tout pas l'impression d'appartenir à leur peuple. Sous ses vêtements amples, ce ne fut pas des muscles qui se dessinaient une large bedaine rebondie. Ses joues comme ses bras et ses jambes étaient gonflés, prouvant que la personne qui venait d'arriver préférait de loin les banquets aux séances d'entraînement.
Presque fascinée, Farca suivit la démarche de ce singulier homme-dragon aux lunettes rondes qui s'avançait vers une étagère avec une pile de livres sous le bras.
– Dîtes, je n'avais pas rêvé tout à l'heure ? demanda-t-elle aux autre en griganien. Ici, les gens préfèrent clairement la musculation à la sieste, non ?
– C'était ce que j'avais cru comprendre, en effet... souffla Udia. Mais on dirait que chaque règle à ses exceptions...
Farca hésita entre s'en aller sans adresser la parole au large homme-dragon et se renseigner sur lui. Une anomalie telle que lui cachait forcément un secret, mais désirait-elle vraiment le percer à jour ?
La porte de la bibliothèque s'ouvrit de nouveau, dévoilant cette fois-ci des homme-dragons tout en muscle qui cherchèrent quelque chose du regard avant de toiser les visiteurs d'un autre monde. La personne à leur tête portait une tunique plus richement brodée que les autres et avait une posture qui indiquait à Farca que l'individu devant elle avait l'habitude d'être obéie, même quand ses ordres étaient absurdes.
– Alors c'était vrai, mon inconscient de père a vraiment ouvert la bibliothèque à de potentiels espions ! ragea le meneur de la troupe en marchant férocement vers les chercheurs. J'ai appris à mon réveil qu'il s'est laissé embobiner par les belles paroles de ce bouffon de Lardzar et son escorte ! Il aurait dû s'en tenir à ce que nous avions décidé et juste tous vous garder enfermés pendant quelques jours !
– En voilà un qui est charmant... marmonna Farca en griganien.
– Je suis bien d'accord... soupira Udia.
Les homme-dragons arrêtèrent leur avancée quand ils remarquèrent la présence de l'obèse de leur race qui les fixait avec appréhension, serrant contre son torse plusieurs ouvrages comme pour s'en servir pour se protéger.
– Ah, tu es là, toi ! Comme si cette journée ne commençait pas assez mal comme ça !
– Bonjour Onyx, j'espère que tu as...
– La ferme Basile, je ne suis pas d'humeur à écouter un échec comme toi ! pesta Onyx en se détournant de son congénère. Je suis là pour interroger ces intrus et comprendre ce qu'ils font vraiment ici !
Farca se racla la gorge et s'avança à la rencontre d'Onyx en cherchant à avoir l'air avenante.
– Comme mon chef l'a déjà expli...
– Je ne t'ai pas demandé de me ressortir le mensonge que mon père a gobé, gamine ! rugit Onyx en poussant la naine hors de son chemin pour aller menacer de plus près Udia. Franchement, vous n'avez rien trouvé de mieux que d'inventer une histoire basée sur une légende sans fondement ? Les Déchus sont un mythe, mon père devrait avoir honte de se faire avoir par une blague aussi transparente !
– Il y a pourtant des preuves qui...
Basile se tut et rentra sa tête entre ses épaules en fondant sous le regard venimeux d'Onyx.
– Tu viens de dire quoi, là ? Qu'il y a des preuves ? Tu passes trop de temps à lire, grand-frère, tu n'arrives plus à faire la différence entre les faits et la fiction ! Tu devrais passer plus de temps à t'entraîner plutôt que ressasser le passé ! Surtout si c'est pour croire à des superstitions !
Basile n'osa pas croiser le regard de son frère, intimidé par sa férocité. Onyx sembla satisfait par son effet et se tourna de nouveau vers Udia.
– Toi, tu vas vite me dire ce que vous faites vraiment ici, sinon je peux te garantir que moi et mes amis allons te faire passer un très...
Quelque chose tira sur sa tunique, l'interrompant dans sa menace. Furieux, Onyx se tourna pour hurler sur l'inconscient qui osait l'interrompre et toussa quand il inspira la poudre qu'on lui souffla au visage. Sa gorge s'enflamma et il tomba à genoux, ne retrouvant pas son souffle.
– C'était pour le gamine, tocard... lui cracha Farca avant de faire signe à ses compagnons. Bon, nous avons assez traîné ici, nous devrions...
– Parce que tu crois qu'on va te laisser partir comme ça ? s'emporta un des alliés d'Onyx. Tu viens de t'en prendre au deuxième prince de Fangia! Tu penses vraiment que nous allons vous...
L'alchimiste fourra sa main dans son sac pour y chercher une bombe remplie de gaz soporifique mais n'eut pas le temps de s'en servir. Basile s'était précipité pour se placer entre les deux groupes et tenter de calmer la situation.
– Ce sont des invités du roi ! Nous ne pouvons pas les menacer comme ça !
Les homme-dragons s'arrêtèrent mais ne se départirent pas de leur furie.
– Cette vermine vient juste d'agresser ton frère, et tu veux qu'on la laisse tranquille ? Où est ta putain de loyauté ?
Basile déglutit, clairement intimidé par les personnes devant lui, mais ne recula pas pour autant.
– Sauf que j'étais là et j'ai vu Onyx se montrer brusque avec elle et il était sur le point de s'en prendre à son amie ! Ce sera votre parole contre la mienne ! Je veux bien que mon père n'a pas beaucoup de respect pour moi, mais il sait que je suis toujours honnête avec lui ! Si ça peut vous rassurer, je peux les escorter et...
– Et quoi ? ricana quelqu'un. T'asseoir sur eux s'ils tentent un truc ?
– On va en rester là pour le moment, mais nous allons quand même en parler au roi quand Onyx sera remis, prévint un homme-dragon au chevet du prince encore au sol. J'espère que tu seras convainquant quand il te demandera pourquoi tu as pris la défense de ceux qui s'en sont pris à son fils préféré...
Basile hocha la tête en bafouillant de vagues remerciements et guida les invités hors de la bibliothèque. Farca attendit qu'ils se soient assez éloignés de l'endroit pour s'adresser à son sauveur.
– Merci, je ne pense pas que j'aurais pu régler le problème sans aggraver mon cas. Vous... Tu es le prince, si j'ai bien compris...
– J'en ai le titre, mais je n'ai pas le respect qui va avec le rang... répondit Basile avec lassitude. En tout cas, je te conseille de rester loin d'Onyx à l'avenir, il a la rancune tenace, et si j'essaye d'interférer à nouveau, il n'hésiterait pas à me faire partager ton sort...
– Mais vous êtes frères, non ? intervint Udia. Il n'irait quand même pas aussi...
– Ho si, il le ferait, parce que ce ne serait pas la première fois... Vous l'avez entendu, je ne suis pas un vrai homme-dragon à ses yeux, et il n'est pas le seul à le penser...Mon père m'adresse à peine la parole, il a clairement honte de moi... Tout ça parce que je n'ai pas envie de m'entraîner au combat... Pour eux, si tu n'es pas fort, tu ne vaux rien... Si je ne faisais pas parti de la famille royale, j'aurais été exilé depuis longtemps. Mais plus les jours passent, plus je sens que mon père va décider d nommer Onyx son héritier à ma place et se débarrasser de moi...
Farca se sentit mal pour Basile et tenta de lui remonter le moral.
– Hé, ce n'est pas comme si les muscles sont la seule chose qui comptent dans la vie ! L'intelligence peut te mener loin aussi ! Il suffit que ton père voit ça !
– Le problème, c'est que mon frère n'est pas juste un fanatique des entraînements... soupira Basile. Il n'a peut-être pas beaucoup de respect pour le savoir de nos ancêtres, il a beaucoup étudié la stratégie militaire et la politique, il est loin d'être stupide... Je n'ai n'ai que mon intelligence, alors que lui, il a ça et la force physique...
La naine hésita, ne sachant pas comment réconforter l'homme-dragon qui se morfondait.
– Ah, vous êtes là ! On venait justement vous chercher !
Farca sursauta avant d'apercevoir Sieg en compagnie de Bélial et Lorelya qui arrivaient de la direction opposée.
– Alors, vous avez trouvé des informations utiles ? demanda l'archère en scrutant Basile qui fixait le sol. Vous vous-êtes fait un nouvel ami ?
– Pas que... avoua Farca en se frottant la nuque. Je vous présente Basile, un prince de Fangia. Il est venu nous aider quand son frère et ses amis sont venus nous menacer parce qu'ils pensent qu'on a menti au roi.
– Il a quoi ? rugit Bélial en s'avançant vers la bibliothèque. Je crois qu'il a besoin d'apprendre les bonnes manières celui-là !
– Tu n'es pas vraiment la mieux placée pour sonner ce genre de leçons... rappela l'alchimiste en attrapant la manche de la barbare pour la retenir. De toute façon, j'ai déjà fait une boulette...
– Oh putain... jura Sieg en se passant la main sur le visage. Rassure-moi, tu ne lui as rien fait de permanent ?
– Ça va, je sais me tenir quand même ! Par contre, quelque chose me dis que son orgueil ne va pas s'en remettre tout de suite...
– Ne lui en voulez pas, elle essayait de me protéger quand Onyx m'a menacée, précisa Udia en posant sa main sur l'épaule de Farca. Et quelque chose me dis qu'il n'aurait pas hésité à passer à l'acte...
– Tu en es sûre ? demanda la verdoyante. Pourtant, un tel acte pourrait causer la guerre qu'on essaye d'éviter...
– Le problème, c'est qu'Onyx la veut, cette guerre...
Tous les regards se posèrent sur Basile qui se tassa encore plus sur lui même, mal à l'aise d'attirer autant l'attention.
– J'ai cru comprendre que ton père aussi n'a rien contre une guerre, mais il est assez réaliste pour savoir que s'il ne fait pas attention, Fangia pourrait se retrouver dans une situation compromettante.
Basile hocha la tête vers Sieg avant de s'expliquer.
– Le problème, c'est que mon frère partage les nouveaux idéaux qui se propagent parmi les plus jeunes... Ils pensent que si on veut progresser, nous devons oublier les vielles idées qui ne seraient plus adaptées à notre époque... Il a déjà commencé à négocier avec d'autres pays d'homme-dragons et il est sûr de pouvoir compter sur leur aide si une guerre éclate, peu importe la raison... Il n'a pas peur d'être blâmé si ses actes ruinent le peu de paix qu'il reste...
– Magnifique... grogna Lorelya. Encore un homme trop arrogant qui ne pense qu'à son petit ego sans s'intéresser à ce qui peut arriver aux autres...
– Nous devrions le garder à l'œil au cas-où, admit l'écarlate. Il pourrait bien ruiner tous nos efforts. Je te remercie d'avoir aidé nos compagnons, Basile, nous t'en devons une.
– J'ai bien peu que je n'ai fait que retarder l'inévitable... Quand il aura récupéré, je sais que mon frère va faire tout ce qu'il peut pour faire payer à Dredia cet affront...
– Nous verrons ça le moment venu. Pour le moment, restons concentré sur ce que nous avons devant nous.
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