Chapitre 87 : Course contre le destin
Bien que partageant la joie de son amie d'avoir trouvé l'écarlate à temps, Farca ne perdit pas de vu où ils étaient et le danger qui continuait de les guetter. L'alchimiste s'avança vers la barbare et l'invita à reposer son amant.
– Oui, oui, on est tous contents de le retrouver, mais vous vous embrasserez plus tard, on doit se dépêcher de filer !
Laissant de côté sa joie de revoir Bélial, le bretteur posa un regard noir sur la naine qui soutint son regard sans broncher.
– Si je t'ai confié le groupe, ce n'est pas pour que tu mettes tout le monde en danger en les embarquant dans...
– Non mais tu t'entends ? râla la sang-mêlée en posant ses poings sur ses hanches. On se décarcasse pour venir te sauver, mais tu arrives quand même à te plaindre ? Tu sais combien de personnes sont venus avec nous pour te tirer d'ici ? On a plus de cent cinquante soldats, voleurs et aventuriers qui se sont mobilisés dans l'urgence pour mettre le bazar pendant qu'on te sauvait ! Ouais, tu m'as bien compris, c'est à ce point là que les gens de Syndras tiennent à toi ! Et tu oses dire après que tu as nul part où aller !
– Farca A Raison. Tu Ne Dois Pas Oublier L'Importance Que Tu As Aux Yeux Des Autres.
– Moi, je suis surtout attristé que tu n'es même pas essayé de nous faire des adieux, bouda faussement Ahmés. Après les péripéties que nous avons partagé, nous méritons plus que d'être ignorés en beauté.
Lorelya posa sa main sur l'épaule de Sieg et l'obligea à la regarder droit dans les yeux.
– Tu es le seul membre de la famille qui ne me donne pas envie de gerber, alors rends-moi service, évite de crever parce que tu penses que tu dois nous protéger. Nous sommes une équipe, ça veut dire que s'il y a une emmerde, nous sommes six à y faire face. Porter le poids du monde seul sur le dos, c'est le meilleur moyen de tout perdre.
Bélial se pencha pour se mettre au même niveau que l'écarlate et le dévisager.
– J'ai vraiment envie de te gueuler dessus pour ce que tu a fait, mais vu que tu m'as empêché de faire la même connerie, je comprend que je suis mal placée pour ça... Je sais ce que tu as ressenti quand j'ai dis que j'allais laisser l'Ordre me prendre pour vous protéger parce que je me suis sentie complètement nulle de ne pas t'avoir sauvé. Alors je vais te faire une promesse, et je te promets que je la tiendrais.
Bélial ferma les yeux et posa doucement son front contre celui du bretteur. Accoutumé à ce contact, Sieg se détendit, sentant un calme serein le prendre.
– Tu meurs, je meurs... souffla la démone. Quoi qu'il arrive, je serais toujours à tes côtés... Alors oublies les plans suicides si tu veux que je vive, d'accord ?
Bel... Je suis désolée, j'aurais dû comprendre que tu étais devenue assez forte pour protéger les autres, même si tu te reposes encore sur eux... Sieg et moi, nous n'avions pas le droit d'essayer de tout régler nous même...
La colère de Sieg se dissipa en se sachant vaincu. Il n'avait pas le moindre argument à fournir pour les chasser et se doutait qu'ils étaient assez cinglés pour le suivre jusqu'à la mort. L'écarlate prit la tête de la barbare entre ses mains et la tira à lui pour l'embrasser.
– Décidément, même mourir, vous n'allez pas me laisser le faire seul... Qu'est-ce que je deviendrais sans vous ?
– J'avoue que ça commence à devenir lourd... ricana Farca en croisant ses mains derrière sa tête. C'est la combientième de fois qu'on doit te sauver maintenant ?
– Calcul Terminé : Depuis Que Je L'Ai Rencontré, Je Compte Six Sauvetages.
– Tu savais que je l'avais sauvé de Narcission avant qu'on s'est rejoint ? ajouta Bélial.
– Correction : Sept Sauvetages !
– Beaucoup plus que la moyenne du groupe... souffla le musicien avec malice. Tu es sûr d'être taillé pour l'aventure ?
Et encore, je me souviens de toutes les fois où Alice avait dût te tirer du pétrin... Décidément, on ne peut pas te laisser seul plus de dix secondes...
– Je vous emmerde... lâcha Sieg en riant.
– Bon assez déconné, parce que Valence se pointe par ici, prévint la verdoyante en poussant le groupe pour qu'il rebrousse chemin. Il faut qu'on trouve un endroit bien visible pour la prochaine étape du plan.
– Comment ça ? s'inquiéta l'épéiste en fronçant les sourcils. Ne devrait-on pas au contraire éviter d'attirer l'attention ?
– Seulement si on veut rester la priorité principale de l'Ordre pour le reste de nos jours, précisa le défunt en pleine course. Mais Farca a une idée. Certes, elle est loin d'être parfaite et ils vont continuer de nous traquer, mais au moins, ça devrait atténuer les répercussions sur Danatal pendant que nous serons dans le monde des ténèbres.
– Alors c'est confirmé... souffla l'écarlate en gardant le rythme avec son équipe. C'est là-bas que se trouve la porte de l'avarice...
– Ouais... grommela l'alchimiste en se souvenant du prix de cette découverte. Mais avant ça, une petite mise en scène s'impose. C'est aussi ça qui va servir de signal pour que toute le monde commence à se replier.
Sieg inspira en se convainquant que si la naine avait échafaudé un plan, il était dans son intérêt de la laisser faire.
– Dans ce cas, on doit rejoindre le troisième étage, il y a une salle de communication magique. Le système permet de projeter des images et des sons directement dans l'esprit des personnes dans la forteresse. Quand je suis arrivé, ils m'y ont emmené pour faire une annonce générale et me présenter à l'Ordre. Je ne serais d'ailleurs pas étonné si quelqu'un sur place est en train de préparer un message.
– Putain, c'est mieux que ce que j'espérais ! s'écria Farca. Avec ça, on va...
L'écarlate fut prit de tremblements, une vive douleur agressant chaque parcelle de son corps. Ses jambes se dérobèrent sous lui et il tomba en avant. Alerté par le cri de son partenaire, Bélial le rattrapa et le serra dans ses bras. L'écarlate grimaçait de douleur alors que les tatouages qui recouvraient son corps commençaient à luire.
– Farca ! hurla la jeune femme en implorant du regard la naine. Je comprend pas ce qui se passe, il est en train de...
Une image s'imposa dans l'esprit de la démone. Dégoûtée, Elle chercha à chasser la vision de son père qui la harcelait mais elle refusait de la laisser.
Toute votre attention je vous pris, réclama Artra. Des intrus se sont introduits dans notre sanctuaire. Nous craignons qu'ils soient ici pour enlever le porteur de Raya.
Farca vacilla en sentant sa tête résonner mais ordonna aux autres de ne pas ralentir. Lorelya affirma avoir localisé où était la personne dans leur vision et prit les devants. Adam arracha Sieg des bras de Bélial pour le porter, lui rappelant qu'en tant que meilleure combattante du groupe, elle serait plus utile à son amant si elle avait les mains libres. Refoulant les larmes qui lui montaient aux yeux, la barbare obtempéra et se mit à courir. La démone ignorait ce qui se passait, mais elle se jura de trouver le coupable des tourments de son partenaire et le lui faire payer.
Mais ne vous inquiétez pas, nous avions envisagé cette possibilité. Nous aurions préféré faire ça au cours d'une cérémonie officielle, cependant nous avons décidé d'activer notre plan de secours. En ce moment même, les sceaux que nous avons apposé sur son porteur sont en train de ressusciter notre déesse en son sein. Le processus est certes plus lent et douloureux que si nous accomplissions la cérémonie comme prévue, mais nous sommes au moins certain que, même si l'ennemi arrive à fuir avec le porteur, le retour de notre déesse est garanti.
– Je vais le buter ce fils de pute ! rugit l'archère en abattant d'une flèche un garde qui venait de faire irruption sur leur chemin. Ils avaient tout prévu au cas où, même si Sieg essayait de s'échapper !
– Pitié, dîtes moi que quelqu'un sait comment arrêter ça ! paniqua la jeune femme en ne quittant pas l'expression douloureuse de l'écarlate des yeux. On peut pas le perdre ! Pas quand on l'avait enfin récupéré !
– Ouais, j'ai une solution ! répliqua Farca qui faisait de son mieux pour suivre la cadence. Mais on doit aller où est ton père ! C'est là-bas qu'on pourra sauver Sieg !
– Mais ouais ! Il doit savoir comment arrêter ce rituel ! Il suffit de le faire parler !
La barbare ne remarqua pas le regard que venaient de s'échanger ses compagnons. Ils avaient tous deviné la solution de la sang-mêlée et détestaient qu'ils étaient contraints d'en arriver là.
Leurs cœurs se brisant en entendant les gémissements de leur chef et les pleurs de leur amie, le quatuor demeura silencieux en se précipitant vers la salle des communications. Ils ignorèrent autant que possible la suite du discours d'Artra qui s'était lancé dans un sermon pour renforcer le moral de ses troupes et célébrer leur victoire.
Le corps de l'écarlate brilla de plus en plus intensément, une aura dorée le recouvrant de la tête aux pieds. Parfois, l'aura prenait une forme féminine qui se superposait sur lui, signalant que la nouvelle âme fusionnait peu à peu avec son enveloppe charnelle.
Pitié, dépêchez-vous ! se fit clairement entendre la voix de Raya. J'essaye de résister pour vous gagner du temps, mais si rien n'est vite fait, je sens que son esprit va être effacé ! S vous avez un plan, c'est maintenant ou jamais !
– T'inquiète, on est sur le coup ! répondit Lorelya en enfonçant une porte.
L'elfe fit irruption dans une pièce remplie de pierres ésotériques avec un large symbole peint sur le sol. En centre de ce dernier, Artra se retourna vers elle avec surprise avant d'ordonner à ses gardes de la neutraliser. La verdoyante ne se laissa pas faire et élimina un d'eux avec une flèche en faisant pousser des branches du parquet pour neutraliser les autres. Ahmés arriva à son tour et gratta les cordes de son luth pour générer un orbe sombre qui frappa le prêtre de plein fouet, l'envoyant voler.
Adam entra en trombe à son tour et suivit les instructions de Farca pour poser Sieg au centre du cercle magique.
– Bien, retourne à l'entrée avec Bélial et Lorelya et empêcher ces salauds d'intervenir ! Si on veut réussir, personne doit nous interrompre ! Ahmés, ramène ta fraise ici, ça va être à toi de jouer.
Accroupie aux côtés de l'écarlate, l'alchimiste se mit à la recherche d'un indice concernant la direction qu'elle devait fixer pour s'adresser aux occupants de la forteresse mais abandonna l'idée après deux secondes. Sa priorité n'était pas d'être présentable.
– Écoutez moi les gars, on a Sieg avec nous ! Ne vous en faîtes pas, on va le sauver, alors commencez à vous barrer ! On va s'échapper comme on peut ! Ignorez tout ce que vous allez voir, vous pourrez rien faire alors sauvez vos vies !
– Vous leur donnez de faux espoirs... grommela Artra en se redressant. Rien peut arrêter...
Lorelya décocha une flèche qui se ficha dans l'épaule du démon qui gémit. Des racines poussèrent du projectile et ligotèrent leur proie.
– Dis nous comment sauver Sieg ! l'implora sa fille de l'autre côté de la salle. Je... Je peux pas vivre sans lui... C'est moi que t'es en train de tuer avec ces conneries !
Artra fixa avec horreur la jeune femme en larmes, dévasté par le désespoir qui brillait dans ses yeux. Il serra les dents, honteux de faire ainsi souffrir sa fille, mais il avait un devoir à accomplir.
– Même s'il existait une façon d'arrêter le processus, je ne vous le dirais pas... Je ne peux pas trahir...
– Ouais, je m'en doutais et je m'en fous ! grogna Farca en aidant Ahmés à redresser Sieg. Hé, s'il est comme ça, tout le monde peut le voir ?
Attends, si tu comptais pas questionner Artra, pourquoi venir ici ? Comment vas-tu le sauver ?
Le prêtre fronça les sourcils, déclarant que tant que l'on se tenait dans le cercle, on était visible pour tout le monde, peu importe sa position.
– Parfait, on peut commencer. Ahmés ?
Serrant contre lui un bretteur délirant et en sueur avec un bras, le musicien hocha la tête pendant que sa main libre devenait squelettique et se nimbait d'une énergie morbide.
– Adam ?
Sur l'injonction de la naine, le gardien attrapa la démone et retint ses mouvements. Déstabilisée, la jeune femme se débattit en vain et adressa à la sang-mêlée un regard rempli de stupeur.
– Désolée, mais on a pas le choix...
Farca inspira avant de s'adresser aux membres de l'Ordre.
– Vous voulez votre déesse ? Allez la chercher bande de connards ! Bonne chasse !
Mais qu'est-ce que vous foutez ? Ne me dites pas que...
Ignorant les mots de l'esprit, Ahmés plongea sa main dans la poitrine de Sieg qui fut prit de spasmes et écarquilla ses yeux irradiés de lumière. Avec une expression peinée, le musicien empoigna le cœur de l'écarlate et le força à s'arrêter.
– Arrêtez ! hurla Bélial de toute son âme. Vous êtes en train de le tuer !
Le bretteur perdit ses couleurs pendant que ses membres s'affaissaient. La lueur dans ses yeux s'éteignit lentement. Pendant de longues secondes, la démone ne put que regarder impuissantes alors que l'on assassinait devant elle l'homme qu'elle aimait.
L'aura qui le recouvrait se détacha de son corps et commença à s'élever au dessus de lui, admirée par des regards incrédules.
Si vous vous merdez, je vous jure de vous faire payer votre folie...
Après cet ultime message, l'aura s'envola en traversant le plafond. Elle émergea du sommet de la forteresse, hors de vue de tous, avant de partir vers le sud-ouest à une vitesse inimaginable.
Dans la salle de communication, un silence terrifiant s'imposa. Personne n'osa prendre la parole. Adam relâcha sa prise sur Bélial qui tomba à genoux, sont regard ne pouvant se détacher du corps sans vie que cajolait le musicien. Elle n'avait plus la force de faire quoi que ce soit, pas même pleurer. Le regard dur, Farca regarda droit devant elle.
– Voila, le porteur est mort. Si vous voulez votre déesse, vous avez intérêt de vous remuer...
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