Chapitre 40 : Un équipement adéquat

Sous une solide escorte, la reine guida Sieg et Bélial vers l'institut de magie. Elle jetait régulièrement des regards noirs à la démone qui n'avait pas été invitée à les suivre. La jeune femme avait prétexté que les soldats avaient besoin de se reposer avant d'attaquer la prochaine séance d'entraînement. Elle avait donc du temps libre et avait clamé s'intéresser à la magie. Personne la croyait, mais l'accuser en publique de vouloir se mettre entre son amant et la reine qui le voulait pour elle n'aurait pas de conséquences positives.

L'écarlate remarqua dans les ombres des figures les suivre. Il n'avait pas l'impression qu'elles étaient là pour la reine, alors le bretteur s'était dis qu'il s'agissait des elfes sous les ordres du roi qui devaient le garder à l'œil. Il devina sans mal qu'ils avaient aussi l'ordre de l'éliminer s'ils voyaient une ouverture, ce qui le fit sourire. Déjouer des projets d'assassinats étaient plus dans ses cordes que régler les différents familiaux.

Le groupe pénétra dans un arbre et descendirent le long de ses racines. Contrairement aux autres bâtiments, celui-ci s'étendait sous terre, en grande partie creusé dans la roche. Pour la première fois depuis leur arrive dans ce village, Bélial et Sieg virent des murs de pierres et de briques. Ils croisèrent des elfes en robe de mage qui leur jetaient des regards intrigués, étonnés de voir des humains ici.

La reine guida ses invités dans une large salle qui avait des allures de salle des trophées. Des vitrines présentaient des dizaines d'objets de tailles et de natures variées. Des armures la plupart vertes, étaient alignées le long de deux murs opposés, comme si des gardes veillaient sur les artefacts stockées ici. Le regard du bretteur bifurqua vers les épées accrochées en face de lui, un mouvement qui n'échappa à Larya qui s'y était attendue.

– Tu as tout le loisir de les regarder. Si l'une d'elles te plaît, tu es libre de la prendre.

– Mais enfin, votre Ma...

La femme qui venait de prendre la parole eut droit à un regard abyssal qui la dissuada d'ouvrir la bouche pour le prochain siècle. Bien qu'il se doutait que la reine lui proposait une nouvelle arme pour s'attirer ses faveurs, Sieg s'approcha des épées pour les étudier. De son côté, Bélial se dirigea vers les armures, intriguée par une en particulier.

L'écarlate dût admettre que la sélection était impressionnante. Il avait sous les yeux les épées elfiques les plus puissantes du continent, ce qui en faisait certaines des meilleures armes du monde. Une d'elle, moins courbée que les autres, lui rappelait les épées droites typiques des humains. Il la prit et sortit la lame de son fourreau. L'éclat légèrement bleuté de la lame hypnotisa l'épéiste qui ne put s'empêcher de faire des moulinets avec. Son équilibre était parfaite, comme si elle était le prolongement de son bras. Sieg pensa qu'il n'aurait besoin que de quelques jours d'entraînement pour ne faire qu'un avec elle.

– Tu as toujours eu un bon œil pour les lames de qualités... susurra Larya en se glissant derrière lui. Je te présente Venwë Fëa, très certainement notre meilleure arme.

– La Lame de l'Âme... traduisit le bretteur en suivant la courbe de l'arme du regard.

– Son nom vient de la pierre d'âme qui lui sert de cœur. Une pierre plus rare que le diamant ou l'orichalque. On raconte que les objets fabriquées avec une de ses pierres ont leur propre conscience, ne révélant leur plein potentiel que si leur utilisateur en est jugé digne. Telle qu'elle est maintenant, cette épée est l'égale de toutes les autres ici. Mais entre les mains d'un maître qui aura sa bénédiction, son pouvoir sera incomparable. Elle est aussi une excellente conductrice de mana, ce qui correspond à merveille à ta façon de te battre.

N'écoutant qu'à moitié les propos de Larya, Sieg dégaina sa propre épée. Bien qu'elle n'avait pas de nom, elle restait une arme remarquable, forgée par Roxas, le meilleur forgeron humain de cette génération. Même les meilleurs artisans nains et elfiques, pourtant réputés meilleurs que les hommes dans ce domaine, ne pouvaient que vanter ses louanges. Roxas avait façonné cette épée en même temps que le bracelet que portait Sieg, liant la lame à l'accessoire. Il suffisait à l'écarlate d'insuffler sa mana dans le bracelet pour qu'il soit transmit à son arme, lui offrant plusieurs options au combat.

L'épéiste exécuta des mouvements avec les deux lames, trouvant un équilibre parfait entre les deux. Même si ce n'était pas sa spécialité, il savait se battre avec deux armes, et celles-ci s'y prêtaient à merveille.

– Il va de soit que vous devrez nous la rendre après le combat... souligna un elfe avec un ton plein de reproches. Nous ne pouvons pas nous séparer d'un tel trésor.

Larya dévisagea son petit-fils avec un regard indéchiffrable avant de sourire.

– En effet, Venwë Fëa ne quittera pas Sylvéria. Mais si tu venais à rester, rien t'empêcherait de l'employer quand tu voudrais.

Sieg se retint de ricaner tant cette réplique était prévisible. Larya comptait le charmer en passant par ses passions, mais il n'était pas si matérialiste. Aussi fascinants qu'ils étaient, des objets ne dicteraient jamais son cœur.

– Je garderais cela à l'esprit... répondit le bretteur en glissant les épées dans leurs fourreaux avant d'accrocher sa nouvelle arme à sa ceinture.

L'écarlate examina les vitrines par curiosité. Aucune note décrivait les objets présentés, mais il pouvait sentir un pouvoir émaner de chacun d'entre eux. Il haussa un sourcil quand son regard se posa sur une pierre qui semblait absorber légèrement la mana des autres objets.

– Je ne pense pas que tu trouveras une utilité à ça... soupira la reine. Elle est ici parce qu'elle est belle, mais cette pierre n'est qu'un prototype incomplet. Elle est supposée transposer une âme d'un corps à un autre, mais elle manque de puissance. Arracher une âme de son réceptacle légitime demande plus de pouvoir que ce dont est capable cet artefact, sans oublier qu'il ne marche que si l'âme ciblée et le nouveau réceptacle ne résistent pas à l'opération. Car oui, il n'est pas possible de lier une âme avec un objet avec cette pierre. Les nouveaux modèles, en revanche...

– Si cette pierre est un échec... souffla doucement Sieg en faisait glisser ses doigts sur la vitre qui le séparait d'elle. Pourrais-tu t'en séparer plus facilement que de Venwë Fëa ?

Surprise, la reine échangea un regard avec les mages présents qui étaient aussi déstabilisés qu'elle par cette requête étrange.

– Et bien oui, mais je ne...

– Tu n'as pas de souci à te faire, dans le meilleur des cas, je ne l'utiliserais pas, clama l'écarlate en ouvrant la vitrine pour prendre la pierre. Dans le pire, par contre... Disons qu'elle me donnera des options...

La pierre disparut dans une poche. Sieg se tourna vers Bélial et fut heureux de voir qu'elle n'avait pas suivi leur conversation. Il ne voulait pas qu'elle ou Raya sache ce qu'il avait en tête. Pas maintenant, du moins.

En remarquant que toute l'attention de la barbare était concentrée sur une armure, il la scruta et écarquilla les yeux en la reconnaissant. Comme possédé, il marcha lentement vers cette dernière, des souvenirs millénaires lui revenant comme une pluie de lames.

– Je ne pensais pas en revoir une un jour... murmura-t-il en arrivant aux côtés de la démone.

– T'as déjà vu un truc comme ça ? demanda Bélial. Je sais pas pourquoi, mais de puis que je l'ai vue...

Oui, et ni moi, ni Sieg ne sont étonnés...

La jeune femme ne s'était jamais intéressée aux armures, trop encombrantes pour elle qui jouait autant sur sa mobilité que sa force. Mais celle-ci l'intriguait. Bélial ne savait pas si c'était son mélange de noir et de rouge ou bien son apparence agressive qui l'attirait. Elle toucha le gantelet et sentit son pouvoir obscur être absorbé. L'armure ne lui volait pas son énergie, mais elle semblait l'attirer naturellement.

– Un de nos trésors de la guerre du Crépuscule ! s'exclama un mage excité. L'une des dernières armures démoniaques encore en existence ! La plupart ont été anéanties à la fin de la guerre, ce qui est un gâchis ! Elles ont été fabriquées dans un métal qui n'existe pas dans ce monde et qui amplifie la magie ténébreuse ! Si je me souviens bien, elle était portée par un général...

– Varda, le Ravageur d'ébène, ajouta Sieg. L'une des six Terreurs, l'équivalent des Sauveurs pour les démons. Varda était de loin le plus brutal d'entre eux, la terre se fendait sous ses coups, divisant le champs de bataille avec des crevasses qui existent encore de nos jours. Il a fallut les efforts combinés de Natas, Simétra et Flavio pour enfin le terrasser après deux jours de combat. On raconte que les armures des Terreurs avaient été façonnées pour eux expressément, surpassant toutes les autres et renforçant leurs talents respectifs. Même aujourd'hui, personne peut forger une telle...

– Je peux l'essayer ?

La question de la démone était sortie naturellement. Elle même, elle n'avait pas réalisé qu'elle avait parlé à haute voix.

– Enfin, vous n'êtes pas sérieuse ! S'indigna un mage. Certes, cet artefact est puissant, mais... Enfin, je veux dire, vouloir porter une armure démoniaque... Même si ce n'est pas dangereux, c'est...

– Laissez la faire.

L'ordre de la reine sidéra les elfes présents. Elle leur donna la consigne de guider Bélial vers une salle où elle pourrait se changer et l'aider en cas de besoin. Sans un mot, la barbare hissa l'armure l'épaule sur son épaule et regarda son partenaire, comme si elle voulait son accord. Il hocha la tête, sachant que la jeune femme voyait en cette armure une opportunité de renouer avec une partie de l'héritage que son clan avait perdu. Même si l'écarlate avait de mauvais souvenirs de cette armure, il ne se dresserait pas sur le chemin de sa partenaire.

La reine regarda la démone sortir et congédia le reste des elfes, y compris sa famille. Elle coupa court aux critiques avant qu'elles ne commencent d'un regard et fut obéie. Quand elle fut seule avec Sieg, elle soupira et examina une vitrine.

– Je savais que Venwë Fëa te plairait, mais je n'avais pas prévue que ta petite démone remarque cette armure d'elle même... Comme quoi, elle est en parti son héritage...

Sieg ne releva pas la remarque de Larya. Bélial lui avait raconté qu'elle avait deviné sa nature au premier coup d'œil, il n'était donc pas surpris qu'elle aborde le sujet une fois sa cour partie.

– Je ne vais pas perdre mon temps à te demandé ce qui t'a poussé à t'allier avec elle... Et encore moins de coucher avec elle... Tant qu'elle t'est utile et peut nous débarrasser de nos ennemis, elle peut même garder l'armure si ça lui chante. Après tout, ce ne sont pas les objets de valeur qui manquent ici... De toute façon, les elfes ne peuvent pas utiliser de magie ténébreuse, alors nous ne pouvons pas déployer tout son potentiel.

– Quelle générosité... lâcha sarcastiquement Sieg.

Larya s'approcha du bretteur et lui caressa le bras.

– Que tu t'amuses avec cette gamine ne me gêne pas. Par contre, jusqu'où penses-tu pouvoir aller avec elle ? De ce que j'ai compris, elle ne possède que les fripes sur son dos et n'a pas d'autre talent que le combat. Toi, en revanche, même si tu n'es pas fortuné, tu possèdes des capacités qui te permettraient de briller, même loin du champ de bataille. Comme dans un gouvernement...

– Mais bien sûr... Ton peuple accepte difficilement deux sang-mêlées dans la famille royale, mais ils vont se réjouir de voir un humain aider à régner sur eux ? Surtout moi ? Ils se taisent pour le moment parce que tu leur en as donné l'ordre, mais s'ils le pouvaient, ils me traduiraient en justice pour mon rôle dans la création du breuvage centenaire !

– Les mentalités changent... souffla Larya en se collant à l'écarlate. Je suis sûre que si tu leur prouvais ce dont tu es capable, tu pourrais avancer la cause des humains ici. Pour être honnête, je ne tolère l'esclavagisme uniquement parce que je sais que l'abolir retournerait tout le monde contre moi. J'ai beau savoir comment maintenir mon autorité, je sais quelles sont les lignes que je ne peux pas franchir. Mais avec ton soutien, qui sait... Peut-être qu'un jour, les humains ici seront libres... Et Isya et Lorelya seraient enfin reconnues à leur juste valeur...

Sieg croisa ses bras dans son dos et serra les poings. Larya savait exactement quels étaient ses points faibles. La souffrance gratuite des innocents le révulsait, et la famille était une notion chère à son cœur. L'elfe avait vite compris qu'elle ne saurait pas le charmer directement, alors elle comptait l'acheter, peu importe qui lui servirait de pion.

– Et ton mari, dans tout ça ? Je n'ai pas l'impression qu'il m'apprécie...

– Cariad ? cracha sa femme avec dédain. Tant qu'il a l'impression d'avoir un peu de pouvoir, il sera facile à contrôler. Et puis, nous ne sommes pas obligés de se voir en publique...

Les mains de la reine glissèrent sur le corps de l'écarlate, palpant ses muscles sous ses vêtements. Le bretteur se libéra de son étreinte et fit deux pas en arrière.

– Je sais que tu as fait un pari puéril avec Bélial. Si tu veux vraiment gagner contre elle, tu vas devoir faire bien mieux que ça... Oh, et si tu penses que tu peux écarter la compétition...

– J'ai bien trop de fierté pour ça... soupira Larya. J'aurais l'impression de perdre contre elle si ma victoire n'est pas dans les règles de l'art. De toute façon, je suis loin de m'avouer vaincue...

La porte de la salle se rouvrit, dévoilant Bélial. L'armure était un peu large pour elle, bien qu'elle était haute de presque deux mètres et était musclée. Elle n'avait pas non plus mis toutes les pièces, jugeant ce qu'elle avait retiré comme étant trop contraignant. L'armure ne recouvrait que ses poings, ses avant-bras, ses coudes, ses épaules, ses pieds, ses genoux, sa tête, ses hanches et son torse. L'armure ne lui allait pas mais elle semblait satisfaite.

– C'est dingue, j'ai l'impression qu'elle me renforce ! J'ai quà lui donner un peu d'énergie, et c'est comme si j'étais plus forte ! Bon, niveau confort, par contre...

La reine détailla Bélial de la tête aux pieds avant de s'adresser aux mages.

– Contactez nos meilleurs forgerons et travaillez avec eux pour reforger l'armure à sa taille. Je veux aussi que vous suiviez toutes ses indications. Que l'armure soit comme une seconde peau pour elle.

– Mais... Mais c'est un... balbutia un mage.

– Je ne veux pas l'entendre ! Suivez mes ordres si vous ne voulez pas tenir compagnie à nos esclaves pour les vendanges!

Larya soupira et remarqua les expressions de Sieg et Bélial.

– Elle a beau être ma rivale, si elle fait jeu égale avec Lorelya, je refuse de gaspiller son potentiel. Mon devoir passe avant mes désirs, quoi que l'on puisse dire. Je sens que le combat à venir va dépendre de nous tous, alors nous devons tous être au sommet de notre potentiel.

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