Chapitre 31 : Le clan Sylvéria

Deux heures durant, la troupe forcée marcha sans baisser sa garde. Les elfes gardaient leurs arcs et flèches en main, prêts à abattre leurs invités au premier signe de danger. Ces derniers n'avaient pas rengainé leurs épées, ne sachant pas combien de temps les sylvériens se retiendraient de les agresser.

Bélial ressentait l'hostilité qui flottait en l'air et s'assura de rester près de ses compagnons pour qu'Adam puisse les protéger en cas de dérapage. La jeune femme remarqua que l'écarlate se retournait souvent vers la dénommée Lorelya qui les suivait sans les quitter des yeux. Bougonne, elle lui mit un coup dans les côtes qui le fit lâcher un petit cri de douleur.

– Hé, je sais que t'aimes les bonnes guerrières, mais si tu pouvais éviter de te rincer l'œil alors que je suis là...

– Quoi ? s'étrangla Sieg. Hein ? Mais... Mais non ! Je n'étais pas... Et puis, je pense qu'elle serait plus tentée de m'égorger que de faire connaissance !

Il marque un point, là... Et puis, tu le vois vraiment te tromper ?

– Bah alors, pourquoi tu la déshabilles du regard ? demanda La barbare d'un ton glacial qui fit frissonner le bretteur.

– Tu l'as bien vue se battre, non ? La façon que la nature semblait répondre à tous ses désirs, la protéger et l'épauler. Et elle créait ses propres flèches en les faisant pousser d'entre ses doigts. Crois-moi, ce n'est pas le genre de tours dont les elfes sont normalement capables. Ça cache quelque chose, mais je n'arrive pas à comprendre quoi...

– Tu trouves ? C'est pas juste de la magie ?

– Non, j'ai directement écarté cette possibilité... Non seulement je n'ai pas senti de vibrations magiques de sa part quand elle faisait appel à ses pouvoirs, mais sa vitesse d'exécution...

– Hein ? Tu parles de quoi, là ?

Ahmés s'approcha du duo et se racla la gorge.

– Plus un sort est complexe, plus il prend de temps à préparer. Par exemple, quand je veux créer une illusion, j'ai besoin de me concentrer pendant quelques secondes avant de la faire apparaître. Plus je me prépare, plus elle est détaillée et réaliste. Sinon, je prends le risque de la rendre facile à percer à jour.

– Et après, il y a des sorts bien plus basiques, le genre de magie si simple que l'on peut y faire appel en un claquement de doigt. Ma magie d'infusion est l'une des plus faciles à déployer, car je ne fais au final que libérer mon pouvoir sans lui donner de forme ou de propriétés particulières à part sa nature élémentaire. Mais cette Lorelya...

Bélial jeta un coup d'œil à l'elfe toujours couverte entièrement. La démone avait l'impression que l'archère les foudroyait du regard, bien que ses yeux n'était pas visibles.

– Elle a fait des trucs compliqués comme Ahmés aussi vite que les sorts simples de Sieg...

– Ce qui m'amène à penser qu'elle a une astuce qui lui permet d'être aussi vive en plein combat, enchaîna l'écarlate. Et puis, il est très rare d'être aussi athlétique et doué en magie. Chacune de ces disciplines demandent un effort constant pour les pousser à son niveau. Même moi, j'ai plus tendance à me reposer sur mes capacités physiques, me servant de ma magie comme un support. Mais elle, si elle l'avait voulu, elle aurait pu nous tenir tête rien qu'avec une de ces options.

– Personnellement, je m'inquiète moins de deviner comment elle est devenue si forte que de savoir si on va sortir de ce merdier vivant... grinça Farca. Si on se loupe sur ce coup-là, Il va nous falloir plus que la ruse et la force pour nous tirer d'ici...

– Affirmatif ! Calcul Des Probabilités En Cours...

– Pitié, ne nous parle pas de nos chances... soupira Sieg qui avait déjà une idée du résultat. Enfin, nous savions tous que traquer Saga ne serait pas sans danger...

– Ouais, mais le danger devait venir de Saga et ses sbires, pas de nos potentiels alliés... critiqua la sang-mêlée.

La nuit était déjà tombée depuis un moment quand les elfes s'arrêtèrent soudainement. À peine éclairés de leurs torches, les soldats scrutèrent les environs, redoutant un nouveau piège. Ils fixèrent les arbres alentours et seuls les plus perceptifs d'entre eux réalisèrent que leurs troncs étaient au moins dix fois plus épais que ceux de leurs congénères dans le reste de la forêt. Certains spécimens étaient plus de trente mètres de large, une particularité qui intrigua Sieg.

– Calmez-vous, bon sang ! s'énerva Lorelya. Aussi stupides que vous êtes, vous devez bien vous douter que nous ne vous aurions pas escortés jusqu'ici rien que pour vous tuer. Nous en avions la possibilité plus tôt. Et c'est toujours le cas, ne l'oubliez pas...

Mazette, qu'elle est aimable...

– Cela n'explique pas pourquoi nous nous sommes arrêtés en plein milieu de nul part ! intervint Matthias. Vous avez affirmé vouloir nous guider à votre reine, mais je doute qu'elle soit...

Un son étrange coupa le lieutenant et accapara l'attention de tous. Une des immenses arbres commençait à s'ouvrir, dévoilant une faible lueur. De l'interstice grandissant, ils purent voir des rambardes et des portes à l'intérieur même de l'arbre qui s'était complètement ouvert à eux, leur donnant l'impression d'avoir devant eux une résidence sculptée à même le bois. Et pourtant, après une rapide analyse, il devint évident par la forme du bois que sa forme n'était pas artificielle. L'arbre avait poussé tel quel, prêt à accueillir des occupants.

– Mais qu'est ce qu'est-ce qui passe, bordel ? cria Lorelya. Nous ne devons pas montrer la vrai forme de...

D'autres arbres s'ouvrirent, dévoilant encore plus de bâtiments dendrologues à des visiteurs médusés. Des elfes sortirent timidement de chez eux, posant un regard suspicieux sur les intrus indésirés. Les plus courageux d'entre eux quittèrent leurs domiciles, descendant des escalier naturels quand ils en avaient besoin, éclairés par les veines de sève phosphorescente qui parcouraient les arbres.

Sidérée, Lorelya repéra un bataillon elfique qui s'approchait de son groupe et s'avança vers eux d'une démarche qui reflétait sa fureur.

– Je peux savoir ce qui vous prend de dévoiler le village à des étrangers ? Vous savez aussi bien que moi que le secret a toujours été notre meilleur allié ! Maintenant, nous n'avons pas d'autre choix que de les tuer ou les garder comme esclaves !

– Ça va pas, non ?

Indignée, Bélial avait rattrapé l'archère et l'avait forcée à lui faire face en lui tirant le bras. Sieg grimaça en entendant les cris de stupeur des elfes du village. À leurs yeux, les humains n'avaient pas le droit de lever la main sur eux et encore moins aussi sauvagement. Choquée, Lorelya se libéra de l'étreinte de la barbare et rugit.

– Comment oses...

La jeune femme l'interrompit en tapotant le torse de l'elfe avec son index, coupant son souffle.

– C'est à moi de te dire ça, connasse ! On est pas des jouets et surtout pas des esclaves ! On est là pour vous aider parce que votre village est en danger et on a vraiment envie de maraver le taré qui va se pointer !

Outrée, Lorelya balaya le bras de la démone et lui hurla au visage.

– Ha ! Comme si j'allais croire un mensonge aussi grossier ! Je ne sais pas ce que vous nous voulez, mais je ne vais pas...

– La porte que personne peut ouvrir.

Même si ses traits étaient imperceptibles, Sieg savait qu'il venait de surprendre l'archère en abordant un sujet dont il devait ignorer l'existence. Des murmures se propagèrent aux alentours, attestant de l'effet qu'avait eu la déclaration de l'écarlate.

– Ouais, celle-là, reprit Bélial en se penchant vers Lorelya. Il y en avait une aussi dans mon village, mais Saga est venu et l'a ouverte en sacrifiant tout mon clan! À part le traitre qui l'a aidé, je suis la seule survivante, alors si tu veux pas que la même chose arrive ici, tu vas fermer ta gueule et nous montrer où est ton chef, parce qu'on a pas de temps à perdre avec une gamine immature qui attaque les gens sans réfléchir !

Regardez qui parle...

Lorelya recula en serrant son arc. La tension déjà palpable venait de devenir encore plus intense. Sieg se mordit les lèvres en voyant de plus en plus d'armes autour d'eux.

– Des paroles étonnement sages, bien que rudes...

L'archère se retourna vivement et déglutit en voyant une douzaine d'elfes avancer vers eux. Une femme était à leur tête, resplendissante dans sa robe mariant le blanc et le vert. Une tiare de platine trônait sur ses cheveux dorés qui tombaient en cascade jusqu'à ses chevilles. Ses yeux bleus perçants étaient posés sur Sieg qui avait les paupières grandes ouvertes.

– Votre Majesté ! paniqua Lorelya en accourant vers elle. Vous ne devriez pas vous...

– Calme toi, ma chère arrière petite-fille, tu n'as pas à te faire du soucis pour moi, souffla la reine sans quitter l'écarlate du regard. Si je les ai faits venir ici, c'est parce que j'ai confiance qu'ils ne vont rien tenter de suicidaire. Après tout, personne serait assez inconscient pour approcher notre territoire sans une excellente raison.

La reine s'avança vers le bretteur qui blêmissait de plus en plus. Bélial le fixait en fronçant les sourcils, ne comprenant pas la réaction de son partenaire.

– Tu n'as presque pas changé... susurra l'elfe en caressant le visage de Sieg. D'une certaine façon, je ne devrais pas être étonnée, mais je ne m'attendais pas à te revoir un jour...

– Oui, tu as raison, Larya... répondit Sieg. Moi aussi, je n'aurais jamais cru te revoir...

– Quelle insolence ! cria Lorelya. Comment oses-tu...

– Silence, Lorelya... demanda calmement la reine. Tu devrais lui montrer plus de respect. Après tout, sans lui, tu ne serais pas ici...

L'archère regarda tour à tour l'écarlate blanc comme un linge et son arrière-grand-mère.

– Mais... Que voulez-vous...

Larya prit sa arrière petite fille par les épaules et la força à faire face au bretteur.

– Regarde le bien, cet humain. Ne te rappelle-t-il pas quelque chose ? Ou quelqu'un ?

Lorelya scruta les traits du bretteur avant de crier et reculer.

– Non... Mais on dirait...

– Oui, ton grand-père lui ressemble beaucoup, n'est-ce pas ?

Les yeux écarquillés de Sieg s'ouvrirent encore plus en entendant cette remarque. À ses côtés, Bélial eut le souffle coupé en réalisant ce qui se passait. Farca ferma les yeux, se disant que le cauchemar disparaîtrait si elle l'ignorait. La reine s'amusa de la réaction de l'épéiste et fit un pas de plus vers lui, collant presque son corps au sien pour lui murmurer dans l'oreille.

– Et oui... Même moi, je ne savais pas encore que j'étais enceinte quand tu as été invité dans le domaine divin, Rotsala...

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