Chapitre 16 : Une soirée riche en incidents
Sieg se précipita dans le jardin, balayant les environs du regard. Les gardes postés ici ne lui demandèrent pas ce qu'il faisait ici. Ils étaient plus occupés à veiller sur leur collègue inconscient au sol. L'épéiste marcha vers eux, n'ayant pas besoin qu'on lui fasse un dessein.
– Par où est-elle partie ?
Les gardes sursautèrent en l'entendant et hésitèrent. L'un d'eux désigna un grand arbre plus loin.
– Merci !
Sieg reprit sa course en direction d'un immense chêne à une centaine de mètres du palais. Quand il distingua une figure assise à son pied, il ralentit l'allure.
Serrant ses jambes repliées contre elle, Bélial leva pas la tête quand son partenaire vint s'appuyer contre l'arbre.
– J'ai dis que je voulais être seule...
– Je t'ai entendue...
Un silence pesant s'installa entre eux. L'épéiste scruta les étoiles, attendant une réaction de la barbare.
– Et la princesse ?
– Les autres sont avec elle... Ils ont tous insisté pour que je te suive...
– Je vois...
Une nouvelle période de silence s'imposa entre eux.
– Tu crois pouvoir faire quoi pour m'aider ? Tu vas me rendre mon vrai père ? Pas le taré qu'on a vu ?
– Si je le pouvais...
– Bah tu peux pas ! Personne peut ! Il est devenu complètement zinzin, et s'il savait que j'ai...
Bélial redressa la tête et la cogna contre le tronc.
– Je sais pas quoi faire, putain... C'était facile de le détester quand c'était juste le type qui avait tué Alice, mais là, je sais ce qui lui est arrivé ! Je sais ce qu'ils lui ont fait ! Ils l'ont rendu fou avant de lui retourner le cerveau ! Je sais que ça le pardonne pas pour tout ce qu'il a fait, mais... Mais...
La démone se remit à pleurer et fixa Sieg qui restait silencieux.
– C'est pas mon père qui a fait tout ça... Mon père, c'est le type qui me prenait sur ses genoux pour me raconter comment était sa dernière chasse... Qui m'a appris à chasser... Qui me disais que je serais la meilleure guerrière du clan... Il avait toujours cru en moi... Mon père est mort et un monstre a pris sa place... Mais même avec ça... Je peux pas...
Sieg s'assit à côté de Bélial et guida sa tête sur son épaule en la caressant.
– Je ne te demanderais jamais de le haïr... Ma haine est à moi... Tu peux m'aider à la supporter, mais tu n'as pas à la porter pour moi... Je veux que tu continues d'aimer le père de tes souvenirs... Ce n'est pas lui que je déteste...
La barbare ferma les yeux. La douleur de son cœur écorché était toujours là, mais les mots de son partenaire l'aidaient à la supporter.
– Dis... Tu vas vraiment le tuer ?
Sieg réfléchit un moment avant de répondre.
– Oui... Pas ce soir, et peut-être pas demain, mais si je recroise sa route dans de meilleurs circonstances, je le tuerais...
Bélial soupira de soulagement.
– Tu promets ?
***
Ahmès continuait de suivre Artra dans les couloirs du palais. Il savait que le prêtre utilisait une pierre de communication pour parler avec quelqu'un, mais il n'entendait qu'une moitié de la conversation. Il savait qu'il pourrait entendre la voix de son interlocuteur s'il approchait d'avantage, mais les couloirs étaient bondés de miroirs que sa magie ne saurait tromper. Il avait même failli se faire repérer au tout début.
Le taouyen avait eu de la chance dans la salle de bal que personne regardait le sol poli comme une glace, sinon ils auraient pu voir un reflet sans source et paniquer.
Tout ce que le musicien avait pu comprendre de la conversation était le rapport qu'Artra faisait sur la situation. Cependant, il avait aussi mentionné que le plan progressait comme prévu. Avec un peu de chance, il en parlerai de nouveau et serait plus généreux avec les détails.
– Oui, je sais que ma fille n'est pas notre priorité et je n'essaye pas d'en faire une... De toute façon qu'elle nous rejoigne ou non, quand les dieux d'or reviendront, elle pourra elle aussi vivre en paix dans leur paradis. Son bonheur est garanti de toute façon, donc je peux la laisser avec ses amis. Plus important, je sais que les autres ont bien progressé, il ne doit rester qu'une dizaine de cibles. En effet, c'est moins d'un tiers. Ils auront largement fini avant la fin des festivités...
Ahmés fronça les sourcils. S'ils avaient déjà enlevé plus de la moitié de leurs cibles, pourquoi personne ne s'en inquiétait ? Même si ce n'étaient que le début de la fête, l'absence soudaine d'une vingtaine personnes influentes ou de leur famille aurait dû être remarquée. Et pourtant rien...
Le taouyen se demandait si les informations que le roi avait reçu étaient erronées. Il était possible que le but de l'Ordre à Hydralia n'était pas celui qu'ils pensaient, mais cela voulait dire qu'ils nageaient encore plus à l'aveugle que prévu.
– Bien sûr, je ne vous recontacterais que dans deux jours. En attendant, je surveillerais Sieg et ses compagnons. Nos autres agents vont eux se concentrer sur leurs dernières cibles, je vais éviter de les contacter au cas où je serais espionné...
Ahmès se félicita d'avoir suivi le prêtre cette nuit ci plutôt que l'autre. Sinon, il aurait manqué sa chance d'obtenir ces maigres informations.
Artra rangea la pierre dans sa poche et accéléra le pas. Ahmés le suivit dans la salle de bal et chercha Adam dans la foule, ce qui ne fut pas bien compliqué. Il vit que non seulement Bélial et Sieg n'étaient pas revenus, mais Finora aussi avait disparu.
– Ne me dîtes pas que vous avez perdu la princesse ? Je vous rappelle que notre mission est de la protéger...
Farca sursauta en entendant la voix du taouyen et regarda autours d'elle avec énervement.
– Putain, j'ai failli faire une crise cardiaque avec tes conneries ! On sait faire notre taf, regarde...
L'alchimiste désigna du pouce le centre de la salle où Firona se tenait fièrement aux côté de Raccan. Ils saluaient dans la plus grande joie les convives qui se relayaient pour les féliciter.
– Après Ce Qui S'est Passé, Le Roi A Décidé D'Annoncer Les Fiançailles De Son Fils Avec La Princesse.
– Il voulait sûrement mettre vite un terme aux rumeurs qui commençaient à se répandre sur vous... soupira Anoro. Après tout, les membres de l'escorte de la promise de son fils ont bien fait parler d'eux ce soir...
– Ouais ben désolée... grommela Farca. Si j'avais su que ma famille serait là, je serais restée lire à l'ambassade...
– Je ne vous blâme pas, Dame Farca. Après tout, la plupart des invités voient vos frères sous un jour négatif après la façon qu'ils vous ont parlé, pas l'inverse...
– Oh, ça va alors... Je ne suis qu'une victime pour eux...
– Si ça peut te remonter le moral, je connaît quelques petits maléfices sympathiques que je pourrais lancer sur eux. Rien de bien méchant, mais ils pourraient passer beaucoup de temps aux latrines...
La naine aurait menti en disant que la perspectif lui déplaisait mais elle dissuada Ahmés de mettre sa menace à exécution. Elle ne voulait pas que sa famille se souvienne qu'elle était alchimiste s'ils se sentaient soudainement mal.
– Ils Sont De Retour.
Sieg et Bélial venaient de rentrer dans la salle de bal, attirant l'attention de plusieurs invités qui s'écartaient à leur passage. Les yeux de la démone étaient encore rouges mais elle affichait un sourire sympathique.
– Enfin, on s'inquiétait ! s'exclama Farca quand ils arrivèrent devant elle. Tu te sens mieux ?
– Bof, tu sais, la famille...
La sang-mêlée secoua la tête en entendant ça.
– Je vois que le roi a annoncé la bonne nouvelle... commenta Sieg en regardant la princesse.
– Et je m'en veux d'avoir manqué ça ! J'ai cependant...
Sieg fit un bond sur le côté en entendant Ahmés prendre la parole juste à côté de lui.
Il faudrait lui mettre une clochette à celui-là ! Bon, j'avoue qu'avec, sa discrétion en prendrait un coup...
– Bon sang, Ahmés... grogna Sieg. Qu'as-tu appris exactement ?
– Pas grand chose, mais j'ai d'inquiétantes nouvelles... J'ai suivi Artra quand il est sorti après vous et il a sorti une pierre communication. Je n'ai pas pu entendre son interlocuteur, mais Artra a dis quelque chose de bizarre... Ses associés n'ont que dix cibles à atteindre car ils en ont déjà eut à peu près vingt... Et il a bien dis cibles, pas personnes...
– Vingt... médita Sieg en jaugeant l'ambiance de la salle. La soirée est déjà bien avancée, je pense que l'on s'inquiéterait si autant de personnes manquaient à l'appel. Je n'ai pas la liste des invités pour comparer, mais j'ai l'impression que chaque pays a au moins un représentant présent. Quelque chose...
– Mort au bâtard de Danatal !
Au centre de la salle, un homme venait de sortir un poignard et s'était jeté sur le prince Canrac. Des gens crièrent alors que le prince se défendait en attrapant les bras de son agresseur. Ils tombèrent tout deux au sol, l'assassin prenant le dessus en levant sa lame au dessus de sa tête.
Adam tira son bras-grappin et attrapa le poignard juste avant qu'il ne transperce la poitrine de Canrac. Le poing frappa le torse de l'assassin qui glissa sur le sol et cessa de bouger. Alors que son câble se rétractait, Adam se précipita d'un pas lourd vers Finora et Raccan et les garda à porté de bras sans quitter l'agresseur des yeux.
– Protocole de protection enclenché !
Ses compagnons le rejoignirent alors que des gardes arrivaient pour maîtriser l'assassin. Quelqu'un prit son poignet et réalisa qu'il était décédé.
– Tout le monde va bien ? demanda Sieg en prêtant assistance à Canrac.
– Oui, grâce à votre compagnon... souffla Vlaran en serrant la main du gardien. Je ne connais pas votre nom, mais tout Menora a une dette envers vous !
– Vos Remerciements Ne Sont Pas Requis. Je N'Ai Fait Que Suivre Mes Priorités.
Le roi regarda Adam bizarrement sans se départir de son sourire. Son attitude changea en entendant des murmures dans la foule. Beaucoup de personnes parlaient de ce qu'avait hurlé l'assassin avant de s'en prendre au prince héritier.
C'est sûr qu'un potentiel scandale va faire jaser...
– Je n'aime pas ça... marmonna Farca.
Vlaran se racla la gorge et s'exprima.
– Mes chers invités, je m'excuse pour cet incident. La situation est sous contrôle. Je vous en prie, oubliez ce qui viens de se passer et amusez-vous !
Vlaran se tourna vers sa famille et s'adressa à l'escorte de Finora au passage.
– Pour le moment, faisons comme si rien ne s'était passé. Si nous partions maintenant, on pourrait porter du crédit aux mots de ce fou. J'aurais préféré le capturer vivant, mais...
– Protocole D'Excuses Enclenché.
– Non, ne vous excusez pas, intervint Canrac. Sans votre intervention, je serais mort au moment où nous parlons...
– L'assassin serait mort de toute façon...
Un garde s'immisça dans la conversation et présenta une capsule bleue dans un mouchoir.
– Nous avons trouvé ça dans sa bouche. Nous ne savons pas encore...
Farca arracha le mouchoir des mains du garde et examina la capsule. Elle la renifla avant de l'agiter et analyser la réaction.
– Si c'est bien du poison, c'est du Quaranda. C'est foudroyant, il serait mort immédiatement après l'avoir pris.
– Certains assassins l'utilisent dans leurs mission, exposa Sieg. Et en cas d'échec...
– Nous en parlerons plus tard ! coupa Vlaran. Puis-je vous demander de nous retrouver à la fin de la soirée, Maître Sieg ? Je m'excuse auprès de vos compagnons, mais contrairement à vous, je suis sûr qu'ils ne sont pas déjà au courent de la situation. Si nous pouvons calmer les choses avant qu'elles ne prennent de l'ampleur, j'aimerais éviter de mettre trop de monde dans la confidence, est-ce clair ?
Le groupe accepta et s'éloigna de la famille royale. Mais l'ambiance de la soirée avait irrémédiablement changée, le poison de la rumeur se propageant trop vite pour être contenu.
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