Chapitre 12

Le lendemain, Kayliyah se réveilla en gueule de bois. Mais sans avoir vibré au rythme de musiques endiablées, mais bien à celui de ses pleurs effrénés. Elle avala son petit-déjeuner sans grande faim, et se força à descendre fumer une clope. Elle avait juste envie de retourner dormir pour le plus longtemps possible, mais se força à aller prendre l'air. Elle croisa Léane dans la cour Carrier.

« Bon, tu veux en parler baby ? demanda la petite blonde de but en blanc.

– Il va bien falloir que je vous explique ... En gros, je sais plus si je t'avais déjà dit qu'il s'était passé un truc avec Ana ?

– Non.

– Bah un soir, alors qu'on était alcoolisées, on a couché ensemble. Et c'était vraiment bien, mais du genre VRAIMENT bien. Sauf qu'après, elle m'a demandé ce qu'on était, et je lui ai dit qu'en gros je n'étais pas prête à entamer une nouvelle relation. Et elle avait dit qu'elle était prête à m'attendre, à attendre que j'aille mieux. Mais là j'ai décidé qu'après ma TS, je ne pouvais plus la laisser espérer. Je ne peux décemment pas la laisser espérer qu'un jour j'aille mieux pour que j'ai assez de temps à lui consacrer. Je ne peux pas encore risquer de lui faire vivre le traumatisme de me retrouver mourante dans son lit. Elle m'a vraiment aidé en m'hébergeant chez elle, et je ne la remercierai jamais assez, mais je ne peux pas laisser une personne pure, comme elle, être souillée par mes problèmes. Et du coup, elle l'a assez mal pris ...

– Au moins t'as été honnête ... Mais faut pas que tu te dises que tu resteras toujours comme ça, ça va forcément aller mieux un jour ! essaya d'encourager Léane.

– Je sais, mais je ne veux pas prendre le risque ... »

Kayliyah fit comprendre à son amie qu'elle ne voulait plus parler de ça, et les filles discutèrent alors d'autres choses. Elles décidèrent de remonter se maquiller, à contre-cœur pour la plus âgée aux cheveux verts, mais elle savait que cela lui ferait du bien.

Quelques jours plus tard, elle reçu un message totalement inattendu de la part de Danaël. Il lui demandait comment elle allait, ayant appris qu'elle était de retour à l'hôpital. Elle lui répondit aussitôt que ça allait un peu mieux depuis qu'elle y était, et lui demanda comment il avait été mis au courant. Il répondit que les nouvelles allaient vite dans cette ville, et lui proposa de se voir à l'extérieur car il détestait les hôpitaux. Elle accepta, ayant obtenu son droit de sortie depuis peu.

Trois jours après cet échange, Kayliyah se fit maquiller par Léane le matin, mangea au self avec ses amies, et sortit rejoindre Danaël. Quand elle le retrouva, il l'a prise directement dans ses bras. Il était le grand-frère qu'elle n'avait jamais eu. Au bout d'une bonne heure, elle lui posa la question qui lui brûlait les lèvres depuis le début :

« Et ... commença-t-elle sur un ton hésitant.

– Oui ?

– Comment il va ?

– Qui ça ?

– Ton frère, Réphaël.

– Ah ... Bah il a été détruit par votre rupture. Il s'est encore plus renfermé sur lui-même, boit et fume beaucoup. Il est aussi encore plus violent. Ça a vraiment cassé un truc chez lui ...

– Je suis désolée, s'excusa la plus jeune.

– Pourquoi tu t'excuses ? C'est pas toi qui l'a violé, à ce que je sache.

– Je sais, mais c'est à toi et à tes frères de le supporter et je suis désolée pour ça ... Mais passons ! Comment vont Luciel et Judicaël ?

– Luciel est assez affecté par l'état de Réfa. Mais il fait avec, et essaie d'avancer. Judicaël est égal à lui-même, il ne laisse rien l'atteindre, ou du moins il ne laisse rien paraître et se réfugie dans les études.

– Bon ça me rassure s'ils ne sont pas plus touchés que ça ! sourit Kayliyah.

– Et puis, tu leur manque à tous les deux !

– Ah bon, s'étonna la jeune aux cheveux verts.

– Bah t'as quand même vécu et partagé des moments forts avec nous !

– Pas faux, rigola-t-elle. »

Ils rigolèrent toute l'après-midi. Quand vint le temps des au revoir, Danaël prit longuement dans ses bras la jeune fille, et ils se promirent de se revoir très vite.

Kayliyah rentra le cœur léger, elle se sentait mieux d'avoir parlé à Danaël. Toute guillerette, elle retourna à la clinique et découvrit une nouvelle jeune qui avait sa chambre juste en face de la sienne. En la croisant dans le jardin, elle l'aborda.

« Salut, t'es nouvelle ? entama Kayliyah.

– Oui ...

– Si t'as besoin de quelque chose, ma chambre c'est la 214, juste en face de la tienne ! lui sourit la jeune. »

Elle s'en alla, toujours aussi guillerette, car elle avait bien compris que la jeune en question n'avait pas plus envie que ça de parler. Elle rejoint Eden, Neïs et Léane, les trois autres fumeuses, pour leur raconter sa journée. Les trois furent rassurées de revoir la Kayliyah qu'elles connaissaient, souriante et déconneuse. Les filles remontèrent à l'étage et se rendirent dans la chambre de Julie M, où tout le reste de la bande était en plus de la nouvelle. Elle se présenta sous le nom d'Anaïs, mais préférait qu'on l'appelle Nanou. Elle était grande, élancée, et au physique très masculin. Celle-ci se figea un peu lorsque son regard se posa sur Kayliyah. Cette dernière passa au-dessus et s'installa par terre pour discuter avec les autres. Les discussions allaient en bon train, et Nanou semblait se décoincer. Les filles allèrent manger toutes ensembles, rajoutant même une chaise à leur table habituelle pour la nouvelle venue. Le soir, elles allèrent toutes dans la cour Carrier pour accompagner les fumeuses. Elles rencontrèrent Romane et Marlène, des patientes du service Carrier. Elles discutèrent toutes ensembles jusqu'à vingt-et-une heure, heure à laquelle elles se rendirent dans leurs services respectifs pour prendre leurs médicaments, et retournèrent dans cette même cour. Ce soir-là, elles prirent des photos, rigolèrent, se coururent après, et firent tellement de bruit qu'elle se firent reprendre par les infirmiers plusieurs fois. En remontant pour aller dans leurs chambres respectives, Nanou s'approcha de Kayliyah.

« Tu sais, je suis désolée si j'ai été froide au début ...

– Oh, t'inquiète, je ne l'ai pas pris personnellement ! Je me suis dite que tu devais avoir tes raisons.

– Oui, j'ai été harcelée par des filles qui te ressemblaient et, du coup, j'ai associé toutes les filles aux cheveux colorés à mes harceleuses. Mais t'as vraiment pas l'air comme ça, donc ça va mieux.

– Tant mieux si tu te sens plus à l'aise ! sourit la jeune aux cheveux verts. »

Quelques jours plus tard, les amis de Kayliyah vinrent la voir, mais cette fois-ci avec ses amis de son ancien lycée. Elle sauta de joie. Toustes les revoir lui faisait du bien. Elle se sentait, pour une fois, entourée. Entourée de genstes qui tenaient à elle, au point de faire plusieurs dizaines de minutes de transports pour venir la voir dans un hôpital miteux. Ils passèrent l'après-midi à discuter.

Les jours passèrent, et elle vit que Nanou et Eden devenaient de plus en plus proches. Cela la rendit heureuse, elle avait vu Eden tellement mal après s'être fait quitter parce qu'elle avait annoncé à son ex qu'elle l'avait trompé avec un ami de Neïs.

Une après-midi, Romane, Eden, Nanou, Léane et Kayliyah décidèrent de sortir et d'aller sur les quais. Elles prirent deux flashs, un de vodka et un de whisky, et le meilleur ami de Nanou – qui les avait rejointes – avait apporté de quoi fumer. Ils s'installèrent tous sur le carré, vers Bellecour, et rigolèrent, prirent des photos, fumèrent et burent.

« Les meufs, j'ai la tête qui tourne ... dit Romane en s'asseyant sur le muret.

– Oula, t'es toute pâle Roro ! s'inquiéta Kayliyah.

– Ouais, t'as l'air vraiment pas bien ... Tu veux pas qu'on rentre ? continua Léane, tout aussi inquiète.

– Non, vous inquiétez pas pour moi, amusez-vous je vais me reposer. »

Les filles n'insistèrent pas, et continuèrent de discuter tout en fumant. L'heure de rentrer sonna, et Romane fut difficile à réveiller. Et réveillée, elle n'arrivait même plus à marcher. Kayliyah paniqua un peu. Elle décida, contre l'avis de tous, d'appeler la clinique.

« Clinique Saint-Paul-de-Vincent, bonjour.

– Bonjour, je suis Alice Kayliyah Benguedj, je suis patiente au service Michelland, est-ce que vous pourriez me passer les infirmiers de Carrier ?

– Oui, pourquoi ?

– Je suis avec une patiente, en permission en dehors de la clinique, et elle ne se sent pas bien. J'aimerais les prévenir qu'on rentre pour qu'ils viennent la chercher à l'entrée.

– Pas de soucis, je vous les passe ! »

La sonnerie retentit, et quelqu'un décrocha.

« Oui, Isabelle à l'appareil, répondit une voix féminine.

– Bonjour, je suis une patiente du service Michelland et je suis en permission avec Romane, de Carrier. On est en train de rentrer, mais elle ne se sent pas bien, elle tient à peine debout.

– Ah mince ... Vous avez consommé quelque chose ?

– Elle a bu de l'alcool et elle a fumé de la drogue.

– Ah ... On va devoir appeler ses parents vu qu'elle est mineure. Dans qu'elle état elle est là ?

– Elle se sent vraiment mal, comme j'ai dit elle tient à peine debout et elle a du mal à rester éveillée.

– D'accord, vous arrivez dans combien de temps ?

– D'ici trente minutes.

– On viendra la chercher. »

La conversation téléphonique se termina ainsi. Dans le bus, Romane s'était rendormie. Une fois descendue du bus, Kayliyah vit Nanou se descendre le mélange de whisky coca.

« Mais qu'est-ce que tu fous ?

– Ca m'a angoissé toute cette histoire ...

– Et alors ? C'est une raison de boire ? s'énerva la plus jeune ?

– Oh c'est bon ... »

Kayliyah, excédée et ne voulant pas se faire attraper avec deux patientes passablement alcoolisées et droguées, marcha plus vite que le groupe et rentra en première, laissant Romane aux bons soins d'Eden. Elle embarqua Léane avec elle. Sur le chemin, elle rencontra sa mère et sa grand-mère.

« Bah, qu'est-ce que vous faites là ? s'étonna Kayliyah.

– Dis tout de suite que t'es pas heureuse de nous voir, lança sa grand-mère de façon tranchante.

– Ah si, si ! Mais je ne m'y attendais pas, c'est tout !

– Tes grands-parents sont de visite à Lyon, donc on a décidé de venir avec ta grand-mère ! lança Marie-Madeleine avec un grand sourire. »

La jeune aux cheveux verts leur présenta Léane, et les quatre femmes rentrèrent dans la clinique comme si de rien n'était. Léane partit dans sa chambre, laissant Kayliyah seule avec sa famille. Elles s'installèrent sur un banc dans le jardin, profitant des premiers rayons du soleil de l'année, et des dernières lueurs du jour. Les trois femmes discutèrent pendant une petite heure. Marie-Madeleine était heureuse de voir sa fille si calme. Elle semblait aller mieux. Elle se rendit alors compte à quel point son mari exerçait une influence néfaste sur le comportement de son bébé. La plus jeune, quant à elle, était heureuse de voir sa grand-mère. Cette vieille dame de quatre-vingt-quatre ans était une femme à fort caractère, un peu trop fort au goût de toute la famille. Mais Kayliyah l'aimait comme elle était, elle avait d'ailleurs hérité son franc-parler et son côté rentre dedans d'elle. Sa grand-mère n'hésitait pas à mettre les pieds dans le plat et à crever les abcès. Quand elles repartirent, Kayliyah se sentit plus légère. Sa maman lui avait manqué aussi, et elle était un peu triste de ne pas pouvoir passer plus de temps avec ses grands-parents. Un peu plus tard, la jeune aux cheveux verts reçu un message d'une inconnue sur Instagram :

[ hello ! je suis une amie de Romane, tu étais avec elle cette après-midi ??

– oui, pourquoi ?

– sa mère voudrait que tu l'appelles, voici son numéro ]

Kayliyah reçu un numéro de téléphone portable qu'elle s'empressa d'appeler. Elle s'imaginait à quel point elle devait être inquiète pour sa fille.

« Allô ? répondit une voix au téléphone.

– Oui, bonjour, je suis Kayliyah, l'amie de Romane. On était ensemble cette après-midi ! expliqua Kayliyah.

– Oui, bonjour Kayliyah ! Tu peux m'expliquer ce qu'il s'est passé ?

– Alors on a décidé de sortir toutes ensemble, de prendre de la vodka et du whisky et de fumer un peu, l'ami de l'une d'entre nous nous a ramené de quoi fumer. Et Romane s'est sentie très mal, elle s'est d'abord allongée et endormie sur un muret, puis on a galéré à la réveiller pour rentrer. Alors j'ai décidé d'appeler la clinique pour les prévenir, je voulais pas être responsable d'elle si quelque chose se passait mal.

– Et tu as bien fait ! Elle a beaucoup bu ? Et beaucoup fumé ?

– Autant que moi et, comme vous pouvez l'entendre, je vais très bien ... C'est pour ça que j'ai compris que quelque chose n'allait pas.

– Ok bon, déjà je te remercie d'avoir prévenu la clinique, et d'avoir accepté de m'appeler. J'étais morte d'inquiétude quand les infirmiers m'ont appelée, et très en colère aussi.

– S'il-vous-plaît, ne soyez pas trop dure avec Romane. On traverse toutes des phases difficiles, et quelquefois on a juste besoin de s'échapper, même l'espace de quelques heures, de notre quotidien morne en clinique.

– Je vais voir ... Je comprends, mais ce qu'elle a fait est grave. Sur ce, je te laisse, je vais essayer d'avoir ma fille au téléphone, bonne soirée.

– Bonne soirée à vous aussi, madame. »

Kayliyah raccrocha. Elle était inquiète pour la suite de Romane, mais soulagée qu'elle soit prise en charge par le personnel hospitalier et ses parents. Elle espérait juste qu'elle ne lui en voudrait pas trop.

Au dîner, Nanou n'avait toujours pas dessaoulé. Elle puait le whisky a des kilomètres, et les infirmières présentes ce soir s'en rendirent bien compte. Alors l'une d'entre elle l'emmena faire une prise sang. Pendant ce temps, les filles allèrent fumer dans la cour Carrier, où elles rencontrèrent Marlène. La jeune fille leur demanda pourquoi Romane n'était pas là, alors Kayliyah, Léane et Eden en profitèrent pour raconter à Marlène et les autres leurs péripéties de l'après-midi. Julie M, Pauline, Lucie et Julie F applaudirent la réaction mature de la jeune aux cheveux verts. Nanou les rejoint plus tard, toujours ensuquée par l'alcool et la drogue. Sur ce, les filles partirent toutes se coucher. 

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