Défis 5 texte 3 Grand-papa

Cher grand-papa,

Aujourd'hui je m'adresse à toi du haut de mes quelques années. Je ne sais ni comment la commencer, ni comment la finir, mais je sais ce qu'il y aura au milieu de cette lettre. Il y a passé douze ans, tu t'es envolé. Tu n'avais pas décidé de t'en aller à ce moment-là, mais ça c'est passé comme ça. Amèrement, au cours de ma petite existence, je me suis faite à ces quelques mots. Je ne crois pas au destin, je ne crois pas en dieu, je ne crois pas en l'humanité. Je crois seulement en la vie et la mort. Hier je croyais en tout ces beaux mots, aujourd'hui non. Peut-être que demain j'aurai la preuve de l'existence d'une quelconque divinité. Est-ce que tu sais toi, de là-haut, de quoi sera fait demain ?J'ai déjà vu ton sourire. J'ai déjà vu tes yeux. Je t'ai vu marché avec tes deux béquilles. Je t'ai tenu la main, j'ai joué à la balle avec toi. La chose terrible là-dedans, c'est que je ne m'en rappelle pas. Cette belle invention qu'est la photographie, à quoi sert-elle quand les souvenirs ne sont plus là pour l'accompagner ? J'ai traversé des hauts, des bas. J'ai vu des gens naître, des gens mourir. La musique m'a toujours accompagnée, de Henry Dès, quand j'étais enfant, à Simple Plan aujourd'hui, en passant par du Bach quand j'étais bien au chaud dans le ventre de maman. Tu aimais la musique. Petite, je tapais sur les touches du vieux piano dans ton ancien chez-toi, ensuite j'ai récupéré ta flûte à bec quand la mienne s'est cassée. Suis-je autorisée à te dire qu'elle sonne plus faux que la voix de papa quand il chante ? Maintenant j'apprends à jouer de la guitare. Est-ce que tu aimais la guitare ?Ce qui me rend le plus triste quand j'y repense, ce n'est pas forcément le manque. Ça peut paraître insensé, mais je ne sais ce qu'est le manque, d'aussi loin que je m'en souvienne, personne ne m'a jamais manqué, à moins que je ne confonde ce sentiment avec un autre. Ce qui me rend triste, c'est de ne pas savoir où tu es et de ne pas savoir si tu es fier de moi. Je ne sais pas si tu me vois grandir. Je ne sais pas si tu me verras recevoir mon diplôme, si bien-sûr je l'obtiens. Tu ne me verras peut-être pas non plus réussir ou rater ma vie. Et puis surtout, tu n'as jamais connu ma petite sœur. C'est probablement ça qui me rend malheureuse quand je pense à toi. Je t'ai connu, alors qu'elle non. J'ai côtoyé une personne merveilleuse, tout le monde m'a dit que tu l'étais, alors qu'elle non, et je ne suis même pas apte à m'en souvenir. J'ai presque honte, même si je n'y peux fichtre rien. J'espère que tu es heureux, où que tu soies. J'espère que tu veilles sur grand-maman, parce qu'elle en a besoin. Ça ne doit pas être drôle tous les jours de vivre seule là-bas en-haut. J'ai le cœur serré en écrivant cette lettre qui t'es adressée et que tu ne liras sans doute jamais. Grand-papa, j'aimerais un jour pouvoir te remercier d'avoir permis à papa de voir le jour, de m'avoir offert un père aussi merveilleux que lui. Il est très fatigué ces derniers temps alors veille bien sur lui aussi. C'est probablement le truc le plus nian-nian que j'aie écrit de toute ma vie, en-dehors des poèmes de cinquième année, mais ça fait un bien fou. Je sais que je ne pourrai jamais te revoir en chair et en os, mais j'espère pouvoir le faire une fois mon heure venue. À bientôt ?


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