S06 - Thème "Retour sur un effet papillon"

D'un monde à l'autre

Chapitre 4 : Tout s'explique !

Alors que l'appareil aurait dû se parquer au niveau d'une passerelle d'accès direct à l'intérieur de l'aéroport, plusieurs bus attendaient les passagers sur le tarmac. Légèrement surpris mais toujours sous le choc de leur « rêve », aucun n'osa poser la moindre question. Ils descendirent de l'avion sans un mot, comme hypnotisés et prirent place dans leur nouveau moyen de locomotion.

Ils furent conduits dans un bâtiment annexe où une dizaine de gaillards en costard-cravate et à l'air sévère les accueillirent et les dirigèrent, sans leur donner la moindre explication, vers une immense salle aux fenêtres occultées. Une fois tout le monde à l'intérieur, la porte se verrouilla automatiquement. Un brouhaha commença à s'élever de la foule, jusqu'à ce qu'un homme prenne la parole.

- Mesdames et Messieurs, bonjour. Tout d'abord, je tiens à vous présenter, à mon nom et à celui de mon équipe, nos plus plates excuses pour les conditions particulièrement étranges, voire sordides, dans lesquelles vous êtes arrivés jusque sur notre magnifique île. Nous sommes réunis ici pour essayer, avec vous, de comprendre ce qu'il s'est réellement passé et, surtout, ce qui a déclenché tout ça.

- Comment pouvez-vous savoir ce que nous avons vécu durant ce vol ? demanda Patrick. Même nous, nous ne sommes pas vraiment convaincus de la réalité des faits.

- Malheureusement, je peux vous certifier que tout ceci était bien réel. Nous avons reçu une alerte lorsque la première distorsion temporelle a été constatée. Dès lors, nous avons essayé de vous suivre dans les suivantes.

- Si vous saviez où nous étions et dans quelle galère nous nous trouvions, pourquoi ne pas nous en avoir sorti plus tôt ? Pourquoi avons-nous dû affronter ça entièrement seuls ?

- Nous ne pouvions rien faire d'ici. Mais une de nos collègues était parmi vous et a fait tout son possible pour mettre fin à votre calvaire.

- Quoi ???!!! Mais qui ?

Un grondement de fureur commença à enfler dans les rangs.

- Agent Miarcosan, vous voulez bien me rejoindre ? appela-t-il, espérant calmer un peu les esprits.

Mais, cela eut l'effet inverse. Lorsque Pénélope se leva de sa chaise, des cris et même des insultes fusèrent dans sa direction.

- Je le savais !

- J'en étais sûre !

- Connasse !

- Traitresse !

- On va te faire la peau !

- Pourquoi tu nous as fait ça ?

Pénélope tenta de les ignorer et zigzagua rapidement entre les rangées de sièges. Mais elle s'arrêta net quand la voix de Patrick se détacha du vacarme.

- Et à moi, pourquoi ne m'as-tu rien dit ? Lors de notre tour de veille, quand je t'ai révélé que des rumeurs t'accusant d'être responsable de tout ce bordel commençaient à se faire entendre, tu aurais pu... Non, tu aurais dû me dire la vérité !

- Je ne pouvais pas, lui répondit-elle en le regardant dans les yeux.

Elle se détourna de lui, rejoignit le haut de la salle et se plaça à côté de son supérieur, qui reprit la parole.

- Messieurs-dames, un peu de calme s'il vous plait. Je comprends votre colère, mais comme l'agent Miarcosan vous l'a dit, elle n'était pas autorisée à vous en parler. A vrai dire, elle-même ignorait de quoi il retournait exactement. L'objectif principal de sa mission était d'acheminer un tout petit boîtier ressemblant à une calculatrice, dont elle ne connaissait pas les propriétés, depuis les Etats-Unis, où nous sommes basés, vers notre antenne de Madagascar. En temps normal, une simple mission de routine.

- Dans ce cas-là, qu'est-ce qui a mal tourné ? l'interrogea Patrick.

- C'est bien ce que nous cherchons à comprendre maintenant que vous êtes revenus dans notre dimension. Une équipe scientifique est en train de désosser votre avion et d'en analyser le moindre élément. Nous espérons pouvoir présenter nos conclusions définitives d'ici la fin de la journée. Mais, en attendant, nous ne devons prendre aucun risque. C'est pourquoi nous allons rester confinés ici tout le temps de l'enquête. Vous pourrez sortir de cette salle, mais je vous demanderais de ne pas quitter le bâtiment.

- Nous sommes en état d'arrestation ?

- Non, absolument pas. Mais nous avons le devoir d'assurer votre sécurité ainsi que celle des habitants de l'île. De fait, si l'un de vous essaie de s'enfuir, nous serons dans l'obligation de l'arrêter, par quelque moyen que ce soit.

- Vous voulez dire que vous seriez prêts à nous tirer dessus ???!!!

- Aucun de nous ne souhaite en arriver à ces extrémités mais, si cela s'avère nécessaire, oui.

La colère faisant place à la peur, un silence glacial tomba sur les « prisonniers ». Car c'est bien comme cela qu'ils se considéraient à présent.

Le mécanisme de la serrure se fit entendre et la porte s'ouvrit, leur permettant ainsi de se déplacer à leur guise dans les autres pièces.

Une bonne douzaine d'heures plus tard, une sonnerie retentit. C'était le signal. Tous se dirigèrent par petits groupes vers la grande et sombre salle de réunion.

Lorsque toutes les chaises furent occupées, Pénélope et son équipe réintégrèrent leurs places.

Leur supérieur entra le dernier et se plaça face à la foule.

- Mesdames, Messieurs, nous avons du nouveau. Après plusieurs heures passées à analyser et recouper les preuves trouvées par les scientifiques, nous pensons avoir réussi à reconstituer l'entièreté de votre parcours. Je vais vous présenter le montage vidéo que nos informaticiens ont réalisé à votre attention.

Sur ces mots, il lança le film et scruta les réactions de l'assemblée.

Dès le départ, il put déceler leur étonnement à l'apparition du titre : « D'UN MONDE A L'AUTRE ». Il entendit des chuchotements, des glapissements de surprise. A ce moment-là, il sut qu'il avait déjà réussi à les captiver.

La première scène représentait une petite souris en gros plan, se faufilant dans une besace, qui se souleva quasiment aussitôt. Là-dessus, le plan s'élargit et ils purent reconnaitre Pénélope qui quittait son siège pour s'avancer vers la porte d'embarquement de leur aéroport de départ.

Durant 1h45, ils replongèrent dans les profondeurs du calvaire qu'ils avaient vécu. Ils étaient tellement absorbés par les images qui défilaient qu'aucun d'eux ne bougea, ni n'émit le moindre son.

Ce n'est que lorsque les mots « THE END » apparurent, suivis de la liste de leurs noms, qu'ils sortirent de leur torpeur.

Leurs yeux s'agrandirent, ronds comme des billes, et de nombreuses questions jaillirent.

- Mais qu'est-ce que c'est que cette histoire ! éructa Patrick. Je n'y comprends plus rien... C'est quoi ce film ? Pourquoi nos identités défilent comme dans un générique de fin ? Si vous continuez à ne rien nous dire, on va devenir complètement barjos !!!

- Calme-toi Patrick. Effectivement, on va tout vous expliquer. Je m'appelle réellement Pénélope Miarcosan, mais je ne suis pas agent d'une quelconque agence gouvernementale. Je suis en réalité actrice et Sébastian, qui s'est adressé à vous depuis votre arrivée ici, est réalisateur. Nous voulions faire un long-métrage différent de ce que les spectateurs ont l'habitude de voir. Nous voulions des réactions réelles et sincères de la part des acteurs. Et, pour cela, la meilleure option qui se présentait à nous était justement de ne pas faire appel à des comédiens professionnels, mais à des personnes lambda, dont les réactions ne seraient pas surjouées.

- Mais comment avez-vous pu nous faire ça ? Et puis, nos évanouissements ? Le fait que Maximilien ait été possédé ? Nous ne l'avons pas inventé tout ça !

- Non, vous ne l'avez pas inventé. Tout ça a été monté de toutes pièces. Maximilien est en réalité un acteur professionnel, tout comme moi. En ce qui concerne vos pertes de connaissance, elles sont dues à la diffusion d'un gaz soporifique. Vos périodes d'inconscience nous permettaient de faire atterrir et redécoller l'avion et, entre les deux, de modifier les décors pour passer à la scène suivante.

Pénélope se tut, leur laissant le temps d'assimiler les révélations qui venaient de leur tomber dessus.

- C'est bien beau tout ça, mais vous comptez vous faire du fric sur notre dos sans qu'on ne puisse dire quoi que ce soit ? reprit Patrick.

- Non, bien sûr que non. Si nous vous avons cloitrés ici le temps du prémontage et montré le résultat, c'est pour avoir vos réactions à chaud. Si vous êtes tous d'accord pour qu'il soit diffusé, nous vous ferons signer des contrats en bonne et due forme et vous serez bien évidemment rémunérés. Sachez que si un seul d'entre vous refuse, le film ne sera jamais produit. Toutefois, quelle que soit la finalité, une copie sera distribuée à chacun de vous, en souvenir. Maintenant, nous allons vous laisser le temps de la réflexion et, lorsque votre décision sera prise, nous vous attendrons dans la pièce attenante.

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