S04 - Thème "La perte"
D'un monde à l'autre
Chapitre 2 : La perte
Pénélope reprit soudainement ses esprits, ruisselante d'eau glacée. Ecarquillant les yeux, elle se trouvait face à une chose informe qui semblait la transpercer du regard en émettant des couinements suraigus. Elle tenta de reculer mais se rendit compte qu'elle ne pouvait faire aucun mouvement. Etait-elle attachée ? Paralysée ? Que lui avait-on fait ? Où se trouvaient les autres passagers de l'avion ? Et, surtout, que lui voulait l'espèce d'ectoplasme qui la dévisageait ?
De longues minutes s'écoulèrent avant qu'elle n'ait un début de réponse. Un écran géant, découpé en plusieurs dizaines de mini écrans, s'alluma au plafond. Il lui sembla distinguer autant de cases que de personnes présentes sur le vol. Visiblement, toutes subissaient le même sort qu'elle. Immobiles, surveillées par une entité flasque et quasi-transparente, elles semblaient aussi hypnotisées par ce qu'elles voyaient au-dessus de leur tête.
Ce calvaire dura plus longtemps que Pénélope ne pouvait en supporter et, espérant que ses cordes vocales fonctionnaient encore, elle se mit à hurler de toutes ses forces. Ses cris rebondirent sur les parois de la salle dans laquelle elle était enfermée, créant un effet de résonnance assourdissant. A sa grande surprise, leur écho eut pour effet de dissoudre instantanément l'ectoplasme qui lui faisait face. Dès qu'il eut totalement disparu, ses muscles retrouvèrent leurs fonctionnalités et elle put à nouveau bouger.
D'abord hésitante, elle finit par se relever et partit explorer les lieux. Une de ses premières missions serait de retrouver ses affaires. Surtout sa précieuse télécommande. Elle devait s'expliquer le cafouillage qui s'était produit lors de la validation expresse, sachant qu'elle avait préalablement paramétré l'année 2021, et découvrir la date à laquelle ils avaient atterri cette fois-ci. Mais avant tout, elle devait sortir de là.
La pièce capitonnée où elle était retenue prisonnière semblait nue, sans meuble ni porte. Elle posa ses mains sur les murs et inspecta chaque centimètre carré. Elle finit par entendre un déclic et, se retournant, vit une ouverture se détacher de la cloison.
Elle resta appuyée jusqu'à ce que l'interstice soit assez large pour qu'elle ait le temps de courir et de passer au travers avant qu'il ne se referme.
Une fois dehors, elle se retrouva au centre d'une immense rotonde composée de dizaines de sas collés les uns aux autres qui renfermaient les portes des cellules. Malheureusement pour Pénélope, il semblait n'y avoir aucun moyen de les ouvrir de l'extérieur.
Réfléchissant à haute voix, elle s'aperçut que, même en parlant tout bas, un léger écho lui était renvoyé. Elle tenta, en haussant le ton, d'interpeller ses camarades, mais ne reçut aucune réponse. Elle s'approcha des murs et tapa de toutes ses forces sur les parois, provoquant une cacophonie tellement infernale qu'elle se recroquevilla sur elle-même, les mains plaquées sur les oreilles.
Toutefois, son acte eut l'effet escompté. Le vacarme avait provoqué la dissolution des geôliers de ses compagnons de galère et leur avait permis de retrouver leurs esprits et de se mouvoir à nouveau. Les entendant se déplacer et appeler à l'aide, elle leur expliqua comment déclencher le mécanisme pour se libérer.
Maintenant qu'ils s'étaient tous extraits de leurs cellules, ils unirent leurs forces pour trouver comment sortir définitivement de cette prison.
Ce fut Maximilien, le pilote de l'avion, qui, déambulant dans toute la pièce, le découvrit en marchant sur une dalle mobile placée en plein milieu. En s'appuyant dessus, ils entendirent les murs grincer et les virent se soulever très lentement. Mais, tout comme le mécanisme d'ouverture de leurs cellules, lorsqu'il relâcha la pression de son pied, celui-ci s'inversa et l'édifice retomba immédiatement dans un grand fracas. La suite des évènements ne faisait plus aucun doute. Il fallait que l'un d'entre eux se sacrifie pour sauver les autres. Sans laisser le choix à quiconque, il se remit donc dessus et y resta jusqu'à ce que le bâtiment soit assez haut pour leur permettre de sortir.
D'abord hésitants, les prisonniers finirent par s'enfuir en lui jetant un dernier regard empreint de reconnaissance.
Mais Pénélope, consciente que tout ceci était de sa faute, ne put se résoudre à l'abandonner à son triste sort. Elle se mit donc à la recherche d'un objet assez lourd pour compenser la pression qu'effectuait le poids de Maximilien sur le mécanisme.
Elle finit par trouver plusieurs pierres imposantes et les achemina aux côtés du pilote. Après avoir fait une quinzaine d'allers-retours, elle estima que ce serait suffisant et entreprit de les déposer sur la dalle, tout autour de leur sauveur. Mais celui-ci n'eut pas la réaction attendue. En effet, au lieu d'en profiter pour s'extirper du piège, il lui ordonna de le laisser là.
Alors qu'elle était accroupie à ses pieds pour placer les derniers petits rochers, elle se releva tout doucement, terrorisée par ce qu'elle venait d'entendre. La voix, rauque et profonde qui avait prononcé ces mots, semblait venir des entrailles de la Terre plutôt que de la bouche Maximilien. Et ce qu'elle vit en levant les yeux vers son visage lui donna raison.
Le pilote était comme possédé. Ses pupilles fixant le lointain, il était totalement immobile. Seules ses lèvres bougeaient, répétant sans cesse la même litanie.
Terrorisée et sachant qu'elle ne pourrait plus rien faire pour le sauver, elle prit ses jambes à son cou.
Ayant réussi à rejoindre les autres, elle leur expliqua ce qu'elle venait de vivre et tous se rendirent à la triste évidence.
Maximilien était définitivement perdu.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top