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DÉFI : Écrire 2 000 mots.

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Assis sur le sol et contre un mur, j'observe le monde qui m'entoure comme à l'accoutumée.

Je connais la station de ce métro comme ma poche, bien que cette dernière soit trouée!

Parfois à l'intérieur mais souvent à l'extérieur afin de respirer un bol d'air frais, je reconnais les passants et leur horaire d'arrivée.

Dans ma tête, j'envie leurs beaux vêtements qui leurs vont si bien. Que ça me fait plaisir lorsque certains s'approchent près de moi, j'ai toujours adoré l'odeur des parfums!

On peut me regarder avec du mépris, de la compassion, du dégoût, de la douceur... J'ai l'habitude, même si ma routine est dure.

M'enfin, je pense que d'autres ont vécu pire alors j'essaie de ne pas songer à ça et préfère sourire aux gens pressés ou posés, qui me rendent la courtoisie.

Malgré tout, je suis très observateur. Parfois, ceux qui sont habitués à me voir viennent me saluer ou me donner une pièce afin de me remonter le moral du mieux qu'ils peuvent.

Par ailleurs, j'ai remarqué que tous les jours, hormis le week-end, une petite fille fait un trajet d'aller-retour toute seule.

Je la vois descendre du bus puis me détailler avec un regard interrogateur avec ses yeux bleus. Cela me rappelle la mer, l'époque où je pouvais encore me déplacer en voiture pour en prendre plein la vue.

Mais pour revenir au sujet, la jeunette se rapproche de plus en plus de moi au fil du temps. Comme si elle osait enfin marcher près du pouilleux que je suis.

Elle s'est mise à me sourire depuis quelques jours. Il ne faut jamais perdre foi aux générations futures, les enfants peuvent être humains!

Avec sa chevelure blonde, elle ne passe pas inaperçue! Mais où sont ses parents? N'en a-t-elle pas? Je serais mort d'inquiétude si mon enfant faisait ce genre de route, qui plus est dans un métro!

Et si je décide de songer à cela, c'est parce qu'elle a rendu mon existence un peu plus savoureuse pas plus tard qu'il y a une semaine en arrière...

• • •

Il fait frais, la grande horloge affiche sept heures et vingt-quatre minutes.

Je connais les horaires des différents bus par coeur, ainsi que les habitants de la ville.

Il y a des matinées où je n'aperçois pas telle ou telle personne alors je m'inquiète comme si nous étions proches alors que ce n'est absolument pas le cas...

-Bonjour.

Une voix, pas du tout familière, résonne près de mon oreille. Je tourne ma tête vers le haut, à gauche.

Devant moi se trouve la petite fille qui fait son trajet routinier en solitaire.

-Salut! Répondais-je avec entrain.

Honnêtement, je ne sais pas s'il faut que je la regarde dans les yeux. Peut-être que cela va la gêner?

-Tu veux mon biscuit?

Elle a dit ça en me tendant un petit sachet. En principe, il devait y en avoir plusieurs mais je suppose qu'elle a grignoté le reste.

-Tu peux le garder, c'est gentil!

-Je n'ai plus faim, moi. Mais demain, je te donne la boîte entière si ma maman est d'accord.

Et voyant que je ne lui prends pas des mains la nourriture divine, elle le pose à mes pieds et s'en va sans demander son reste.

-Merci, petite! Tentais-je de crier.

La concernée se retourne et revient immédiatement sur ses pas.

-Je crois que je ne devrais pas le dire mais tu ne le répèteras à personne, hein?

-Quoi donc?

-C'est un secret mais moi, je m'appelle Pauline!

Je souris, attendri par tant d'innocence. Ses parents ont dû lui recommander de ne pas dévoiler la moindre information à un inconnu.

Depuis cette matinée assez chaleureuse, la prénommée Pauline vient tous les jours à ma rencontre.

On discute de tout et de rien, j'en apprends sur elle et vice-versa.

« Mes parents travaillent beaucoup, ils ont un peu de temps pour me préparer avant que je rejoigne l'école! »

« Parfois, je me sens différente des autres »

« J'aime bien le soleil car il est jaune et parfois blanc, puis il brille! En fait, il est comme tes dents »

« Oh, moi aussi j'ai des chaussettes trouées! »

Il n'y a pas de quoi s'ennuyer avec elle! Je lui conte d'anciennes péripéties qui me sont arrivées il y a jadis.

« Avant d'être à la rue, j'habitais dans un petit appartement, pas très loin d'ici. Malgré ça, je rendais visite à ma compagne qui logeait au bord de la mer. Elle venait d'avoir son permis de conduire, c'est pour cela qu'elle tenait à débouler chez moi. Sauf qu'il pleuvait, le brouillard est apparu sur l'autoroute... Elle a fait un accident, ne sachant pas manipuler les mécaniques de la voiture »

J'essaie toujours d'apporter un côté positif à mes histoires, même si je n'en trouve pas particulièrement dans celle-ci...

• • •

-Eh, arrête de venir si tôt.

Voici ce que je dis à Pauline quand je la vois, lorsqu'elle descend du bus une fois de plus.

-Mais comme ça, on peut parler plus longtemps!

Le problème, c'est qu'elle prend deux bus plus tôt que celui qu'elle empruntait auparavant. Le métro est dangereux, ce n'est pas un endroit pour laisser des jeunes seuls!

-Tu perds des heures de sommeil... Trouvais-je en tant qu'excuse.

-Non, ne t'en fais pas. Ça ne me dérange pas, tu es mon ami!

Bon sang, comment lui faire comprendre que les gens n'ont pas toujours des pensées saines, peu importe le transport ou l'endroit? Je ne vois pas comment formuler ma phrase sans traumatiser ou faire stresser la tête blonde...

-Je suis fatigué, tu m'obliges à me réveiller une heure avant!

-Pas grave, tu as tout le temps pour te rendormir!

Qu'est-ce qu'elle a de la répartie, ça sert à rien de lutter.

-Laisse tomber...

• • •

Au loin, j'aperçois un homme parmi tant d'autres qui utilise son téléphone. Apparemment, il est six heures, les bars ne sont pas encore ouverts alors mon café hebdomadaire attendra.

Tiens, un bus arrive. Je me mets à parier que c'est celui dont Pauline va descendre!

Et bien que j'ai eu raison, l'ambiance me semble étrange... Oui, j'en suis persuadé.

En quittant le transport, je repère deux adolescents qui collent et parlent à la petite de façon assez suspecte. Elle presse le pas, essaie de ne pas les écouter afin d'arriver rapidement sur le quai du métro.

Pourquoi personne ne dit rien? Les passants ne voient pas que ces garçons embêtent une gamine qu'ils ne connaissent pas? De là où je suis, ça se voit qu'ils ne disent pas que des jolis mots...

Alors qu'elle me lance un regard de déstresse, Pauline s'engouffre dans le bâtiment où se situe la station sans venir me voir.

Mon sang ne fait qu'un tour et je bondis hors du sol tellement rapidement que mon verre rempli de pièces s'écroule par terre, des journaux s'envolent et mes jambes tremblent sous le feu de l'action.

J'accours du plus vite que je peux en bousculant des gens, et je m'en excuse intérieurement.

Les voilà, ces imbéciles! Prêts à victimiser la plus jeune!

Ni une, ni deux, j'attrape l'épaule droit du plus grand et gifle ce dernier avec une telle puissante qu'il s'écroule sur le carrelage. Pour la maîtrise de soit, on y repassera.

L'autre, qui est sur le point de s'enfuir avec l'écolière, tente finalement de mener un duel avec moi. Malheureusement pour lui, je n'ai jamais oublié mes cours de karaté que ma mère m'avait forcé d'apprendre.

Comme son ami, il goûte la poussière du sol en grognant. Quelles ordures...

-Tu vas bien? Comment te sens-tu? Dis-je rapidement à Pauline, avant de remarquer que de nombreuses personnes ont observé l'entièreté de la scène.

-Ce gars est un héros, la vie de ma mère. Commente un jeune qui siffle d'étonnement.

Soudain, d'autres mouvements suivent comme certains applaudissements ou même des regards admiratifs. Même la sécurité arrive, en retard.

Quelqu'un a dû prévenir des policiers qu'un potentiel enlèvement allait arriver car les hommes vêtus de bleu sont présents, tandis que des commerçants racontent mon geste pourtant si normal.

• • •

Depuis, je suis connu comme le sauveur du métro. Les patrons des magasins décident petit à petit de me donner de la nourriture, qu'elle soit sucrée ou salée. On me tend la main d'un nombre incalculable!

Par ailleurs, les citoyens qui étaient présents lors de l'arrestation des deux idiots n'ont plus de mal à me saluer. Oui, les gringalets ont été amenés au poste de police.

Les parents de Pauline m'ont chaudement remercié quand leur fille a raconté la terrible histoire qui lui ai arrivé, ils ont tenu à me récompenser mais des liasses de billets ne m'intéressaient pas spécialement, de peur de les dépenser de façon rapide.

La tête blonde, elle, s'est promise de ne plus prendre de bus aussi tôt! En me demandant si je lui en voulais, je lui ai répondu que non et qu'au contraire, cela me rassurait.

Au final, la chaleur humaine peut être bonne ou mauvaise mais je sais que désormais, je serais bien entouré et plus jamais ignoré durant toute une journée.

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