Chapitre 1
Ma respiration est hachée, cela fait au moins cinq minutes que je cours à en perdre haleine. Je ne me suis toujours pas retournée depuis que j'ai commencé ma course effrénée, mais, je sens que mon assaillant est à moins de dix pas derrière moi. Soudain, avec effroi, je sens une main m'agripper le bras, me forçant à me retourner.
Un homme vêtu d'une cape et d'une capuche rendant ses traits invisibles à mes yeux se tient face à moi. Avec férocité, il brandit un poignard, et d'un geste rapide, sûr de lui, me l'enfonce dans l'épaule. Je titube en arrière de douleur, me rappelant trop tard que je me trouve au bord d'un gouffre...
- Non !
Je me redressai d'un bond, à bout de souffle.
Encore ce rêve, le seul souvenir de ma vie passée, un vestige qui me hante chaque nuit.
- Servante Lin Shan, levez-vous, vous devez nettoyer la salle d'étude du jeune maître avant qu'il ne revienne. Puis vous balaierez la cour intérieure comme chaque matin.
- Oui, tout de suite Madame.
Je me dépêchai d'enfiler la tenue réglementaire des servantes de la résidence Wei et de tresser mes cheveux en deux nattes, que je torsadai ensuite en forme de huit de chaque côté de ma tête. Une coiffure pratique, réservée aux jeunes filles de ma caste qui a pour but qu'aucun cheveu ne nous dérange lors de nos tâches quotidiennes. Me voilà prête à débuter ma morne journée monotone.
J'attrapai un seau en bois et deux carrés de tissu blanc, qui me servaient de lingettes, avant de me diriger vers le puits où je remplis mon récipient.
Cinq minutes plus tard, je le posai sur le sol de la salle d'étude de mon maître en faisant bien attention qu'aucune goutte ne s'en échappe et ne se répande sur le sol lustré après des heures de nettoyage effectuées par mes consœurs. Il ne me restait plus qu'à faire le reste...
- Et voilà ! m'exclamai-je en essuyant d'un revers de main la sueur qui perlait sur mon front. La cour intérieure maintenant.
Je déposai le seau ainsi que les lingettes dans l'entrepôt et les troquai contre un balai. Même si ce dernier n'allait guère m'aider dans ma tâche, bien au contraire...
Quand je me retrouvai sur place, je vérifiai que personne ne se trouvait aux alentours avant de tendre ma main vers le sol et de laisser mon pouvoir me submerger. Une fraction de secondes plus tard, plus aucune feuille, plus aucune poussière ne souillait les dalles grisâtres de la cour. Mon don de contrôler le vent à ma guise les en avait débarrassés. Un pouvoir que je ne devrais en aucun cas détenir : je vis dans un état où seuls les gens de noble naissance, comme l'empereur, ou encore ses ministres, détiennent de telles facultés. C'est un cadeau donné par les immortels à ceux qui parviennent à se tailler une place dans la société. Or, pour une servante telle que moi, posséder cette capacité était un sacrilège. Si quelqu'un me dénonçait, je pouvais dire adieu à ma tête !
Au moment où je baissai ma main, je sentis deux bras m'encercler par derrière. Mon cœur tressauta ; on avait découvert mon secret. Ma panique monta, j'avais du mal à respirer, je crus que j'allais défaillir avant qu'un doux parfum de santal ne parvienne à mon nez. Un parfum reconnaissable entre mille ; celui de mon maître, Wei Yuwen.
- Je t'ai fait peur ?
C'est à cause, - ou grâce, je ne saurais le dire – de lui que je possède ce don qui pourrait me faire condamner à mort. Il y a quatre mois de cela, en rentrant d'un de ses voyages, il m'a trouvée inconsciente, à demi morte sur la berge d'un ruisseau. Un poignard empoisonné enfoncé jusqu'à la garde dans mon épaule gauche. Heureusement, il n'avait touché aucun tendon, mais je restai tout de même dans un état critique. Pour me sauver, mon maître m'a transmis quelques millilitres de son sang divin. Qui aurait cru que je développerais, par la suite, cette faculté de manier le vent, alors que Wei Yuwen dominait le feu. Puis, petit à petit, un lien s'est tissé entre nous, jusqu'à ce que l'on tombe éperdument amoureux l'un de l'autre, bien que nous soyons forcés de garder notre relation interdite, secrète.
- Que fais-tu, lui demandai-je, quelqu'un pourrait nous voir !
Avant qu'il ne puisse me répondre, nous fûmes forcés de nous séparer, une flèche venait de nous effleurer avant d'aller se ficher dans le bois d'un pilier du bâtiment. La première frayeur passée, je me retournai vivement vers l'origine du tir. Face à nous se tenait un homme, tout de noir vêtu. Brusquement, il s'agenouilla et plaqua sa main droite sur le sol. Une muraille de terre jaillit du sol et se dirigea droit vers Wei Yuwen. Celui-ci la repoussa du mieux qu'il put, mais l'indésirable en profita pour se glisser dans mon dos et me plaquer un tissu imbibé de poison sur la bouche et le nez. Je sentis ma tête devenir lourde tandis que l'homme me hissa sur son épaule. Je venais de me faire kidnapper en bonne et due forme.
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