Chapitre 10

Je me réveille reposé comme je ne l'ai plus été depuis très longtemps. Je ne sens plus de présence derrière mon dos, je suis seule dans mon lit, un pincement au cœur se fait sentir en pensant que James a préféré partir avant que je ne me réveille, mais je suis aussi reconnaissante car on évite le malaise. Je me souviens parfaitement de ce qu’il s’est passé cette nuit, je sais que je l’ai appelé par le prénom de Jason, que j’ai fait des cauchemars et qu’il est resté près de moi pour me rassurer. J’ai peur qu’il me pose des questions alors s’il est parti je n’aurais au moins pas à devoir y répondre aujourd’hui.

Je regarde le réveil à regret et vois qu'il est dix heures passé. Je me lève d'un bon et me dirige aussitôt vers la chambre de Dorian. Il n'y a aucune chance qu'il ne se soit pas réveillé depuis hier soir. Quand j’arrive dans sa chambre et que je vois son lit vide je commence à paniquer. Je descends l’escalier le plus vite possible oubliant ma cheville qui me fait souffrir encore très légèrement. Je ne sais pas où peut être mon fils. Du moins je ne le sais pas jusqu'à ce que j'atteigne le salon et que je le vois endormi sur le torse de James qui est, lui, assis sur le canapé à regarder la télévision. Mon sourire apparaît alors à cette vision et mon angoisse s'évapore encore plus vite qu'elle n'est apparue. Je viens m’asseoir sans bruit près de James et de mon fils toujours avec ce fichu sourire aux lèvres. Je remarque que James arbore le même quand il m'aperçoit.

― Bonjour, je constate que tu as réussi à récupérer pas mal de sommeil.

― Bonjour,

Je réponds en lui faisant une bise sur sa joue rugueuse ce qui le fait sourire un peu plus.

— Je n'avais pas dormi comme ça depuis… le début de ma grossesse. Merci, James. Je n'ai même pas entendu Dorian ce matin, je suis désolée.

― Tu n'as pas à t'excuser Aisling, ça ne m'a pas dérangé de m'occuper de lui, bien au contraire.

Je réitère mes remerciements légèrement gênée puis focalise mon regard sur mon fils, profondément endormi sur le large torse de James et je ne peux penser à rien d'autre qu'à l'image de ce dernier en tant que père. L'image d'un père sûrement très attentionné, présent et peut-être un peu trop passif me vient en tête, tout comme Jason l’aurait été. Quand je me rends compte de la tournure que prennent mes pensées j’essaie de les éliminer aux plus vite. C'est alors qu'en baissant le regard pour éviter de continuer à penser à ça, je me rends compte de ma tenue, je suis toujours en sous-vêtements avec seulement mon débardeur qui me couvre le haut.

― Oh putain !

Je me lève et me précipite à l'étage sans explication. J'entends James rire légèrement et je le maudis intérieurement. Il a forcément remarqué ma tenue légère, mais n'a pas fait de remarque. Je profite qu’il s’occupe si bien de Dorian pour prendre un peu plus de temps que d’habitude pour me préparer. J’ai envie de faire un effort pour une fois, peut-être pour inconsciemment plaire à James aussi. Je redescends donc une demi-heure plus tard, ce dernier est dans la cuisine et n'a plus mon fils dans les bras. Dorian est dans son transat dans le salon, surveillé de près par Van Gogh qui lui apporte ses jouets, il est plutôt éveillé et n’a visiblement pas l’intention de s’endormir avant un petit moment. James avance aussitôt vers moi quand je le rejoins dans la cuisine. Il s’approche lentement et se pose devant moi.

― Je ne te ferais jamais de mal, lâche-t-il soudain avant de me serrer dans ses bras.

Je ne réponds rien, je ne sais pas exactement si j’ai parlé pendant mes cauchemars où s’il parle d’autre chose alors je préfère garder le silence. Quand je redresse la tête mon regard s’ancre au sien, la sincérité que j’y lis me désarme, son visage se rapproche du mien et il dépose un baiser chaste sur mes lèvres.

Je mets quelques secondes à me rendre compte de ce qui se passe, avant de machinalement passer mes bras autour de son cou et de lui donner un baiser à mon tour sans même me poser de question. Je me recule ensuite et enfouis de nouveau ma tête contre son cou afin d’éviter son regard.

― Désolé, j’avais dit qu’on irait doucement.

― Ce n'est rien. Ça ne m’a pas… déplût.

― À moi non plus. J'avais envie de faire ça depuis que je t’ai vu te lever.

Je souris timidement, mais ne réponds pas. Ne sachant d’ailleurs pas vraiment quoi dire je me détache de son corps chaud et me dirige dans le salon pour être près de Dorian qui a l’air en pleine conversation avec Van Gogh. J’aime tellement les voir ensemble, j’ai l’impression de revoir Jason parlé avec son chien chaque fois que je vois ce genre de scène.

― Est-ce que tu voudrais sortir avec moi aujourd'hui ?

James qui m’a suivi observe la scène aussi et me le demande après un moment de silence.

― Je ne peux pas. Je n’ai pas prévenu la nounou, elle a une semaine de repos puisque je n'irai pas courir pour le moment.

― Tu ne sors jamais avec ton fils ? demande-t-il l’air confus.  

Je réponds positivement, ne comprenant pas pourquoi il me demande ça. Évidemment que je sors avec mon fils.

― Alors pourquoi tu aurais besoin que la nounou garde Dorian ? Il peut très bien venir avec nous.

― Je pensais que tu voulais dire juste nous deux.

En entendant ma réponse, il me sort le sourire timide duquel je suis absolument fan. Et je ne peux que rougir devant.

― Non en fait, je pensais à nous trois. On pourrait aller au parc et ensuite manger quelque chose ?

La photo de nous deux, partout sur internet fais alors son apparition dans mon esprit suite à sa proposition et j'hésite. James doit s’en rendre compte car il me coupe dans mes réflexions et finit par me demander ce qu’il se passe, ajoutant que je n’ai pas l’air enchanté. Mais ce n’est pas ça, je serais ravie de pouvoir sortir avec lui avec Dorian.

― C'est juste que… j'ai un peu peur que Dorian soit photographié par des paparazzis, moi aussi par la même occasion. J’aimerais éviter d’être… reconnu.  

J’ai peur qu’il ne comprenne pas pourquoi je parle de ça, il n’a peut être pas entendu parler des photos de nous deux devant la salle lors de mon accident. Mais il n’a pas vraiment l’air surpris et semble comprendre de suite pourquoi je dis ça. Il se renfrogne alors légèrement avant de me répondre.

― Tu es au courant pour la photo c'est ça ?

J'acquiesce sans un mot.

― Je suis désolé. Je dois te prévenir que si on sort tout les deux, ou tout les trois, ça arrivera forcément très souvent, m’annonce-t-il peu ravie à cette idée.

― Je ne m'inquiète pas pour moi, enfin si un peu, mais pas pour les mêmes raisons que pour Dorian.

Je me fiche d’être prise en photo et étaler sur des torchons, mais j’ai peur pour d’autres raisons dont je n’ai pas envie de parler à James pour le moment, quand il me pose d’ailleurs la question je change de sujet et lui dit que je n’ai pas envie que cela arrive à mon fils. James me sourit tendrement et remet une mèche de mes cheveux derrière mon oreille, avant de caresser ma joue de son index.

― Je te promets qu'il sera en sécurité, que vous le serez tout les deux et qu'on fera tout pour que son visage soit toujours caché. Personne ne pourra l'apercevoir dans sa poussette.

J’accepte finalement, au grand bonheur de James, avec un peu d’appréhension. Je ne suis pas vraiment convaincu, mais si James me le promet alors étrangement, je le crois. Content de ma réponse, il s'approche de moi pour déposer un léger baiser sur le bord de mes lèvres. Au moment où il se recule avec un grand sourire aux lèvres, j'entends mon portable se mettre à sonner. Je me lève rapidement pour le récupérer. Je suis surprise de voir le nom de Sarah sur l’écran. J’hésite à répondre sachant que James est près de moi et pourrait entendre la conversation, j’ai peur aussi que l’appel dure un peu trop longtemps, mais elle ne m’appelle jamais en matinée ce qui m’inquiète et me décide à tout de même répondre. Je décroche et Sarah me salue rapidement alors que je fais de même. Tout à l’air d’aller bien ce qui me rassure. Après quelques banalités elle me demande finalement si je peux passer en visio pour qu’elle puisse voir Dorian. J’hésite encore une fois, Dorian est près de James et je n’ai pas envie qu’elle le voit. Je n’ai rien à cacher, mais j’ai peur de leur réaction, à Griffin et elle, s’ils savaient que je commence à voir quelqu’un. J’accepte malgré tout pour ne pas éveiller les soupçons puisque je n’ai jamais refusé jusqu’à maintenant, mais je fais en sorte d’être à terre avec mon fils l’écran nous faisant face et James derrière le téléphone invisible pour Sarah. Ce dernier me regarde d’ailleurs sans un mot et a l’air de comprendre.

— Qu’est-ce qu’il grandit vite.

Sarah s’extasie aussitôt qu’elle aperçoit Dorian puis enchaîne ensuite sans me laisser répondre :

— Tu as l’air d’aller bien aussi, on dirait que tu es moins fatiguée.

— J’ai mieux dormie cette nuit.

J’essaie de ne pas regarder en direction de James en disant ça alors même que je sens son regard sur moi. Un silence pesant se fait entre Sarah et moi, nos conversations sont de plus en plus difficiles avec le temps, je ne leur en veux pas vraiment de ne pas avoir déménagé, mais je leur en veux de ne pas être venu rencontrer Dorian et ils le savent même si je n’ai jamais rien dit.

— Il est le portrait craché de Jason.

Je me tends et n’arrive pas à m’empêcher de regarder vers James cette fois, celui-ci se contente de sourire et me fais signe vers le téléphone pour que je continue à parler.

— Je sais, je ne vois que lui quand je le regarde.

— Il nous manque beaucoup.

— Sarah…

— Non, non, attends. Je sais qu’il te manque aussi, je sais que tu crois qu’on n’a pas déménagé parce que tu penses qu’on t’en veut, mais c’est faux, tu n’es pas coupable Aisling. C’était juste trop dure pour nous de quitter tout nos souvenirs ici, avec lui, ça n’a rien à voir avec toi.

— Vous n’êtes jamais venu rencontrer son fils. J’ai accouché toute seule, apeurée, alors que tu m’avais promis d’être là.

L’accusation sort toute seule en oubliant complètement la présence de James. Je m’en veux aussitôt surtout quand je vois Sarah les larmes aux yeux. Je m’excuse rapidement, lui disant que ce n’est pas de sa faute et que je comprends. Je ne devrais pas m’en prendre à elle, elle n’y es pour rien, j’ai décidé de partir et continuer les projets qu’on avait avec Jason, elle et Griffin n’étaient pas obligé d’en faire de même. Leur meilleur ami est mort par ma faute pourquoi seraient-ils venus me rendre visite ?

— Ne t’excuses pas, tu as raison. On aurait dû venir depuis longtemps et j’aurais dû respecter ma promesse, je suis désolée. On va venir avec Griffin d’ici la fin de l’année, d’accord ?

J’acquiesce sans vraiment y croire. J’ai déjà entendu ça.

— Aisling… On veut que tu sois heureuse, tu le sais n’est-ce pas ?

J’acquiesce ne comprenant pas pourquoi elle me dit ça subitement. Puis ça devient clair quand elle ajoute :

— On sera heureux pour toi si tu rencontres quelqu’un. C’est ce que Jason voulait, il te l’a dit.

Ils ont vu la photo de James et moi eux aussi. J’aurais dû me douter qu’elle irait partout et que même s’ils étaient à l’autre bout du pays ça ne changerait rien. Sarah a toujours aimé les potins de star. Ça ne m’étonne pas vraiment qu’elle s’intéresse à la vie de James. Vie dans laquelle je suis désormais apparemment inclus selon les médias.

Sarah raccroche peu de temps après et je reste un instant assise par terre avec Dorian dans les bras. Je fixe mon portable dont l’écran est devenu noir, les larmes menaçant de couler à tout moment. Je me retiens du mieux que je peux, embrassant mon fils sur sa joue potelé, jusqu’à ce que James bouge et nous rejoigne au sol. Il se place automatiquement près de moi et passe un bras autour de mes épaules pour m’attirer contre lui où je laisse finalement quelques larmes couler le long de mes joues.

— Si tu as besoin de parler je suis là, tu peux tout me dire, quand tu seras prête.

— Jason est le père de Dorian. Sarah et Griffin étaient ses meilleurs amis avant d’être les miens.

Je pense qu’il a déjà compris ça, mais je pense devoir lui dire tout de même. Il acquiesce contre moi attendant visiblement de voir si je lui avoue autre chose, mais je reste muette.

— Pourquoi tu serais coupable de sa mort ?

Je me redresse et le regarde. C’est une question à laquelle je ne suis pas encore prête à répondre et il le comprend puisqu’il n’insiste pas. À la place il me propose à nouveau si je veux sortir. J’accepte sachant que ça me fera du bien, je me lève donc avec Dorian et pars dans sa chambre pour le préparer pendant que James nous attends en bas.

Quand je regarde Dorian, je vois encore une fois Jason, l'homme que j'ai aimé plus que tout et qui m'a été enlever brutalement. Je revois encore une fois mon passé et la douleur qui en fait partie. Je ressens la douleur que l’autre m’a fait endurer comme si tout était arrivé hier, mais je la repousse en repensant aux beaux souvenirs que j’ai, au bien être que je ressentais dans les bras de Jason et que je ressens étrangement quand je suis avec James. Cette confiance que j’ai eu rapidement avec l’un comme avec l’autre, cette facilité que j’ai eu de me laisser toucher. James me fait me sentir bien et je me demande si cela pourrait être avec lui aussi bien que ça l’était avec Jason. C’est ce qui me manque depuis qu’il a disparu, de me sentir à nouveau aimé et en sécurité, tout ça sans jamais oublier le premier amour de ma vie.

***

Je redescends après avoir terminé de préparer Dorian, James se lève du canapé et range son téléphone qu’il avait dans la main. Il sourit et s’approche de nous tendant les bras pour récupérer mon fils.

― Vous êtes prêts ?

J’acquiesce avant de rapidement mettre mes chaussures et récupérer le sac à langer de Dorian. On décide de nous rendre à pieds avec la poussette dans le parc situé à quelques rues de chez moi, où je vais souvent passer du temps avec mon fils. On marche en silence sans pour autant que ça ne soit gênant, James tient la laisse de Van Gogh pendant que je m’occupe de la poussette où Dorian babille. Bien que je ne tienne pas sa laisse, Van Gogh ne me quitte pas, il marche à mes côtés obligeant un espace entre James et moi. Après avoir jeté plusieurs coups d’œil à mon chien, James rompt le silence face à son comportement.

― Il a l’air d’être très protecteur envers toi et surtout envers Dorian.  

Je relève la tête vers lui puis la baisse vers mon chien, lui, qui la première fois qu’il m’a vu s’est tout de suite douté que quelque chose n’allait pas et qui m’a accepté sans hésitation sous son toit, auprès de son maître. Il a eu autant de mal que moi à se remettre de la mort de Jason, ne me quittant pas d’une semelle pendant des semaines, mangeant que si je le faisais aussi, dormant quand j’y arrivais. Mais il a repris du poil de la bête petit à petit et j’ai essayé d’en faire de même, en même temps.

― Il l’est. Il se sent responsable de nous, il pense qu’il doit nous protéger.

— Il a des raisons de penser que vous devez être protégé, tout les deux ?

Je sais que sa question n’est pas anodine et qu’il essaie d’en savoir plus, je ne peux pas lui en vouloir d’être curieux après la nuit qui vient de passer.

— Il a eu ses raisons, mais les habitudes ne meurent jamais vraiment je suppose, même chez les animaux apparemment.

James s’arrête un instant et me fait signe d’un banc libre pas loin. On s’y assoit tout les deux, la poussette et Van Gogh devant nous. Je n’ose pas regarder l’homme à côté de moi. Je sais qu’il veut en savoir plus, que ce qu’il a entendu dans la nuit n’aide en rien à ce qu’il soit patient. Je le comprends. Je serais probablement aussi curieuse que lui si j’étais à sa place, s’il prononçait le nom de son ex, qu’il faisait des cauchemars et que j’assistais à des conversations étranges avec ses amis. J’ai envie qu’il le sache pour que ce soit du passé, que je n’ai plus à me demander quand est-ce qu’il découvrira tout de lui-même, ou qu’il recherchera des informations sur internet. Ce ne sera pas difficile de faire la connexion avec moi quand il aura trouvé le lien qui mène à l’affaire du meurtre de Jason. Les médias s’étaient emparé de l’histoire à New-York, mais je ne pense pas que ça ait voyagé aussi loin, du moins je l’espère. Il ne manquerait plus qu’en plus d’être affiché au bras de James, les deux histoires se liaient. Qu’on fasse le lien entre cette femme qui s’est fait tiré dessus après avoir vu son fiancé mourir sous ses yeux et celle qui se balade avec une star mondiale. Mon nom n’a jamais été divulgué, ma photo non plus, ils se sont contentés de raconter cette histoire sordide qui a eu plus d’impact parce que Jason faisait partie des forces de l’ordre et était le héros.

— Ça ne va pas Aisling ? Tu es devenu toute blanche.

Je sors enfin de mes pensées et relève la tête vers James. J’ai envie de lui mentir et lui dire que tout va bien, mais c’est faux, j’ai besoin de lui parler, qu’il comprenne, mais je n’y arrive pas et au lieu de cela quelque chose d’idiot sort de mes lèvres.

— Je ne pense pas qu’on devrait continuer à se voir.

James fronce les sourcils et se tourne complètement vers moi tentant d’ancrer son regard au mien, mais je le fuis. Je ne voulais pas dire ça, mais c’est la seule chose à laquelle je pense pendant que les images des articles de journaux, internet et télévisuel me reviennent par vagues en tête. Je ne peux pas être reconnu, je ne veux pas qu’on me voit dans la rue et qu’on me voit comme cette femme, je suis venue ici pour tout oublier et pour recommencer à zéro. Comment les gens réagiraient s’ils me voyaient refaire ma vie si rapidement après avoir perdu Jason ? Je n’ai pas envie de le savoir, je n’ai pas envie d’être jugé, je n’ai pas envie d’être épié, j’ai trop peur des conséquences.

— J’ai fait quelque chose de mal ?

Je secoue la tête et tente de réfléchir logiquement. Je sais qu’il n’y a presque aucune chance qu’on me relie à New-York, aucune chance qu’on me lie à cette femme, mais j’ai tellement peur. La main de James se pose sur moi et pour la première fois je sursaute réellement quand il entre en contact avec ma peau, tous ces souvenirs me font revenir en arrière et régresser alors que tout allait si bien jusque là. James remarque sans problème ma réaction et retire sa main rapidement en s’excusant.

— Tu n’as rien fait de mal.

J’arrive enfin à parler, mais les explications ne viennent pas. Je me tais un instant et cherche mes mots, James reste silencieux à côté de moi.

— J’ai peur d’être… d’être vu avec toi, reconnue si je suis photographiée à tes côtés.

Son incompréhension se lit vite sur les traits de son visage, je disais que je ne voulais pas de cela pour Dorian avant de sortir plus tôt, mais je n’avais pas encore réfléchis à tout ce que pouvait impliquer le fait que je sois reconnue.

— Je ne comprends pas. Aisling, est-ce qu’il y a quelqu’un en particulier qui ne doit surtout pas te reconnaître ? Est-ce que tu te caches d’une personne en particulier ?

Je secoue une nouvelle fois la tête. Il doit le savoir, je dois lui dire, c’est maintenant ou jamais sinon je n’en trouverais jamais le courage.

— J’ai peur que mon passé soit dévoilé au grand jour si je suis avec toi et qu’on fouille pour savoir qui je suis.

James attrape doucement ma main et la serre, je le vois faire et ne sursaute pas cette fois-ci. Je suis certaine qu’il a pris son temps pour que je le voie venir, je sais qu’il a compris tellement de chose et qu’il attend seulement que je lui confirme.

— Dis-moi Aisling, que contient ton passé pour que tu aies si peur ?

― J'ai été une femme battue.

Je l’avoue enfin. Ce n’est qu’une petite partie de l’iceberg, mais c’est tout ce que j’arrive à lui dire pour le moment. J’arrive à ne pas faire tomber les larmes qui picotent mes yeux, même quand James s’avance pour me serrer dans ses bras. Il ne fait pas de commentaire, du moins pas pour le moment, je savais qu’il avait compris. Pour le moment il se contente juste de laisser ses bras autour de moi et de me laisser poser ma tête dans son cou et de prendre mon temps pour que ça aille.

Quand je me redresse enfin je me sens un peu mieux. James brise le silence après un petit moment quand il comprend que je ne suis pas prête à en dire davantage.

 — Je suis désolé de ce qui t'es arrivée.     

J’hausse les épaules, peu encline à en parler

— Ce n’était pas… Jason ?

Je me tends quand je l’entends prononcer son prénom, je sais qu’il l’a entendu quand Sarah en a parlé, il l’a même entendu quand j’étais endormie dans ses bras hier, mais on n’en a pas parlé explicitement ensemble et ça me fait bizarre.

— Ce n’était pas lui. Jason était un homme bon, il ne m’aurait jamais fait de mal.

— C’était avant lui ?

J’acquiesce cette fois et essaie de respirer un peu plus régulièrement, j’ai l’impression d’avoir retenu ma respiration depuis le début de cette conversation.

— Tu étais jeune.

Ce n’est pas une question de sa part, juste une constatation et j’ai peur de le regarder, de voir dans son regard de la pitié ou quelconque émotions y ressemblant. Je ne veux pas voir ça alors que je me sentais si bien et si normale avec lui. Je pince les lèvres et baisse la tête, mais James m’empêche de me morfondre, il passe doucement son index sous mon menton et me redresse la tête pour que je le regarde.

— Tu étais très jeune, mais ça n’a pas dicté le reste de ta vie, ça se voit. Tu peux être fière de toi.

Je souris, mais je ne suis pas entièrement d’accord avec lui, ça ne dicte plus ma vie, mais je ne peux pas être fière de moi. C’est à Jason que revient tout le mérite et il n’est plus là.

— Je n’insisterai pas pour que tu m’en dises plus, parce que je sais que ce n’est pas la fin de l’histoire. Mais si tu veux m'en parler un jour, je serais là pour t'écouter. En attendant ce que je peux te promettre c’est que ton passé le restera et ne refera pas surface même si on est vu ensemble. Je suis très bien entouré pour ça, je paie des gens très chère pour que certaine chose ne soit jamais dévoilé et le message sera passé pour que ça s’étende à toi. Je te laisserai parler à mes avocats pour que tu leur dises ce qu’il faut cacher, ils ne pourront même pas m’en parler, ce sera ton secret autant de temps que tu as besoin. D’accord ?

Je souris enfin sincèrement et hoche la tête. Je le crois, je n’ai aucune preuve qu’il dise la vérité, pourtant je le crois sans aucun problème. Pour lui faire comprendre je m’approche de lui et pose un baiser sur sa joue, je sens son sourire contre mes lèvres avant de me reculer.

— Alors on va déjeuner ? propose-t-il avec un grand sourire.

J’accepte et me lève prête à pousser la poussette, mais James me demande si on peut inter changer afin qu’il prenne Dorian et que je m’occupe de Van Gogh. Je suis surprise sur le coup, mais le laisse faire. Ça ne me dérange absolument pas, au contraire.

***

On s’installe à la terrasse d’un restaurant une dizaines de minutes plus tard. James s’est fait arrêter deux fois sur le chemin pour signer des autographes et prendre des photos avec des fans. Je ne me suis d’abord pas senti à l’aise, mais James s’est tout de suite assuré que j’allais bien, me lançant sans cesse des regards et écourtant les conversations dès que possible. James a été reconnu plus d’une fois et même si tous ne l’ont pas arrêté pour demander un autographe, les regards curieux face à cet homme avec une poussette ne sont pas passés inaperçu.

Je sors Dorian et l’installe sur mes genoux avant de récupérer un petit pot dans son sac, James se charge d’aller demander à le faire réchauffer et revient peu de temps après avec un petit bol.

— Il ne doit pas être trop chaud.

Je le remercie et commence à nourrir mon fils sous son regard. James me sourit, mais ne dit rien avant de rire quand Dorian fait une tête dégouté après sa première cuillère. J’en essaie une deuxième qu’il refuse et recrache aussitôt. Je l’essuie rapidement et tente à nouveau l’expérience, mais c’est la même rengaine. J’abandonne donc et me décide à préparer un biberon.

— Il n’a pas l’air d’avoir apprécié son repas gastronomique, plaisante James en me voyant abandonner.

— Il n’est passé que récemment à la diversification alimentaire, je ne sais pas encore ce qu’il aime vraiment et d’habitude je lui fais moi-même ses purées. Le petit pot industriel est un véritable échec.

James me propose de prendre Dorian pendant que je prépare son biberon, la serveuse arrive entre deux pour prendre nos commandes et ne peut s’empêcher de dévisager James en souriant. Quand elle décide enfin à s’éloigner pour transmettre notre commande je donne le biberon à James pour qu’il nourrisse Dorian.

— Je peux te poser une question ? demande-t-il alors que je suis concentrée sur l’image qu’il renvoie avec mon fils.

J’hoche la tête craignant tout de même une question à laquelle je n’ai pas envie de répondre. James baisse la tête vers Dorian puis me regarde à nouveau et hésite un instant avant de se lancer.

— Est-ce qu’il était voulu ?

Sa question me surprend, mais je n’hésite pas à y répondre.

— Plus que tout au monde.

James sourit tristement avant de regarder à nouveau vers mon fils. Il ne dit plus rien jusqu’à ce que la serveuse nous apporte nos boissons, il la remercie et attends qu’elle s’éloigne pour reprendre la conversation.

— Je n’imagine pas à quel point ça a dû être dur pour toi.

Je me renfrogne légèrement, mais suffisamment pour que James s’en aperçoive et comprenne que c’est un sujet que je ne veux pas vraiment aborder.

— J’ai toujours adoré les enfants, j’ai eu envie d’en avoir très jeune.

— Mais ce n’était pas le cas de ton ex-femme.

Je me souviens de ce qu’il m’avait déjà dit et m’intéresse de savoir si c’est la seule raison pour laquelle ils se sont séparés.

— Elle me disait d’abord qu’elle était trop jeune, ensuite qu’elle voulait profiter de nous deux, puis sa carrière était trop importante pour s’encombrer.

— C’est quelqu’un de connu aussi ?

James cache rapidement sa surprise suite à ma question quand il se rappelle que je ne sais rien de lui comparé à d’autres. Il acquiesce et m’annonce que c’est aussi une actrice, mais il ne me dit pas son nom.

— C’est la seule raison pour laquelle vous vous êtes séparés ?

— On avait beaucoup de différents.

Il coupe court à la conversation et n’ajoute rien. Je comprends qu’il ne veut pas en discuter et je ne demande rien de plus, je sais ce que c’est de ne pas être prêt à parler de certaines choses.

— Dorian est vraiment un bébé adorable, dit-il après un moment de silence.

Je regarde mon fils qui termine son biberon et souris. James à l’air totalement accro à sa bouille et je lui fais remarqué.

— Tu t'es déjà attaché à lui alors que tu ne l'as rencontré qu’hier.

— Je sais, c'est bizarre, mais il est tellement mignon qu'on ne peut pas faire autrement.

Il répond avec un sourire que je lui rends avec plaisir. Je ne peux pas détacher mon regard du sien, j’y vois des choses que je n’ai pas vues depuis longtemps, je ressens des émotions que je pensais ne jamais plus ressentir, mais tout se brise quand la serveuse nous interrompt afin de déposer nos commandes.

Tout le repas se passe dans une ambiance détendu, on se pose des questions mutuellement, on essaie de se connaître davantage, James me demande un tas de chose différentes, mais respecte mon choix et n’essaie pas d'en savoir plus sur mon passé avec Jason et je fais de même en ne demandant rien sur sa vie avec son ex femme.

James nous raccompagne, Dorian et moi, chez nous sans qu’on ne se pose de question. Il s’occupe à nouveau de Van Gogh tandis que j’ai la poussette. Je l’invite naturellement à entrer chez moi quand on arrive et il l’accepte aussitôt. On passe toute l'après-midi à parler, assis sur mon canapé, à s'occuper de Dorian. Jusqu’à ce que ce dernier nous bénisse avec une couche pleine.

— Tu veux le changer ?

Je plaisante quand je tends mon fils à James, mais ce dernier ne cille même pas et accepte en prenant Dorian dans les bras. J’ai beau lui dire que je n’étais pas sérieuse il insiste et se dirige déjà dans la chambre pour le déposer sur sa table à langer.

— Je vais bientôt être tonton, autant apprendre maintenant, dit-il sérieusement. Je vais avoir besoin d’aide par contre.

Je souris, je crois que je ne me suis pas sentie aussi bien depuis longtemps et cette journée est en train de me rebooster. J’explique pas à pas à James ce qu’il doit faire et il suit mes instructions à la lettre jusqu’à ce que je me penche quelques secondes pour récupérer quelque chose tombé au sol. Quand je me redresse je vois qu’il est prêt à commettre une erreur.

— Non n'enlève pas l'ancienne couche aussi vite.

— Pourquoi p...

Il n'a pas le temps de finir sa phrase que Dorian lui fait déjà pipi dessus. Je me dépêche de le couvrir en posant un lange sur lui tout en me moquant de James. Ce dernier regarde son t-shirt puis rit.

— Ok, j'ai compris pourquoi. Ton fils vient gentiment de me baptiser. Je suis fière de toi Dorian, t’es un vrai bonhomme !

Mon fils sourit à James et babille ce qui m’attendrit plus que je ne pouvais l’imaginer. Je ris encore, mais m’excuse pour ce qu’il vient de se passer. James s’en fiche et dit que ce n’est rien.

— Je vais laver ton t-shirt.

— Tu n'es pas obligée.

J'insiste parce que je sais que ça ne peut pas être agréable pour lui et il finit par céder, mais il tient à terminer de changer Dorian seul d’abord. Je continue de le guider dans les dernières étapes jusqu’à ce que ce soit fait. Il a l’air fier de lui quand il reprend mon fils dans ses bras ce qui me fait à nouveau sourire. J’aime vraiment les voir tout les deux ensemble.

J’indique ensuite que c’est l’heure de sa sieste. J’embrasse Dorian sur la joue et laisse James le coucher dans son lit. Je branche ensuite le baby phone et m’assure qu’il fonctionne en regardant mon téléphone avant de sortir de la chambre suivis de James.

Hors de la chambre ce dernier passe son t-shirt par dessus la tête. La vision de son ventre dénudé me surprend et je bloque un instant dessus. Je suis bien plus attirée par lui que je ne le pensais et je me rends compte que je me suis plantée devant son corps seulement quand ma main se pose sur son torse au dessus de son cœur. Je m’excuse aussitôt en retirant ma main et en baissant ma tête, je n’aurais pas dû faire ça, je ne sais vraiment pas ce qu’il m’arrive.

— Je ne sais pas ce qui m'a pris, je suis désolée, je crois que... c’est juste un manque de contact, je...

Je n’arrive pas à finir ma phrase et je sens les larmes prêtent à couler. James me redresse la tête du bout de l’index puis pose sa paume contre ma joue.

— Tu te sens seule ?

J’acquiesce en sentant une larme couler. Il ne fait aucun commentaire et se contente de prendre ma main et de la reposer sur son cœur que je sens battre très rapidement. Quelques secondes passent sans qu’aucun de nous ne bougent ou ne disent quoi que ce soit, James caresse ma pommette du pouce avant de finalement prendre la parole.

— Ne t'excuse jamais de tes actes avec moi Aisling. Si tu te sens seule, si tu as besoin de contact je suis là. Je n’imagine pas à quel point ça a dû être difficile pour toi, je te l’ai déjà dit, mais tu n’as plus à être seule à partir de maintenant. Que tu ne veuilles qu’un ami ou plus, je serais là.

Je ne réponds pas, je sais que je suis prête à craquer alors j’hoche juste la tête. Ma main toujours au niveau de son corps descend lentement vers ses abdos. Son soupir me donne un peu de courage et m’incite à continuer la découverte de son corps. Ses muscles sont dur et bien dessiné ce qui ne devrait pas m’étonné vu le genre de rôles qu’il joue à l’écran, mais les sentir en vrai sous mes doigts n’a rien à voir avec le fait de les voir à la télé.

J’ose poser ma deuxième main sur son torse et James ferme les yeux, sa respiration devient un peu moins contrôlé, il garde les bras le long de son corps et ne me touche pas ce que j’apprécie, je ne sais pas si je suis prête pour que lui me touche comme je le fais. Je ne suis même pas sûre de savoir ce que je veux, mais je remonte lentement mes deux mains autour de son cou et avance mon visage vers le sien avant de déposer un baiser chaste sur ses lèvres. Ses yeux s’ouvrent et s’écarquillent de surprise avant qu’il ne sourit. Il s’avance à son tour lentement vers moi, mais un bruit dans la chambre de Dorian me fait reculer. Mon fils babille puis est de nouveau silencieux. Sans réfléchir j’attrape la main de James et l’attire dans ma chambre pour ne pas faire de bruit dans le couloir.

Je ferme la porte et me tourne vers James qui jette un coup d’œil à ma chambre avant de me regarder. Je comprends tout de suite ce que l’avoir emmené ici peut signifier et je me trouve stupide de ne pas avoir plus réfléchis avant d’avoir agis.  

— Désolée, j’avais peur de faire du bruit et de déranger Dorian. Je… je ne t'ai pas emmené ici en pensant que...

James m’interrompt en s’approchant de moi et en posant ses mains de chaque côté de mon visage, me redressant lentement la tête pour que je le regarde.

— Aisling, je n’ai pas pensé une seule seconde que tu m’as emmené dans ta chambre pour qu’il se passe quoi que ce soit. Je veux aller à ton rythme, alors il faut que tu me dises ce que tu attends de moi.

— Je ne sais pas vraiment ce que je veux. Ça fait tellement longtemps tout ça, que je ne me suis pas sentie à l’aise avec quelqu’un, que je n’ai pas peur. Je ne sais pas exactement ce que je veux dans l’avenir, mais la tout de suite j'ai juste envie d'être proche de toi. Alors est-ce qu'on ne pourrait pas faire ce qu'on a envie sans se poser de questions ?

— Donc tu veux t'amuser un peu ce soir et demain continuer comme s'il ne c'était rien passé ?

Il demande confirmation à ma requête stupide, j'acquiesce timidement n’hésitant pas longtemps. Il approche alors son visage du mien pour déposer un baiser beaucoup trop léger pour tenter quoi que ce soit et se recule aussi vite qu’il est venu.

—  Je ne peux pas faire ça.

La confusion doit se lire sur mon visage quand je me recule plus loin de lui. Je replie mes bras autour de mon corps et baisse la tête, je me sens rejetée alors que je ne pensais pas que cela arriverait avec lui.

— Ne te méprend pas Aisling, j'ai horriblement envie de toi. Mais je ne peux pas faire ça parce que je sais que tu n’es pas prête et que tu le regretteras. Tu ne veux pas qu’on finisse au lit alors qu’il y a une photo de Jason sur ta table de chevet et ce que je pense être une des ses chemises dans ton lit.

Je me tourne aussitôt vers le lit et remarque la chemise dans laquelle je dors habituellement, je ne l’ai pas mise hier soir parce que c’est James qui m’a couché, mais je suis certaine qu’il l’avait déjà remarqué. Je regarde ensuite la photo et mes larmes se mettent à rouler le long de mes joues sans même que je n’ai le temps d’essayer de les contrôler. Aussitôt James se retrouve à côté de moi et me serre dans ses bras. Mon visage caché dans son cou, il me frotte le dos et dépose des baisers contre mon crâne.

— Je suis vraiment désolé, je ne voulais pas te faire pleurer. Je préfère être honnête, je ne veux pas que tu regrettes quoi que ce soit qui pourrait se passer entre nous.

— C’est moi qui suis désolée. Je ne veux pas que tu penses que je profite de toi ou je ne sais quoi.

— Ce n’est pas le cas.

— J’aime être avec toi, mais je ne sais pas quand je serais vraiment prête à quoi que ce soit de plus que ça. Je… je l’aime toujours, je l’aimerais toujours et il fera toujours partie de ma moi, de Dorian, peu importe si je reconstruis ma vie ou non. Je ne pourrais jamais l’oublier.

La prise de James se resserre un instant autour de moi avant qu’il ne me relâche pour se reculer afin de me voir. J’essuie rapidement mes larmes du revers de la main et ancre mon regard au sien.

— Je ne te demanderais jamais de l’oublier et quiconque te le demande n’est pas humain. Tu as le droit de penser à lui, de l’aimer et c’est normal qu’il te manque. Mais à ce que j’ai entendu il t’a dit d’être heureuse, alors ne laisse pas sa mort t’empêcher de vivre, aucuns hommes ne voudraient voir la femme de sa vie malheureuse.

Une autre larme coule, mais cette fois James l’essuie rapidement de son pouce avant de me serrer à nouveau dans ses bras. Il n’ajoute rien et je ne dis rien non plus, je sais qu’il a raison, que Jason m’a demandé d’être heureuse, mais c’est tellement difficile quand je me sens encore coupable de sa mort.

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