Bienvenue... Ou pas.
Malo
Dès qu'il a passé le pas de la porte, rejoignant sa voiture, j'ai couru à la fenêtre pour l'épier, comme si je n'en avais pas vu assez de lui. Il a grimpé sur son siège et durant plusieurs minutes, il est resté garé là, sans bouger. Et j'ai dû me forcer pour ne pas le rejoindre et me dire de m'emmener chez lui pour le faire ailleurs que sous l'œil des caméras de l'oncle Sam. Parce que ce soir, lors de cette trop courte visite, la tension sexuelle qui émanait de lui était si forte que j'en avais moi aussi envie. Pourtant, je suis vierge.
Jamais un garçon ne m'a subjugué au point que je veuille passer le cap avec lui, mais Isham... Depuis le début, il m'attire. Pourtant, il n'a rien du prince charmant et je suis certaine qu'il ne doit pas faire dans la tendresse et l'amour. Mais il m'allume. De son physique, de son regard sombre, de ses lèvres pleines, des cicatrices que portent ses bras et ses mains. Je dois être cinglée pour vouloir vivre ma première expérience avec un type pareil, mais je n'arrive pas à faire autrement.
La voiture de Big remplace rapidement celle de Isham et j'éteins toutes les lumières avant de me réfugier dans mon lit.
Je scrolle sur mon téléphone depuis plusieurs heures, quand un sms arrive.
Isham : [Sache que dans mon monde, ce sont les putes qui reçoivent les mecs en nuisette].
Je retiens mon souffle, prends mon courage à deux mains et l'appelle directement. Il a décidé de redevenir con ? Mon désir s'est instantanément volatilisé pour devenir hargne. Je vais lui faire bouffer son téléphone ! Malheureusement pour moi, il ne décroche pas. Je ne le comprendrais jamais ! Comment on peut être aussi lunatique en l'espace de seulement quelques heures ? Je me redresse, le sommeil soudainement disparu de mes yeux, jette mon téléphone sur le lit, attrape des vêtements dans la valise que je n'ai pas encore défaite. Je les enfile, jurant après ce connard, puis, je me souviens que je ne sais même pas où il habite.
Je fulmine. J'en ai marre qu'il me traite de pute !
Ça doit être la quatrième fois qu'il le fait mais aujourd'hui, je suis décidée à lui faire ravaler ses mots à la con ! Je saisis mon portable, appelle Jk, la haine au ventre. Le gangster répond à la deuxième sonnerie.
- Dis-moi où vit cette enflure !
- Euhhh... Malo... Je... Je suis désolé pour l'autre fois, je t'assure que...
- Dis-moi, Jk, j'en ai rien à cirer de l'autre jour ! Ton pote est un bâtard et je vais lui faire ravaler chaque mot qu'il me crache depuis que je suis arrivée !
Il ricane, même si c'est malgré moi, me file l'adresse que je note rapidement sur un morceau de papier.
- Tu veux que je vienne te chercher ? Il est tard, Malo.
- Non, je sais me défendre toute seule, merde ! Vous faites chier !
*
J'ai dû négocier de malade avec Big pour lui dire où je comptais me rendre avec la Jeep de l'oncle Sam. J'ai inventé un bobard, comme quoi je voulais passer chez Kinsha, histoire de lui confier des soucis de fille. Il a haussé un sourcil, perplexe, mais m'a laissée filer en me confiant qu'une arme se trouvait dans la boite à gants, en cas de pépin. J'ai sourcillé, mais n'ai rien ajouté. Je ne compte pas tirer sur quelqu'un, ou du moins pas encore.
Je rentre l'adresse de l'enflure sur mon téléphone, et conduis jusqu'à là. Plus j'avance, et moins je suis certaine de vouloir confronter le métis. Cependant, il doit comprendre que j'en ai ma claque de me faire insulter gratuitement. Je ralentis quand le GPS m'indique l'immense tour devant moi. Je me gare le plus loin possible, pour qu'il ne repère pas de suite la Jeep bleue mon oncle, coupe le moteur et observe les lieux. Autour de moi, six tours me font face. Elles sont hautes d'au moins quinze étages chacune. Des jeunes trainent dans la rue malgré le fait qu'il fasse presque noir. Néanmoins, ils ne m'ont pas l'air dangereux donc je sors. Mes jambes tremblent quand je pousse la porte de l'immeuble. Des cris résonnent dans la cage d'escaliers, le bruit de différentes télé se fait entendre, les bébés de l'immeuble se donnent le mot pour hurler. Je grimpe jusqu'au sixième étage, et m'arrête. Mon cœur bat la chamade quand sa porte apparait devant moi. Il vit donc ici. Seul ou non ? J'hésite longuement à frapper, mais je refuse de me dégonfler. C'est pour ça qu'il se permet de mal se comporter avec moi, parce que je lui semble fragile et faible alors que pas du tout. Pour une fois, c'est moi qui vais le surprendre tellement il ne s'attend pas à ce que je débarque chez lui. Rassemblant mon courage, je frappe à la porte, recule et attends. Sauf qu'il n'est pas là.
Je décide de l'attendre. Il est seulement vingt-trois heures, il ne va pas encore trainer durant des heures, si ?
Je m'assieds sur la première marche de l'escalier, tapote un sms, l'efface. Rien ne sert de le prévenir de ma présence, ça ne fera que le rendre un peu plus désagréable. Je finis par m'assoupir quand des pas me réveillent.
Une femme m'observe silencieusement.
- Vous attendez quelqu'un ?
Mes yeux fixent les siens et je comprends alors qu'il s'agit de sa mère. Ils sont identiques aux siens, même si dans son regard, on ne lit aucune trace de violence. Il va me tuer.
- Euh... Oui, j'attends Isham.
J'ai quand-même lâché la bombe qui va le faire imploser. Elle penche légèrement la tête alors je me relève, époussetant mon pantalon.
- Je suis Malo...
- Oh ! C'est toi la nièce de Samuel ! Moi je suis Talai !
Elle sourit enfin, s'avance pour me donner une accolade que je lui rends maladroitement.
- Il m'a beaucoup parlé de toi ! Attends, viens, rentre sinon le bougon d'en face va encore rouspéter pour le bruit !
Elle me fait un clin d'œil et rassurée par son accueil, je décide de la suivre dans l'antre d'Isham. Dès qu'elle ouvre la porte, j'ai une vue imprenable sur la chambre de l'ours. Son parfum s'en dégage et je me force pour ne pas y entrer et faire ma curieuse. La mère d'Isham m'invite en tendant son bras à travers l'étroit corridor.
- Entre, je t'en prie ! C'est tout au fond.
Mes yeux se posent partout. Sur le guéridon du couloir, sur la liasse de billets qui s'y trouve, juste devant une photo sur laquelle se trouvent deux gamins -Ihsam et son frère, je suppose- sur les tapis colorés.
- Désolée de te recevoir dans cette pagaille, on est en train de tout repeindre et ça prend un peu de temps. Ish est très méticuleux quand il m'aide.
Je souris, ravie de savoir qu'il fait les choses bien avec sa mère. Alors qu'elle se déshabille, je prends note de plusieurs détails : Isham est un fils à maman, et c'est une bonne chose, ça prouve qu'il est capable de respecter une femme, au moins. La seconde, c'est qu'elle est africaine. Son accent est fort même si elle gère vraiment bien notre langue. Je dépose mon sac sur le sol, contre un meuble en bois moderne tandis que Talai me propose à boire. Elle s'affaire dans la cuisine, et je m'arrête net quand elle me demande :
- Dis-moi, Malo... Pourquoi tu l'attends si tard ?
Elle apparait dans l'embrasure de la porte et elle a tellement d'espoirs en elle, que je n'arrive pas à lui dire la vérité.
- Il a perdu sa carte d'identité chez Sam, l'autre jour, et à chaque fois, j'oublie de lui rendre.
Je souris, ramasse mon sac et en sors la fameuse carte avant de la poser sur l'imposante table de salle à manger. Mais si j'en crois le sourire en coin qu'elle affiche, elle ne me croit pas.
- Est-ce qu'il est gentil avec toi ?
Je cligne plusieurs fois des yeux. Elle connait son fils mieux que quiconque. Si je lui disais oui, elle saurait que je mens.
- Ça dépend de son humeur, déclaré-je en esquissant un pathétique sourire.
Ses lèvres se redressent en un trait fin, pas convaincue pour la cause.
- Assieds-toi, crie-t-elle de la cuisine, les cafés latte arrivent.
Assise sur le bord du canapé, Talai me parle de l'oncle Sam et surprise, de mon père ! Elle l'a connu bien avant ma naissance, bien avant sa rencontre avec ma mère. Tous les trois ont été à la même école, avaient les mêmes amis.
- Ton père était si drôle ! Je crois que jamais DorcoastShcool avait connu un tel comique ! Moi je ne parlais pas très bien l'anglais donc je ne comprenais pas vraiment tout ce qu'il pouvait raconté mais son rire était...
La porte qui claque dans le corridor avec une violence inouïe annonce l'arrivée d'Isham, que je redoute, cette fois-ci.
Ses yeux noirs m'assassinent dès qu'il met un pied dans le salon et le sang quitte mon corps quand il ne prononce qu'un seul mot :
- Dégage !
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