6 | Mitsuha
Je bloquai bêtement devant la glace. C'était stupide. Complètement irrationnel. Je n'aurais pas dit que j'étais terrifiée, mais je n'étais pas sûre de moi. Soit je restai figée là comme une idiote à attendre de voir si Ani se relevait, soit j'y allais et je faisais comprendre à tout le monde ma façon de penser. Qu'importe le lieu où je me trouvais. Qu'importe qu'ici, à côté d'Ani, Aleksey se tenait.
J'étais venue en le sachant. Dès l'instant où Ani m'en avait parlé, plus aucune surprise n'aurait été possible. Mais là, tout de suite, ce n'était pas ça qui importait. Pas le moins du monde.
Ani était blessé. J'étais celle qui s'occupait de lui, alors il était hors de question que je reste figé à ne rien faire. J'étais plus que ça.
Foutue glace.
Une voix m'appela, perçant à travers tout ce brouhaha, mais déjà, j'avais un pied sur la glace. Ne pas y penser. J'y allais et on n'en parlait plus. Aussi simple que ça.
— Mitsu !
Du coin de l'œil je vis Mylan, mais ne m'arrêtai pas. Mon pied dérapa et je réussis à me maintenir bien droite. Mon cœur battait excessivement vite, mais il y avait une autre raison à ça.
Ne pas y penser. Ce n'était pas le plus important. Clairement pas.
Un focus était nécessaire. Tout le monde entourait Ani qui était encore au sol et le connaissant, j'étais sûr qu'il était content de sa connerie, même s'il n'y était pas pour grand-chose.
Ce gosse, quelle idée Aron avait bien pu avoir en me le refourguant ? Olivia aurait été totalement à même de le gérer. Ou pas.
Olivia n'était pas mauvaise. Mais elle manquait encore d'une certaine expérience qu'on n'avait pas forcément avec les années, ni même avec la pratique. Ça se jouait sur un tout autre plan et ça, je n'étais pas franchement sûre qu'elle s'en soit encore rendu compte. Peut-être un jour. Tant qu'elle convenait à Blake. Et Theo était là, lui aussi. Il était moins actif, mais Blake pouvait compter sur lui sans aucun souci.
Au niveau des gradins, la foule réclamait la reprise du match. Il y avait une certaine folie. Quelque chose d'entraînant. Pas encore une foule en liesse, ça, c'était réservé aux matchs de l'équipe de Blake. Eux, ils rendaient fous bien des gens. Et d'après Mylan, pas mal de filles mouillaient leurs petites culottes. Très imagés, mais pas si loin de la vérité, ce qui était un peu déplorable. Je comprenais l'engouement pour le sport dans une certaine mesure, mais je ne saisissais pas la notion de groupie. Ça, ça m'échappait complètement. Et ça faisait ricaner les mecs, du moins à l'époque où je faisais partie du staff, ce qui, de retour ici, me paraissait être une éternité.
Parfois, il m'arrivait de me demander si Blake avait vraiment fait le bon choix. Si on pouvait vraiment couper la poire en deux. Et puis je passais à autre chose.
Je n'étais pas soumise à la volonté de mon Alpha, mais je n'étais pas du genre à discuter les ordres. C'était ancré en moi, d'une manière qui me conditionnait. Obaasan parlait d'une loyauté particulière que les Occidentaux ne connaissaient pas vraiment. Notre peuple était à part qu'elle disait, sans pour autant juger. Elle aimait beaucoup Blake. Et même si elle avait été très dure avec Aleksey, elle l'avait apprécié. À sa manière. Parce que c'était une femme dure et inflexible. J'avais hérité ça d'elle. Pour Yotsuha, c'était une autre histoire.
Ani se redressa et retira son casque. Je n'étais plus très loin d'eux lorsque ma cheville échappa à mon contrôle et qu'un petit cri m'échappa. Je me sentis partir et me fit la réflexion, encore une fois, que je haïssais la glace pour tout un tas de raisons qui me semblaient toutes plus sensées les unes que les autres.
Je me préparai à l'impact avec un petit côté blasé. Mais il ne vint pas. Un bras s'enroula autour de mon ventre et suspendit mon corps.
Tout autant que ma raison.
Parce que je n'avais jamais eu besoin de mes yeux pour voir Aleksey. Même lorsqu'aucun lien ne nous reliait hormis celui de la meute, j'avais eu une conscience aiguë de sa présence.
De son toucher.
Du mal et du bien que cela me causait.
De la façon dont ça me faisait me sentir vivante.
Et de la manière dont ça brisait tout en moi.
— Il faut que tu arrêtes ça, grognai-je en m'écartant.
Une étincèle s'alluma dans son regard. Et son regard se fit à la fois tendre et calculer. Le malin.
— Quoi donc, akachan ?
Je levai les yeux au ciel. J'avais une furieuse envie de le frapper. Et de me jeter sur lui pour tout autre chose. L'un n'allait pas forcément sans l'autre me diriez-vous. Mais je n'étais pas venu ici, dans cette meute, dans ce pays, pour ça.
— Où est-ce que tu es allé pêcher ça, au juste ? Que ce soit dans ma langue, dans la vôtre ou dans n'importe laquelle, appeler une fille « bébé », ça craint. J'ai un prénom.
Son sourire se fit plus grand encore. Si c'était seulement possible. Et avec lui, ça l'était puissance mille.
— Mi. Tsu. Ha. C'est mieux ?
Heureusement que je n'avais pas un casque de joueur sous la main à lui balancer à la tronche. Il l'aurait mérité.
Baka !
— Je ne veux plus parler avec toi, dis-je avec aplomb. Je m'en vais.
J'eus à peine le temps de lui tourner le dos qu'il était déjà là. Bon Dieu, il bougeait plus vite que n'importe qui. Avec une carrure pareille, ça semblait impossible. Et pourtant, tout ce qui paraissait l'être avec lui n'en était rien.
Il brisait tout.
Ses doigts effleurèrent mon bras. Mon cœur loupa un battement.
— Alors, il faut que j'arrête quoi au juste, akachan ?
Mon coude se retrouva dans son ventre, mais cela ne sembla même pas lui faire mal. En même temps vu, les abdos, le contraire m'aurait grandement étonnée.
— De m'appeler comme ça. Mitsuha c'est bien. Mitsu si tu veux, mais c'est tout. Et... arrête de me toucher, bon sang !
Son éclat de rire. Il se tapa les genoux du plat de la main et je crus voir ses yeux briller de larmes de joie tant il semblait se payer la barre de sa vie.
— Tu es vraiment un abruti, Lynch.
Il renifla et se redressa. Il pencha la tête sur le côté.
— Mitsu ? Non. L'autre débile de Taylor t'appelle déjà comme ça quand tu as le dos tourné. Pour les autres tu es Yamada.
— Et pour toi ?
Ça m'échappa. Et ça me donna envie de me gifler. Yotsuha aurait éclaté de rire, se moquant ouvertement de moi. Elle était comme ça ma petite sœur.
Aleksey se fit très sérieux. Trop ? Ma bouche s'assécha. Je déglutis. Pourquoi est-ce que j'avais seulement demandé ça ?
Son visage se retrouva tout près du mien. Son souffle caressa mon oreille.
— Pour l'instant, ce sera akachan. Et pour plus tard, tu seras Suha. Ma Suha.
Le rouge éclata sur mes joues. J'étais indignée. Choquée. Et pourtant... pourtant...
J'avais le cœur dans la gorge.
Vous savez comme c'est long deux ans ? J'avais le compte exact des jours depuis que nous ne nous étions pas vus.
Je ne l'avais plus aperçu.
Je n'avais plus entendu sa voix.
Plus rien.
Un silence imposé. Un bandeau camouflant mes yeux.
Et une lente douleur prenant possession de mon corps.
La chaleur d'Alek heurta mon corps. Me faisant frissonner.
Nous n'étions plus sur la glace, entourés de centaines de supporters.
Je n'arrivai pas à respirer.
Il était là. Juste là. Son corps touchant le mien. Sa simple présence annihilant tout en moi et me plongeant dans une spirale à couper le souffle.
J'avais envie de murmurer son prénom. Peut-être pour rendre le moment... réel ? Je ne savais même pas.
Je ne pensais plus.
Cette situation me plongea dans un état terrible.
Un mélange de bons souvenirs. Et de beaucoup moins bons.
La dernière fois que je l'avais vu, il avait... il avait... Ma louve en souffrait encore aujourd'hui, terrifiée par ce qu'elle avait alors ressenti à l'époque.
Seul Blake l'atteignait encore. Parfois Aodh.
La douleur était là, bien présente, même si tapie au fond de nous.
Je redressai la tête.
Alek avait les yeux écarquillés, le visage pâle. Il avait agi sans réfléchir. Il avait bougé avant que mon corps n'atteigne le sol.
Il était aussi bel homme que dans tous mes souvenirs. Même brisé par le poids de ce qu'il était, il avait toujours été beau.
Une sorte de beauté brisée.
Il ouvrit la bouche, mais j'étais arrachée à sa prise et je reconnus sans mal l'énergie d'Aodh. Toujours là au bon moment, hein ? Blake n'était pas loin, mais il n'était pas venu.
Alek fit un pas.
— Aleksey, gronda la Main de la meute, se fichant bien qu'il soit son Second.
Je ressentis l'aura particulière d'Aodh. Celle qui le caractérisait comme étant ce qu'il était.
Je me mordis l'intérieur de la joue en entendant la voix de l'arbitre.
Celui-là...
Je me dégageai de la prise d'Aodh, poussais Aleksey et mon doigt alla s'écraser contre le torse de l'arbitre.
— Vous, faites votre putain de job la prochaine fois. Ce sont des gosses, pas des putains de professionnels. Espèce d'incapable ! criai-je, mauvaise.
Le parfait silence. L'arbitre me regarda avec des yeux ronds. Ani ricana et la claque que je lui assénai sur le sommet du crâne le fit gémir. Je fis volte-face vers lui :
— Si tu n'avais pas de commotion cérébrale, maintenant c'est le cas espèce de sale gosse ! Tu te crois en roc, Anibal ?
Il se rembrunit à la mention de son prénom complet.
— Est-ce que quelqu'un a appelé une putain d'ambulance ? hurlai-je, hors de moi.
— Ça va, m'dame Yamada, grommela Ani. C'est rien qu'un petit...
Mon regard le dissuada d'en dire plus. Les autres joueurs n'osaient pas l'ouvrir.
— Urusei Kuso Gaki ! Dis encore un seul mot, Anibal Aguilar et je te jure que je te couds la bouche.
Je ne jurai jamais. Encore moins dans ma langue maternelle. Mais là... là, ça allait trop loin.
J'étais hors de moi. Lorsqu'Olivia débarqua, bien plus à l'aise que moi sur cette foutue glace, elle était légèrement en nage.
— L'ambulance arrive, dit-elle à bout de souffle. Je peux jeter un coup d'œil si tu...
Je ne l'écoutai pas et me laissai tomber aux côtés d'Ani.
— Tu me montres où tu as mal. Et ne t'avise pas de dire nulle part, crachai-je devant sa tête.
Il secoua la tête, décidant de n'en faire qu'à sa tête.
— Vous avez tous joué n'importe comment, ne t'étonne pas si tu ne peux plus venir sur la glace pour les prochaines semaines. Des branleurs ! Votre coach ne vous a rien appris, ou quoi ? Même ma grand-mère jouerait mieux que vous !
Je palpai le corps d'Ani et il ne put retenir plusieurs grimaces.
— Ah ça, ça ne fait même aucun doute, résonna la voix de Blake.
J'étais aussi en colère contre lui. C'était irrationnel, mais je m'en fichai bien. Je détestai lorsqu'un joueur se blessait.
— On va devoir déplacer Anibal pour que les ambulanciers puissent le transporter sans problèmes. D'accord ?
La voix de Blake était calme, posée.
— Mitsuha ?
Il pencha son imposante carrure à mon niveau et attendis un mot de ma part.
— Ça va, c'est bon, grondai-je. Faite comme vous voulez !
Blake ne me laissa pas le temps de me relever toute seule. Sa main s'enroula autour de mon bras et il serra tout en tirant.
La douleur explosa et sous l'impulsion, je le repoussai pour qu'il me lâche.
Il leva la main en l'air, ne comprenant pas ce qu'il venait de se passer. Au moins, nous étions deux. Je me frottai le bras, mal à l'aise.
Je laissai Blake et Aleksey transporter Ani et l'arbitre géra le reste. Aodh me colla aux basques jusqu'à ce que je me trouve dans le bureau qu'occupait Blake en général.
Aodh se planta devant moi, pas l'air content du tout. On était deux, alors !
— Tu ne devais pas te trouver là, Mitsuha. Depuis quelques semaines, tu as une fâcheuse tendance à me la mettre à l'envers.
Il n'était pas content. Avec raison. Ce n'était pas la première fois que j'arrivai à me faufiler en dessous de ses radars. Si ça l'amusait en général, là ce n'était plus le cas.
Et ça se résumait à une seule chose. Un seul prénom.
Je lui tournai le dos, fermai les yeux et inspirai un grand coup.
J'ignorai si c'était le contre coup ou pas. J'ignorai si je me sentais mal ou non. Il y avait bien quelque chose.
Une sensation, logée bien plus qu'au creux de mon ventre. Insidieuse, elle s'étendait lentement le long de mes membres.
L'odeur d'Aleksey s'accrochait à moi.
Me tenait en un étau étouffant.
— Ce n'est pas de ma faute, crachai-je en secouant la tête.
Alek eut un rire jaune, mauvais.
— Vraiment ? Tu es censée t'occuper de nous et voilà que je me retrouve blessé. La faute à qui, Mitsuha ?
Sa propre colère était aussi palpable que la mienne. Je m'avançai vers lui et mon doigt s'écrasa sur son torse.
— Ce n'est pas mon problème si tu es incapable de jouer correctement. Je suis votre préparatrice physique, pas un marabout capable de déjouer le mauvais sort. Va te faire voir !
Son poing s'écrasa contre le mur. Je sursautai. Reculai.
Une lueur passa dans ses yeux. Il ouvrit la bouche et je sus qu'il allait s'excuser. Comme toujours.
Comme... toujours.
— Va te faire voir, soufflai-je.
Je lui tournai le dos et le laissai ça, ruminant, incapable de mettre son égo de côté.
Je sentis Aodh dans mon dos. Il se contenta de poser sa main sur mon épaule. Ni plus ni moins. Je crois que je n'aurais pas voulu plus.
En deux ans, bien des choses changeaient. Bougeaient. Et d'autres, absolument pas.
C'était une plaie.
— Tu ne veux pas m'engueuler ?
Aodh ricana. Il était comme Blake. Quand ça me concernait, elle était loin la Main de la meute.
— Je laisse notre Alpha gérer.
Et ce dernier fit son apparition. Il n'avait pas l'air content, mais pas dans une colère noire non plus.
— Ani ? demandai-je.
— Parti aux urgences avec Theo et Mylan.
Alek était donc toujours ici. Il était quelque part et...
— Je vais aller gérer les gosses et Alek va les rejoindre. Si on ne le surveille pas, Anibal est capable de se faire la malle.
Je hochai la tête. Du Ani tout craché. J'espérai qu'il n'avait rien de grave. M'en occuperait dans la mesure du possible si c'était le cas. J'avais un devoir envers ce gosse.
— Je vais appeler Aron pour lui demander de prendre Olivia sur ce coup.
Mes yeux s'écarquillèrent. Que... quoi ?
— C'est moi qui m'occupe d'Ani, Blake.
— Et jusqu'à présent ça ne me posait aucun problème. Du moins jusqu'à ce que tu débarques ici.
Son ton était cassant, presque sans appel. Aodh soupira et se recula, comme pour nous laisser de l'espace.
— S'il te plaît...
— C'est quoi le problème ? Tu n'en voulais pas au début de ce gosse, Mitsuha. Qu'est-ce qui a changé ?
Qu'est-ce... qu'est-ce qui avait changé ? Il demandait vraiment ?
— Je ne lâcherai pas Ani parce que tu le veux, dis-je en croisant les bras.
— Ah non ?
Il les croisa à son tour, me toisant.
— Je n'ai rien fait de mal, explosai-je. Je suis juste venue voir un match, Blake !
Il secoua la tête. Il ne m'écoutait pas. Ne voulait pas m'écouter et ça me rendait folle.
— Tu n'as pas le droit de venir ici. J'étais clair pourtant, non ?
Je bouillai intérieurement. Je n'avais jamais rien dit. Je n'avais pas remis une seule fois en question ses décisions. Parce qu'il était l'Alpha. Et bon Dieu, même sans ça, j'avais toujours eu confiance en Blake. Ce n'était pas près de changer. Mais là... là, ça devenait n'importe quoi.
— Tu ne peux pas m'empêcher d'aller et venir sur le territoire. Une bonne partie des membres de la meute sont toujours ici et je ne peux même pas venir les voir !
J'avais cru que me passer de tout le monde ne poserait pas de problèmes, mais c'était pesant. Cette solitude. Même si Aodh était là. Même si Blake venait.
C'était pesant.
Les yeux de Blake lancèrent des éclairs, mais avant d'avoir pu en dire davantage, Ylesia fit son entrée, toujours belle et apprêtée, malgré le lieu. Son visage était grave.
— Mitsu, ma chérie, je crois qu'Ani va avoir besoin de toi. Si tu y allais ?
Blake ne l'ouvrit pas. La parole de notre Dominante valait autant que la sienne. Et quelque chose me disait qu'il allait passer un mauvais quart d'heure. Quand Ylesia faisait cette tête, ça ne promettait rien de bon. Aodh voulut m'emboîter le pas :
— Vous restez là, tous les deux.
Sa voix claqua dans l'air. Je passai à côté d'elle et me faufilai en dehors de la pièce. Mon cœur battait sourdement dans ma poitrine et je remontai le long couloir qui menait à la sortie au niveau du parking, à l'arrière. Je n'avais pas envie de revoir la tête d'idiot de l'arbitre ou du coach de l'équipe adverse.
Je grimpai dans ma voiture et pris la direction de l'hôpital sans trop réfléchir. Je savais Ani entre de bonnes mains, mais ça ne m'empêchait pas d'être inquiète. Il était encore jeune et bien plus encore, ce n'était pas un loup. Ce qui changeait tout. Un mauvais coup pouvait faire beaucoup de dégâts, mais il était trop jeune et intrépide pour que cela ne le touche.
Stupide gamin.
Il me donnait envie de jurer dans les cinq langues que je connaissais. Et il l'aurait bien mérité, le bougre.
Je traversai le parking de l'hôpital en courant, me dirigeant directement aux urgences.
Mon cœur tomba devant mes pieds lorsque mes yeux se posèrent sur Aleksey. Il était là, debout, appuyé contre le mur. Attendant. Quoi ? Q...qui ?
Toi, me souffla ma conscience.
Il n'avait pas changé. Ou peut-être que si. Après tout, qu'est-ce que j'en savais ?
Il était toujours aussi grand et comparé à la dernière fois où nous nous étions vus, il était exactement comme dans mes souvenirs, lorsque j'étais arrivée dans le staff.
Un joueur de haut niveau.
Une beauté froide et intransigeante. Un peu moqueuse aussi.
Comme s'il m'avait senti, il tourna son visage vers moi. Ses yeux étaient si clairs que longtemps, je m'étais demandé comment il faisait pour supporter le moindre éclat trop puissant, trop éblouissant. Il avait des yeux incroyables.
Les tenaient-ils de sa mère biologique ou de son géniteur ? Un mélange des deux ?
Mes paumes devinrent instantanément moites.
Deux ans.
Deux longues années. Pour sept décennies passées ensemble.
Il avait été mon compagnon. Puis mon mari. Il avait failli être père et moi mère. Nous avions failli fonder une famille.
Avant que son loup ne décide que soumettre ma louve était peut-être mieux. Ça n'avait duré que quelques secondes, mais ça avait été les plus longues et les plus atroces de toute mon existence.
Les plus destructrices.
Je m'avançai vers lui, consciente que je ne pouvais faire autrement. Il se redressa, les mains dans les poches. Il fuyait mon regard par intermittence.
— Salut, souffla-t-il.
Tout tournoyait sous mes pieds.
Le monde. Mon existence.
Deux ans. Deux ans. Deux ans. Deux ans.
Sa voix avait la même inflexion parfaite. Le même timbre rauque et un peu cassé. Je baissai les yeux sur mes pieds. Inspirai.
— Ani va bien ?
— Je crois. Un médecin est avec lui. Theo aussi.
— D'accord.
Je ne savais pas quoi dire. Quoi penser. J'avais chaud. Je frissonnai.
— Mitsuha, je...
Prendre la fuite me paraissait être la meilleure solution envisageable. Trop de choses se confondaient en moi.
Se heurtaient.
— Je... je reviens.
Il ne me retint pas. Je trouvai les toilettes et allai m'appuyer contre un des lavabos. J'étais pâlotte.
Reprends-toi, m'intimai-je.
Une lente inspiration pour une profonde expiration.
Tout allait bien aller.
Tout.
Je me frottai le bras et une décharge de douleur me fit froncer des sourcils. Qu'est-ce que...
Je retirai ma veste et remontai la manche de mon haut. Mes yeux s'écarquillèrent devant les bleus qui s'étendaient là.
Il y en avait plusieurs. Là où une main m'avait saisi.
Ce n'était pas Blake.
L'autre soir, lorsqu'Adonis avait voulu aller dans ce bar alors que je n'en avais pas l'envie, il m'avait attrapé par le bras pour me pousser à l'intérieur. Est-ce que... c'était lui qui m'avait fait ça ?
Vraiment ? Ça me paraissait fou, mais pourtant...
Je croisai mon reflet dans le miroir. Je me donnai l'impression que j'allais m'effondrer d'un instant à l'autre.
Aleksey était de l'autre côté de la porte. Un mur nous séparait.
Je n'avais pas peur. Malgré tout. Malgré tout ce qui était arrivé, je n'avais pas peur.
Est-ce que j'étais folle ?
Sûrement.
Kuso.
Je ne me disais pas que c'était une mauvaise chose. Qu'Aleksey soit là-bas. Je n'arrivai pas à penser de cette façon. Pas du tout même.
Nouvelle inspiration. Je me reculai et quittai les toilettes. J'étais patraque.
Alek était juste là. Son regard glissa sur mon bras. Je rebaissai la manche de mon haut.
Et plongeai mes yeux dans les siens.
Cœur battant à tout rompre.
Souffle coupé.
🌺 🍁 🌺
Et me revoilà avec la suite après une petite pause ! Comme vous le savez je suis en vacances donc hormis écrire et glandouiller un peu je ne fais pas grand chose ☺️ ce qui n'est pas plus mal !
On en pense quoi de ce chapitre ? De Alek et Mitsu qui se revoient pour la première fois après plus de deux ans ? 🙄😏😔
Des bisous 😘
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