3 | Aleksey

Deux mois plus tard,

Mon corps était tendu par tout l'exercice que Blake m'imposait. J'avais les muscles en feu. Mes cuisses tiraient et une crampe couvait.

_ Lève ton cul, Alek, grogna Blake.

Je posai mes coudes sur le guidon et levai mes fesses en l'air. Je soufflai bruyamment, les cuisses gonflées à bloc. Je me concentrai sur mes mouvements, sur ma respiration. Je ne lâchai rien. Pas devant Blake. Surtout pas devant lui. Cela faisait deux semaines que je n'avais pas touché un seul calmant. Mon corps n'était pas sevré, je le savais. Seulement, je voulais qu'il le soit. Voilà la première chose qui avait changé depuis ces deux mois.

Ça et Priam.

Et ma mère.

_ Plus vite, gronda Blake.

Il se tenait devant moi, le regard plongé sur mes performances. Je poussai un peu plus, si seulement c'était possible. Une main se posa en bas de mon dos, agrippant mon t-shirt pour que je ne tombe pas.

_ Il va avoir une crampe, remarqua Olivia.

Elle était l'une des deux coachs de l'équipe des Maple Leafs. Elle prenait sur son temps libre pour venir me faire tenir la forme. Comme la plupart des personnes du club, elle savait les histoires qui avaient agité notre meute, ma vie à vrai dire. Je n'aimais pas revenir ici, mais Blake passait son temps ici et je passais mon temps avec mon Alpha. Priam avait dit : tu ne le lâches plus à partir de maintenant. Tu respires son air, tu deviens son ombre.

Pourquoi ? Je n'en savais foutrement rien, mais au fil des dernières semaines j'avais appris à suivre ce que Priam m'ordonnait.

Je continuais de pousser sur mes jambes. Blake avança son doigt vers un bouton et poussa la difficulté un cran au-dessus. Olivia me tenait toujours d'une main forte.

Je pouvais sentir les gouttes de sueur qui tombaient sur mon front, ma nuque. Elles coulaient le long de mon dos. J'avais repris de la masse musculaire d'après Blake et il fallait que je la travaille. Il était prêt à me laisser reprendre l'entraînement des jeunes si je pouvais passer cet exercice physique et bon sang, j'avais besoin d'être utile. J'avais besoin de faire quelque chose de mes dix doigts.

_ Plus haut, souffla Blake. Tu peux le faire, Alek.

_ Son mollet ne va pas tenir, maugréa Olivia.

Je ne l'écoutai pas. Mon mollet était vraiment sur le point d'exploser, mais franchement, je n'en avais rien à foutre. Je voulais atteindre ma vitesse de pointe, je voulais terminer cet effort. J'avais besoin de fermer certaines portes. La première étant celle qui concernait mon addiction. Elle était en train d'être relativement tournée. Blake m'accompagnait aux narcotiques anonymes. C'était particulier, tout comme les séances chez le psy. Je savais qu'elle avait voulu m'y emmener et que j'avais refusé. Plus par principe et ego, que par pur raisonnement.

Priam m'avait donné des bases dans mon contrôle. Dans le contrôle de mon loup. Ma mère quant à elle, après de longues conversations sur ce que nous portions en nous et pourquoi Sharan l'avait mis là, m'apprenait comme elle pouvait à ne pas laisser la colère gérer cet aspect pour moi. Je ne lui avais pas avoué ce que j'avais fait. Pas même à Priam. Blake l'avait sûrement fait à ma place.

Je ne lâchai pas le regard de mon Alpha alors qu'il tapait impatiemment sur la machine. Je continuai de rouler comme si les chiens de l'enfer étaient à mes trousses.

_ Encore un peu, murmura Blake.

_ Blake ! gronda Olivia.

_ Baisse ton cul et ralenti, maugréa enfin Blake.

Je poussai un soupir sifflant et mon corps cria grâce. Je posai mon cul sur la selle, gardant un rythme assez maintenu pour ne pas me faire de claquage. C'était toujours compliqué de faire un gros effort et de s'arrêter brutalement.

_ Les mômes seront là d'ici trois heures, remarqua Blake. Je te laisse gérer ton temps. Tu restes dans l'enceinte du gymnase et de la patinoire.

_ Oui, Alpha.

Ma réponse était rauque, mais claire. J'obéissais à mon Alpha. Voilà, la première base que Priam avait ramenée d'actualité. Blake ne me lâchait plus cette fois-ci. Et je ne voulais pas lâcher non plus. Depuis quelques jours, je pensais lui demander des détails sur elle... Mais son regard ne me disait rien qui vaille. Il suffisait que je sous-entende quelque chose et je prenais ce vieux regard qui me disait « ouvre encore la bouche et je te fais manger la poussière ». Je n'avais pas repris assez de force pour me battre contre lui. Je le savais.

D'après mes propres informations, Aodh était toujours celui qui la surveillait. C'était arrivé après ce que je lui avais fait subir. Il était évident qu'elle avait voulu se protéger de moi. Je pris la bouteille qu'Olivia me tendit. Elle diminua la puissance de l'engin et alla me chercher une serviette.

Olivia avait remplacé celle que je cherchais. Mais pour Blake, elle avait toujours été la meilleure dans son domaine, donc il avait fallu deux personnes pour la remplacer elle.

Blake laça ses patins avant de me lancer ma crosse. Je cognai la mienne avec la sienne et il ricana.

_ Pourquoi une femme ? grognai-je. Depuis quand le coach ne suffit pas ?

_ Ce n'est pas la nouvelle coach, espèce d'idiot, maugréa Blake. C'est la préparatrice physique. Elle va nous en faire baver.

_ Et il trouve ça sexy ! s'écria un des gars.

_ Quelqu'un l'a déjà vu ? s'enquit un autre.

Je secouai la tête. Elle n'était même pas arrivée qu'elle était déjà chambrée par la moitié de la meute, ainsi que la moitié de l'équipe... Si ce n'est toute l'équipe. On était des mecs, on ne se refaisait pas. C'était important qu'elle le sache.

Blake enfila son casque et attacha la sangle. Je fis la même chose et lui donnai un coup d'épaule. On allait voir la nouvelle préparatrice physique de l'équipe des Mapples Leafs. J'avais hâte de voir ça. J'espérais vraiment qu'elle soit mieux que la dernière qui s'était tapé la moitié de l'équipe. Sauf moi. Blake était bien trop amoureux de sa compagne pour oser la tromper, alors je savais qu'il avait été épargné. À vrai dire, j'étais presque sûr que les gars de la meute n'avaient pas couché avec l'ancienne.

Pour avoir le respect des gars, il ne fallait pas présenter son cul. Ça, c'était quelque chose d'universel. Quand tu ne comprenais pas ça, il ne fallait pas venir préparer des molosses comme nous.

Les gars s'amusèrent un peu avant de monter sur la glace. L'entraînement commençait dans quelques minutes, si bien qu'on pouvait toujours s'échauffer un peu avant.

Je fis quelques accélérations avec Blake. Étant en attaque, je passai mon temps à accélérer en avant pour aller mettre ce putain de palet dans le filet. La course était quelque chose que j'adorais. L'adrénaline qui allait avec aussi. Alors que je longeai le mur de la patinoire, j'aperçus une silhouette passer dans les gradins. Mon loup se redressa au creux de moi, aux aguets. Il l'était rarement quand j'étais au sport, mais visiblement cette personne l'intéressait.

Je mis quelques coups de patin plus forts et atterris à côté de la personne en question. Son regard croisa le mien alors que j'arrivais à son niveau. Elle était derrière le plexiglas qui nous séparait des gradins, mais je réussis à voir son visage et son expression.

Je sus immédiatement qu'elle était japonaise. Son port était droit et tendu. Elle portait un jogging proche de son corps fin et musclé. Tout chez elle respirait la fierté. Elle était très sportive, ça crevait les yeux. Putain, le corps qu'elle devait avoir sous ce jogging... J'aurais pu me frapper comme un idiot, mais j'étais scotché devant sa beauté.

Cette femme avait un charisme à couper le souffle.

Son regard, fin et en amande, me détailla rapidement avant de se poser derrière moi.

Je n'eus pas le temps d'esquiver Riley et il m'écrasa comme un barbare contre la vitre.

La femme ne sursauta pas de l'autre côté. Elle haussa un sourcil et reprit son chemin.

_ Putain de merde, Ri ! crachai-je. À quoi tu joues ?

_ Ne reluque pas la préparatrice ou on va prendre cher. Paraît qu'elle vient du Japon et qu'elle est hyper... hyyyyyper stricte.

Je levai les yeux au ciel alors que Riley faisait une grosse moue exaspérée. Lui, il avait pris cher pour avoir couché avec l'ancienne.

Blake, capitaine de notre équipe, siffla un bon coup. Tout le monde rappliqua autour des gradins sans plexi. Je cherchai rapidement la préparatrice des yeux.

Je me stoppai sur la glace, d'un mouvement presque inconscient. Blake fila un coup de patin dans ma crosse et je trébuchai. Du coin de l'œil, j'aperçus le regard narquois de la jeune femme. La jeune louve. Voilà celle que Blake attendait depuis quelques semaines.

Cette femme, c'était Mitsuha Yamada.

Je reçus une serviette dans la tronche et ronchonnai.

Olivia eut un petit sourire satisfait. Elle était grande, athlétique, toute en jambe. J'étais presque sûre qu'elle avait des fesses plus musclées que les miennes. Cette femme était un monstre. Pas autant qu'elle... mais bien assez pour me faire mal. Encore une fois, rien comparé à ce que Mitsuha nous avait fait subir quand elle était arrivée en soutien à notre coach. À l'époque, j'avais fait partie des cons qu'elle avait préparée. Depuis, elle avait été envoyée sur une autre mission. Je savais que c'était ma faute. Blake l'avait fait exprès. Ça avait été plus facile de la bouger elle que moi, même si elle avait toujours rêvé d'un putain de poste comme ça.

Je grimaçai. Penser à Suha ne m'aiderait pas.

Je ne devais surtout pas penser à elle maintenant.

Après avoir avalé encore quelques kilomètres à vélo, je descendis et allais sur le tapis de course. Je poussai la vitesse à douze kilomètres par heure. Ce n'était pas si rapide que ça avec les jambes que j'avais. L'entraînement des gosses n'arrivait pas tout de suite. Je m'étirai les bras en même temps et en profitai pour faire l'inventaire de mes muscles. C'était douloureux, mais c'était trop bon pour seulement arrêter. J'allais retrouver ma forme physique plus vite que je ne le pensais avec Blake et Olivia au cul.

_ Ton mollet ? s'enquit Olivia en venant à côté de moi.

Elle sortit son calepin de sa poche arrière de jogging et nota mes paramètres. Je grimaçai.

Son regard était acéré, presque froid parfois. Mais je savais très bien que je pouvais tenter une approche. N'est-ce pas ? Elle ne m'avait pas bouffé jusque-là et ce n'était pas faute de faire le con. J'étais parfait quand elle s'occupait des entraînements. J'avais fait le malin les trois premiers jours de préparations avant les qualifs et après les matchs pourris que nous avions eu, j'avais suivi à la lettre les préparations de Mitsuha.

Elle faisait le tour des joueurs, regardant rapidement les paramètres que nous avions mis. Certains ne suivaient pas ces conseils, moi oui. Le verrait-elle ?

Je continuai de rouler dans le vide, mon vélo poussé à la bonne vitesse. Ma position était bien tenue, comme elle le voulait. Elle s'arrêta à côté de mon vélo et observa ce que je faisais.

_ Plus haut les coudes, ordonna-t-elle d'une voix ferme.

Je m'exécutai. Elle tira son calepin rouge de son gilet et y nota plusieurs choses. J'aperçus un léger sourire se dessiner sur ses joues, mais il disparut vite quand on l'appela.

_ Continue, Lynch, grogna-t-elle.

_ Oui, M'dame, répondis-je.

Alors qu'elle s'en allait, je me penchai doucement observant son cul moulé par son legging de sport.

Je couinai quand une chaussure percuta mon épaule.

Je fusillai Blake du regard.

Je me demandais souvent ce que les préparateurs pouvaient bien noter dans ces petits calepins qui leur semblaient si précieux. Des notes. Des performances. Mitsuha n'avait jamais lâché le morceau... même après... Je secouai la tête et poussai le tapis de course une vitesse au-dessus.

_ Pas trop vite, tu vas te cramer. Tu as encore un entraînement à tenir, me conseilla Olivia.

Je hochai la tête.

Ce fut elle qui m'arrêta après une autre heure de course. J'étais en train de détendre mes muscles dans la salle prévue à cet effet quand du bruit me parvint. Je me redressai et fronçai les sourcils. C'était quoi ce bordel ?

Je longeai le couloir qui menait aux vestiaires en entendant des rires étouffés et des chuchotis. Qui est-ce qui s'amusait à baiser dans les vestiaires ?

Je poussai la porte sans ménagement, prêt à engueuler les idiots qui s'amusaient, mais je me figeai. Blake se tenait entre les jambes de sa femme, ma Dominante, allongés tous les deux sur le banc des vestiaires. Elle était déjà à moitié nu, tout comme lui.

_ Putain ! m'écriai-je.

_ Alek bon sang ! grogna Blake.

_ Sors de là, Alek ! cria Ylesia, rigolant en même temps.

Je refermai brusquement la porte, tentant de repousser toutes les images qui voulaient s'imprimer sur ma rétine. Je les avais déjà trouvés dans de bien pires positions, mais putain... pas ici.

_ Y a-t-il un endroit où vous ne l'ayez pas fait ?

_ Dans ton lit ! cria Ylesia.

Elle rit, un peu trop fort et ce fut ce moment où je décidais de les laisser faire. Ils étaient affreux. Ylesia venait d'une meute où les relations sexuelles étaient hyper... libérées. Laissez-moi vous dire que ça avait rendu mon Alpha heureux, clairement.

Je retournai vers la salle de détente et une voix me força à me redresser. Je sentis mon loup, calme et observateur. Il me poussa à retourner vers le bout du couloir, qui menait sous les gradins. Je me figeai complètement en reconnaissant enfin la voix.

Une voix que je n'avais pas entendue depuis... deux ans. Deux longues années. À vrai dire, j'avais gardé ma messagerie comme elle l'avait toujours été... rien que pour entendre cette voix, quand j'avais trop mal. Quand je me rappelais à quel point j'avais pu être un putain de connard avec elle... Elle qui n'avait rien fait que tenter de m'aimer, d'aimer la carcasse que j'étais.

Je restai dans l'ombre des gradins. Que faisait-elle ici ? Elle n'aurait jamais dû venir là... J'étais un danger pour elle. Où était Aodh ? Ne faisait-il pas son putain de boulot ?

_ Mitsuha ! s'écria la voix d'Olivia.

Ma femme parlait avec animation en présence du coach. Il semblait concentré face à ce qu'elle tentait de lui expliquer.

Ex-femme.

Une petite voix qui me murmurait souvent ce détail.

Je me penchai un peu plus, restant toujours aussi discret. Si Blake arrivait maintenant, j'étais sûr qu'il m'assassinerait. Il avait toujours très bien protégé mon ex-femme de ma personne. Après tout, c'était lui qui avait fini par nous séparer. Définitivement. Je déglutis et posai enfin mon regard sur elle. Deux ans sans la voir. Ces deux années me revinrent en pleine face alors que je redécouvrais la beauté exotique de ma femme.

Mitsuha portait un jean épais et noir qui lui moulait les cuisses et les fesses. Sa doudoune bleue m'empêchait de voir le haut qu'elle portait, mais d'après moi, elle portait une veste avec un petit haut. Un haut que je lui avais... offert. Il était reconnaissable entre mille puisqu'il avait deux liens qui se nouaient dans le dos. Une fois le vêtement mis, les liens pendaient à l'arrière, comme en ce moment. Deux petits pompons rouges sur le haut de ses fesses. Voilà un vêtement que je n'avais pas brûlé... Qu'elle avait pu récupérer malgré mes conneries.

Son visage était fin, sa peau toujours avec ce léger teint particulier que j'adorais. Ses joues étaient moins creuses qu'à une époque. Et cet éclat dans son regard... Je lui avais pris cet éclat il y avait bien longtemps.

Elle portait ses cheveux un peu plus longs que dans mes souvenirs. Recommençait-elle certaines cérémonies ? Était-elle retournée au Japon ?

Je tentai d'entendre ce qu'elle disait au coach, mais ils étaient trop loin. Elle agitait beaucoup ses mains devant elle pour expliquer les choses, preuve qu'elle était passionnée par ce sujet. Ses joues étaient légèrement roses. L'air frais de la patinoire la forçait à réchauffer son corps naturellement. Elle n'avait pas ôté ses gants. Dehors, il faisait un froid de canard et elle avait toujours les extrémités froides.

Sous mes mains, je sentis ses doigts de pieds s'agiter. J'accentuai ma pression et elle gémit doucement de plaisir.

_ J'adore, souffla-t-elle.

Je souris, moqueur.

_ Je sais, admis-je.

Je continuai de lui masser la voute plantaire, tout en réchauffant ses pieds. Elle s'agita sur le canapé, mais je secouai la tête.

_ Reste sage, lui ordonnai-je.

Elle était assez souple cependant pour se pencher. Elle me vola un baiser avant de se réinstaller confortablement dans le canapé. Ses doigts de pieds se recroquevillèrent sous ma main et un nouveau gémissement de pur plaisir sortit de ses lèvres.

Je me raclai la gorge, repoussant le souvenir. Mitsuha m'avait laissé lui faire des choses qu'elle n'aurait sûrement jamais accepté d'un autre. Je n'avais pas eu son éducation stricte du Japon, ni sa façon de voir la meute. Nous avions eu des divergences sur beaucoup de choses, mais tellement plus de plaisir à faire découvrir à l'autre toute une culture... Je déglutis et mon dos s'appuya contre le mur.

Je perdis le contact visuel, tentant de ne pas l'appeler. J'avais très envie d'aller la voir, comme si tout allait bien. Lui montrer que... Que quoi ? Je n'étais pas remis.

Je n'étais pas son mari.

Je n'étais même pas son Second. J'avais perdu cet honneur en ne veillant pas sur elle. En lui faisant du mal...

Je sentis mon dos se décoller du mur. J'étais prêt à sortir de l'ombre alors que je n'aurais pas dû. Cependant, le coach et Mitsuha avait déjà disparu.

Je poussai un long soupir et me frottai le visage. Je partis en direction des vestiaires et croisai mon couple Dominant sur le chemin. Je ne relevai pas leurs vêtements en vracs et leurs cheveux légèrement décoiffés.

_ Alek ? fit Blake.

_ Je vais à la douche. Les mioches vont sûrement arriver, grondai-je.

Je poussai l'eau brûlante à fond et laissai mes muscles se détendre un à un. Je pris une longue inspiration, me gorgeant dans la buée qui se formait ici. Je posai mes deux mains sur le carrelage en face de moi.

Il n'y avait pas que Blake qui avait fait des idioties dans ces vestiaires.

Mitsuha m'en avait voulu après coup, mais je savais qu'elle avait tout autant adoré que moi faire cette petite entrave au règlement. Bon, ça s'était révélé compliqué quand les joueurs étaient entrés dans le vestiaire alors que nous y étions déjà... dans les douches.

Je ne pus retenir un sourire face à ce souvenir complètement idiot.

Le corps nu de Mitsuha ondulait sous l'eau. Sa jambe était posée sur mon épaule, ses mains enfoncées dans mes cheveux, ses doigts raclant contre mon crâne.

_ Alek... Alek c'est... oui... merde...

Je sentis son corps se crisper alors que je la faisais atteindre un orgasme particulièrement fort. Ma langue ondula contre son clitoris alors que mes doigts la pénétraient un peu plus fort. Mes genoux me faisaient mal, enfoncer dans le carrelage humide des vestiaires.

Un cri rauque s'échappa de la bouche de Mitsuha. Elle venait de jouir. C'était le troisième orgasme que je lui donnais de toute ma vie et putain, j'étais prêt à lui en donner d'autres.

Ses doigts desserrèrent leur prise alors que la porte émettait un bruit sourd.

Des rires forts retentirent. Je fronçai les sourcils. Mitsuha cligna des yeux. Merde, je l'avais attirée ici... Si jamais les gars la voyaient là, elle était fichue. Personne ne savait que nous avions batifolé et nous venions faire les idiots dans le pire endroit qu'il soit. Si Blake me choppait la main dans le sac.... j'étais mort.

Mitsuha entendit cette fois-ci les commentaires un peu crapuleux des mecs et se redressa brusquement, manquant presque de s'étaler dans la douche. Je tirai la porte de notre cabine que je n'avais même pas pensé à fermer.

_ Bah alors Alek, on a peur de montrer sa petite bite à tout le monde ?

Mitsuha écarquilla ses yeux. Je pris ses hanches entre mes mains. Je la soulevai pour qu'elle enroule ses jambes autour de ma taille. Elle ouvrit la bouche pour protester, mais au moins les gars ne verraient pas que je n'étais pas seul dans la douche, sous la porte qui avait un espace bien assez large pour ne pas laisser beaucoup de place à l'imagination.

Je posai un doigt sur la bouche de Mitsuha.

_ Fais-moi confiance, murmurai-je.

Elle posa ses deux mains sur ses yeux, le corps légèrement tremblant. Putain, il fallait que je gère ça.

J'avais réussi à faire sortir tous les mecs en avance avant de faire sortir Mitsuha à son tour. Elle ne m'avait pas permis de la toucher bien des jours après ça, me rendant complètement fou.

L'alchimie sexuelle entre nous avait toujours été très forte. Je ne pouvais le nier. Mais c'est ce qui avait pu nous blesser à un moment... Je n'avais jamais profité d'elle comme ça et inversement. Seulement, être vulnérable de ce côté-là. Ça nous avait fait rechuter... après le divorce.

Non, non.

Pas encore.

Trop de souvenirs.

Ils étaient tous importants, mais bien trop remplis de douleurs et parfois de regrets...

Je sortis de la douche et tombai sur Blake. Il était fraichement lavé. Ylesia avait disparu et je savais qu'elle lui avait juste rendu une petite visite sur le pouce, comme elle adorait le faire. Ylesia, était comme une sœur pour moi, l'avait toujours été. Elle m'avait amené un nombre incalculable de fois en cure de désintox. Elle avait soutenu Mitsuha quand j'avais hurlé sur elle, quand je l'avais blâmé pour ma première blessure sur la glace.

Rien n'avait été sa faute.

Et Mitsuha avait tout fait pour me soigner après, malgré les problèmes que notre condition mettait en travers de notre route.

_ Tout va bien ? s'enquit Blake. Tu as de quoi faire pour l'entraînement ou tu veux que je reste ?

_ Reste quand même, dis-je en enfilant un jogging épais. Je ne veux pas faire de bêtise.

_ Tu n'en feras pas, Alek. Aie un peu confiance en toi...

Je ne lui montrai pas la légère panique qui m'avait pris il y a quelques secondes.

Je ne lui parlais pas non plus des nombreux souvenirs qui se baladaient dans ma tête aujourd'hui.

Comment allais-je faire ce soir ? Comment allais-je dormir ? Comment allais-je seulement arrêter de penser à ma femme ?

Ex-femme.

Je grognai et pivotai vers Blake.

_ J'ai vu Suha, grondai-je. Elle était là, mais je ne l'ai pas approchée. D'accord ? Je ne pensais pas qu'elle...

Le visage pâle de Blake m'apprit que visiblement, Mitsuha n'aurait pas dû être là de son côté non plus.

_ Alek, souffla Blake.

_ Je te jure. Elle ne m'a même pas vu...

Le souffle qu'il relâcha détendit mes épaules.

_ Merci pour ta franchise. Je réglerais le problème.

_ Il n'y a rien à régler. Elle a le droit d'aller où elle veut.

_ Alek, recommença Blake.

_ Non, vraiment. C'est sa maison à elle aussi ici tu sais. Je comprends... Elle s'occupe d'un gosse ?

Blake se frappa le front et maugréa contre lui-même avant de se lever et de se frotter la nuque.

_ Oui. Un des jeunes que tu as aujourd'hui sort d'une rééducation. Il est... un bon élément. Je ne voulais pas influencer ta façon de le voir. Mais Mitsuha s'en occupe au centre de rééducation. Il a eu quelques soucis de santé et doit se ménager. Elle voulait sûrement mettre le coach au courant... Tu n'étais pas prévu dans le programme.

_ Vraiment, Blake, soupirai-je. Ça ira.

Blake posa sa main sur mon épaule et son regard plongea dans le mien.

_ Tu es sûr ?

Absolument pas. J'avais encore plus envie de la voir à présent. De lui parler.

Deux ans.

Deux ans que je n'avais pas parlé à ma femme.

Ex-femme, maugréa la petite voix.

Deux ans que je ne lui avais rien dit, alors qu'elle était sûrement la personne qui me connaissait le mieux.

Même le mauvais.

Deux ans que je n'avais pas posé mon regard sur la seule personne au monde que j'aurais aimé protéger. Même de moi.

Oui, je voulais la voir.

Oui, je voulais lui parler, tenter de lui expliquer.

Oui, je voulais qu'elle rencontre ma mère. Pour qu'elle sache. Pour qu'elle comprenne que je n'avais pas voulu la blesser.

Mais le regard de Blake était catégorique.

Je n'étais pas près de m'approcher d'elle. De près ou de loin. Il fallait que je m'y fasse.

_ Oui, je suis sûr. On peut aller s'entraîner maintenant ?

_ Tu retournes quand voir Honor ?

Sa question me figea, avant de me faire grimacer.

_ Je vais bien, je t'assure, marmonnai-je.

Il me frotta les cheveux dans un geste fraternel et je le repoussai en le maudissant.

Aussi bien qu'un addict en guérison pouvait l'être.

🏒  ⛸️  🏒



Un chapitre rythmé par quelques souvenirs de nos deux loulous à une époque bien moins sombre que celle-ci ! Et Alek qui voit Mitsuha ! Au moins, il a été honnête avec Blake, ce qui montre à quel point la présence de Priam l'aide à gérer, mais aussi ses discussions avec sa mère 😇

Vous allez bien sinon ? ❣️

Des bisous 😘🤩

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