15. Némésis

La meute de Columbia dans le Missouri n'était pas très vieille, ni très grande, malgré que Khalil Weiss soit l'Alpha d'État.

Depuis pas mal de siècles, le Gardien, que ce soit le père et ensuite le fils, avait opté pour la jeunesse. Cela ne rimait pas avec faiblesse comme certains le pensaient. Loin de là.

Khalil Weiss était un Alpha puissant ; jeune, il n'avait pas encore atteint le maximum de son potentiel. Mais je savais qu'avec les années, ça arriverait.

Tous les Alphas d'États étaient puissants et tous avaient été choisis avec soin, à l'inverse de ce que certains vieux loups en poste pouvaient penser. Comme Auxann par exemple. Mais lui, il avait surtout un problème avec Azad, le prochain sur ma liste. Un problème qu'il faudrait régler, parce que si cela s'envenimait, alors le monde des loups tout entier tremblerait.

Khalil n'avait pas repris la suite de son père ; ce dernier était mort il y avait bien longtemps, alors qu'il n'était encore qu'un très jeune louveteau et c'était le Second de la meute qui avait repris la suite et surtout, qui avait élevé Khalil comme son fils tout en prenant toujours grand soin de son propre enfant. Malo Skinner officiait toujours en tant qu'Alpha et Khalil se tournait très souvent vers lui, encore aujourd'hui.

Et c'était une très bonne chose.

Il n'était pas rare de voir les nouveaux jeunes Alphas se tourner vers les anciens à la recherche de conseil et autre.

Surtout de ce côté-ci des États-Unis.

Il y avait six vieux Alphas ici ; Nathaniel Hunt, Auxann Brock, Ilkan Lloyd, Darell Bailey, Nohlan Christensen et Ghali Gray.

Ainsi, Nathaniel Hunt était venu en aide à Rayhan Estrada, Alpha du Kentucky, à Keyrian Reed, Alpha de Virginie occidentale et aussi à Milhan Torres, Alpha du Maryland. Nohlan Christensen avait donné de son savoir à Pharell Sandoval, Alpha de l'Illinois mais aussi Ziad Batache, Alpha de Caroline du Nord. Auxann quand à lui avait pris sous sa charge Adriel Gibbs, Alpha du Tennessee, Ilkan Lloyd s'était intéressé à Loam Bowers, Alpha de Caroline du Sud et Ghali Gray, d'Egan Cooper, Alpha du Massachusetts.

Bien sûr venir en aide ou s'occuper étaient de bien grands mots, mais l'idée était là et le Gardien avait été plutôt content de ses initiatives.

Le savoir et la connaissance des plus vieux n'étaient en rien négligeable, bien loin de là. Tous n'étaient pas dans cette optique malheureusement et beaucoup avait dû se débrouiller plus ou moins seul. Le Gardien avait été présent pour tout le monde, mais il ne pouvait être toujours là.

Dans certaine meute, il y avait eu pas mal de problèmes, quelques ratés, mais rien de très grave non plus.

Timothy savait qu'il pouvait faire confiance à pas mal d'Alphas dans le coin pour l'épauler en cas de soucis. Et il savait qu'il devait se méfier de beaucoup d'autres aussi. Il n'y avait pas de juste milieu et parfois, c'était embêtant.

Tous les Alphas n'étaient pas parfaits. Tous ne pouvaient pas être du côté de Timothy. Ce que je trouvais dommage, parce qu'il ne voulait que le bien de tous.

Être le Gardien n'était pas facile. Bien loin de là.

Je jetai un coup d'œil à Zoran, alors que nous arrivions aux abords de la maison de l'Alpha d'État. Il n'avait pas dit grand-chose depuis hier soir. Il n'avait même pas dit un mot, à part peut-être quand nous avions fait l'amour.

Je savais qu'il n'était pas emballé.

Depuis que je lui avais parlé de Darell et de Khalil, c'était bien la dernière de ses envies d'aller dans leurs meutes. Mais est-ce que nous avions le choix ? Non. Et il devait comprendre que ce qui s'était passé avec Khalil remontait à presque un siècle maintenant.

C'était beaucoup cent ans. Mais pas assez pour Zoran, semblait-il. Quand nous avions croisés Maxim et Keziah hier soir, il avait été polit, mais n'avait pas vraiment parlé avec eux. Et surtout, il ne m'avait pas touchée une seule fois.

Pas une seule fois !

Maxim Gale était le troisième Dominant de la meute et Keziah, sa compagne.

Tous les deux étaient plus que charmants et très gentils ; comme tous les loups de Khalil de toute manière.

Cette meute m'avait toujours accueillit à bras ouverts et il m'était arrivé d'y rester quelques semaines, sans vraiment voir le temps passer.

— Tu comptes ne plus me parler et ne plus me toucher ? Grognai-je.

Il s'arrêta devant un immense portail où je pouvais voir pas mal de caméras.

Le système de sécurité avait été mis en place par la société d'Auxann qui avait d'ailleurs construit la maison de Khalil, quelques décennies plus tôt.

L'entreprise d'Auxann s'était étendue à pas mal d'États et il était très demandé ; pas forcément que par des meutes, mais aussi par des humains.

Zoran tourna son visage vers moi, mais ne répondit rien.

Je détestai quand il était comme ça. Froid, distant. J'ignorai comment faire pour qu'il redevienne normal, même si cet aspect-là de sa personnalité faisait partie de lui après tout. Simplement, j'avais envie et besoin qu'il me touche. Ne le comprenait-il pas ?

Pourquoi lui avais-je seulement parlé de Khalil ?

Si tu ne l'avais pas fait, ça aurait été bien pire, gronda ma louve.

Elle n'avait pas tort. L'apprendre de ma bouche était mieux que le vivre en vrai, n'est-ce pas ? Même si Khalil avait très bien compris le message, enfin... un peu. Je le soupçonnai aujourd'hui de m'embêter juste pour m'embêter. Mais dans un cas comme dans l'autre, ça n'allait pas plaire à Zoran.

Et je ne pouvais pas y faire grand-chose.

Rester loin de Khalil n'était pas franchement envisageable.

Je sentais vraiment mal les deux jours qui allaient arriver, c'était le cas de le dire.

Le portail s'ouvrit doucement et Zoran enclencha la première, toujours sans un mot. Je le fusillai du regard, y mettant toute ma colère.

Quelle espèce de...

— Sale con, dis-je en me détournant de lui.

Mais je le vis sourire et cela me mit encore plus en rogne.

Il remonta l'allée jusqu'à se retrouver dans les garages. Il gara la voiture derrière la Lexus de Khalil et coupa le contact. Je sortis de la voiture et allai prendre mon sac derrière sans un regard pour l'idiot de loup qui m'accompagnait.

Il allait avoir ma mort un jour. Franchement... S'il croyait qu'il allait pouvoir jouer à ça le temps qu'on serait ici, il se fourrait le doigt dans l'œil bien profond !

S'il voulait jouer, alors moi aussi j'allais le faire.

— Isis !

Avant d'avoir eu le temps de me retourner, je fus soulevé de terre et Kenzo, le Lieutenant de la meute me fit tournoyer un instant ; sa bonne humeur complètement contagieuse.

J'éclatai de rire juste avant qu'il ne me repose par terre et qu'il plante un baiser bruyant sur ma joue. Il me serra dans ses bras avant de tourner son visage vers Zoran qui s'était avancé légèrement.

— Tu es Zoran Swanson, je me trompe ? Dit Kenzo, pas le moins du monde déstabilisé par l'expression froide sur le visage de Zoran.

Je retins un soupir. Qu'il m'agaçait bon sang !

— C'est ça, finit-il par répondre sans intonation particulière.

Kenzo hocha la tête et offrit sa nuque à Zoran qui le salua en l'effleurant du bout des doigts. Kenzo était largement moins puissant que lui, c'était un fait avéré. Et il le reconnaissait sans mal.

Pas de souci d'égo.

Surtout pas chez les loups de Khalil.

Il y avait des meutes comme ça. Avec l'esprit ouvert et le respect des aînés inscrit en chaque loup.

Respect et loyauté. Les fondements de n'importe quelle meute. Que cette dernière soit vieille ou non.

Khalil, malgré sa jeunesse et le fait qu'il était toujours en train d'apprendre, était un très bon Alpha. Du moins, à mes yeux. Bien-sûr il n'était pas parfait et il y avait encore beaucoup de lacune dans la gestion de son territoire et surtout de l'État, mais la cohésion de sa meute restait vraiment impressionnante. Et c'était là que résidait toute sa force.

Être entouré des bons loups était primordial. C'était même la règle de base.

Mauvais loups, mauvaise cohésion.

Mauvaise cohésion et la meute était en danger.

Il y avait eu beaucoup de cas de ce genre. Et aucun ne s'était bien finit malheureusement.

— On t'attendait un peu plus tôt, tu sais ? Dit Kenzo en me prenant mon sac des mains et en nous faisant signe de le suivre.

Nous lui emboitâmes le pas, Zoran encore plus silencieux si c'était possible. Est-ce que je pouvais le frapper ?

Je lui jetai un coup d'œil avant de le détourner. Idiot.

— J'ai dû m'attarder dans quelques meutes qui avaient besoin de moi, répondis-je simplement.

Nous remontâmes une petite allée qui faisait le tour de la maison et nous arrivâmes au niveau d'une immense terrasse.

Je pouvais sentir que la plupart des hauts-gradés étaient ici. Tous ne vivaient pas dans la demeure de Khalil, mais ils y passaient vraiment beaucoup de temps. J'entendis les pleurs d'un bébé :

— Comment va Lyse ?

Kenzo tourna un visage rayonnant vers moi. Il était papa depuis onze mois maintenant et je crois que je ne l'avais jamais vu aussi heureux que ça. Je savais que tout le monde couvait sa compagne ; Sanjy, ainsi que la petite Lyse. C'était souvent le cas dans n'importe quelle meute.

Un enfant était précieux et on devait en prendre soin.

Que ce soit celui de l'Alpha ou celui d'un Patrouilleur.

Parfois, des meutes l'oubliaient.

Parfois, on abandonnait des petits loups juste parce qu'ils... dérangeaient.

Des bâtards.

Un frisson me parcourut et je me frottai le bras, soudain mal à l'aise. J'avais repoussé de mon esprit le fait d'avoir revu Marc et Élise.

D'avoir rencontré pour la première fois Joan. Mais je ne pouvais repousser la douleur que ça me causait. Qui étais-je pour repousser de la sorte ceux qui m'avait élevé ? Ceux qui m'avait aimée et choyée ?

Qui ?

Je levai la tête vers le ciel d'un bleu éclatant. Il faisait chaud, mais pas trop. Et il y avait une légère brise dans l'air qui soulevait mes cheveux et laissait ma nuque respirer. J'aimais bien le vent. J'aimais bien la fraîcheur.

C'était agréable.

C'était bienvenu.

Je senti un regard sur mon visage. Zoran. Je baissai les yeux sur lui et vis qu'il me fixait, une expression indéchiffrable sur le visage.

Il ne m'avait posé aucune question et ne le ferait pas. Mais il avait compris. Il savait. Et il avait tout fait pour me changer les idées.

Il était si gentil cet idiot... peut-être trop même. Je lui souris un instant et son visage tout entier s'adoucit.

Il était de nouveau là, le Zoran tendre et... aimant. Mais il ne me touchait pas. Et ne le ferais pas. Mon sourire disparut et je détournai de nouveau la tête.

— Némésis !

Chems, le premier Dominant de la meute me fit un signe de la main, assit sur la table. Il était grand, les cheveux coupés assez court et il avait une oreille percée.

Son sourire forçait les gens autour de lui à le lui rendre. Son aîné, Roman, était assis sur une chaise à côté de lui. Il était encore très jeune pour un loup et paraissait avoir la vingtaine d'années. Il avait les traits de son père et les yeux de sa mère. Le deuxième, Armel, n'était pas là. Les deux frères se ressemblaient tellement que beaucoup les croyaient jumeaux. Mais les humains n'étaient pas censés savoir que les loups ne pouvaient avoir des jumeaux. Ceux qui en avaient n'avaient pas un compagnon ou une compagne de la même nature qu'eux. C'était aussi simple que cela.

Autour de la table, il y avait aussi Elyzio, l'Eros de la meute et comme tout Eros se respectant, il était d'une gentillesse rare et précieuse. À ses côtés se tenaient Estéban, le compagnon de Shany, la deuxième Dominante ainsi que Keziah et leur fille, Pia.

J'eu le droit à des bisous de tout le monde et les nuques furent tendues à Zoran, comme si tout cela était naturel.

Je surpris le regard quelque peu curieux d'Elyzio sur Zoran, mais il ne dit rien.

Nous savions que le fait que Zoran m'accompagnait n'était plus un secret et que tout le monde devait être au courant maintenant.

Une vieille Main accompagnait l'envoyée du Gardien, de quoi faire jaser un peu tout le monde. Étonnamment, cela n'avait pas encore conduit à de réels problèmes, mais ça ne voulait certainement pas dire que ça n'allait pas arriver.

— La route n'a pas été trop longue ? Me demanda Pia avec un sourire.

— Ça a été.

Des rires me parvinrent alors de l'intérieur de la maison et je reconnu la voix de Khalil sans mal.

— Espèce d'idiot de Second ! Je vais t'apprendre moi à...

Il y eut un gros fracas et Valéran surgit sur la terrasse, mort de rire.

Il était torse nu et ne portait qu'un short. Il avait plusieurs bleus sur le torse, preuve qu'il sortait d'une petite séance d'entraînement. Et il était luisant de transpiration aussi. De quoi mettre plus que la puce à l'oreille, pas vrai ?

Il jeta à peine un coup d'œil à Zoran et m'avisa. Il sourit de plus belle et se retrouva alors derrière moi, ses bras autour de mon ventre. Il embrassa ma joue :

— Coucou, Isis, souffla-t-il.

Valéran Skinner était le fils du fameux Second qui avait élevé Khalil, faisant des deux loups presque des frères.

Ils se considéraient comme tel d'ailleurs et leur relation avait toujours été très fusionnelle. Ce qui d'après moi aurait dû être le cas pour n'importe quel Alpha et Second.

Ils avaient grandi ensemble.

Ils avaient créé cette meute ensemble.

Et il était toujours très drôle de voir Khalil s'énerver contre son Second en fait...

Ce dernier déboula d'ailleurs et se figea en voyant Valéran derrière moi.

— Tu n'oseras pas me frapper avec Némésis entre nous, hein, Khal ?

— Utiliser une femme pour te protéger, c'est vraiment bas, mon pote, rit Chems.

Valéran retint un rire alors que je sentais de toutes les fibres de mon corps que Zoran était tendu à l'extrême. Khalil le regarda et je vis quelque chose passer dans son regard. Quelque chose qui n'allait pas forcément plaire à Zoran ou me plaire...

— Némésis, quel plaisir, ronronna-t-il.

Khalil n'était pas suicidaire, ni même stupide, il était simplement joueur. Très joueur même. Si à une époque il avait vraiment voulu de moi, aujourd'hui je le soupçonnai juste de trouver tout cela très amusant. Il n'avait pas vraiment la même notion que moi de tout ça, mais après tout...

Il me tendit ses deux mains, un sourire carnassier aux lèvres. Le genre de sourire qui aurait pu faire tomber n'importe quelle femme faible d'esprit à ses pieds.

— Si c'est un stratagème pour mieux me frapper ensuite, je ne suis pas dupe, dit Valéran.

Khalil arqua un sourcil :

— Tu es inexistant pour moi en cet instant, Second.

Pia leva les yeux au ciel devant les gamineries de Khalil et Valéran. Ils avaient le droit à ça presque tous les jours, ce qui ne devait pas toujours être de tout repos, c'était clair...

— Tenez-vous un peu, bon sang. Il y a des invités, grogna Elyzio en secouant la tête, pas vraiment agacé, juste... habitué.

— C'est Némésis, répliqua Valéran, ce qui pour lui, m'excluait totalement du terme d'invité.

— Pas un pour rattraper l'autre, n'est-ce pas ? Lâcha alors Leela en apparaissant derrière Khalil.

Tout de suite, Valéran me lâcha :

— Tu étais là, chérie ? Dit-il, faussement surprit.

Cette dernière fit la moue et ne réussit pas totalement à cacher son amusement. Qui le pouvait ?

Valéran et Leela n'étaient pas ensemble depuis très longtemps. Leur lien n'était pas vieux et ils apprenaient encore à se découvrir, ce que je trouvais vraiment très... mignon pour tout avouer.

J'ignorai si elle était son âme sœur, mais en tout cas il semblait avoir trouvé en elle une compagne idéale.

C'était toujours très drôle de les voir tous les deux. Valéran pouvait être terriblement gauche parfois et Leela, très, très gênée. Mais tout le monde était passé par là. Derrière Leela, il y avait Sanjy qui tenait la petite Lyse dans ses bras.

Je profitai que Valéran m'ait lâché pour aller saluer Khalil. Il attrapa mes mains et m'attira très près de lui. Il était plus grand que Zoran et du donc se baisser.

Khalil était bel homme. Il faisait très jeune et très soigné, même alors qu'il venait de transpirer. Ses cheveux étaient coupés courts et ses yeux avaient la particularité de changer de couleur selon la luminosité, presque selon le temps parfois. Cela m'avait fascinée la première fois et continuait de le faire.

En cet instant, alors qu'il me regardait, ils étaient d'un parfait mélange entre le bleu, le vert et une légère nuance d'un brun si clair qu'en plein soleil, cela aurait été un bel orange. Il n'y avait pas de mot pour décrire ça. C'était tout simplement incroyable.

Il déposa un baiser à la commissure de mes lèvres et je sentis sa puissance m'entourer. Son Alpha brilla dans ses yeux et il sourit :

— Quel plaisir de t'avoir de nouveau près de moi, Némésis.

Je déglutis, mal à l'aise et reculai, butant presque contre le torse de Zoran. Sa puissance balaya celle de Khalil et s'accrocha à ma peau, comme si c'était là qu'était sa place. Cela ne me dérangea pas. C'était presque comme s'il me touchait et pour l'instant, je pouvais me contenter de cela.

Khalil se redressa et il pinça des lèvres :

— Zoran, lâcha-t-il.

Zoran ne lui offrit pas sa nuque et Khalil ne chercha pas plus à le saluer. Ils se connaissaient. Et ils ne s'appréciaient pas du tout. C'était gros comme le nez au milieu de la figure.

Khalil était très jeune comparé à Zoran, alors quel était le litige entre eux ? L'Alpha de Columbia reporta son regard sur moi :

— Je vais aller sous la douche et nous passerons dans mon bureau, d'accord ?

Je hochai simplement la tête et il effleura ma joue du bout des doigts, faisant se crisper un peu plus Zoran dans mon dos.

Khalil fit un signe de tête à Valéran et ils disparurent tous les deux.

Sanjy vint me saluer et me fourra sa fille dans les bras. Je ne l'avais vu que quelques semaines après sa naissance et dire qu'elle avait bien grandit depuis le temps était un euphémisme. Kenzo s'avança et embrassa sa petite fille sur le bout du nez. Il me raconta les exploits de son petit bout de chou et tout le monde y mit son grain de sel. Il n'y avait pas une seule personne qui échappait aux joies de garder l'enfant.

Tout le monde mettait la main à la main à la pâte comme on disait. Mais c'était ça que de vivre en meute, en communauté.

Zoran garda le silence ; il ne connaissait personne ici, ou du moins, pas comme dans d'autres meutes où nous étions allées.

Khalil n'avait pas de Main. Pas encore. Mais il devrait bientôt en trouver une, parce qu'une meute sans Main, ce n'était pas bon. Cette dernière était celle qui dispensait les punitions, celle qui donnait la chasse à ceux venant faire les malins sur le territoire.

Ne pas en avoir était une faiblesse impardonnable. Et même Timothy ne pouvait pas laisser passer ça. Mais il ne pouvait aucunement punir les Alphas en question, car ce n'était pas forcément de leur faute s'il n'avait personne à ce poste.

Voilà une des raisons du pourquoi de cette mission si spéciale aux yeux de Yahto.

Kenzo nous fit alors signe et nous le suivîmes à l'intérieur. Khalil avait demandé à deux grandes décoratrices d'intérieur de s'occuper de sa maison. Allyson Baker et Tessa Campbell étaient très réputées dans ce domaine.

Dans le salon, nous grimpâmes quelques marches avant de nous diriger dans un couloir qui ne menait qu'à une seule chose ; le bureau de Khalil. La porte était ouverte et ce dernier nous tournait le dos, boutonnant sa chemise. Valéran avait opté pour un simple t-shirt et était penché sur l'ordinateur portable de Khalil, un grand sourire collé aux lèvres.

— Je suis sûr que ça existe. Ça donnerait quelque chose comme... rencontres-lupines.com ou une connerie dans le genre. Bon ça sonne un peu comme coquine, je te l'accorde, mais...

Valéran releva la tête vers nous à ce moment-là et se frotta la nuque, légèrement rouge. Kenzo secoua la tête et soupira devant la stupidité de son Second. Le niveau mental dans cette meute était parfois assez impressionnant...

Il se racla la gorge et Khalil se retourna.

Il me sourit tout naturellement et nous invita à nous assoir. Je savais déjà que j'allais lui donner la lettre.

Les loups de Khalil me connaissaient et m'appréciais.

Je pouvais largement traiter avec lui à la place de Timothy. Les problèmes qu'il pourrait avoir, je pourrais les gérer avec lui.

Il s'installa tranquillement et Valéran resta une fesse sur le bord du bureau. Je parlais donc de ma mission et Khalil posa peu de questions. Ils s'étaient toujours douté de ma... proximité avec Timothy et que je sois envoyée par lui ne l'étonnait donc pas plus que ça.

Quand nous en arrivâmes au but de ma mission et ce que j'attendais exactement de lui, il grimaça.

Khalil était peut-être l'Alpha d'État, mais il n'était pas le plus vieil Alpha présent au niveau du Missouri et sa meute était très, très loin d'être la plus vieille. Les cinq autres principales villes de l'État étaient toutes occupées par des meutes. Les deux plus importantes restaient celles situées à Kansas City et à Saint-Louis. Et les vieux Alphas à la tête de ses villes n'avaient pas tous appréciés qu'un petit jeune soit mis à la tête de l'État tout entier.

D'où la grimace de Khalil.

Ses rapports avec lesdits Alphas n'étaient pas très bons, même si je savais qu'il prenait sur lui et qu'il faisait beaucoup d'effort.

Mais que faire contre la jeunesse elle-même ?

— Je ne suis pas sûr qu'ils écoutent ce que j'ai à leur dire si je les appelle, soupira-t-il.

Khalil n'avait encore aucune autorité sur eux. Je connaissais assez bien l'Alpha de Saint-Louis, pas celui de Kansas City. Si je le contactai moi-même, peut-être serait-il plus enclins à écouter...

Non. Ce n'était pas la bonne façon pour procéder. Loin de là.

— Tu dois t'imposer, Khalil. Tu es celui qui est censé contrôler l'État et cela veut dire que les Alphas te doivent le respect. Qu'ils soient plus vieux ou plus jeunes que toi.

Se faire respecter de ses loups était une chose, le faire d'autres Alphas, une toute autre.

— Fais-leur comprendre que la demande vient du Gardien et de Yahto, maître des Mains. Si un seul refuse, c'est que ce ne sont pas de bons leaders.

Khalil pencha légèrement la tête, son regard rivé au mien, un sourire énigmatique étirant sa bouche.

— On pense toujours que la compagne d'un Alpha n'est faite que pour évoluer dans son ombre, mais je trouve ça stupide. Si un Alpha trouve la femme qui est à sa hauteur, alors autant qu'elle marche à ses côtés, tu n'es pas d'accord, Némésis ?

Valéran regarda Khalil qui était étonnamment sérieux soudain. Où voulait-il en venir ?

— Je crois que tu es ce genre de femme, Némésis. On n'a pas conscience de ta force quand on est devant toi, mais elle couve, là, à l'intérieur et il faudrait être le dernier des idiots pour ne pas te vouloir.

Je rougie violemment à ses propos alors que Zoran inspirait. Khalil me dévorait des yeux et j'y vis son loup, je l'entraperçu.

J'ignorai s'il était vraiment sérieux ou si encore une fois ce n'était qu'une sorte de jeu pour lui.

— Tu es faite pour un Alpha, pas pour une simple Main.

Ma main se retrouva sur la cuisse de Zoran avant qu'il ne pense seulement à bouger. Sa colère me percuta de plein fouet et quelque chose remua en moi.

Il était hors de question qu'il fasse quoi que ce soit dans cette meute. Ce n'était que des paroles. Khalil était doué avec ces dernières. Il avait essayé de passer à l'action une fois, mais avait très bien compris ce qu'il risquait s'il s'y essayait une nouvelle fois.

— La seule qui puisse décider de cela est Sharan, Khalil, notre Mère à tous.

Et je n'avais pas besoin de lui rappeler que j'étais une louve solitaire. Très peu savait ce que cela signifiait réellement.

Il était dur pour nous de nous lier.

Ce n'était pas qu'on ne le voulait pas, c'est qu'on ne le pouvait pas. Ma louve avait toujours très mal supporté de vivre en communauté, d'être reliée à une meute.

Timothy, c'était différent pour nous. C'était un lien, mais un lien spécial.

Si un jour j'avais pensé pouvoir me lier à quiconque, je m'étais simplement dit que ce serait avec mon âme-sœur, si je la croisais un jour. Sinon, je resterais comme j'étais.

Une louve solitaire. Et Le Gardien alimentant le seul lien que j'avais.

Je sorti alors la lettre de mon sac et la lui donnai.

Il l'a lu et sourit.

Aucune surprise pour lui, comme je l'avais pensé.

Khalil se rencogna dans son siège et se mit à tapoter son bureau du bout des doigts :

— Je vais faire mon possible pour t'avoir tout ça au plus vite, Némésis. En attendant, ma maison est tienne, comme toujours.

Je me levai et Zoran fit de même.

— Je te remercie, dis-je avant de quitter le bureau.

Zoran ne dit rien et je n'essayai pas de le faire parler. Qu'il boude autant qu'il voulait. Ce n'était qu'un... idiot.

Oui. Un idiot doublé d'un sale con.

Nous retournâmes dehors et pas mal de membres de la meute vinrent pour me saluer. Je ne connaissais pas forcément tout le monde, mais un nombre conséquent quand même.

En fin de journée, Valéran refit son apparition et il emmena avec lui les deux Dominants présents pour aller régler un petit souci. J'aurais pu demander de quoi il retournait, surtout après que Khalil ait accepté de traité avec moi dorénavant, mais ne le fis pas.

Les femmes des hauts-gradés disparurent dans la cuisine pour préparer le repas et Elyzio prit des nouvelles de l'Eranthe de Jahyan auprès de Zoran qui se fit un plaisir de répondre.

Elyzio était le loup le plus vieux de la meute, ce qui était souvent le cas des Eros des jeunes meutes. Zoran se fit un plaisir de lui répondre. Je pris le temps de répondre aux textos d'Oren et Arthur et en envoyai aussi un à Luka. Je l'avais appelé il y avait quelques jours et d'entendre sa voix m'avais fait beaucoup de bien.

Je sentis alors Khalil s'avancer dans mon dos et se placer à côté de moi. Zoran était dans notre dos, toujours avec Elyzio, mais je savais que toute son attention était concentrée sur moi.

— J'ai déjà obtenu pas mal de réponses. Cela devrait aller plus vite que je ne l'avais cru, finalement, me dit-il.

Je tournai mon visage vers lui :

— Tu n'as pas assez confiance en toi, Khalil. Cela risque de te jouer de mauvais tours un jour.

Il rit doucement :

— Je sais, mais tu seras là pour m'aider si ça arrive, n'est-ce pas ?

Il me laissa là et retourna à l'intérieur, non sans avoir observé un instant Zoran. Je croisai le regard de ce dernier et lui tirai la langue ; chose parfaitement puérile et immature, mais je m'en fichais.

La table fut mise tard et nous mangeâmes alors qu'il faisait nuit depuis longtemps. Tous les hauts-gradés étaient là et tous vinrent me parler. Le repas s'éternisa et bientôt je baillai à m'en décrocher la mâchoire. Leela le vit et me proposa de me montrer où je dormirais. Où nous dormirions, puisque Zoran se leva en même temps que moi.

Il n'avait presque pas mangé et n'avait quasiment pas parlé de la soirée. Il s'était assis le plus loin possible de Khalil et à plusieurs reprises, je l'avais surprit à me fixer intensément.

C'était à la fois étrange et déstabilisant de ne pas se parler, ni même de ne pas se toucher aussi longtemps. Ma louve remuait étrangement en moi et moi-même je me sentais... gauche ? Je ne savais pas trop si le mot était le bon.

Leela ouvrit une première porte au premier étage. La chambre était bien décorée, dans de jolis tons. Il y avait quelques plantes vertes et des cadres accrochés au mur. Il n'y avait rien d'impersonnel là-dedans, bien au contraire.

— C'est très bien, dis-je.

Leela sourit et ouvrit la porte en face de la mienne. Je vis Zoran froncer les sourcils avant de me regarder, comprenant que nous n'allions pas dormir ensemble. Il ouvrit la bouche, mais je le devançai :

— Bonne nuit.

Je fis un petit signe à Leela et refermai, m'appuyant contre le battant de la porte.

Mon cœur battait à tout rompre et une profonde tristesse s'empara de moi un instant. Je laissai mon regard dériver sur la pièce, la trouvant bien vide sans Zoran. Je sentais sa présence de l'autre côté du couloir, mais ce n'était pas pareil que de l'avoir près de moi. Loin de là...

Il avait joué à l'idiot toute la journée et toute la soirée. Il n'avait que ce qu'il méritait, fin de l'histoire. Je pouvais me passer de lui une nuit.

N... non ?

J'allais aller me mettre au lit quand je sentis une présence dans le couloir.

Khalil.

Ma louve grimpa. Elle ne voulait pas le voir. Elle ne voulait voir qu'un seul mâle. Ne voulait avoir affaire qu'à une seule personne.

Une porte s'ouvrit et je su que c'était Zoran. Il avait senti Khalil et il était hors de question pour lui de le laisser aller plus loin. Devais-je sortir maintenant ou... attendre ?

— Tu n'as rien à faire ici, grogna Zoran.

— Je suis chez moi aux dernières nouvelles, rétorqua Khalil, pas vraiment mauvais.

— Tu as très bien compris ce que je voulais dire.

Il ne pouvait pas y avoir plus d'animosité que ça dans la voix de Zoran qu'en cet instant.

— Tu es un très bon chien de garde dis-moi, Zoran, railla Khalil.

Ce n'était peut-être pas la meilleure idée pour lui de chercher Zoran de la sorte. Même s'il était un Alpha, je n'étais pas sûre que Zoran se retienne de le frapper s'il en avait envie.

— Si tu me considère comme tel, c'est vraiment que tu n'as rien dans la tête.

Khalil ne répondit rien à cela et je n'eut aucun mal à les imaginer en train de se fixer, de s'assassiner par le regard même.

— Ne crois pas que je suis le seul loup à l'avoir courtisée, Zoran. D'autre Alpha l'on fait. Mais aussi des Seconds ou de simple loup sans grade. Tu devrais faire attention à ce qui t'est précieux parce que Némésis l'est pour beaucoup d'autre personne. Ne l'oublie pas.

Khalil n'ajouta rien d'autre. J'entendis ses pas s'éloigner, mais pas la porte de Zoran. Était-il encore dans le couloir ?

— Soit tu m'invite à entrer, soit j'ouvre cette porte, que tu le veuille ou non.

Sa voix me fit sursauter. Ma main reposait contre le battant de la porte et je le savais là, juste derrière. Les battements de mon cœur s'accélérèrent et j'inspirai légèrement.

— Tu n'as été qu'un sale con toute la journée, soufflai-je d'une toute petite voix.

— Je sais, bébé.

J'appuyai mon front contre la porte et fermai les yeux. Que faisait-il derrière cette porte ? Attendait-il simplement que je lui ouvre ?

J'avais envie qu'il me touche.

J'avais envie de le toucher.

Et tout cela commençait sérieusement à me faire peur. Pouvais-je vraiment le vouloir autant ? Avais-je seulement le droit de le considérer comme mien ?

Peut-être.

Peut-être pas.

Je ne savais pas. Je ne savais plus.

Je finis par ouvrir la porte et ses yeux happèrent les miens immédiatement. Ils étaient sombres.

Plein de désir ou de danger, je n'étais pas sûre.

Je me reculai pour le laisser entrer et il referma la porte derrière lui. Il ne portait qu'un short et sentait la cigarette.

— Vous avez décidé d'être moins bête, monsieur Swanson ? Raillai-je.

Il retint un sourire, mais ne se retint pas de m'attirer dans ses bras. Tout de suite, je me senti bien mieux.

À ma place.

Je soupirai d'aise et ça ne lui échappa aucunement. Il quémanda un baiser et je me jetai sur ses lèvres, n'en pouvant tout simplement plus.

Mes mains se retrouvèrent dans sa nuque et son dos alla appuyer contre la porte ; avant qu'il n'inverse nos positions.

Ses yeux étaient si sombres !

Son corps, si brûlant !

J'avais l'impression que je pourrais fondre à son contact. C'était assez incroyable.

Zoran enfouit son visage dans mon cou alors qu'une de ses mains passaient sous mon débardeur, se frayait un chemin sous mon soutien-gorge et il pinça mon téton.

Fort. M'envoyant une décharge à travers tout le corps.

Je gémis et sa bouche l'aspira.

— Zo... Zoran...

J'avais faim de lui.

Faim de son corps.

Et je savais que tout ça ne partirait pas.

Je savais que je voudrais toujours sentir ses mains sur mon corps.

Alors je m'abandonnai à lui.

Je m'abandonnai à son étreinte, et j'oubliai tout.

Je promis à Khalil de revenir dès que je le pourrais pour voir ce que je pourrais faire au niveau de l'entente avec les autres Alphas.

En échange, il me promit d'aller dans une Maison pour y trouver sa Main. Il était vraiment temps pour lui d'en trouver une et il le savait.

La meute me salua et je passai de bras en bras.

Je cru que le répertoire de mon téléphone allait exploser et cela fit rire Zoran qui n'arrêta pas de se moquer.

Nous prîmes la route pour l'Arkansas, où nous attendait Azad Wise, le petit insecte qui n'arrêtait pas de bourdonner dans les oreilles d'Auxann. C'était ainsi que me l'avait présenté Jasper, le Second de la meute de la Nouvelle-Orléans la dernière fois que j'avais été. Je connaissais un peu Azad, ne l'avais croisé que deux fois pour tout dire. Il n'avait pas un mauvais fond et n'était pas méchant, simplement, il avait des soucis personnel avec Auxann. Qu'est-ce qu'on pouvait contre ça ?

De Columbia, il fallait six heures vingt pour rejoindre Little Rock dans l'Arkansas, là où Azad s'était installé.

Zoran prit le volant le premier avant que je ne prenne sa suite peu après la frontière. Il y avait peu de monde sur les routes et c'était agréable. Il ferma les yeux, mais ne fit que somnoler. Je mis la musique et chantonnais tranquillement.

Ma louve remua alors et je la senti aux aguets. Zoran se redressa presque immédiatement dans son siège et au loin, je vis deux silhouettes.

Deux hommes. Des loups. Et le fait qu'ils soient en plein milieu de la route ne signifiait qu'une seule chose, pas vrai ?

— Qu'est-ce que...

Ma phrase se perdit.

Quelque chose heurta violemment l'arrière de la voiture et je perdis le contrôle du véhicule. Mon hurlement jaillit de ma poitrine et le bras de Zoran me retint juste avant que la voiture ne fasse des tonneaux.

Tout se confondit et j'eu l'impression de passer sous un rouleau compresseur. La douleur explosa dans ma jambe et mon esprit s'embrouilla en même temps que ma vue.

Sous la peur et l'adrénaline, ma louve poussa et prit le dessus.

Mon corps changea contre ma volonté et cela fit plus mal encore que l'accident. Ma louve bondit hors de l'épave alors que Zoran en sortait aussi, encore sous sa forme d'humain. Il saignait, mais ne semblait pas blessé gravement.

Une ombre derrière ma louve. Elle bondit et ses dents se refermèrent sur le bras d'un homme. Il essaya de l'atteindre avec un couteau en argent, mais déjà, Zoran lui brisait net la nuque.

Ma louve leva son museau vers lui et elle le vit changer.

C'était un loup magnifique. Un mâle tout en muscles. Il gronda et lui donna un coup de museau. L'air nous apporta des odeurs.

Ils étaient cinq.

Cinq lupins.

Je me concentrai sur les odeurs. Ce n'étaient pas des sans meutes. Bien au contraire. Le loup de Zoran sembla se ratatiner sur lui-même et avant que l'un de nos assaillants n'est ne serait-ce que eu le temps de m'approcher, il attaquait, ses dents déchiquetant.

Précis.

Meurtrier.

Il y avait du sang.

Il y avait la mort.

Ma louve grogna et se mêla à la bataille, sans plus réfléchir. Le lupin en face de nous se changea et fondit sur nous. Il nous heurta de plein fouet et tous nous os vibrèrent.

Ma louve recula et quand elle appuya sur sa patte arrière, elle couina et frémit. L'autre en profita. Ses dents cherchèrent à nous atteindre à la gorge alors qu'un autre s'avançait derrière nous.

Cherchant à nous acculer.

Elle esquiva le premier et atterrit sur son dos, y plantant et ses griffes et ses crocs. L'animal couina et chercha à s'en défaire, mais une fois qu'elle était agrippée, elle ne lâchait rien. Quelque chose, ou plutôt quelqu'un la heurta de plein fouet et elle roula au sol, la douleur explosant de tout côté. Elle releva le museau juste avant de voir le loup de Zoran s'occuper des deux loups qui restaient.

Elle ne détourna pas les yeux en voyant toute cette rage, toute cette haine. Il y avait quelque chose de beau.

Quelque chose de... vrai, de véritable.

C'était incroyable.

C'était juste beau.

Et à la fin, il ne resta que du sang.

Le loup de Zoran s'ébroua, comme pour se défaire de tout ce sang et il s'avança droit sur ma louve, son corps se balançant au rythme de ses foulées.

Ma louve était allongée au sol, respirant vite et fort. Le loup s'arrêta devant elle et renifla l'air avant de se frotter contre elle et de donner un léger coup de museau.

Un message.

Lève-toi.

Ma louve lui gronda dessus et ne bougea pas. Un autre coup de museau. Ses dents agrippèrent l'oreille de ma louve, très légèrement, sans faire mal.

Elle gronda plus fort et finit par bouger. La douleur fusa dans son corps entier quand elle posa sa patte par terre et sous le coup, sa présence se fit moins forte et cela me permit de changer.

Je criai en retombant au sol, nue, en sueur et la souffrance pulsant dans ma jambe. Je n'avais pas le courage de voir dans quel état elle était.

Était-ce cassé ? L'os ressortait-il ?

Un haut-le-cœur me prit et je dû me retenir à la dernière seconde pour ne pas vomir. Le souffle du loup me caressa le visage avant que je ne sente sa langue sur ma jambe.

Je sursautai et fermai les yeux, m'agrippant à son pelage, tremblante.

J'avais froid et chaud en même temps.

J'enfoui mon visage dans les poils du loup alors qu'il léchait le sang, qu'il nettoyait la plaie.

L'adrénaline quitta mon corps et je me mis à trembler de plus belle. Je m'accrochai au loup de Zoran, le tenant si fort que j'eu peur de lui briser quelque chose.

Mais il ne broncha pas.

Les larmes roulèrent sur mes joues alors que je n'avais jamais eu aussi peur de toute ma vie. Je devais me reprendre.

Je ne devais pas être faible. Je ne l'étais pas. Je... ne l'étais pas.

Les poils du loup étouffèrent mes sanglots alors que sa chaleur me réchauffait de l'intérieur.

Je me laissai bercer par le rythme régulier de sa respiration.

Et à aucun moment il ne bougea, sentant que j'en avais besoin.

Besoin de lui.


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