7. Jahyan
Elle ne bougeait plus. Si docile sous ma prise. J'aimais ça. Mon loup aimait ça. Il grimpa dans mes mains et doucement se pencha un peu plus. Nos dents attrapèrent la lèvre inférieure de Shana. Elle ferma les yeux et j'entendis un léger gémissement lui échapper alors que lentement, mon loup tirait sur cette lèvre un peu boudeuse. Je pressai mon torse contre sa poitrine, raffolant du contact de son corps. Mon loup tournait en rond dans la cage de mon corps. Toujours à frôler dès qu'il pouvait pendant que nous nous battions, sans qu'elle le remarque et pourtant c'était là.
Ce besoin.
Ce besoin viscéral de nos loups.
Ce besoin de toucher. D'être touchée.
De se repaître du contact de l'autre.
Elle rouvrit les yeux alors je me tenais au-dessus de sa bouche, attendant, laissant la tension grimper entre nous. J'aurais aimé qu'elle me touche aussi. Mon loup avait besoin de contact. Au-delà du fait que la meute me manquait, que mes loups et mes louves me manquaient, cela faisait longtemps que je n'avais pas touché une femme avec désir.
Avec envie.
Et Shana était là, devant moi, si irrésistible dans cette foutue chemise bien trop courte.
Dans ce short bien trop court lui aussi.
Ses longues jambes.
Ses bras fins.
Ma main libre glissa dans son dos et mon bras l'entoura la ramenant contre mon torse. Ses mains s'accrochèrent à mes bras, serrant fort. Comme si elle tentait de me repousser. Comme si elle pensait qu'elle pourrait me repousser.
Ce n'était pas le cas.
On ne me disait pas non.
Pas à moi.
Mon loup, ne résistant plus et profitant de ma faiblesse, se pencha.
Nos bouches s'effleurèrent et nos souffles se rencontrèrent. Je resserrai ma prise dans son dos et elle le cambra, pressant un peu plus ses seins contre mon torse. Mon sexe se fit douloureux alors que j'appuyai mes lèvres contre les siennes. Je frémis alors que ses mains glissaient dans ma nuque, me tirant un peu plus vers elle. Nos loups respectifs utilisaient notre faiblesse d'humains pour arriver à leurs fins, mais en ce moment je m'en fichai. Shana, sûrement désorientée par mon propre pouvoir, laissa le sien glisser.
Nos énergies, presque brillantes, et surtout très chaudes s'enroulèrent autour de nous, resserrant notre cocon. Ma bouche jouait avec la sienne. C'était si bon de l'embrasser après tous ses fantasmes sur elle pendant cette longue semaine éprouvante. Je n'avais jamais été du genre à craquer vite. Et j'avais retenu mon loup autant que je pouvais.
À présent, je me demandais bien pourquoi j'avais autant attendu.
Je grognai et Shana atterrit sur le plan de travail, moi entre ses jambes. Je plongeai ma langue dans sa bouche, maintenant son visage baissé vers moi. Elle gémit et tira sur mes cheveux alors que nos deux corps montaient en température. Mes mains glissèrent de ses fesses à ses flancs, et mes doigts en éventails effleurèrent ses seins. Mon loup gémit en sentant leur pointe se tendre vers lui.
Elle en avait envie.
Elle le voulait.
Des bruits me parvinrent de dehors. Je réussis à m'écarter de Shana avant que Jalil n'entre dans la cuisine. Shana était immobile, ses mains sur les cuisses. Je me tenais non loin d'elle, un léger sourire sur les lèvres.
_ Tu en as mis du temps à trouver cette tequila, remarqua Jalil en nous observant.
_ Tu n'as qu'à pas la mettre hors de portée, grogna Shana.
Sa louve était à la surface, mécontente d'avoir été interrompue. Je retenais moi-même difficilement mon loup. Jalil ne sembla pas remarquer le léger tremblement dans la voix de Shana, ni même le fait qu'elle soit assise nonchalamment sur le plan de travail. J'aurais pu me lécher les lèvres pour sentir encore le goût de ses lèvres.
Il fallait que je me calme. Mon sexe me faisait vraiment mal et je dus fermer les yeux un instant alors que Jalil disait à Shana de chopper des verres. Elle bondit au sol, encore légèrement tremblante et attrapa des verres. Alors que Jalil sortait et que nous nous apprêtions à la suivre, elle posa les verres sur la table de la cuisine. Elle prit le torchon à ses côtés et me le lança.
_ Espèce de con, cracha-t-elle.
Je souris et m'approchai d'elle. Elle me repoussa de ses deux mains en frissonnant.
Personne ne me repoussait. Surtout pas Shana.
Mon loup grimpa si vite dans mes membres que même Shana fut surprise. Il la plaqua contre le plan de travail, sa bouche contre sa gorge. Notre langue remonta le long de cette magnifique gorge. Shana haleta un instant avant de tirer sur mes cheveux et de vouloir me reculer. J'attrapai son menton et soufflai sur ses lèvres.
_ Arrête, murmura-t-elle.
_ Écoute les besoins de ta louve, soufflai-je. Elle ne demande que ça...
_ Recule Pearson, gronda-t-elle en me fusillant du regard.
J'avais fait le beau la plupart du temps quand je savais qu'elle regardait mes combats. J'avais vu la lueur d'excitation dans son regard. Dans celui de sa louve.
C'était bon.
Drôlement bon.
Et j'aimais faire jaillir cette étincelle dans son regard.
_ Comme tu veux, murmurai-je contre sa bouche.
Elle retint son souffle, ses lèvres légèrement entrouvertes.
M'appelant.
Me suppliant de les embrasser.
Maintenant. Tout de suite.
_ Alors ces verres ! Ricana Zoran de dehors.
Je grognai et relâchai Shana. Elle reprit sa respiration. Je pris les verres et la laissai passer devant, mes manières reprenant le dessus. Je l'attraperai ce soir. Hors de question qu'elle me file encore entre les pattes. Si je n'apaisais pas mon loup, la prochaine semaine serait juste affreuse et je deviendrais mauvais. J'étais sûr que la louve de Shana était dans le même état.
Shana me tint la porte et nous échangeâmes un long regard où nos loups s'observaient eux aussi. Elle détourna son visage en première et je déposai les verres sur le haut des marches, m'installant sur la première, appuyé contre la rambarde. Shana dut s'asseoir juste en face de moi et je souris. Elle me fusilla du regard, mais ses joues étaient chaudes et je pouvais sentir d'ici les demandes de sa louve. Elle voulait que je la touche. Elle voulait ce réconfort que toutes les louves voulaient. Dont toutes les louves avaient besoin.
Quelle soit dite « dominante » ou non, toutes les louves avaient les mêmes besoins.
J'étais un mâle. Mon loup voulait absolument prendre soin des besoins de la louve de Shana. Tant que ça en restait à ça, je n'interviendrais pas, ayant moi aussi en tant qu'homme des besoins. Tout comme Shana devait en avoir. Mais j'étais aussi attiré par sa puissance. Je ne pouvais que l'avouer.
_ On va bien voir qui tiens l'alcool ce soir, ricana Jalil en versant cinq verres de tequila.
_ Il y a d'autres bouteilles à la cave, fit Joaquim en buvant son premier shooter d'un coup. Je vais aller les chercher je pense.
_ Alcoolique, se moqua Zoran en buvant à son tour.
Shana prit son petit verre en même temps que moi.
Avec une lueur de défi, nous bûmes tous les deux notre tequila.
Et la soirée se fit à ce rythme là. La tension montant encore et encore entre nous.
Habituellement, je ne buvais pas. Mais j'avais vraiment besoin d'oublier un peu la tension qui m'habitait. Et qui faisait péter un plomb à mon loup. En sachant que j'étais en terrain passablement allié, je bus sans trop me poser de question. Je savais que grâce à Hermès, j'avais un taux élevé de tolérance à l'alcool.
Les rires grimpèrent dans notre groupe alors que Jalil avait lancé un jeu. Shana se fit avoir et c'est avec des regards soutenus qu'elle buvait ces gorgées. A la quatrième bouteille de tequila entamée, Shana rendit les armes. Alors que Jalil et les deux autres zozo ricanaient, je me levais avant Shana, lui tendant ma main.
_ Tu as vraiment des manières au mauvais moment, remarqua-t-elle alors que je lui tenais la porte.
Elle entra et mon loup ne put s'empêcher de la suivre. Elle jeta un coup d'œil au canapé.
_ Tu n'as donc aucun lit ? Murmurai-je en frôlant sa nuque de mes doigts.
Elle pivota brusquement et voulut frapper dans ma main, qu'elle loupa.
_ Va donc dormir, souffla-t-elle.
_ Je suis moins saoul que tu ne l'es, grondai-je non loin de sa bouche.
_ Tu es un connard, murmura-t-elle. C'est tout ce que je sais...
_ Ah oui ? Souriais-je.
Elle hocha la tête.
_ Et un idiot. Et... tu tapes bien trop fort... Et... sexy... malheureusement... Et...
Mon sourire allait devenir trop grand pour ma bouche. Sexy hein ? Elle tapota mon torse de son doigt.
_ Tu ne devrais pas être aussi sexy, ajouta-t-elle.
Bon sang... était-ce l'alcool qui rendait son contact si chaud ou... Elle poussa un cri quand je la fis basculer sur mes épaules. Elle ne put s'empêcher de glousser.
_ Pose-moi ! Espèce de connard sexy !
_ Chut, soufflai-je. Les enfants dorment...
Elle posa sa main sur sa bouche, pouffant entre ses doigts. Je poussai la porte de ma chambre. Je la lâchai, mais elle tangua sur ses pieds. Je la rattrapai alors qu'elle voulait poser ses fesses sur le lit tout en visant le sol. Bon sang... quel état...
Je l'allongeai sur le lit en poussant un grognement. Elle me frappa à l'épaule.
_ Hey ! Gronda-t-elle. Je ne suis pas grosse à ce point !
Je m'agenouillai à côté de mon lit en ricanant. Elle me tapa sur la tête. J'agrippai son poignet. Elle me regarda avec de grands yeux, les battements de son cœur toujours aussi bons à entendre quand ils s'accéléraient. Grimpant en puissance.
_ On ne tape pas, marmonnai-je.
Ma prise sur son poignet était douce. Elle roula sur le côté, fronçant ses sourcils. Sa main se posa sur ma joue, mes doigts toujours sur sa peau. Je me figeai alors que mon loup tentait de lutter. Je n'allais pas faire ce qu'il voulait alors que Shana était à moitié saoule. J'avais encore de l'estime.
Et trop de respect pour elle...
Si j'étais un vrai connard la plupart du temps, c'était aussi parce que je devais faire mon job. Et que c'était le seul moyen pour que tout le monde m'écoute.
_ Je crois... murmura-t-elle, que tu as envie de moi...
Je souris et tapai son nez doucement.
_ Tout comme tu as envie de moi, louve, grondai-je en retirant sa main de ma joue. Mais tu es bien trop saoule pour que je touche ton joli corps.
Elle rougit un instant avant de marmonner quelque chose en espagnol. Elle roula sur le dos et je me redressai, tanguant légèrement. Je lui virai ses chaussures et son short. Elle replia ses jambes en frissonnant un peu. Je frôlai sa cheville et tout son corps eut un long frisson. J'embrassai son genou. Elle posa sa main dans mes cheveux. Je frottai mon nez contre sa cuisse. Elle gémit doucement. Je tirai le drap sur ses jambes, ôtant la vue de sa peau nue à mes yeux baladeurs. Elle rouvrit ses yeux brillants sur moi et gronda doucement.
_ J'aurais pu t'apprécier dans une autre vie, admit-elle en frôlant ma mâchoire.
Je souris. Sûrement que dans une autre vie nos chemins auraient pu se croiser d'une manière différente.
_ Tu te contenteras de subir mes coups dans celle-là, grognai-je.
Elle rit doucement et hocha la tête. Elle tira sur sa chemise et me la lança en pleine figure.
_ Ça c'est pour m'avoir titillé et ne rien prévoir par la suite, marmonna-t-elle.
Elle me dévoila son soutien-gorge qui rehaussait ses seins de manière très attirante. Ils étaient légèrement bombés, offert à ma bouche. A mes mains. Jamais le corps d'une femme ne m'avait à ce point attiré.
Je pressai la chemise contre mes narines et inspirai son odeur à fond.
Tellement envoûtante.
_ Ça démange, chaton? Me moquai-je.
Elle tenta de me frapper, mais j'attrapai son poignet, trop lente qu'elle était.
Nos regards s'accrochèrent et ne se lâchèrent pas.
_ Je t'ai mis à terre aujourd'hui, souffla-t-elle. Je pourrais être récompensée.
Je souris et secouai doucement la tête. Shana était bavarde quand elle avait un coup dans le nez. C'était... mignon.
_ Et quelle devrait être cette récompense ? Rétorquai-je en frôlant son bras, que je tenais, de mes lèvres.
_ Tu es un gars intelligent, soupira-t-elle en baillant, trouve quelque chose...
Je posai son bras sur le lit. Mon loup aurait aimé la faire tourner sur son autre flanc et se presser contre son dos. Se presser contre elle et se réchauffer dans sa chaleur si belle et si douce.
_ Un baiser serait-il une récompense assez bonne pour toi, louve ? Grondai-je en m'asseyant à ses côtés sur le lit.
_ Tu ne sais pas embrasser, rétorqua-t-elle en ricanant.
Je me penchai sur elle et elle se figea. Je haussai un sourcil.
_ On verra ça, remarquai-je en souriant à mon tour.
Elle voulut repousser mon visage de sa main, mais soupira et ferma ses yeux. Je me penchai sur elle et frôlai son nez de mes lèvres.
Bientôt, nous verrions si je savais embrasser.
Elle soupira d'aise et roula sur son flanc, prenant la position qu'elle avait dans le canapé.
Je restai quelques heures à l'observer je crois. Je ne savais plus. L'alcool avait dû me plomber le cerveau. Je n'arriverais pas à dormir dans le même lit qu'elle ce soir. Impossible. Même avec l'alcool, il voulait encore la toucher. Qu'elle nous touche. C'était bon, tellement bon.
Et cela faisait tellement longtemps... qu'une femme ne nous avait pas touché avec tendresse.
Que je n'avais pas accepté de tendresse de la part d'une femme... Ce n'était pas aussi facile que ça. Mon loup avait été solitaire et fixé sur la meute pendant trop longtemps. Il n'avait jamais trouvé de femme à sa hauteur. Il n'avait jamais vraiment apprécié les louves que nous avions eu. Aucune d'entre elles. La dernière qui avait demandé plus c'était vite retrouvé effrayé par mon loup moqueur et irritant. Mais la louve de Shana... elle avait les mêmes besoins que lui en ce moment. Avoir un loup plus puissant avec soit, c'était comme un attrait en plus. Un très gros attrait. Et elle pouvait se laisser aller, sa puissance était presque aussi forte que la mienne. Toutes les louves que j'avais eu dans ma vie étaient des soumises, puissantes, mais soumises. Elles m'avaient laissé faire. Et... quelque chose m'attirait dans le fait que Shana ne me laisserait pas faire. Elle n'écoutait mes ordres que sur le terrain d'entraînement. Autrement, elle se faisait un malin plaisir à ne rien laisser passer. Je détestai et j'aimais ça d'une drôle de façon. C'était étrange.
Trop étrange.
Hors de contrôle.
Mon loup grogna en sentant que je reculais face à tout ça. J'avais pensé que si je laissais aller mes pulsions de mâles, tout irait mieux. Tout se tasserait.
Mais je devais rester six mois ici. Six mois à côté de son corps fin et musclé. Six mois à côté de cette odeur que j'avais déjà mémorisée. Je ne pouvais pas me laisser aller maintenant. Je ne devais pas écouter mes simples instincts. Je n'avais jamais été comme ça.
Elle m'avait pris à mon propre jeu de séduction et j'étais en train d'en perdre complètement le contrôle.
Je m'écartai du lit, posant mon front sur mes genoux relevés.
J'étais un vieux loup.
J'avais ma meute.
Je ne devais pas m'amuser avec une simple louve.
Elle n'est pas simple.
Mon loup gronda doucement. Je secouai la tête et le fis reculer, le temps de pouvoir réfléchir.
Je contrôlai tout. Je contrôlai tous les aspects de ma vie, y compris ceux de mes loups. Je ne devais pas prendre de décision comme ça sur un coup de tête.
Une semaine que tout ce jeu durait et elle en prenait le contrôle chaque jour un peu plus.
Je secouai la tête et me levai. Je m'approchai de la fenêtre et l'ouvris. Je bondis et me réceptionnai doucement au sol. Je virai mon t-shirt et le balançai derrière moi. Je retirai mes chaussures. Je laissai mes pieds nus s'habituer au sol et me mis à courir vers l'enclos. Je trouvai rapidement Tyee. Sans le seler, je grimpai sur lui en sautant, m'accrochant à sa crinière. Mes talons frappèrent doucement ses flancs et il partit au trop.
Sentir les muscles de la bête bouger contre le mien était une sensation différente de toute celle que je pouvais connaître. C'était ne faire qu'un avec la bête. C'était devenir la bête.
Respirer comme elle.
Bouger comme elle.
Elle vous donnait l'impression de voler pendant un instant.
Je fis le tour du ranch, continuant le long des pâturages. Il faisait frais. Cela faisait du bien. Un très léger vent secouai mes cheveux. Je nous arrêtai dans un champ et m'allongeai. Tyee vint s'allonger à mes côtés, renâclant doucement. Je le caressai longuement, calmant mon esprit.
Rehaussant mes barrières.
Reprenant le contrôle.
Mon loup n'était pas contente, mais il ne comprenait pas. Il voyait en Shana une louve à qui il pourrait satisfaire ses besoins. Moi je voyais bien plus de choses et cela commençait à me faire reculer.
Ma dernière discussion avec Hermès sur le sujet avait suffit à faire ressortir des faiblesses chez moi. Eneko était le seul à savoir cette faiblesse. Shana aurait pu être la femme parfaite... Shana était la femme parfaite, mais elle me détestait. Et je n'étais pas sur de pouvoir lui donner ce qu'elle désirait.
Or, je savais que si je craquais une première fois avec elle... Je perdrais le contrôle et en aucun cas je ne voudrais le reprendre. Trouver une louve n'était absolument pas dans mes priorités.
Surtout pas une espèce d'Alpha qui avait une meute aussi déjantée qu'elle... Enfin. Pas totalement. Qu'est-ce que je pouvais être de mauvaise foi quand je m'y m'étais.
Reprendre le contrôle.
Quand Timothy viendrait, je lui demanderais de me laisser deux trois jours de vacances. Pour retourner vers les miens. Je ne l'avouerais jamais à voix haute : mais j'avais besoin de mes loups. Ils me donnaient tous une sécurité dont ils n'avaient aucun idée. Mais elle était là.
Je me redressai, l'oreille tendue. Le loup de Zoran sauta par-dessus le taillis et vint se frotter contre moi. Tyee renâcla, mais ne s'écarta, me faisant confiance pour le protéger. Mon loup grogna doucement et frotta sa joue contre celle de sa Main.
_ Rentrons, soufflai-je.
Il grogna et sauta une ou deux fois, émettant de petits bruits idiots. Il était saoul. Mais de façon étrange, Zoran arrivait à se transformer même en étant bourré. D'ailleurs, je savais qu'il pouvait tuer, même en étant bourré. Alors... Je grimpai de nouveau sur Tyee et frappa d'un coup sec ses flancs. Il partit au galop, reprenant le chemin de la maison.
Le lendemain matin, aux aurores, j'étais déjà en train de courir dans le ranch. Je n'étais même pas retourné dans ma chambre. J'avais grappillé quelques heures de sommeil dans le canapé, mais l'odeur de Shana était partout sur les coussins alors... JE secouai la tête.
Ne pas penser à elle en ces termes.
Ça n'aidait pas.
Ça n'aidait en rien !
Aux alentours de huit heures, je retournai vers la maison, en courant avec des grandes foulées. J'avais déjà le corps échauffé et la tension de mes muscles était supportable pour l'instant. Je l'aperçus sur les marches, une main sur les yeux. Zoran à ses côtés semblait dormir contre la rambarde. L'avait-il réveillée pour qu'elle ne soit pas en retard ? Il aurait pu cet idiot. Tout comme Joaquim d'ailleurs. Ces deux zozos pensaient que je ne les voyais pas aider Shana... Au moins, elle apprenait. C'était tout ce qu'il comptait.
Je ralentis le rythme en arrivant à la maison. Shana leva son regard vers moi. Elle s'était réveillée dans mon lit. Se souvenait-elle de ce qu'il s'était passé ? De ma douceur ? J'espérais que non. Elle ne verrait rien de plus. J'avais remis toutes les barrières qu'elle avait déplacées doucement malgré elle avec ses mimiques, son corps et ses sourires. J'attrapai la serviette qui m'attendait sur la rambarde alors que la chaleur grimpait.
Je ne dis rien et Shana non plus. Elle pinça les lèvres alors que je buvais la moitié d'une bouteille d'eau d'un coup. Je claquai des doigts. Elle gronda et Zoran ricana.
_ Bonjour, peut être, remarqua-t-elle en me suivant sur l'herbe qui était devenue notre terrain d'entraînement.
Je ne répondis rien et l'attaquai de front. Elle n'esquiva qu'un seul de mes coups et se retrouva à terre, les yeux écarquillés. Elle se releva en bondissant sur ses pieds, fronçant les sourcils. Je lui fis signe d'approcher. Elle s'exécuta.
Sans un mot de la matinée, je la mis à terre encore et encore. Plus méchamment que d'habitude. Ne prodiguant aucun conseil. Je voulais qu'elle me déteste de nouveau. Qu'elle ne croit pas que j'allais devenir doux et calme juste parce qu'il y avait eu un moment de faiblesse l'autre soir. Alors que le soleil touchait bientôt le sommet de sa course, je la plaquai au sol une dernière fois, ne m'attardant pas contre elle. Mon loup était muselé si profondément, que j'utilisais simplement mais efficacement mes capacités humaines. Plusieurs fois, la louve de Shana avait tenté d'émerger, mais la jeune femme ne l'avait pas laissée faire. Alors que je grognai un terminé, j'allais reprendre ma serviette et m'essuyai le visage. Bizarrement, Shana suivit mon comportement et ne parla pas. Jusqu'à ce qu'Hadrien, le troisième Dominant n'arrive.
Il devait être un peu plus de 16h et la chaleur était encore prégnante, m'étant à mal les caractères de tout le monde. Shana était assise dans l'herbe, à l'ombre d'un arbre. J'attendais debout de pied ferme, des légers rayons de soleil passaient à travers les arbres. Hadrien nous rejoint, légèrement stressé et inquiet. Et il pouvait l'être. Shana se leva et vint se poster non loin de moi, mais trop en retrait. J'observai attentivement le comportement d'Hadrien. Il eut un léger temps d'arrêt devant nous, mais prenant sur lui, il se dirigea d'abord vers Shana et lui tendit sa nuque à regret. Elle le frôla de ses doigts rapidement, mal à l'aise elle aussi. Hadrien se redressa et imita le geste avec moi. Je le saluai à mon tour. Il recula de quelques pas, nous ayant tous les deux dans notre champ de vision.
_ Avant tout, commençai-je d'une voix sombre, j'aimerais me battre contre toi. Ensuite, tu te battras contre Shana.
Je sentis le regard de surprise de la louve à mes côtés. Hadrien eut un léger sourire. Connard. Il pensait qu'il allait pouvoir la mettre au sol dès qu'il la toucherait. Il n'y avait que moi qui avais ce privilège. Et il allait le comprendre. En une semaine, elle avait fait des progrès. En même temps, elle avait intérêt sinon... J'aperçus Kerann et Jalil étaient appuyés contre la rambarde. Alessandro travaillait je crois. Joaquim et Zoran eux étaient assis juste devant la maison, sur l'herbe, attendant sagement. Voir que tout le monde allait écouter était peut être gênant pour Hadrien, comme pour Shana. Alors je soupirai et me tournai vers Zoran, lui passant le message d'un simple regard. Il fit bouger tout le monde et bientôt dehors, il n'y eut plus que nous trois.
_ Il s'agit d'un entraînement, remarquai-je. Montre-moi ce que tu sais faire.
Hadrien retira son t-shirt et le balança un peu plus loin. Shana s'écarta, se retenant de faire un commentaire. J'étais déjà échauffé, mais lui non. Il ne tira pas trop au début, et quand il fut échauffé à son tour, il attaqua vraiment. Il avait un peu les mêmes mouvements que Jalil, mais si ce dernier était plus gracieux qu'Hadrien dans ces gestes. Seulement, il n'avait pas la faculté de Kerann à changer efficacement de tactique si l'une ne marchait pas. Ce que je déplorais pour un Dominant. Il faudrait que je travaille ça avec lui. Je le mis à terre quelques minutes plus tard. Il grogna et se redressa.
Je pivotai vers Shana.
_ A la fin des six mois, remarquai-je froidement, tu devras être capable de battre n'importe lequel de tes hauts-gradés. Joaquim ne faisant pas partie de l'équation. Il sera celui qui t'entraînera après mon départ. Tout comme tu devras te tenir au courant des dernières techniques de combats pour t'améliorer.
Elle hocha la tête. Je lui fis signe d'avancer.
_ Allez-y, lançai-je en m'écartant légèrement.
Shana encaissa les coups d'Hadrien. Et évidemment, elle garda la technique. Elle l'épuisa sans qu'il le remarque, gardant son rythme à elle, gardant ses forces. Elle ne faisait qu'esquiver ou encaisser. Elle frappait une ou deux fois, mais ne se fatiguait jamais. Alors qu'Hadrien commençait à suer en essayant de l'atteindre plus violemment, elle balança son pied. Hadrien se le prit en plein mâchoire et il bascula en arrière, le cul par terre.
Pas mal du tout. Mon loup tenta de bouger, mais je le retins. Toujours refoulé le plus loin possible. Hadrien se redressa et souffla bruyamment.
_ Encore, soufflai-je.
Shana me jeta un coup d'œil interloqué, mais obéit. Elle retenta la même technique, mais Hadrien n'était pas bête et frappa plus violemment. Ce qui perturba le rythme de Shana. Elle se mit à frapper à son tour, amis ces coups étaient encore trop timides, pas assez puissants. J'allais devoir lui faire faire des exercices de musculations. Qu'elle prenne en force. A aucun moment elle n'utilisa sa louve pour soumettre Hadrien. Pas même quand son troisième Dominant l'a mis à terre. Ce qui m'ennuya. Croyait-elle qu'elle n'avait pas le droit ? Ou ne le voulait-elle simplement pas ?
J'arrêtai le combat quand les regards entre Shana et Hadrien se firent plus méchants. Je me mis entre les deux, repoussant doucement Hadrien dans son coin. La colère qui l'habitait était étrange.
_ Que reproches-tu à ton Alpha, Hadrien ? M'enquis-je en penchant la tête.
Il regarda Shana par-dessus mon épaule. Elle soufflait bruyamment dans mon dos.
_ C'est une femme. Elle n'a pas à être l'Alpha.
_ Veux-tu que je t'emmène voir Nora Baker ? Soufflai-je. Ou Aria Yvarez ? Veux-tu te mesures à ces femmes ?
Il me regarda, grognant doucement.
_ Tu ne peux pas la détester simplement parce que c'est une femme en haut de la hiérarchie, remarquai-je.
_ Bien sur que si, gronda Shana.
Je levai une main pour qu'elle se taise, sans la regarder.
_ Que reproches-tu à ton Alpha ? Murmurai-je.
Il garda la bouche fermée.
Ils me cachaient quelque chose. Enfin, pas vraiment vu que je me doutais comment Yago était mort.
_ Je suis une femme, voilà. Son ego en prend un coup.
Le regard d'Hadrien brilla en sa présence.
Je pivotai lentement vers Shana. Elle était crispée, les poings serrés. Je m'approchai d'elle et elle soutint mon regard vibrant de colère.
_ T'ai-je posé une question ? Murmurai-je.
_ Non.
_T'ai-je posé une question ? Insistai-je, froid et distant.
_ Non ! Rétorqua-t-elle véhémente.
_ Alors pourquoi est-ce que j'entends ta voix ? Crachai-je.
Elle se mordit la lèvre si fort qu'une perle de sang glissa. Je pivotai de nouveau vers Hadrien.
_ Que reproches-tu à ton Alpha ? Repris-je.
_ Ce n'est pas sa place, souffla Hadrien.
_ Que reproches-tu à ton Alpha ? Grondai-je.
_ Il te l'a dit ! Fit Shana, énervé.
Ne pouvait-elle pas se taire bon sang ?
_ Que reproches-tu à ton... Alpha ? Soufflai-je en m'approchant nez à nez avec lui.
_ Ce n'est pas sa place, murmura Hadrien en regardant mon torse plus que mon visage.
_ Enfin une preuve de loyauté, ricanai-je. Va t'en...
Hadrien ne se le fit pas dire deux fois et décampa. Kerann était sorti sur la terrasse. Je pivotai vers Shana qui faisait les cents pas. Je m'approchai d'elle et agrippai son bras pour la faire pivoter vers moi.
_ Empêche-moi encore une fois de faire mon travail, crachai-je, et je te jure que je te laisse dans ta merde...
Elle blêmit légèrement face à ma colère. Je la relâchai abruptement. Elle recula d'un pas. Elle ou un autre avait ordonné de ne rien dire à propos de la mort de Yago. Et je savais, j'en étais persuadé, que c'était en rapport avec sa mort. Une preuve de loyauté qui aurait dû me faire rire, mais qui au fond, me montrait que la meute n'était pas totalement perdue. C'est ce qui lui valait l'animosité de deux de ses Dominants de son lieutenant.
Le lendemain, ce fut Jamie qui vint. Ce fut le même refrain qu'Hadrien. Il avait aussi certaines faiblesses au niveau des techniques de combat que je redresserais plus tard dans les prochains mois. Shana refit le même speech qu'avec Hadrien et je faillis la foutre à terre pour ça. Sauf que Zoran se mit entre elle et moi, me soufflant que ça ne valait pas le coup. Shana avait renvoyé Jamie sans se faire prier. Si l'avoir avec moi lors de ses entretiens m'avait paru être une bonne idée, à présent, cela devenait un cauchemar. Je décidai de repousser les autres pour la semaine prochaine.
Au fil de la troisième semaine qui passa, la tension devint presque ingérable. J'étais mauvais avec Shana, méchant et presque vicieux. En plus des entraînements le matin, je lui avais rajouté à la période la plus chaude la journée, des étirements et de la musculation. Zoran s'en occupait l'après-midi. Je me chargeai simplement de la matinée. Et puis, elle devait aussi travaillé pour le ranch.
Le problème étant que sans les entretiens, Shana était moins énervée et semblait tenter de comprendre pourquoi j'étais redevenu froid. Ses petites manigances comme me frôler dans la cuisine, ou sortir de la salle de bain la chemise encore ouverte, ou encore d'autres gestes qui faisaient remonter mon loup à chaque fois, étaient de plus en plus durs à supporter. J'étais presque sur les rotules quand le samedi arriva. J'avais laissé sa journée à Shana, étant certain que j'allais craquer aujourd'hui. En mal. Surtout en mal. Sa louve était de plus en plus en demande de caresses et mon Alpha était mis à mal par ça surtout. Car je l'empêchai de la toucher.
La journée était affreusement chaude et tout le monde marchait au ralentit. Jade revint des courses en fin d'après-midi et proposa un barbecue. Ça revigora tout le monde à mon grand étonnement. Eneko m'avait appelé pour me demander quand est-ce que je passerais les voir. Certaines louves présentaient des manques avec la pleine lune qui arrivait et les loups devenaient presque fous pour certains. Eneko était en déplacement constant pour la bonne parole de Timothy, et Zoran avec moi. Je faisais confiance à mon lieutenant et à mon sous-lieutenant. Même à Anya. Mais ils n'allaient pas tous tenir pendant six mois de cette façon. J'allais redresser une meute d'un côté, mais plongé la mienne de l'autre.
Je somnolai dans mon lit quand on frappa à ma porte. Je n'avais que très peu parler à Shana lors de cette fin de semaine et je l'évitais un peu comme la peste. Son odeur à elle suffisait à mettre mon loup dans un état d'excitation proche de la folie. Soit elle faisait inconsciemment les gestes qui me perturbaient. Soit consciemment. Même si je me doutais que sa louve recherchait ma puissance.
_ Yan ! S'amusa Luisa en sautant sur mon torse. Viens viens ! On a plein à manger en bas ! Papa va faire le barbecue !
_ J'arrive, grognai-je en la chatouillant.
Elle éclata de rire et s'enfuit en courant. Je me redressai et frottai mes cheveux. Mon loup était dans un état affreux de stress, de tension et d'excitation. Même la course. Même les balades à cheval ne le détendaient pas. Et aller courir sous sa forme... C'était presque mission impossible. Il irait voir Shana directement. Nous avions d'ailleurs croiser sa louve une nuit dans la forêt. Mon loup était resté en retrait bizarrement, observant le comportement de sa proie. Cela m'avait suffi pour ne pas retenter l'expérience. Il aurait pu lui courir après et... faire ce que deux animaux en rut font en général en pleine nuit dans une forêt...
Je secouai la tête.
Tellement difficile d'avoir le contrôle quand tout vous rappelait la personne qui vous le volait.
J'allais prendre une douche froide. Cela me tendit encore plus.
Merde.
Je descendis en bas. Alessandro me fit signe d'aller chercher une bière dans le frigo. Tout le monde était réuni sur la terrasse. Voir même plus qu'habituellement. Je fis un signe rapide avant de me diriger vers la cuisine. J'ouvris le frigo et attrapai une bière. Alors que je me reculai pour la fermer, on la ferma à ma place.
Je me figeai en voyant Shana s'appuyer contre la porte du frigo. Elle portait une belle robe blanche avec me semblait-il une légère dentelle par-dessus qui portaient de beau motif. Sa peau hâlée était mise en valeur. Elle portait des petites sandales blanches elle aussi. La ceinture renforçait l'effet de sa taille mince.
_ Je pense qu'on devrait communiquer, souffla-t-elle.
Je serrai légèrement ma bière. Elle avait mis du parfum. Bon sang... Du parfum sucré... Elle n'avait pas pu savoir. Même Zoran ne le savait pas. Mon loup, après tant de jours passer loin d'elle et refoulé au creux de mon esprit, tourna la tête vers elle. Elle retint son souffle alors qu'elle devait lire la tension dans mes épaules. Le désir dans mon regard.
Je repris le contrôle en prenant une longue inspiration et fermai les yeux.
_ Jahyan, murmura-t-elle.
_ Pas besoin, grognai-je.
Ma voix était rauque. Rauque de plaisir. Cette robe. Cette robe était de trop. Je l'avais déjà vu presque nue, mais bon sang... ce n'était pas pareil que m'imaginer lui retirer cette foutue robe. Sa main voulue me frôler, mais je m'écartai d'un pas.
_ Si, il y a besoin, reprit-elle en me suivant.
Son pas vers moi la rapprocha doucement vers moi. Son odeur grimpa de nouveau dans mes narines.
_ J'aimerais m'excuser pour mon comportement en début de semaine, remarqua-t-elle sa main posée sur le plan de travail, non loin de ma hanche.
_ Exerce toi au lieu de me présenter des excuses inutiles, dis-je en lui lançant un regard légèrement noir.
Elle ne s'arrêta pas à ça et s'approcha.
Elle savait. Dans son regard je le savais.
Elle voyait que je craquais.
Merde.
Non !
_ Je ne me souviens pas de tout, murmura-t-elle en faisant un autre pas.
Je ne pus reculer. Ce serait trop me dévoiler. Sa main frôla mon bras.
_ Je.. n'ai que des brides, ajouta-t-elle.
Je retins mon souffle alors qu'elle se positionnait devant moi. Sa louve brillait doucement à travers ses yeux. La pleine lune était dans une semaine. Je pouvais sentir le besoin qu'elle avait que je la touche. Mais si je la touchai... Bon sang, même en étant vieux et maniaque, je n'étais pas sur de pouvoir m'arrêter.
Si elle me le demandait... bon sang... qui étais-je pour lui refuser ?
C'était une louve. Une louve puissante.
Qui m'attirait alors qu'elle aurait dû rester dans la case paysanne.
_ Mais je me souviens d'une chose, souffla-t-elle, c'est que tu avais envie de...
Je la plaquai contre le frigo, mon corps pressant le sien, ma main sur sa gorge, légère douce. Mon geste avait été brutal, mais ma prise restait calme.
_ Ne joue pas avec moi, chaton, grognai-je en frôlant sa gorge de mes lèvres.
Cette odeur... Cette odeur était aphrodisiaque. Mon sexe était douloureux. Je bandai déjà à moitié.
Putain.
Je perdais le contrôle. L'alarme sonnait alors que ses mains glissaient contre ma nuque.
_ Jahyan, haleta-t-elle.
Mon pouce glissa contre sa gorge, puis sur son menton et sur sa bouche.
Mon front était pressé contre le sien.
Il fallait que je recule.
Que sa louve arrête d'appeler mon loup.
Elle frôla ma bouche de la sienne alors que je gémissais.
Mon autre main se referma sur sa nuque.
Un raclement de gorge nous figea tous les deux.
_ Patron, s'excusa Zoran, Timothy est là.
Le souffle court, je tournai mon regard le plus sombre vers ma Main.
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