3. Jahyan
Corrigé
Quelqu'un me secouait. Qui pouvait bien s'amuser à ça alors que je savais à peine épeler mon prénom ? J'avais la tête dans le coussin, la joue presque enfoncée dedans. Je crois que Zoran nous avait trouvé un hôtel assez luxueux sur Ann Arbor, mais je ne savais pas. J'avais un gros trou de mémoire. Un trou gros comme un vortex bordel... Parfois, je détestai Hermès.
_ Alpha, souffla Zoran.
Sa main sur mon épaule. Je grognai et me redressai subitement. Ma tête vibra et je sentis mon ventre se contracter. Je toussai un instant et m'assis dans le lit, pressant mes paupières.
_ Bon sang, grondai-je.
Je clignai des yeux plusieurs fois à la suite, essayant de m'habituer à la luminosité. Merde alors. Hermès avait mis la dose, sauf qu'il était plus habitué que moi à ce genre de choses. Je ne buvais de l'alcool à foison comme ça qu'en sa présence.
_ Aller Jahyan ! Tu n'es pas un lâche ! s'écria Hermès.
Il entrechoqua son verre avec le mien et c'est cul sec que nous le terminâmes. Nos rires résonnèrent dans le bar alors que les autres personnes nous observaient avec des sourires et des grands yeux. Je crois que c'était le verre de trop malheureusement. J'eus un haut-le-cœur. Il devait être plus de une heure du matin et on buvait depuis cinq heures de l'après-midi.
_ Tu sais que quand tu fais cette tête, on dirait que tu es un mort-vivant, ricana Hermès.
_ Ferme-la, vieille bique, grognai-je.
_ Tu vas me décevoir si tu vomis vieux crabe ! Retiens-toi ou je vais penser que tu t'es ramolli !!
Et il me tendit un autre shot. Bon sang...
J'observai le verre d'alcool que me tendait ma Main et je le fusillai du regard.
_ Pour faire passer la nausée, remarqua-t-il.
Je secouai la tête un instant, mais pris quand même le verre. Je le bus d'un coup sec et laissai échapper un gémissement de dégoût.
_ Merde, crachai-je.
_ Ça marche ?
Je clignai des yeux, l'alcool avait réchauffé mon intestin et remit la nausée en bas. Ça arrachait les boyaux, mais c'était une bonne solution visiblement. Je soufflai bruyamment et balançai mes jambes en dehors du lit. J'étais en caleçon et je ne me souvenais absolument pas comment j'étais arrivé ici... Heureusement que Zoran était avec moi tien.
_ Alors ? grognai-je. Comment étais-je ?
_ En première partie de soirée, plutôt joyeux, et puis Hermès a déprimé, donc vous l'avez suivi.
_ De l'auto-apitoiement hein ? marmonnai-je. C'est bien notre genre quand on est bourré.
Hermès avait posé sa tête sur la table alors que je l'avais rejeté sur la banquette. Nous étions dans un de ces états, mais je n'arrivais pas trop à le penser sincèrement. Ce genre de cuite n'arrivait qu'une fois toutes les décennies donc je devrais survivre. Comme d'habitude.
_ Ça ne te manque pas des fois ? souffla Hermès.
Je fronçai les sourcils, mais mon loup, même à moitié anesthésié compris Hermès.
_ Parfois, murmura-t-il. Pendant les moments de solitude...
Hermès hocha la tête.
_ Tu crois qu'on trouvera quelqu'un... un jour ? souffla-t-il. Où sommes-nous voués à nous retrouver tous les dix ans pour se prendre une murge ?
_ Je ne peux pas prendre une femme Hermès, soupira mon loup.
J'étais ailleurs, pensant à tout ce qui avait pu m'échapper dans ma vie de loup. Il arrivait un moment où on pouvait remettre tout en question. Ce soir était un de ces moments. Comment se souviendrait-on de moi plus tard ? Quand je serais mort ? Manquerais-je à quelqu'un ?
_ Moi non plus, ricana-t-il. Mais je prendrai bien un beau brun... un sorcier. Je n'ai jamais vraiment testé les sorciers...
_ Ce Nazir te faisait de l'œil pourtant, remarquai-je.
Mon loup grogna un instant.
_ Tu sais bien que je suis conservateur, vieux crabe, soupira Hermès. Un loup ou rien du tout.
Je secouai doucement la tête.
_ Élargit ton champ de possibilité, vieille bique. Tu verras que ça fait du bien !
_ Ooooh ! Jahyan Gordon Aris Pearson ! s'écria Hermès. Où as-tu été fourré ta queue dis-moi ?!
J'éclatai de rire avant d'avoir un hoquet affreux. Je pris une longue inspiration et levai un doigt vers Hermès.
_ Nulle part depuis bien trop longtemps si tu veux tout savoir, grognai-je.
_ Je vois ça, se moqua Hermès.
_, Mais je me souviens de cette sorcière, succube je crois, Yuria, dis-je.
Et je partis dans mes souvenirs.
J'ouvris un œil sur Zoran qui ouvrait la porte de la chambre.
_ Il n'est pas prêt, remarqua-t-il à la personne.
_ Pas besoin qu'il le soit, fit Timothy en repoussant doucement ma Main.
Je fusillai le Gardien du regard. Il tenait une enveloppe dans ses mains. Il tira une petite carte de sa poche arrière. Il posa l'enveloppe sur le bureau, et la carte dessus. Il s'approcha de moi, ne s'agenouilla même pas pour se mettre à ma hauteur.
_ La réunion commence dans une heure, souffla-t-il. Enfile des vêtements.
_ Je ne viendrais pas, grondai-je.
Son visage devint neutre.
_ Tu ne m'as pas laissé le choix, Jahyan, soupira Timothy. Dans une heure. Sois ponctuel.
Je grognai et me levai pour lui dire deux mots d'homme à homme, mais il partait déjà. Je tanguai un peu, mais réussis à m'approcher du bureau. Je pris la carte et lus ce qu'il y avait dessus.
Tu ne m'as pas laissé le choix.
Une dette est une dette.
À ton tour d'en payer le prix.
Le souffle court, je frappai le bureau sur lequel étaient posés les papiers.
_ Dehors ! crachai-je à Zoran. Dehors !
Ma Main ne se le fit pas dire deux fois et sortit. Je déchirai la carte et jetai les morceaux par terre. Les mains tremblantes, j'ouvris l'enveloppe. Il y avait un compte au nom d'une jeune fille. Il y avait des bulletins scolaires. Je secouai la tête, grondant. Il y avait aussi la participation de Maël. Il y avait une photo de la jeune femme à présent. Elle était le portrait craché de son père.
Je fulminai littéralement. Je pivotai et m'approchai de la table qui se trouvait au milieu de la chambre. Mon pied la fit décoller contre le mur. Je hurlai de rage.
Les poings crispés le long de mon corps, les mâchoires à la limite de se rompre, je pivotai de nouveau vers les papiers. Je tombai à genoux devant le bureau.
Parfois, le poids des années remontait.
Parfois, les actes commis remontaient à la surface.
Eneko attendait dehors. J'étais celui qui était resté avec Milie. Elle n'était pas la compagne d'Eneko. Elle était sa femme cependant. Ils s'étaient mariés sans mon approbation. Avaient failli se lier sans mon approbation. Milie n'était pas faite pour Eneko. Jamais elle ne le serait et pourtant, elle avait accouché d'une petite fille. Elle pleurait doucement, pressant sa fille contre elle.
_ Je peux la garder, soufflait-elle. Jahyan, je t'en prie...
_ Il est temps, murmurai-je.
Je m'approchai d'elle et tendis mes bras. Elle secoua la tête, des larmes coulant sur ses joues.
_ Donne-la-moi maintenant, soufflai-je.
_ Elle sera heureuse ? chuchota Milie. Elle le sera, n'est-ce pas ?
_ Elle ne manquera de rien, dis-je.
Elle desserra la prise sur sa fille. Ce petit nourrisson.
_ Elle aura des parents ? Ne la laisse pas seule Jahyan... s'il te plaît...
_ Elle aura des parents aimants, dis-je.
J'aurais dû la tuer. J'aurais dû simplement prendre la petite et la tuer. Elle n'était pas prévue. Elle n'aurait jamais dû naître. Je sortis de la pièce, les cris et les pleurs de Milie dans mon dos. Je déposai la petite dans un couffin que l'infirmière tenait. Elle aussi j'avais dû acheter son silence.
_ Je reviens, dis-je.
Je rejoignis Eneko dehors. Il était assis sur un banc, regardant le sol, se tenant la tête à deux mains. En m'entendant, il bondit sur ses pieds. Mais son visage se ferma immédiatement en voyant le mien. Il savait ce qui devait être fait.
_ Je ne veux pas la voir, souffla-t-il. Occupe-toi d'elle. Ne la tue pas Jahyan. Elle n'a rien demandé.
_ Devrais-je te tuer toi à la place ? murmurai-je, la voix froide et sombre.
_ Tu as marqué ton point, fit Eneko. S'il te plaît... ne la tue pas, c'est la seule chose que je demande.
Je hochai la tête.
_ Rentre, ordonnai-je. Je m'occupe de la suite.
_ Et Milie ? souffla-t-il.
Son loup parlait. Ses yeux brillaient. C'était sa femme que je lui enlevais. C'était sa fille que je lui enlevais. Pour toujours. Et à jamais.
_ Elle va bien, dis-je. Rentre, Eneko.
Son regard trahit sa demande et je secouai négativement la tête.
Non.
Il ne la reverrait pas.
Jamais.
Je desserrai ma prise sur mes cheveux. Maël. Maël m'avait aidé à la prendre en charge. Il lui avait trouvé une famille. J'étais simplement un donateur anonyme. Je payai ses études, je payais tous ses frais de santé et autre. Je savais qu'elle avait eu un appareil dentaire. Qu'elle avait eu même des lunettes pendant un temps et qu'elle avait mis des lentilles après, pour simplement tout abandonné quand elle s'était transformé pour la première fois, sa louve guérissant tous ses petits problèmes.
Cette jeune femme sur la photo.
Cette jeune femme était la vraie héritière d'Eneko.
Ma vraie héritière.
Et je l'avais envoyé au loin.
J'avais fait en sorte de suivre le plan concernant Eneko.
Milie était faible. Bien trop faible et soumise. Alors, j'avais rompu tout lien entre eux.
A jamais.
Je frémis un instant avant de secouer la tête.
Rien de tout ça ne devait arriver aux oreilles d'Eneko. Ou de Louna. Louna ne savait rien. Eneko savait juste que la petite était en vie quelque part sur la planète.
Maël aurait dû être une tombe. Et il avait tout balancé.
Si je croisais ce fils de pute...
Tu as voulu jouer, grogna mon loup. Voilà où tu en es. Accepte ta défaite. Pour Eneko. Pour son loup.
Je frappai le sol de mon poing, grognant.
Je pris une longue inspiration et me redressai, tanguant légèrement à cause de l'accès de colère mélangé à l'alcool. Je secouai la tête un instant et rangeai rapidement les papiers dans une enveloppe. Je fourrai l'enveloppe dans un de mes sacs et pris des fringues. Je pris une douche, mais je savais que je sentais encore légèrement l'alcool. J'enfilai des vêtements et sortis de la chambre.
Maël tenait la petite dans ses bras. Il allait la déposer dans une meute, dans une famille qui ne pouvait pas avoir d'enfants. Il m'avait décrit la famille et j'avais accepté. J'avais accepté d'abandonner la fille d'Eneko. J'avais moi-même brisé le couple qu'Eneko et Milie formaient. Je le porterai à jamais sur ma conscience.
_ Je ne veux aucun nom, murmurai-je. Seulement des chiffres.
_ Tu passeras par moi, souffla Maël. Les virements seront automatiques.
_ Que la famille ne sache jamais d'où elle vient. Invente l'histoire qu'il te plaira.
_ Tu es sur de toi Jahyan ? fit Maël en déposant la petite dans son couffin.
_ Je suis sûr, souffla mon loup.
Milie était trop faible. Elle ne ferait que déséquilibrer la meute. Je ne pouvais pas laisser ça arriver.
Et j'avais fait ce qui devait être fait à l'époque.
Chaque loup à sa manière de fonctionner.
Chaque meute à sa manière de fonctionner.
C'était un de mes principes.
Il est essentiel qu'un groupe soit en symbiose. Peu importe la manière dont il le fait, peu importe les règles qu'il impose.
Je ne devais jamais perde ce but essentiel dans ma vision des choses.
Être un loup signifie ne pas être seul.
Être un loup signifie être un groupe.
Être un Alpha signifie penser à sa meute avant.
Le bien de la meute. Le bien des loups.
Penser à son groupe.
Penser à son fonctionnement.
Penser à sa symbiose.
Il fallait agir pour le bien commun avant de penser à soi. Eneko l'avait compris.
Zoran l'avait compris.
Anya et Navid l'avaient compris.
Et moi ? Pensais-je au bien-être de mes loups ? Au cas par cas ?
Même si certaines règles sont injustes pour d'autres.
La vie est injuste. Il faut savoir se battre.
Zoran me suivit en silence. Il m'indiqua la chambre d'Hermès. J'ouvris la porte sans frapper. Wallace bondit sur ses pieds et fronça les sourcils.
_ Réveille-le. On nous attend, grondai-je.
Wallace hocha la tête. Je pris la direction de l'ascenseur. La descente me donna légèrement la nausée.
_ Tout va bien Alpha ? souffla Zoran.
_ Chut, grondai-je.
_ Tu saignes de la main, murmura Ma Main.
Je regardai mes jointures. Et merde. Mon loup me soigna comme il peut. Zoran me fila un mouchoir pour essuyer le sang. Nous prîmes le chemin du bar. Je restai sombre et silencieux. Mon loup avait raison. Pour rien au monde les choses ne devaient changer. Pour rien au monde Eneko ne devait voir ces photos, ou savoir où elle était. Louna n'accepterait pas ce genre d'annonce. Je le savais parce que je la connaissais, parce que je l'avais choisi pour Eneko. Elle ne digérerait jamais ça. Tout devait rester enterré. Même pour la gosse. Je pinçai l'arête de mon nez, tentant de rester calme. Timothy voulait que je paye cette dette. Je ne savais pas que demander un service au Gardien méritait contribution par la suite.
Tu l'as cherché ta contribution, cracha mon loup.
Je grognai. Clairement, je l'avais cherché. Alors, on allait écouter Timothy en silence. Repartir sans vague en espérant qu'il ne me demanderait rien d'extravagant. Et bon sang, s'il me demandait quelque chose, j'allais devoir m'exécuter. Autant me faire oublier. Autant qu'il oublie ce que j'avais fait.
Merde, merde et merde. Qu'est-ce qu'il pourrait bien me demander ? Il n'avait pas besoin de moi.
Pour quoi que ce soit.
Donc pourquoi ?
Pourquoi devoir payer une dette qui n'en était pas une ?
Et qui lui avait donné cette fâcheuse idée ?
Alors que j'ouvrais la porte du bar, je sus. Je sus qui lui avait donné cette brillante idée.
Quoi de mieux pour faire fermer son clapet à un vieux loup que de déterrer ses secrets ?
Maël releva son regard sur moi. Je serrai les dents. Il avait donné le nécessaire à Timothy. Il s'approcha de moi. La tension monta dans mon corps. Je ne voulais même pas le saluer. Mais malheureusement, l'étiquette me rattrapa et mon loup, contrôlant mon corps, me fit basculer en avant.
Maël frôla doucement ma nuque que je lui offrais avec le plus grand respect.
_ Tu m'avais promis que des chiffres, murmurai-je.
_ Et c'est ce que tu as eu durant ces deux cents dernières années, Jahyan, souffla Maël. Ne crois pas mon fils sans ressource. Ce serait te fourvoyer.
_ Je crois que c'est déjà fait, grondai-je.
_ Tu sais bien qu'un Gardien est au-dessus de toutes règles. Tu as bien cherché Timothy de ce que j'ai appris. Ne t'étonne pas que la colère d'un Gardien ne soit pas honorable.
Je fermai les yeux un instant.
Le visage de la jeune femme me hantait à présent. J'avais mis du temps à faire disparaître le visage de Milie, la douleur d'Eneko et les petits bruits du bébé. J'avais mis du temps bon sang...
_ Reste sage, souffla Maël. Sinon, tu vas t'en mordre les doigts. Et je détesterais devoir intervenir. Tu as déjà voulu jouer avec moi, Jahyan et tu sais que j'ai fait de ta vie un Enfer. Alors, cesse cela.
Je grondai doucement et le contournai. Je saluai Nohlan d'un signe de tête et m'assis au bar. J'entendais des voix dans la cuisine. Je reconnus la voix de Peython, ainsi que celle de Shana. Et même celle d'Alice.
_ Tu pues l'alcool, remarqua Nohlan, les yeux encore un peu plus gonflés que la veille.
_ Et toi tu ressembles à un cadavre ambulant.
_ Au moins, j'ai une bonne excuse, rétorqua-t-il.
Je hochai la tête.
_ Qu'est-ce que tu veux manger ?
_ N'importe, tant que c'est consistant pour un loup de ma taille.
Nohlan ricana. Zoran s'installa à mes côtés. Je sentais son impatience et son incompréhension pour ma réaction. Rien ne devait filtrer. J'avais enfermé la fille d'Eneko derrière mes plus grosses barrières. Il était hors de question que quelqu'un d'autre le sache. Timothy n'aurait jamais dû être au courant. Cela faisait une personne de trop.
Peython repoussa le rideau et sortit de la cuisine. Je descendis de mon tabouret et la saluai. Elle sourit doucement et tapota ma joue. Je restai froid en voyant Shana sortir. C'était de sa faute tout ça. Elle évita soigneusement mon regard. Alice la suivit, mais aussi une autre personne. Je reconnus Basile, qui portait un petit paquet contre lui.
_ Le petit Jamy se porte bien ? dis-je en m'inclinant légèrement face à l'Oracle qu'était Basile.
Il sourit et découvrit doucement le visage de son fils. La petite bouille me fit sourire malgré moi. Alice fit un signe de tête à Basile. Ce dernier me tendit son fils que je réceptionnai avec habitude.
Alice fronça son nez.
_ Tu sens l'alcool, remarqua-t-elle. Basile, reprends notre fils avant qu'il ne soit aussi alcoolisé que Jahyan.
Je fis la moue, mais rendais le petit à Basile. Ce dernier retenait un sourire. Il pressa son fils contre son torse et le petit émit quelques gazouillis. Je regardai du coin de l'œil Shana s'installer aux côtés de son sous-lieutenant. Mon loup l'observa et vit quelques détails qui l'amusèrent. Comme sa natte bien tressée sur le côté, sa chemise rouge qui faisait ressortir son côté hâlé. Je détournai mon regard alors qu'elle relevait le sien et me rassit à ma place, discutant un peu des joies de la paternité avec Basile. Nohlan me servit à manger et je réussis à terminer avant que la réunion n'arrive. Hermès n'était toujours pas arrivé. Il vomissait sûrement tripes et boyaux dans ses chiottes à l'hôtel. Zoran avait réussi à me piquer mes verres à un moment de la soirée. Alors que j'amenais moi-même mon assiette dans la cuisine, Alice apparut. Elle me donna un chewing-gum et tira sur les pans de ma chemise. Elle frotta de la poussière imaginaire sur mes épaules et posa ses mains sur mon torse.
_ S'il te plaît, souffla-t-elle, sois gentil.
_ Qu'est-ce que ça veut dire ce mot ? Je le connais ? me moquai-je alors qu'elle me faisait avancer vers la table.
Nous reprîmes nos places d'hier. Je croisai le regard de Timothy. Aucune pitié au fond de ses yeux. Il savait exactement ce qu'il faisait. Je croisai mes bras sur mon torse. Je regardai Basile s'approcher de moi, avec son fils. Je fronçai les sourcils alors qu'il me le déposait dans les bras. Je voyais pourquoi le chewing-gum maintenant. Alice me fit un clin d'œil, se pressant contre le torse de Basile en souriant malicieusement. Cette bonne femme... Je croisai le regard de Jamy. Vif et puissant. Il n'était pas un petit loup, mais un petit sorcier avec des parents très, très puissants. Il serait sûrement très intelligent et puissant. Je le berçai doucement, ayant eu l'habitude de prendre soin des enfants de Louna comme si c'était les miens.
_ Bien, nous allons commencer, fit Timothy.
La porte du bar s'ouvrit sur Hermès et Wallace. Hermès avait une de ces têtes.
_ Wallace, viens à côté de moi, murmurai-je.
Le pauvre Jamy allait sinon se prendre des échos d'alcools hallucinants.
_ Certains se sont bien amusés hier soir, remarqua Elena.
Je préférai me concentrer sur le petit. Wallace tira la chaise à son Alpha qui grogna. Hermès croisa mon regard et vit que quelque chose n'allait pas malgré le brouillard de l'alcool. Il hocha doucement la tête et croisa ses bras sur son torse, se fermant un peu. Je tendis mon doigt à Jamy qui le serra avec force.
Timothy démarra son discours, faisant fi des hoquets d'Hermès. Il nous parla du rôle que pouvaient avoir dans le temps les Alphas d'États. Ils s'étaient très bien renseignés le gosse dit donc.
En effet, au moment de la première élection des Alphas d'États, le Grand Rassemblement, avait conclu que nous serions ceux qui feraient respecter certaines lois universelles sur l'État que nous avions en charge. Au fil du temps, cette idée était passée à la trappe. Oublier par les plus jeunes Alphas arrivés bien après nous. Timothy voulait réinstaurer certaines lois universelles. Et il voulait réintroduire le pouvoir des Alphas d'États. Que nous ne soyons pas qu'une figure paternelle à qui présenter les enfants d'Alphas. En cas de problème majeur, il voulait que l'Alpha d'État soit présent sur le terrain. Sois présent pour la meute. Il ne pouvait pas passer voir tout le monde et cela avait porté préjudice longtemps à certaines meutes qui s'étaient permis de faire n'importe quoi avec leurs loups. Par ailleurs, il voulait que l'Alpha d'État, s'il en avait les moyens financiers, soit un pilier d'aide pour aider certaines meutes pauvres à repartir du bon pied.
La dernière demande était bien sur celle qui me faisait grincer des dents. Les humains avaient besoin d'une bonne image par rapport aux loups. Alors, nous devions devenir cette image. Nous les Alphas d'États. Nous montrer aux yeux des humains, véhiculer une image sérieuse, une fonction honorable. Ayant Jamy dans les bras, je ne pus protester comme il le fallait, mais de toute façon, je ne l'aurais pas fait. Jake posa quelques questions pratiques, pertinentes à mon goût. L'Alpha d'État devenait un financeur pour les autres meutes seulement s'ils en avaient les moyens. Il ne pouvait se mettre sur la paille pour les autres. Timothy concéda ce point et ajouta qu'il aiderait avec des fonds privés les meutes à se rétablir. Il voulait réinstaurer une égalité des chances au sein des meutes. Il voulait aussi que la sécurité quant aux chasseurs et aux mercenaires soit accrue et si possible surveiller de près par les Alphas d'État.
_ Nos loups doivent-ils tous se montrer au grand jour ? s'enquit Elena. Ou pouvons-nous prendre seul cette charge.
_ Pour commencer, expliqua Timothy, vous serez les seuls à vous montrer lors de conférence de presse. Vous et ceux de votre meute qui acceptent de se faire voir des journalistes évidemment.
Zoran grogna doucement.
_ Ma Main aimerait prendre la parole, remarquai-je en regardant l'intéressé.
Il me regarda un instant avec de grands yeux et secoua la tête.
_ J'aimerais juste faire remarquer que de par mon poste, je ne peux pas me permettre d'être connu de toute la terre. Par ailleurs, laisser mon Alpha se balader devant une foule d'humains compacte est une chose que je ne peux pas laisser sans être là.
_ Tu pourras toujours te fondre dans la masse si cela est nécessaire, remarqua Nanita, la Lieutenant d'Elena.
Sa voix était neutre, comme si elle énonçait un simple fait. Cette femme était mariée à Neal Phelps. Comment dire, c'était presque inimaginable pour moi. Mais visiblement c'était vrai.
_ Ça va quand il ne se passe rien, reprit Zoran.
_ Les gardes du corps humain font le même travail, fit Shana. Les photographes ne sont pas intéressés par les hommes de l'ombre.
Mon loup l'observa parler. Elle semblait moins expansive qu'hier. Et c'était sûrement ma faute. Je ne culpabilisais pas pour autant. Je lui avais dit exactement ce que je pensais : à elle de gérer la suite. Si elle ne pouvait pas accepter la vérité, que pourrait-elle accepter exactement ? Pas grand-chose. Elle devait se prendre en main avant de tenter de prendre plus d'une centaine de personne en main. L'analogie était peut-être mauvaise, mais gérer une meute était comme gérer une entreprise. Et quand on n'avait pas le caractère pour ça, autant abandonner.
_ Tout cela sera vu en temps et en heure, reprit Timothy. Par ailleurs, si aucun n'est volontaire, une alternative pourra être utilisée. Comme une vidéoconférence ou autre. Mon premier souci est que les Alphas d'États doivent reprendre les rondes au sein des meutes de leur État.
Je fermai les yeux et secouai doucement mes mains, tirant un petit bruit à Jamy.
_ C'est la seule chose qui a coulé le rôle d'Alpha d'État, dis-je d'une voix neutre. Et tu voudrais la remettre ?
_ Les meutes d'Alpha d'État ont au minimum un sous-lieutenant qui gère les Patrouilleurs ou les Veilleurs. Une ronde extérieure au territoire une fois par mois. De façon aléatoire pour ne pas aider les idiots à cacher leurs conneries. Et pour ne pas offrir le territoire aux attaquants tous les cinq du mois.
_ C'est trop de travail, soufflai-je. Les Alphas d'États pourraient se faire renverser par d'autres juste pour un rapport de force.
_ Les Alphas croiraient à une inspection, ajouta Hermès. On a déjà tenté. Ça en fait qu'empirer les situations.
_ Sauf que vous ne serez plus les juges des situations. Si vous avez une préoccupation par rapport à une meute, vous ne serez pas celui qui gère le problème. Vous me convoquerez et j'irais sur place.
Je soupirai et secouai la tête.
_ C'est ajouter un poids sur l'Alpha d'État, remarquai-je. Nous ne pourrons pas toujours faire une ronde par mois.
_ Dans ces cas-là, vous prendrez une meute Alias, fit Timothy. Une meute qui peut prendre le relais de ce tour de garde. Celle qui était aussi puissante que la vôtre.
_ Les combats de pouvoir arriveront avec, répétai-je en berçant doucement Jamy.
Timothy fronça ses sourcils.
_ Tu ne veux peut-être pas essayer, Jahyan, mais moi j'ai besoin d'avoir des résultats sur une chose ou une autre. On commencera par ça.
Je pinçai mes lèvres. Si je disais un mot de plus, Timothy me ferait doublement payer ma dette. Je ne savais déjà pas ce qui m'attendait tout à l'heure, alors mieux valait que je ferme ma gueule. Jamy me regarda avec de grands yeux ronds alors que je grinçai des dents. Je vis sa petite lèvre trembler et soupirai.
_ Je crois qu'il ne m'aime plus, dis-je à Basile qui s'était approché doucement.
Jamy se mit à pleurer et Basile vint le prendre. Mes épaules se décrispèrent légèrement. Tenir un bébé était toujours impressionnant, surtout les tout petits comme ça.
_ Les premières étapes seront donc de réinstaurer votre rôle. Vous serez mes messagers. J'ai besoin de vous pour que tout se passe bien dans les meutes.
_ Tu veux contrôler tout le monde Timothy ? souffla Hermès.
Je le fusillai du regard. Qu'il ferme sa gueule lui aussi tient. Il allait me mettre dans la merde aussi.
_ Je veux faire en sorte que tout se passe bien dans notre peuple, Hermès, rétorqua Timothy. Les humains ne se satisferont pas d'une bonne parole. Il faudra des actes.
_ N'est-ce pas à eux de s'adapter à nous et non l'inverse ? murmurai-je.
Le regard de Timothy se posa sur moi. Et je sus que j'avais dit la chose de trop. Il plissa ses paupières un instant, puis redevint aussi neutre que possible.
_ En évoluant, nous montrerons que nous ne sommes pas de simples animaux, reprit Elena. C'est un gage de bonne conscience pour les deux espèces. L'une doit bien avancer avant l'autre pour montrer le chemin.
Je ne prenais même pas la peine de regarder ma sœur.
_ Nous allons prêcher la bonne parole ! s'exclama Hermès. Si ce n'est pas formidable.
_ Si j'avais pu le faire seul, je l'aurais fait. Mais clairement, certains s'amusent à rendre la vie de leur loup impossible, fit Timothy.
Je fermai les yeux un instant. Le visage de la fille d'Eneko monta doucement dans mes pensées. Je soupirai. Avions-nous le choix de toute façon ?
_ Les directives ? murmurai-je.
Hermès me regarda avec de grands yeux.
_ Passer dans chaque meute annoncée mon plan, fit Timothy. Que toutes soient au courant. Vous serez mes portes-paroles.
_ Sais-tu combien j'ai de meutes sur mon territoire, Gardien ? souffla Hermès.
_ Je vous donne donc un mois pour le faire.
Je me pinçai l'arête du nez, tentant de rester calme. Un mois ? Pour prévenir les vingt-deux meutes que j'avais sur mon territoire ? Quelle joie. Hermès devait avoir une quarantaine de meutes allant de vingt loups à trois cents loups. Dont la sienne. Je ne faisais pas mon fier non plus. J'avais du monde éparpillé un peu partout.
_ Passez le message aux Alphas, ils passeront le message à leur meute. Si vous n'y arrivez pas, appelez-moi, je viendrais vous aider autant que possible. Dans deux mois au plus tard, les rondes commenceront.
Timothy ajouta encore un ou deux détails et nous relâcha. Nous devions être milieu d'après-midi à présent. Hermès me prit un peu à part du groupe et claqua des doigts devant mes yeux. Je clignai des yeux et le regardai. Oui, j'étais ailleurs.
Cette histoire n'allait pas aider les Alphas d'États, et même si Timothy allait nous aider, c'était un poids qu'il fallait accepter. Accepter en refaisait une nomination des Alphas d'État. Certains avaient déjà beaucoup de travail dans leur meute, et pas que la paysanne qui discutait avec son sous-lieutenant, et d'autres n'était plus depuis longtemps les plus puissants de leur région. Seulement les plus vieux. Timothy avait précisé qu'il se chargerait de remettre tout le monde à niveau. Même ceux qui n'avaient plus leur place au cours du premier mois. Ainsi, il pouvait gérer qui serait son porte-parole au sein de l'État.
Je regardai Timothy saluer Jake qui devait partir pour une affaire urgente. Shana parlait avec Peython sur le côté, elle ne semblait pas prête à partir. Timothy devait aussi lui parler à elle ? Je n'en savais rien , m'en foutai littéralement. Je voulais juste rentrer avec les miens. Me tenir éloigné de ce foutu gardien.
_ Jahyan, fit la voix de Timothy. Je peux te parler ?
_ Est-ce que j'ai le choix ? soupirai-je.
_ N'aggrave pas ton cas, remarqua Maël non loin de moi.
Je le fusillai du regard. Alors que Timothy s'avançait vers la sortie, un homme entra. Suivi d'une jeune femme. Maxence Ambrose. Un connard parmi tant d'autres. Nos regards se croisèrent. Il sourit, un sourire mauvais qui hérissa mon loup. La jeune femme soupira et avança. Nous nous tenions l'un en face de l'autre.
_ Jahyan Pearson, souffla Maxence. En chair et en os. Toujours vivant. Toujours pimpant.
_ Maxence Ambrose, remarquai-je. Heaven ne t'a pas encore attaché à un poteau comme un petit chien ? Elle en donnait l'impression pourtant.
Le visage de Maxence se crispa. Il se pencha un peu plus sur moi.
_ Fais attention, murmura-t-il. J'ai des trous dans mon emploi du temps. Tu ne veux pas que je vienne chez toi pour...
Le dos de Maxence heurta le mur alors que ma main emprisonnait son cou. Mes dents claquèrent non loin de son nez que j'aurais voulu arracher en ce moment.
_ Mets un seul pied sur mon territoire et crois-moi que cette fois tu souffriras, grondai-je contre son oreille.
Il souriait alors que je le relâchai, le repoussant. La puissance et la rage de mon loup dégoulinaient autour de moi. C'était étouffant. Je soufflai lentement, laissant ma puissance faire peur à tous les autres loups de la pièce. J'étais vieux. Maxence ne devait pas l'oublier. Jamais.
_ Retourne avec ta maîtresse, crachai-je.
_ Jahyan qui perd son sang-froid, souffla-t-il. C'en est presque risible après tout ce temps de contrôle. Ton père avait presque réussi à faire de toi un loup hors norme. Mais avec le temps les fêlures s'agrandissent n'est-ce pas ?
_ Maxence, assez, souffla Timothy.
Il ne pouvait pas vraiment se mettre entre nous deux, mais il tentait de désamorcer le conflit.
_ Tu attends que je sois faible pour me blesser, petit loup ? soufflai-je en souriant. J'espère que tu vis longtemps et que tu es prêt à attendre.
Maxence voulut répliquer quelque chose, mais déjà je contournai Timothy et sortis du bar, me forçant à prendre une longue inspiration pour me détendre.
Reprendre le contrôle.
Mon loup m'aida et rapidement je fus de nouveau calme. Nous savions apaiser l'autre de manière efficace. Des années de contrôles, de méditations, de symbiose avec notre moitié. Je rouvris mes yeux sur Timothy.
_ Cet épisode n'était pas prévu, remarqua-t-il.
_ L'annonce que tu as à me faire est si affreuse que ça ? ricanai-je.
Zoran ferma la porte et me rejoint dehors.
_ Allons à ton hôtel, fit Timothy en se mettant en marche.
_ Pourquoi ne pas en parler ici ? grognai-je.
_ Comme tu voudras.
Il pivota vers le bar et fit un signe de la main. La magie d'Alice me picota la nuque pendant quelques secondes. Elle empêchait le bar d'entendre notre conversation ? Ou simplement que personne n'entende la nôtre ?
_ Alice te ramènera après ce que j'ai à dire, fit Timothy. Et tu la suivras sans un mot, sans aucune remarque.
Je penchai la tête.
_ Tu oses vraiment t'en prendre à moi de cette façon ? soufflai-je.
_ Ne me menace pas Jahyan. Zoran, recule d'un pas s'il te plaît.
Ma Main ne bougea pas, conscient qu'il n'obéissait qu'à moi. Je lui jetai un coup et fis un signe de tête. Il obéit et fronça les sourcils alors qu'il n'entendait sûrement plus ce qu'on disait. J'avais eu raison pour Alice.
_ Tu sais que je peux faire certaines choses avec les informations que je détiens, reprit Timothy.
_ Tu ne feras rien.
_ Ne me prend pas pour un loup de pacotille, Jahyan Pearson, souffla Timothy. Je suis le Gardien. Je donne des ordres et vous exécutez. Tu sais que je peux faire de ta vie un Enfer. Mon père l'a déjà fait, je ne trouvais aucun mal à t'en faire baver de la même façon que lui.
_ J'écoute, dis-je en grinçant des dents.
_ Tu vas aller dans la meute de Shana Ortega pour les cinq prochains mois, déclara Timothy.
Mon loup resta estomaqué alors que je fronçai les sourcils.
_ Tu vas faire en sorte de redresser sa meute et de lui apprendre à devenir l'Alpha qu'elle devrait être. Tu vas la former pour devenir un Alpha, pour être précis.
Mes poings étaient prêts à exploser. Que venait-il de dire ?
_ Elle a besoin d'aide et tu vas être celui qui dispense cette aide.
_ Avec le travail que tu viens de nous ajouter, je ne crois pas que ce soit une bonne idée, soufflai-je au bord de l'hystérie.
Mon loup tournait en rond, à la fois inquiet de cette déclaration et amusé. Il s'amusait de ma colère.
_ Je suis sure qu'Eneko sera très compétent pour être mon porte-parole. Par ailleurs, il était plutôt favorable à ce que tu prennes le pouvoir d'Alpha d'État rapidement. Trop de choses ne vont pas sur ton territoire.
_ Je n'irais pas là-bas, murmurai-je. J'ai d'autres choses à faire que de m'occuper de cette gamine.
_ C'est pourtant ce que tu vas faire, Jahyan, reprit Timothy. Sinon j'annoncerais moi-même à Eneko que je ne serais plus la passerelle pour m'occuper de sa fille. Et je lui dirais qu'elle a demandé à la rencontrer.
Je clignai des yeux.
_ Quoi ? soufflai-je.
_ Cela fait bientôt deux ans qu'elle cherche à entrer en contact avec son père. Je n'ai rien laissé remonter à la surface et je peux faire en sorte de cesser cette envie chez elle. Toi seul es maître de ce que je dirais ou non.
Je voulais le frapper.
Je voulais le frapper si fort que je dus faire appel à tout mon contrôle pour éviter de me jeter à sa gorge et la lui trancher net.
_ Tu as cinq mois pour former Shana.
_ Pas assez de temps, soufflai-je.
_ Six mois alors, admit Timothy.
Je secouai la tête.
_ Et ma meute ?
_ Tu pourras retourner vers elle quand tu en as besoin évidemment, fit Timothy. Mais tant qu'Eneko peut gérer la crise, je veux que tu sois immergé à 100% dans la meute de Shana pour régler les problèmes.
_ Elle n'est rien pour moi. Pas même une Alpha, crachai-je. Comment pourrais-je faire d'elle ce qu'elle n'est pas ?
_ Shana est la première fille de sa famille, me dévoila Timothy. Elle est celle qui aurait dû être Alpha. Elle en a la puissance et le potentiel. Charge-toi du reste.
Je le regardai avec des grands yeux. Cette paysanne était la première fille d'un Alpha ? Et Yago alors ? Je secouai la tête.
_ Je t'accompagnerai dans quelques jours là-bas. Le temps que tu prennes tes dispositions.
_ Tu te moques de moi, soufflai-je. J'ai un travail. J'ai une meute.
_ Et heureusement pour moi, tu n'as pas de famille, cracha Timothy. Ton Gardien te demande un service. En paiement d'une dette qui continuera de s'exécuter si tu obéis. Est-ce clair ?
_ Je ne serais pas ton pantin.
_ Il s'agit d'aider ton voisin, remarqua Timothy. Je ferais passer ça en loi universelle. L'Alpha d'État voisin doit aider l'autre à devenir un bon Alpha d'État. Le fait que tu l'entraînes à être une Alpha tout court sera un bonus pour te faire pardonner et que je ne te cours pas au train pour le restant de tes jours.
Mes mâchoires grinçaient à présent.
Salop.
Salop de merde.
Timothy pivota vers le bar et fit signe à Alice.
Elle sortit et s'approcha de nous.
Le sort tomba. Zoran se poste à mes côtés, sentant ma colère.
_ Merci Alice, souffla Timothy en entrant de nouveau dans le bar.
Alice s'approcha lentement de moi. Zoran lui tendit sa main et fut le seul à me toucher.
Il valait mieux.
La prochaine personne qui me touchait prendrait des coups.
Et ce serait Shana Ortega !
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